De la transformation metallique

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DE
LA TRANSFORMA-
TION METALLIQUE,
trois anciens tractez en rith-
me Françoise


ASCAVOIR.


avec la response dudict Alchy. par J. de
Meung. Ensemble un tracté de son
cernant ledict art.


Avec
La defence diceluy art et des honestes personages qui y va
quent: Contre les effortz que J. Girard mect à les oultrager.


A PARIS,
Chez Guillaume Guillard, et Amau-
ry Warancore, rue S. Jaques à
l’enseigne S. Barbe.
1561



CES AVTHEVRS,

Aux lecteurs.


Gens de bon cœur, noſtre venue
Doner ne vous doibt deſplaisir.
Si vne fois auéz cognue
La verité, cachée & nue
En noz eſcriptz, auréz plaiſir.






AVX LECTEVRS.



Ces jours paſſéz, amys lecteurs, ſont venuz en mes mains trois petitz liures touchãt la trãſformation des metaulx, ancienement compoſéz en rithme françoiſe par autant de bons autheurs: leſquelz i’eſtime ſi delectables & profitables, qu’ilz merite bien eſtre leuz: principalement par ceulx qui ayment tele ſcience . Et pour ce que parauant les exemplaires d’iceulx estoyent ſi rares, que pluſieurs deſiroyent en vain les veoir, vous pouéz cognoiſtre quele affection ma eſmeu à prendre peine qu’ilz vous fuſſent publiquement préſentéz, ie dy, moyenãt l’aide de variables copies eſcriptes à la main, beaucoup mieulx ageancéz et correctz, que de ma part ne les auois oncques trouuéz ſeparément. Mais ie pence qu’il eſt convenable, de dire icy quelque aultre choſe de chaſcun d iceulx, pour vous doner plus de contentement.

La font. des
Amo. de sciẽ
ce.
    Le premier qui est appelé la fontaine des amoureux de ſcience, fut compoſé L’an 1413. par Iehan de la fontaine, natif de Valenciennes en la comté de Henault : & ha eſté cy devant imprimé à Paris & à Lyon : Mais ſcavéz vous comment? Veritablementça, et la, trop corrompu, et amplifié de plusieurs choses superflues et sottes, tant au regard du sens, que de la rithme : Lesqueles y avoient esté entremeslées, par la liberalité de quelque ignorant, soubz espoir d’avoir part audict livre. Or vous veulx je advertir, que en transcrivant et dreçant ce nostre exemplaire, n’ay suivy une seule copie imprimée ou escripte à la main: à cause des faultes et erreurs estans en la chascune de celles que j’ay peu recouvrer: mais de toutes leurs meilleures pieces assemblés et, à mon jugement , ou besoing estoit , le mieux que j’ay peu corrigées, l’ay rendu tel qu’il est: tousjours fuyant et en cedict livre et es aultres, de faire (par mon labeur) aulcun tort aux autheurs, ou lecteurs d’iceulx. Quant aux diverses images des fours et vaisseaulx, estans es impressions de Lyon, je les ay laissées comme non necessaires : mais, que plus est, adjouxtées contre la sentence mesme de l’autheur d’iceluy livre, qui dict (f. 15. page 2. vers 10.)
Des fours.Un metal en un seul vaissel
Te convient mettre en un fournel: etc.
Joinct qu’il n’est faicte aucune description ou mention desdictz fours et vaisseaulx, es vieulx exemplaires lesquelz nous avons veu escriptz à la main.

Les remonstr.
faictes par
nat. à lalch.
etc. autheur
J. de Meung
    Au second livre qu’on avoit encore imprimé, est premierement introduicte nature, remonstrant à l’alchymiste la difference de ses effectz et de ceulx de l’art: à fin qu’il puisse trouver ce qu’il cherche, en prenant et suyvant la voye naturele : et apres, le-dict alchymiste, luy faisant response prudente. On l’appelloit communément, la complaincte de nature: pour ce que l’autheur luy faict commencer sa harangue en se doulourant. Quant au nom d’iceluy autheur, les exemplaires que j’ai veu ne le porte en tiltre: mais j’estime, avec plusieurs aultres, que c’est Jehan Clopinel, dict Jehan de Meung, d’où il estoit natif : encores que je n’aye oblié le passage de cedict livre, ou il est escript (f. 32. pag. 2. ver. penult.)
Comme tu peux veoir es Romantz
De Jehan de Meung: qui bien m’apprenne,
Et tant les sophistes reprenne.
Car cecy est dict soubz le personage de Nature: et lon peut semblablement veoir entre de ce que ledict de Meung ha composé, suyvant G. de Loris, au Romant de la rose, que Amour, qu’il faict la parler, tient treshonorables propos de luy mesme. C’est apres avoir dict,
Cy se reposera Guillaume,
Dont le tombeau soit plein de baulme,
D’encens, de myrrhe, d’aloes,
Tant m’a servy, tant m’a loes.
On s’ensuyt,
Et puis viendra Jehan Clopinel
Au cœur gentil, au cœur isnel,
Qui naistra dessus Loyre à Meung,
Lequel et à soul et à jeun
Me servira toute sa vie
Sans avarice et sans enuye:
Et sera si sage et si bon,
Qu’il n’aura cure de raison

Qui mes oignemens hait et blasme,
Combien qu’ilz flairent plus que basme. Etc.
J’ay aussi extraict et jouinct au dessusdict livre, un lieu d’iceluy Romant, auquel ledict de Meung tracte manifectement de l’art susdict, et à cause duquel seul, plusieurs achaptent ledict Romant. Apres est suyvant le petit testament attribué à Arnauld de Villneufve.

