Correspondance de Voltaire/1767/Lettre 7023

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Correspondance : année 1767GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 45 (p. 383-384).
7023. — À M. DAMILAVILLE.
18 septembre.

Je reçois, mon cher ami, votre lettre du 21. Je vous assure que vous m’aviez donné bien des inquiétudes. Prenez bien des fondants, et vivez pour l’intérêt de la raison et de la vérité.

Vous ne me disiez pas que M. et Mme de Beaumont avaient gagné pleinement leur cause. Il est juste, après tout, que le défenseur des Calas et des Sirven prospère. Je me flatte que le procès des Sirven sera rapporté.

J’ai lu les Pièces relatives[1]. Les Riballier et les Coger devraient mourir de honte, s’ils n’avaient pas toute honte bue.

Je ne sais qui m’a envoyé le Tableau philosophique du genre humain, depuis le commencement du monde jusqu’à Constantin[2]. Je crois en deviner l’auteur ; mais je me donnerai bien de garde de le nommer jamais. Je suis fâché de voir qu’un homme si respectueux envers la Divinité, et qui étale partout des sentiments si vertueux et si honnêtes, attaque si cruellement les mystères sacrés de la religion chrétienne. Mais il est à craindre que les Riballier et les Coger ne lui fassent plus de tort par leur conduite infâme, et par toutes leurs calomnies, qu’elle ne peut recevoir d’atteintes des Bolingbroke, des Woolston, des Spinosa, des Boulainvilliers, des Maillet, des Meslier, des Fréret, des Boulanger, des La Mettrie, etc., etc., etc.

Je présume que vous avez reçu actuellement le brimborion que je vous ai envoyé pour l’enchanteur Merlin. Je lui donne cette pièce, que j’ai brochée en cinq jours[3], à condition qu’il n’aura nul privilège. Je n’ai pas osé faire paraître Henri IV dans la pièce[4] ; elle n’en a pas moins fait plaisir à tous nos officiers et à tout notre petit pays, à qui la mémoire de Henri IV est si chère. Songez à votre santé ; la mienne est déplorable.

  1. Les Pièces relatives à Bélisaire sont en cinq cahiers in-8°, qui, réunis, forment un peu plus de 120 pages.
  2. Cet ouvrage, qui parut en 1767, en un seul volume petit in-8°, a pour auteur Ch. Bordes, de Lyon.
  3. Charlot, ou la Comtesse de Givry.
  4. Voyez la Préface de l’auteur et la note des éditeurs de Kehl, tome VI, page 343 ; et ci-après, la lettre 7047.