Délire bachique

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Les contemporaines, recueil de poésies et chansons inédites, pour 1825Bouquin de la Souche (p. 7-8).
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DÉLIRE BACHIQUE.

Mes amis, nos coupes sont pleines,
L’écume en couronne les bords ;
Quel feu, circulant dans mes veines,
M’inspire de nouveaux transports !
Je vois Bacchus, je vois sa gloire ;
Mon ivresse m’élève aux cieux ;
C’est Hébé qui me verse à boire ;
Je suis à la table des Dieux.

Approche, joyeuse Bacchante ;
L’œil en feu, les cheveux épars,
Viens redoubler l’ardeur brûlante
Que je puise dans tes regards ;
Verse d’un bras infatigable
Le pur nectar des immortels ;
Je me contente de leur table,
Sans aspirer à leurs autels.


Vois dans sa marche vacillante
Silène qui, l’œil égaré,
Laisse aller sa tête tremblante
Que couronne un raisin doré.
Il sourit : et sa bouche avide
Dont la soif paraît s’irriter,
Appelle encor la coupe humide
Que sa main ne peut plus porter.

Qui de nous, dans ces jours de fête,
Peut compter sur un jour nouveau ?
Le lierre qui pare ma tête,
Croîtra demain sur mon tombeau :
Mais loin qu’une sombre tristesse
Précède mon dernier sommeil,
Je veux m’endormir dans l’ivresse
Et chanter encore au réveil.

Casimir de Lavigne.