Sommai.
Philoso. de
N. Flamel.
    Le troisiesme livre (qui n’avoit paravant esté mis en lumiere) est intitulé le Sommaire philosophique de Nicolas Flamel: qui florissoit en l’an 1393. et 1407. comme il appert encores en la ville de Paris à S. Innocent es monumentz de deux arches opposites, le cymitiere entre elles, qu’il feit alors faire. En l’une desqueles sont, oultre autre choses, erigéez les effigies de deux serpentz, ou Dragons, et d’un Lyon, suyvant la description que d’iceulx il ha faict en ce livre, fol. 53. pag. 2. ver. penult. et fol. 54. pag. 2. ver. 21. Or croy-je bien que vous ne depriserez cesdictz autheurs pour leur stile : car encores que leurs vers ne ayent, quant aux motz, la grace de ceulx de Marot, ou de plusieurs aultres poëtes de nostre temps, c'est asses qu’ilz enseignent choses exquises et precieuses, lesqueles sont sovent cachées soubz quelque vil habit. Encores sera ce humainement faict de les excuser tous, ou aulcuns d’iceulx, des faultes qu’on leur pourroit attribuer, et en changer ou le temps, ou la perplexité et difficulté de la matiere subjecte, ou bien les vices des exemplaires corrompus. J’ay adjouxté à la fin desdictz livres, une défense de ceste dicte scien-ce: contre l’outrageuse epistre de J. Girard: à fin qu’ilz soyent moins subjectz aux oultrages de quelques langardz estourdis, et plus agreables à plusieurs honestes personnes. Or si en quelque endroit ma peine vous peut proufiter ou plaire, jouisséz en joyeusement.

*   *





Lysez.


Fol.5.b. ver.22. trouvé.
Fol.8.a. ver.dernier. Ançois.
Fol.9.b. ver.14 four.
Fol.24.b. ver.21. sublime.
Fol.35a. ver.8. maintz. Et la mesme
ver.27. mendie.
Fol.37.a. ver.2. guerre. Item ver.3. au.
Fol.38.b. ver.17. povez.
Fol.45.b. ver.19. peut.
Fol.46.b. ver.8. mode.
Fol.47.a. ver.25. scavez.
Fol.48.b. ver.17. est.
Fol.58.a. ver.11. doubtance.
Fol.61.b. ver.1. toute.
Fol.64.a. ver.23. trongne.






LA FONTAINE DES
AMOUREUX DE SCIENCE: COM-
posee par Jean de la Fonteine de Va-
lenciennes, en la Comté
de Henault.



Ce fut au temps du mois de May,
Qu’on doibt fouir dueil et esmay,
Que j’entray dedans un vergier
Dont Zephirus fut jardinier.
5Quand devant le jardin passoye,
Je n’estois pas vestu de soye:
Mais de povres draps maintenu,
Pour n’apparoir en public nud.
Et m’esbatant avec desir
10De chasser loing mon desplaisir,
Ouy un chant armonieux
De plusieurs oyseaux gracieux.
Adonc je regarday l’entree
Du jardin, qui estoit fermee.
15Mais comme ma veue estima
Zephirus tost la defferma:
Puis se retira, par effect
Monstrant qu’il n’avoit cela faict.
Et quand je veis celle maniere,
20Je me tiray un peu arriere,
Et en apres entray dedens.
Du jour n’avois mengé des dentz,
J’avoye grand soif et grand faim:
Mais pourtois avec moy du pain,
25Qu’vois gardé une sepmaine.
      Lors apperceu une fonteine,
D’eaue tresclere pure et fine,
Qui estoit soubz une aubespine.
Joyeusement empres m’assis,
30Et de mon pain soupes y feis:
Puis m’endormis, apres menger
Dedens ce gracieux verger:
Et selon mon entendement,
Je dormy assez longuement,
35Pour la plasance que prenoye
Estant au songe que songeoye.
Or pourrez scavoir de mon songe,
Et s’après le trouvay mensonge.
      Il est vray qu’il me fut advis
40Que deux belles dames au cler veis,
Semblables à filles de Roy
Au regard de leur noble arroy.
Vers moy s’en vindrent doulcement
Et je les salue humblement,
45En leur disant, Illustres dames
Dieu vous sauf et de corps et d’ames,
Plaise vous à moy voz noms dire,
Ce ne me vueillez esconduire.
L’une respond par grand plaisance
50Amy j’ay à nom Congnoissance:
Voicy Raison que j’acompaigne,
Soit par montz, par vaulx, par campaigne.
Elle te peult faire moult saige.

Alors entendant ce langage,
55Et cuidant estre resveillé,
D’un cas fus fort esmerveillé:
Car yssir veis de la fonteine,
Qui est tant agreable et saine,
Sept ruisseaux que veu je n’avoye
60M’estant couché en celle voye,
Lesquelz m’avoyent si fort mouillé
Que j’en estoye tout souillé.
Là s’espandoit l’eaue à foison.
Adonc priay dame Raison,
65Qui estoit avec Congnoissance,
Me dire la signifiance
De la fonteine et des ruisseaux
Qui sont si plantureux et beaux
Et à qui estoit le pourpris,
70De tous costez bien entrepris
D’arbres et de fleurs odorantes
Arrouséez des eaux courantes,
En sorte que pareilz jamais
Ne me sembloit avoir veu. Mais
75Elle me dict tresdoulcement
Mon amy tu scauras comment
Va de ce que as si grand desir:
Escoute moy tout à loisir.
     En la Fontaine ha une chose,
80Qui est moult noblement enclose.
Celuy qui bien la congnoistroit,
Sur toutes autres laymeroit.
Qui la vouldroit chercher et querre,

