Croquis honnêtes/19

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Gangloff (p. 69-71).

Religieuse blessée.

La scène représente un champ de bataille, au soir du grand combat. La nuit tombe au milieu de ces horribles cris des mourants qu’on ne saurait oublier, quand on les a une fois entendus.

En se penchant sur un blessé, la Sœur de Saint-Vincent vient, elle-même, d’être blessée.

Elle souffre cruellement, mais se tait et offre à Dieu son angoisse.

Un tel spectacle est fait pour provoquer plus d’une réflexion utile.

Depuis un certain temps, on ne cesse de conseiller aux catholiques de faire à leurs adversaires quelques concessions… légères.

C’était, l’autre jour, M. Renan, qui, de sa voix douceâtre, nous demandait de consentir tout simplement au sacrifice du culte de la Vierge.

Et c’était, le lendemain, un illustre romancier qui avait la bonté de ne nous réclamer que le sacrifice de la divinité du Christ.

Braves gens, cours naïfs !

Si nous nous avisions de leur faire ces « petites » concessions, savent-ils seulement ce qui arriverait ?

Il arriverait que l’excellente religieuse, dont le dévouement est fait pour exciter une si légitime admiration, ne se serait pas dévouée de cette façon, ni à ce point.

Il arriverait qu’il n’y aurait plus, ici-bas, ni sœurs de charité, ni charité.

Ces saintes filles, sachez-le bien, sont principalement soutenues en leur tâche sublime par la pensée de l’Homme-Dieu, par la pensée de sa Mère ;

De l’Homme-Dieu, qui nous offre le type incomparable de la souffrance volontaire,

Et de sa Mère, type de toute virginité, et qui a tant souffert de voir souffrir son fils.