Cours d’agriculture (Rozier)/ANCOLIE

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Hôtel Serpente (Tome premierp. 523-524).


ANCOLIE, ou Gants de Notre-Dame. (Voyez Pl. 15) M. Tournefort la place dans la seconde section de la onzième classe qui comprend les herbes à fleurs de plusieurs pièces irrégulières anomales, dont le pistil devient un fruit à plusieurs loges ; & il la nomme aquilegia silvestris. M. le chevalier Von Linné la nomme aquilegia vulgaris, & la classe dans la polyandrie pentagynie.

Fleur, anomale, à cinq pétales lancéolés, ovales, planes, ouverts & égaux ; cinq nectaires D égaux, placés alternativement avec les pétales, prolongés en dessous en forme de cornes recourbées, imitant les griffes de l’aigle, d’où lui vient son nom ; les corolles purpurines pour l’ordinaire, & quelquefois blanches. B représente la fleur dépouillée de ces cinq nectaires. C’est un des cinq pétales. Les étamines, au nombre de quinze à trente, sont représentées dans la figure B. Le pistil E est placé dans le centre de la fleur, & est divisé en cinq parties.

Fruit, composé de cinq capsules cylindriques F, parallèles, droites, à une seule loge G, qui contient beaucoup de semences H.

Feuilles, portées sur de longs pétioles, & trois fois ternées ; les folioles sont ordinairement entières, quelquefois découpées.

Racine A, pivotante, branchue, blanche, fibreuse.

Port. La tige s’élève ordinairement à la hauteur de deux pieds ; elle est grêle, rameuse, rougeâtre & un peu velue. Les fleurs naissent au sommet, disposées en espèce de corymbe, tournées contre terre. Les feuilles sont alternes.

Lieu. Les bords des bois, les coteaux un peu froids ; elle fleurit en Mai & Juin.

Propriétés. La racine a une saveur douceâtre, la plante un goût d’herbe ; elle est apéritive & rafraîchissante. Les semences sont plus apéritives.

Usages. On a beaucoup vanté ses fleurs & ses feuilles contre la colique néphrétique, contre les graviers, l’asthme pituiteux, le scorbut ; pour faciliter l’éruption de la petite vérole, &c. Ces assertions demandent à être confirmées par de nouvelles expériences. On prescrit les fleurs sèches depuis demi-drachme jusqu’à demi-once, en macération au bain-marie, dans cinq onces d’eau ; & les feuilles sèches, également macérées, depuis une drachme jusqu’à une once ; & les semences réduites en poudre & macérées comme les fleurs & les feuilles, depuis demi-drachme jusqu’à demi-once.

Culture. Les fleuristes ont tiré des bois cette plante pour enrichir leur parterre, & leurs soins ont été récompensés par les agréables variétés qu’ils ont obtenues. On cultive aujourd’hui l’ancolie à grande fleur double, à fleur double renversée, à fleur double couleur de rose, à fleur verte, à fleur panachée, &c.

Cette plante se multiplie & par semences & par les pieds enracinés, qu’on sépare de l’ancien. La graine est dure à lever. Il faut la semer dans un pot au commencement de l’automne, & elle poussera au printems suivant. Si on sème au printems, la graine ne lève qu’en automne. Cette plante est peu délicate, & ne craint pas le froid ; cependant c’est en multipliant les soins lorsqu’on la sème, qu’on perpétue ses variétés : sans eux, elle dégénère, & revient à son premier état. La terre dans laquelle on doit semer, sera bien préparée, légère, abondamment fournie de fumier bien consommé, & la graine sera recouverte de terreau sur l’épaisseur d’un pouce. Lorsque les jeunes plantes seront assez fortes, & que la saison le permettra, on les replantera à demeure. Pour cette opération, il faut avoir arrosé dès la veille le terrain de la pépinière, afin de pouvoir le lendemain les en tirer sans rompre les racines, & les replanter sans les châtrer, & les rafraîchir à la manière des jardiniers. Par ce moyen, la reprise en sera prompte, assurée, & la plante ne s’appercevra pas du changement de domicile.

La saison convenable pour séparer les jeunes pieds de l’ancien, & même les anciens, est assez indifférente, si on en excepte les grandes chaleurs : mais il vaut mieux les séparer en Avril ou en Septembre.