Et puis trouvée mettre en terre
85Et secher en menue pouldre,
Puis arriere en son eau resouldre,
Mais que fussent avant parties,
Puis assembleez les parties,
Qui la terre mettroit pourrir
90En l’eaue que la doibt nourrir
Il en naistroit une pucelle
Portant fruict à double mammelle,
Mais qu’on ostast la pourriture,
Dont elle ne son fruit n’ha cure.
95La pucelle dont je devise
Si poingt et ard en mainte guise:
Car en l’air monte, en hault volant
Puis descend bas, à val coulant,
Et en s’en descendant Faonne,
100Faon que nature luy donne.
      C’est un Dragon qui à trois goules:
Familleuses et jamais saoules:
Tout autour de luy chascun rue.
L’environnant ainsi qu’en rue,    Alias
Mais avant par chaleur on chasse
Gresse que luy couvre sa face.
   Alias
Mais dessus luy fault que lon chasse
Etc.

105Et poursuyvant par forte chasse
Tant que gresse couvre sa face
Que le noircist et si l’englue.
Puis le compresse et le mengue.
Elle r’enfante mesmement:
110(Ce se fait amoureusement)
Plus puissant que devant grand somme:
Puis le boit comme jus de pomme.
Ainsi l enfant à sa manière.

Souvent boit et r’enfante arriere,
115Tant que plus cler est que Christal.
Pour vray le fait en est ytal.
Et quant il est ainsi luysant,
En eaue moult fort et puissant,
Il pense devorer sa mere,
120Qui ha mangé son frere et pere.
Ainsi comme l’alaitte et couve
Le Dragon le fiert de sa cove.
Sa mere en deux parties part,
Que luy aide apres ce depart,
125Et puis la delivre à trois goules,
Qui l’ont plus tost prins que gargoules:
      Alors est le plus fort du monde.
Jamais n’est rien qui le confonde.
Merveilleux il est et puissant.
130Une once en vault cent d’or pesant.
C’est un feu de telle nature,
Qu’il passe toute pourriture,
Et transmue en aultre substance,
Quant qu’il attaint à sa semblance.
135Et guerist maladie toute,
Apostume, lepre, et goutte:
Et es vieux corps donne jeunesse,
Et es jeunes, sens et liesse.
C’est ainsi que de Dieu miracle.
140Ce ne peult faire le triacle,
Ne rien qu’y soit soubz ciel trouvé,
Fors cecy, qui est esprouvé
Par les Prophetes anciens,

Et par docteurs Physiciens.
145      Mais on ne l’ose plus enquerre,
Pour peur des Seigneurs de la terre.
Onques mais n’advint tel meschié:
Car ce faire on peult sans pechié:
Moult de Sages si l’ont aymé.
150Maudit soit qui l ha diffamé,
Lon ne le doibt onc reveler,
Qu’a ceux qui veulent Dieu aymer:
Et qui bien ayment, ont victoire
Pour servir Dieu, aymer, ou croire:
155Car cil à qui Dieu donne espace,
De vivre tant que en quelque place
Il ayt celle œuvre labourée,
A de Dieu la grace impetrée
En soy, saches certainement.
160Dont prier doit devotement
Pour les sainctz hommes qui l’ont mise
En escrit selon leur devise,
Philosophes et Sainctz preud hommes:
Dont je ne scay dire les sommes,
165Mais Dieu leur face à tous mercy,
Qui ont ouvré jusques icy:
Et ceux qui ayment la science,
Dieu leur doint bien et patience.
      Scavoir dois que celuy Serpent,
170Que je t’ay dit premierement,
Est gouverné de sept Ruisseaux,
Qui tant sont amoureux et beaux,
Ainsi l’ay voulu figurer,

Mais autrement le vueil nommer:
175C’est une pierre noble et digne,
Faicte par science divine,
En laquelle vertu abonde,
Plus qu’en nulle qui soit au monde:
Trouvée est par Astronomie,
180Et par vraye Philosophie.    Alias
On trouve quelle croist en hault,
Avecques tout ce quil luy fault.

Elle provient en la montaigne
Ou ne croist nulle chose estraigne.
Sachez de verité prouvée,
Plusieurs Sages l’y ont trouvée.
185Encores la peult on trouver
Par peine de bien labourer,
Des philosophes est la pierriere
Que tant est amoureuse et chére.
Aisément on la peult avoir:
190Et si vault mieux que nul avoir.
Mais peine auras moult endurée,
Avant que tu l’ayes trouvée.
L’ayant, n’auras faulte de rien
Qu’on trouve en ce monde terrien.
195Or revenons à la fontaine
Pour en scavoir chose certaine.
     Celle Fontaine de valeur,
Est à une Dame d honneur,
Laquelle est Nature appellée,
200Qui doit estre moult honnorée:
Car par elle toute chose est faicte,
Et s’elle y fault, tost est deffaicte.
Long temps ha que fut establie.

