Cours d’agriculture (Rozier)/CHAUME

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 185-186).


CHAUME, Botanique. On exprime par ce mot générique, l’espèce de tige qui est propre aux plantes graminées, & que l’on désigne quelquefois sous le nom de chalumeau. Cette tige est fistuleuse communément ; quelquefois cependant pleine d’une moelle légère, sur-tout vers l’extrémité, près de la fleur : différens nœuds la coupent en quatre ou cinq endroits. Les feuilles de la tige sont une prolongation de l’écorce du chaume, & l’enveloppent comme un collet. Toute espèce de tige, en général, est composée d’un épiderme, d’une écorce & d’une substance ligneuse ou herbacée, qui en tient lieu. Dans le chaume, on retrouve l’épiderme, la substance corticale, & à la place du bois, l’intérieur de la cavité est tapissé d’une multitude incroyable de vaisseaux de toute espèce, qui montent le long de la tige ; plusieurs ont leurs orifices dans l’intérieur. Si l’on coupe une tranche horizontale d’un chaume, & qu’on l’expose à la lentille d’un fort microscope, on distingue facilement les orifices d’une multitude prodigieuse de vaisseaux qui en composent les différentes substances. (Voyez au mot Blé l’analyse du chaume de ce graminée, avec la gravure, par M. l’abbé Poncelet) M. M.

Pour mieux saisir la description qu’on vient de lire, il faut consulter la gravure de la p. 187 du tom. 2, qui représente tous les développemens du chaume, & leur description au mot Blé.

Les cultivateurs ne sont point d’accord sur l’emploi du chaume ; les uns les arrachent pour brûler dans leurs maisons, les autres pour faire pourrir dans les étables, dans les bergeries ; quelques-uns les brûlent sur place ; d’autres enfin les enterrent par un coup de charrue. De toutes ces méthodes, je préfère la dernière. La première est la plus absurde, à moins qu’on ne soit dans une disette extrême de bois de chauffage. Il semble que l’on craint la formation de la terre végétale ou humus : ( voyez ce qui en a été dit au mot Amendement.) La seconde est une opération faite en pure perte, puisque la paille du seigle récolté, suffit à la fourniture de la litière : mais on aime mieux conduire cette paille à la ville pour la vendre ; elle procure de l’argent comptant au fermier, à qui il importe peu que la terre s’épuise. Les propriétaires attentifs doivent établir cette clause expresse dans l’acte d’arrentement ou bail : que toutes les pailles quelconques seront consommées dans la métairie, & que le fermier ne pourra point en vendre, à moins d’un dédommagement fixé. À quoi servira cette clause, si le propriétaire n’a pas les yeux sans cesse ouverts sur son fermier, surtout si son domaine est près d’une grande ville, ou situé dans un pays de vignobles, où l’on a adopté la méthode de lier les seps & les sarmens à des échalas ? Brûler les chaumes sur la place, est une amélioration momentanée, de peu d’utilité, puisque la flamme en dissipe presque tous les principes.

Je dis qu’il vaut beaucoup mieux, aussitôt après la récolte, faire donner un labour avec la charrue à versoir : il en résulte deux avantages : 1o. le chaume est encore rempli de tous les principes constituans de sa végétation, & la chaleur du soleil n’a pas eu le temps de les dissiper ; par-conséquent, dans cet état, il fournira plus de terre végétale ; 2o. c’est le moyen le plus prompt pour détruire les mauvaises herbes. À cette époque, les unes ont leurs graines mûres, & les autres ne le sont pas encore : ce labour fait périr les dernières en terre. Les premières végètent ; mais un second labour, donné à l’entrée de l’hiver, les déracine, les ensevelit & les fait pourrir : c’est ainsi que peu à peu on parvient à détruire les mauvaises herbes. Il y a plus, le chaume ainsi enterré, tient la terre soulevée pendant un assez long espace de temps, & l’action de la chaleur du soleil & des autres météores, la pénètre d’une manière plus vive & plus uniforme. ( Voyez le mot Amendement) Si on se contente de retourner le chaume à l’entrée de l’hiver, c’est une opération manquée.