Aller au contenu

Cours d’agriculture (Rozier)/PINTADE ou PEINTADE

La bibliothèque libre.
Hôtel Serpente (Tome septièmep. 712-713).


PINTADE ou PEINTADE. Dénomination qu’elle mérite mieux que la première, attendu que son plumage semble peint & tacheté de marques noires & blanches. On la nomme encore Poule de Numidie, Poule de Guinée. C’est la numida meleagris. Lin.

Je n’ai jamais élevé de pintades, je suis obligé de copier ce qui a été dit : elle est de la grosseur d’une poule ; ses ailes étant pliées, s’étendent à un pouce au-delà de l’origine de la queue. La tête n’est pas couverte de plumes, il y a seulement, à l’origine du bec de quelques individus de cette espèce, un petit bouquet composé de poils roides, assez semblables a des soies de cochon. La pintade a sur le front une espèce de corne conique, courbée en arrière & couverte d’une peau de couleur fauve, brune & rougeâtre. Elle a aussi des membranes charnues d’un très-beau rouge, qui pendent à côté de l’ouverture du bec ; les joues sont bleuâtres dans le mâle & rouges dans la femelle. La partie supérieure du col est couverte de plumes noires, semblables à des poils ; la partie inférieure a une couleur cendrée tirant sur le violet ; les plumes du dos, du croupion, les petites des ailes, celles du dessus de la queue, de la poitrine, du ventre, des côtés du corps sont noires, & ont des taches blanches, rondes & symétriques ; le tour de ces taches est purement noir & le reste de la plume est d’un noir mêlé de cendré. Les taches du dos sont plus petites que celles des autres parties du corps, & il n’y a pas de couleur cendrée sur les plumes de toute la face inférieure de l’oiseau. Les grandes plumes des ailes sont noirâtres & ont des taches blanches. La queue est arrondie comme celle des perdrix, & de couleur grise ; elle a des taches blanches, rondes & entourées de noir ; elle porte sa queue recourbée comme la perdrix, ce qui fait paroisse bossu le dos de l’oiseau. Son bec est rouge à son origine, & de couleur de corne à son extrémité.

Cet oiseau pond & couve de même que les poules ordinaires ; ses œufs sont plus petits & moins blancs, ils tirent un peu sur la couleur de chair & sont marqués de points noirs. On ne peut guère accoutumer la pintade à pondre dans le poulailler ; elle cherche le plus épais des haies & des broussailles où elle pond jusqu’à cent œufs successivement, pourvu qu’on en laisse quelqu’un dans son nid.

On ne permet guère aux pintades domestiques de couver leurs œufs, parce que les mères ne s’y attachent point & abandonnent souvent leurs petits ; on aime mieux les faire couver par des poules d’Inde ou par les poules communes. Les jeunes pintades ressemblent à des perdreaux ; leurs pieds & leurs becs rouges, joint à leur plumage qui est alors d’un gris de perdrix, les rendent fort agréables à la vue. On les nourrit avec du millet, mais elles sont très-difficiles à élever.[1]

La pintade est un oiseau extrêmement vif, inquiet, turbulent ; elle court avec une vitesse extraordinaire, à peu près comme la caille & la perdrix, & ne vole pas fort haut. Elle se plaît néanmoins à se percher sur les toits & sur les arbres, & elle s’y tient plus volontiers pendant la nuit que dans les poulaillers. Son cri est aigu, perçant, désagréable & presque continuel ; du reste, elle est d’humeur querelleuse & veut être la maîtresse dans la basse-cour ; les plus grosses volailles, même les poules-d’Inde sont forcées de lui céder. La dureté de son bec & l’agilité de ses mouvemens la font redouter de la volaille. La pintade est comptée parmi les meilleurs gibiers.


  1. Note de l’Éditeur. Cette difficulté est plutôt l’effet d’un climat froid, qui convient très-peu à un oiseau originaire de Numidie, sur-tout lorsqu’il est nourri uniquement avec du grain. Il gratte la terre comme les poules, ce qui indique que comme elles, comme les perdrix, &c. il vit également de vers, de sauterelles, & autres insectes semblables : sa domesticité ne peut lui faire perdre les goûts naturels, puisqu’ils tiennent à ses besoins.