Celle Dame je vous affie:
205Car aussi tost que Dieu eut faitz
Les Elemens qui sont perfaictz,
L’Eaue, l’Air, la Terre, et le Feu,
Nature en tout parfaicte fu.
Sans Nature ne peult plus croistre,
210Dedens la Mer la petite oistre.
Nature est mere à la ronde
De toutes les choses du monde.
Noble chose est que de Nature.
Moult bien y pert à la figure
215De l’homme, que Nature ha faites,
En quoy de rien ne s’est meffaite:
Aussi fait il en plusieurs choses,
Qui par Nature sont descloses:
Oyseaux, arbres, bestes, fleurettes,
220Du tout par Nature sont faites:
Et ainsi est il des metaulx,
Qui ne sont pareilz ny esgaulx.
Car par elle mesme se font,
Dedens la terre bien profond:
225Desquelz plus à plein conteray
Quand Nature te monstreray,
Laquelle je veulx que tu veoye,
Affin que mieux suyve sa voye
Et son sentier en la tienne œuvre:
230Car il fault que la te descoeuvre.
     Ainsi que telz propos tenoit,
Je veis Nature qui venoit.
Et alors, sans faire delay,

Droict encontre elle m’en allay
235Pour la saluer humblement.
Mais certes tout premierement
Vers moy feit inclination
Me donnant salutation.
Lors Raison dict, voicy Nature:
240A l’aymer mectz toute ta cure:
C’est elle que te fera estre
De son ouvrage prudent maistre.
     Je l’escoutay diligemment:
Et elle se prit sagement
245A me demander d’où j’estoye
Et qu’en ce lieu la je queroye:
Car il estoit beaucoup saulvage
Et pour les non clercs plein D’ombrage.
Dame, dy je, par Dieu de cieux,
250Je suys venu cy, comme cieux,
Qui ne scait en quel’part aller,
Pour bonne adventure trouner.
Mais je vous diray sans attente,
Et en brief propos mon entente.
255     Un moult grand Prelat vey jadis,
Scavant, clerc, prudent et subtilz,
Qui parloit en commun Langage,
Ainsi que faict maint homme sage
Du scavoir de la medicine
260Quil faisoit tres haulte et tresdigne,
En demonstrant ses excellences
Par moult grandes expériences.
Des philosophes et leur science

Devisoit en grand reverence.
265Bien avoit este à l’escolle.
Alors fus mis en une colle
Ardente, dapprendre et scavoir
Chose meilleur que tout avoir:
Et de luy demander m’advint,
270Dou premier la science vint:
S en escript on la rencontra
Et qui fut cil qui la monstra.
Il me respondit sans delay
Par ces propoz que vous diray.
275     Science si est de Dieu don,
Qui vient par inspiration.
Ainsi est science donnée
De Dieu, et en l’homme inspirée:
Mais avec ce apprend on bien
280A l’escole par son engien.
Mais avant qu’onc lettre fust veue
Si estoit la science sceue,
Par gens non clers, mais inspirez,
Qui doibvent bien estre honorez:
285Car plusieurs ont truvé science,
Par la divine sapience:
Et encor est Dieu tout puissant,
Pour donner à son vray servant
Science telle qu’il luy plaist:
290Dequoy à plusieurs clercs desplaist:
Disans qu’aulcun nest suffisant,
S’il n’a esté estudiant.
Qui n’est maistre es ars, ou docteur,

Entre clers Recoipt peu d honneur.
295Et de ce les doit on blasmer,
Quand autruy ne scauent louer:
Mais qui bien punir les voudroit,
Les livres oster leur fauldroit.
Là seroit science faillie
300En plusieurs clers, n’en doutez mie:
Et pas ne le seroit es laiz
Qui font rondeaux et virelais,
Et qui scavent metrifier,
Et plusieurs choses que mestier
305Font à mainte gens à delivre,
Qu’ils ne trouvent pas en leur livre.
Le Charpentier, et le Masson
N’estudient que bien peu, non,
Et si font aussi belle usine
310Qu’estudians en Medicine,
En Loix, et en Theologie,
Pour avoir pratiqué leur vie.
    Des lors fus grandement epris
D emploier du tout mes espris,
315Tant que par vraye experience,
Avoir peusses la congnoissance,
De ce que maint homme desyre,
Par grace du souverain syre.
Mon conte raison et nature,
320Bien escoutoient, je vous asseure.
Puys à nature dy, Madame,
Helas tousjours de corps et d’ame,
Suis en travail voulant apprendre,

Science, ou ne puisse mesprendre,
325Pour avoir honneur en ma vie,
Sans ce que nul y ayt enuie:
Car tout mon bien je vueil acquerre,
Comme les Laboureurs de terre:
La terre fouyr et houer,
330Et puis la semence semer,
Comme font les vrays Laboureurs,
Qui font leurs biens et leurs honneurs.
Et pour cela prier vous vueil,
Que vous me dites de voz vueil,
335Comme on nomme celle Fontaine,
Qui tant est amoureuse et saine.
     Elle respond, amy, de voir,
Puis que desires le scavoir,
Elle sappelle, pour le mieulx,
340La fontaine des amoureux.
Or te doibt il estre notoire
Que depuis Eve, nostre mere
J’ay gouverné tretout le Monde,
Si grand comme il est à la ronde:
345Sans moy ne peult chose regner,
Si Dieu ne la veult inspirer.
Moy qui suis Nature appellee,
J’ay la terre environnée,
Dehors, dedens, et au mylieu:
350En toute chose ay pris mon lieu,
Par mandement de Dieu le Pere,
De toutes choses je suis mere,
A toutes je donne vertu,

Sans moy n’est rien, ne oncques fu,
355Chose qui soit soubz Ciel trouvee,
Qui par moy ne soit gouvernée.
Mais puis que tu entendz raison,
Je te vueil donner un bel don,
Par le quel, si tu veulx bien faire,
360Tu pourras Paradis acquerre,
Et en ce monde grand’richesse,
D’on te pourra venir Noblesse,
Honneur, et grande Seigneurie,
Et toute plaisance, en ta vie:
365Car en joye tu l’useras,
Et moult de nobles faictz verras,
Par celle Fontaine et caverne,
Qui tous les sept metaux gouverne.
Ilz en viennent, c’est chose clere,
370Mais de la Fontaine suis mere,
Laquelle est doulce comme miel,
Et aux sept Planetes du ciel,
Comparee est: scavoir, saturne,
Jupiter, et Mars et la Lune,
375Le Soleil, Mercure et Venus:
Entendz bien, tu y es tenus.
Les 7. planetes que jay dict
Accomparons sans contredict,
Aux sept metaulx venans de terre,
380Qui tous sont faictz dune matiere.
L’or entendons par le Soleil,
Qui est un metal sans pareil.
Et puis entendons pour l’argent,

Luna le metal noble et gent.
385Venus pour le cuyvre entendons,
Et aussi c’est moult bien son noms.
Mars pour le fer, et pour l’estain
Entendons Jupiter le sain.
Et le plomb pour Saturne en bel,
390Que nous appellons or mesel.
Mercurius, est vif argent,
Qui ha tout le gouvernement
Des sept metaulx: car c’est leur mere,
Toutainsi que cy les compere:
400Que les imperfaits peut perfaire.
Apres le te voudray retraire.
     Or entends bien que je diray,
Et comme je declareray
La Fontaine à dame Nature,
405Que tu vois cy pres en figure.
Se tu scez bien Mercure mettre
En œuvre, comme dit la lettre,
Medecine tu en feras,
Dont paradis puis acquerras,
410Avecques l honneur de ce Monde,
Ou grand planté de bien abonde.
     Scavoir dois par Astronomie,
Et par vraye Philosophie,
Que Mercure est des sept metaulx
415La matiere, et le principaux:
Car par sa pesanteur plombasse,
Se tient soubz terre en une masse,
Nonobstant qu’elle est volative,

Et es autres moult conversive,
420Et est soubz la terre trouvée,
Tout ainsi comme est la rousée,
Et puis en l’air du Ciel s’en monte,
Moy Nature le te raconte,
Et si apres peut concevoir
425Qui en veult Medicine avoir
Mercuriale, en son vessel
Le mettra dedens le fournel
Pour faire sublimation,
Qui est de Dieu un noble don,
430Laquelle je te veux monstrer
A mon pouvoir, et figurer.
Car si ne fais purs corps et ame,
Ja ne feras bonne amalgame,
N’aussi bon parachevement.
435Mectz y donc ton entendement.
     Or entends si tu veulx sçavoir,
(Mieux vault bon sens que nul avoir)
Pren ton corps et en fais essay,
Comme autres ont faict bien le scay,
440Ton esprit te fault bien monder,
Ains que puisses incorporer.
Se faire veulx bonne bataille    Alias
vingt encon
tre convient.
etc.

Vingt contre sept convient sans faille.
Et se ton corps ne peult destruire
Vingt, à ce pas il fault qu’il muire.
445Si est la bataille premiere
De Mercure trèsforte et fiere,
Après rendre luy convient faire,
Ançois qu’on en puist rien attraire.

Quand à ton vouloir entrepris
450Rendu sera, lors estant pris,
Si tu en veux avoir raison,
Lenfermeras dens la prison,
Dou il ne se puisse bouger.
Mais dun don le doibz solager:
455Ou pour toy rien ne voudra faire,
Tant que luy feras le contraire,
Et si faire luy veulx plaisir,
Il le te convient eslargir,
Et remettre en son premier estre.
460Et pource seras tu son maistre:
Autrement scavoir bien ne peux
Ce que tu quiers, et que tu veux.
Mais par ce point tu le scauras,
Et à tout ton plaisir viendras,
465Mais que tu faces de ton corps
Ce, dont te fais cy le recors.
     Faire dois donc, sans contredit,
Premier de ton corps esperit,
Et l’esprit reincorporer
470En son corps sans point separer.
Et si tout ce tu ne scez faire,
Si ne commence point l’affaire.
Apres ceste conjunction,
Se commence operation,
475De laquelle, si tu poursieux,
Tu auras la gloire des cieux.
Mais tu dois scavoir par ce livre,
Que moy Nature te delivre,
AMOUREUX DE SCIENCE:

Que le mercure du soleil,

N'est pas à la Lune pareil:

Car toujours doit demeurer blanche,

Pour faire chose à la semblance.

Et celui qui au Soleil sert,

Le doit ressembler en appert:

Car on le doit rubifier:

Et ce est le labour premier.

Et puis assembler les peut on

Comme ai dit, en ma raison

Ci devant que tu as ouïe

Qui te doit entrer en l'ouïe.

Et si ce ne se auois entendre,

En ton labour pourrais méprendre:

Et à l'aduentare perdraisPage:De la transformation metallique.djvu/26

D’oyseaulx, de bestes,& de fruictz :
Autrement prouuer ie le puis
Mettez d’vn arbre la semence
En terre par bonne fience :
Apres la putrefaltion,
En viendra gener ation.
Par le froment le peux scanoir,
Qui cause mieux que nul autre auoir.
Scmant vn grain, en auras mille.
Làne fault estre moult habille :
Ne oncques ne fut creature,
Qui dire pesft à moy Nature,
Naissance ay prins sans te chercher,
Tu ne peux rien me reprocher.
Et ainfı des metaulx est il,
Dont Mercure est le plus subtil.
Dens le Four est mis, on son corps,
Que se t’ay dit en mes recordz
Et de ce faire il est moult p est,
Ainsi que verras cy apres.
La luy contient en amourer,
Son pareil,& puissabourer.
Mais ains qu’affin puisse venir,
D’ensemble les fault defp artir.
Mais apres celle departie,
Se r assemblent ie vous assie.
La fois première est fianfaille,
Et la feconde l’espousaille,
Alatierce fois par droičture,
Affermblécz en vne naturc,

al. Comme.

al. Quand il est mis dedes son corps.

Il le conuiét enamourer.

De son pareil puis labourer, c.

Alias Vous assie.

C'eft le mariage perfaict,
Anquel gift treftont noflre fait.
Or entens bien comme i'ay dit:
Car pour vray en rien n'aymefdit.
Quand tu les auras feparez,
Et peu d peu bien reparız,

  • pen.

En apres les r'affembleras,
Et l'vn auec l' autre,mettras.
Mais te fouuienne en ta leçon,
Du prouerbe que dit Caton:
L'homme qui lift rien n'entend,
Semble ati chaffeur qui vien ne prend.
Si aprens donc à bien entendre,
Affin que ne puiffes reprendre
Les liures, ne les bons facteurs,
Lefquelz font perfaitz entendeurs:
Car tous cenlx qui noftre æuure blafment,
Ne lacongnoif ent ne l'entendent:
Celny qui bien nous entendroit,
Moult toft à noftre œuure viendroit.
Plufeurs fois ha efté ouurée,
Et par Philofophes efprounéc:
Mais plufieurs gens tenus pour fages
La blafment,dont ilz font folages:
Et chafcun les en doit blafmer,
Qui ba fens en foy fans amer.
Mais louer deibt on bien & bel,
Tous ceulx qui aiment tel ioyel,
Et qui le penfent à trouner,
Par

Amoureux de science. 11

Par peine de bien labourer.
Et doibt on dire, c'eſt bien fait,
Loz merite leur bel effect.
Or auons nous dict vne choſe,
Qu'il fault que briefment ſoit decloſe,
C'eſt que ſi bien proceder veulx
Tu faces l'vnion des deux
Tant que fiancez, puiſſent eſtre
Ou vaiſſel qui en ſcait bien l'eſtre.
Ft pais pour ton faiết fiparer
Iete conuient lbien erdonner.
Et pozr t'en dire !A fazs
Ceneft que efolutioat
Laquelle te fait grand maftier,
Se pourfuyuir veulxle meftier,
Elle doibt le compoft deffaire
Ainfi que tu en as affaire,
T'ant que chafcun à par luyjoit,
Et puis ayant la terre foif,
De l'eane du Ciel par droičture,
(Car ilz font tont d'vne naturi)
C'eft raifon qu'ell'foit abbrenéc,
Et de moy fera gounuernée.
Ortayie dit fans rien meftrendre,
Comme ton corps peult ame prendre,
Et comme les fault defpartir,
Et l'vn d'auec l'antre partir:
Mais la defpartie, fans deubte, .
Eft la clef de nofire cunre tonte.
Par le feu elle fe perfailt:
Alins
Quand tu
yerras la ter
re ferche,
De leau du
ciel fais quel
de leiche:
Car ilz fant
tous dune na
Sure.
Labore dốc
ques par
Arodlure.
B 3

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LES REMONTRANCES de NATURE
a l'ALCHIMYSTE ERRANT
Auteur JEHAN de MEUNG.

Comme nature se complaint,
Et dict sa douleur & son plaint
A un sot souffleur, sophistique,
Qui n’use que d’art mechanique.

NATURE.
Helas que je suis douloureuse,
Me voyant ainsi malheureuse,
Quand je pense à toy, genre humain,
Que Dieu a formé de sa main,
A sa semblence & vraje Image,
Pour le perfaict de son ouvraige,
Qui sur toute autre créature,
Te dereigle tant de Nature,
Sans user par temps & saison
En tes faictz de dame Raison.

Je parle a toy sot fantastique,
Qui te dis & nomme en practique
Alchimyste & bon philosophe:
Et tu n’as scavoir, ny etoffe,
Ny theorique,ny science
En l’art, ny de moy cognoyssance.
Ta romps alambicz grosse beste,
Et brusle charbon qui t'enteste:

Tu cuis aluns, sels, ou pigmentz,
Et fonds metaulx, brusle atramentz,
Tu fais grans & petits fourneaulx,
Abusant de divers vaisseaux.
En effaict je te certifie
Que j’ay honte de ta folie.
Qui plus est, grand’douleur je souffre
Pour la fumée de ton soulphre.
Et par ton feu chauld,qui ardgent,
Tu cuide fixer vif argent
Qui est yolatil & vulgal,
Et non cil dont je fais metal.
Pauvre homme tu t’abuses bien:
Par ce chemin ne feras rien,
Si tu ne marche d’autres pas.
Mal tu uses de mes compas:
Mal tu entens mon artifice.
Mieux vauldrait faire ton office,
Que tant dissoudre & distiller
Tes drogues, puis les congeler
Par alambicz et descensoires,
Cucurbites, distillatoires,
Par pellicans, & matheras:
Jamais tu ne l’arresteras.
Puis tu fais pour ta fixion,
Feu de reverberation,
Voire si tresschauld que tout fond.
Ainsi tes oeuvres se perfont.
Enfin pers l'autry & le tien
Jamaism tu n'y trouveras rien,

Si tu n'entre dedans ma forge,
Ou je martelle & toujiours forge
Mctaulx, es terrestres minieres:
Car la tu verras les manieres
Et la matière de quoy j'oeuvre.
Ne cuide pas que je decouvre
Le mien secret, qui tant est cher,
Si premier tu ne vas chercher
Le germe de tous les metaulx,
Des animaux & vegetaulx,
Qui sont en mon pouvoir tenus,
Et en la terre detenus.
L’un, quant a generation,
Et l'autre par nutrition.

Les metaulx, n’ont fors que l’essence:
les herbes, ont estre & croissance:
Les bestes, ont la sensitive,
Qui est plus que vegetative:
Metaulx, pierres & atramentz
Je procrée des elementz:
D’eulx je fais telle mixtion
Et prime composition,
Leans au ventre de la terre,
N'ailleurs oncques ne les doibs querre.
Les herbes on graines expresses,
Pour conserver cy leurs especes:
Et les bestes portent semence,
Dont elles engendrent leur semblance.
Brief, chacun saict bien son devoir,
Sans me tromper, ne decepvoir.

Mais toy homme tout plain de vice,
Entreprenant sur mon office,
Tu te dévoye de nature,
Plus que nulle autre créature.

La Nature
Metaulx n’ont vie nullement,
Ne nourriture aucunement
Pour pululer & augmenter,
Ny nul pouvoir de vegeter:
Ils n'ont semence generable:
Aussi n’engendrent leur semblable.
Ils sont creéez en prime instance
Des elemens & leur substance:
De ces quatre je les fais n’aistre.
Les metaulx & pierres,n’ont qu'estre.
Toutes les pierres sont frangibles,
Et tous les metaulx font fusibles :
Apres leur fusion, fixables
Doibvent estre & bien malleables.
Les uns, par dépuration
Recoipvent grand’perfection,
Comme l'or fin, par mon art gent,
Que je dépure, & fin argent:
Mais les autres plus impurs sont:
Pour ce que le vif argent ont
Trop crud & leur soulphre terrestre
Trop aduste. Si ne peult estre
Tel métal mis en pureté:
A cause que n'a mérité
La matiere forme si bonne:
Car tous mes faistz tant bien j'ordonne.

Que chascun son espece ameine,
Selon que la matiere est saine.

Si scavoir veux ou je recouvre
Matiere a ce:tout premier j'ouvre
Le cabinet de mes secretz
Par oultilz, subtilz & discretz,
Et vays chercher propre matiere
Prochaine pour faire minière:
Laquelle je prens es boyaux
De mes quatre elementz royaux,
Qu'est la semence primitive,
Contenant forme substantive
En simplicité composée,
Preparée & bien disposée
A transformer les quatres en ung
Soubz genre general commun.
Lors luy donne, tant suis benigne,
Par mon art vertu metaline,
Dont sont faictz metaulx purs impurs
Les uns mols, les autre plus durs.
Je l'ay des elemens extraicte
Par mes cielsz l'ay ainsi pourtraicte,
Laquele par longtemps je meine
De la matiere primeraine
En prochaine & propre matière
Dont je fabrique ma minière:

Puis soulphre & vif argent en ussent
Que en metaulx se convertissent.
Non pas tel vif argent & soulphre
Que tu voys:mais ne le souffre:

Car par contraires qualitez
Sont transmuez & agitez
De leur propre en aultre nature.
Matiere ainsi par pourriture,
En idoine corruption,
Au moyen de privation,
Que la forme première tue,
Puis de nouvelle est revestue:
Et par la chaleur naturelle
Que la matière tient en elle
Excitée de tous les cyeulx,
Avecques le feu gracieux
Que je scay en ma forge faire,
Forme je donne, sans forfaire,
Enfin tele que la matiere
Est bien susceptible & la tire.

Ainsi privation & forme
Et matiere, dont je t’informe
Sont mes principes ordonnes,
Qui d'enhaut me furent donnes:
C'est mon maistre le créateur
Que commanda comme un aucteur
Qui de matiere universelle
Je fisses, comme son ancelle,
Transmuer les quatre elemens
Par mes actes & regimens
S’oubz une forme generale
De toute espece minerale.

Si fais par mon art naturel
Circonferer le beau soleil

En vingt & quatre heures la terre:
Lequel jamais ne faut nynerre
D’exciter par son mouvement
Chaleur en chacun element:
Aussi faist la huitieme sphere,
Les sept planettes, & leur pere,
Qui est le grand premier mobile
Lequel ravist, tant est abile,
Avecques luy les spheres toutes:
Et ny fault point faire de doubtes.
Son chemin faist en occident:
Et les autres sans accident,
Font au contraire tous leurs cours.
Si conduis les longs & les courts,
Comme Saturne,qui son temps
Et son cours perfaict en trente ans:
Jupiter en douze ans le faict:
Et Mars en deux ans le perfaict.
Le beau Soleil pere de yie
Sa circunferance assouvie,
En passant par un chascun signe
Justement un an y assigne
En six heures, pour tout le compte.
Venus,dont on faict si grand compte,
Met troys cens quarante & neuf jours:
Et puis Mercure faict son cours
En troys cens trente neuf en somme.
La Lune, prochaine de l'homme,
Vingt & neuf & demy demeure
A passer les douze & quelque heure.


Et ainsi, par leurs cours divers,
Sont causéz estez & yvers,
Es elemens mutations,
Et ??? generations.
Et jamais riens, qui soit sensible
Ou soit visible ou invisible
Ne peut estre, ne avoir lieu
Sans moy, sans les cieulx, & sans Dieu.

Ainsi font les cieulx toutes choses
Qui sont dessoubs la Lune encloses,
Et envoyent leur influence
Sur la matiere en sa puissance.
Et la matiere forme appere,
Comme femme l'homme souhaitte.
Tant d'estoiles sont au ciel mises,
Soubz quimatieres sont submises
Et subjectes, en divers nombres.
Unes sont claires, autres sombres:
Tant & tant sont innumerables,
Que ce sont choses admirables.
Ainsi diverses choses sont,
Pourtant de divers cours qu’elz ont
Lassus au ciel, a bas vertus
Ses elemens: dont sont vestus
Despeces les individues.

Et saches que ne sont perdues
Tant d'influences nullement
Quant descendent sur l'element
De la terre, posé qu'elz soient
Invisibles, & ne se voyent,

Et qu'autant quelz tombent sur terre
Sont si pressez & en tel serre,
Que par force lune & lautre entre
En penetrant jusques au centre
En si tres diner se manieére
Quelles sont dedans la miniere
Diverses generations,
Par diverses impressions,
Sans erreur & sans nulles faultes
Obeissantz les basses aux haultes.

Si est la terre environnée
Des cieux, dont elle est bornée,
En recevant leurs influences
Et tres agreables substances.
Dont la vertu chacun veult mettre
Et jusques au centre penetre,
Et par mouvements & chaleurs
S’engendrent en terre vapeurs,
Aussi sont exhalations
Des primes compositions.
La vapeur, est froide & humide,
Voire que demeure & reside
Et est en terre retenue:
Mais si elle va en la nue,
Humide & chaulde pour ? estre.
Lautre, que demeure terrestre
Et qu'est enfermée & enclose,
Par laps de temps je la dispose
En soulphre, qui est son agent,
Avec son passif vif argent.

Lors est seconde mixtion
De prime composition.
Le tout est tire de la masse
Des quatre elemens que j'amasse,
Comme t’ay ja dit cy devant:
Et pour toy j'en parle souvent,
Affin que point tu ne t’abuses
Et qu’en pratique ne t'amuses.

Apres la putrefaction,
Se faict la generation,
Par chaleur, qui est annexée
Dedens l’œuvre ja commencée,
Tres amiable, sans ardeur,
Affin dechaufferla froideur
Du vif argent: lequel tant souffre
Qu’il est faict un avec son soulphre.
Le tout en seul vaisseau compris,
Le feu, l’air, & l'eau, que je prins
Dedans son terrestre vaisseau,
Qui tous sont en un seul fourneau,
Je cuis lors, dissoulz, & subleive,
Sans marteau, tenailles, ni lime.
Sans charbon, fumier, baing marie,
Et sans fourneau de souflerie.
Car j’ay mon feu celestiel,
Qui excite l’ellementel
Selon que la matiere appete
Forme telle qui luy compete.

Ainsi mon vif argent je tire
Des elemens & leur matiere.

Puis son soulphre le suit de pres,
Comme tout un, qui par expres
L’eschauffe petit à petit
Doulcement à son appetit.
Lors, froit se faict chault vertueux,
Et le sec, humide unctueux.
Or entens par hic & par hec,
L'humide n’est point sans son sec,
Ne le sec aussi sans l’humide :
Car l’un avec l’autre reside
Soubz une essence primitive,
Qui en est l’elementative
L'esperit & la quinte essence,
Dont notre enfant prend sa naissance.
Le feu l’enfante & le nourrist
Dedens l’air: mais avant pourrist
Au ventre de la vierge terre :
Puis en vient l’eaue qu’on doibt querre,
Qui est la matiere premiere
Dont je commence ma miniere.
Car un contraire circonstant,
Son contraire est fort resistant,
En se fortifiant, de sorte
Non tant que l’agent ne l’emporte.
Lors est le passif transmué,
Et de sa forme desnué,
Par l’appetit de la matiere,
Que toujours neufue forme attire.

Du premier ciel & grant moteur,
Est mon scavoir gubernateur:

Mes mains, sont la huitiesme sphere,
Ainsi que l'ordonna mon pere :
Mes marteaux, sont les sept planetes
Dont je forge choses si netes.
La matière dont fais ouvrages,
Pierres metaulx, arbres, herbages,
Bestes brutes & raisonnables,
Que sont les œuvres tres louables,
Generalement toutes choses,
Que sont dessoubz le ciel encloses,
Je la prens, & point je ne mentz,
Seulement es quatre elementz.
C'est la matiere primeraine,
Cahos, hyle?? : c'est le dommaine
De quoy je fais jouir le Roy,
Et la Reyne, & tout son arroy.
Le Chevalier est toujiours prest
Et la chambriere faict l’apprest.
Et tant plus est noble la forme,
Et plus noblement my conforme.
Sache que j’ay toutes puissances
De substanter toutes essences,
Et de les faire consister,
Et forme en matiere exciter.

Or notez bien les trois parties
Que de la masse sont parties .
Que Dieu fist au commencement:
De la pure, premierement
Il crea Cherubins, Archanges,
Les Seraphins, & tous les Anges :

Et de la moins pure & feconde,
Il créa les cieulx & la ronde:
Et de la tierce part moins pure,
Les elementz & leur nature
Il créa: mais le feu premier
De vertu volut praemuer,
Et le mist hault dessoubz la Lune.
Corruption ne tient aucune
En soy, mais tient de quinte essence
La plus pure part en puissance.
Et puis l’air tres subtil il fist,
Et de la quinte essence y mist,
Non tant comme au feu : puis fist l’eau.
Qui est un visible & tres beau
Element: quinte essence tient
Autant comme à elle appartient :
Et puis la terre voulut faire,
Affin de son vouloir perfaire :
Combien que en un petit moment
Il aye faict chasque element,
Et les cieulx & toute nature,
Qui suis la prime creature.
La terre grosse opaque fist,
Ou chascun trouve du proufict,
Que contient en soy sans doubtance
La moindre part de quinte essence.
Premier furent simples notez,
En leurs spheres elmentz telz.
Si est l'air propremmt humide:
Appropriement le feu l’ayde :

Et l’eau est froide proprement,
Et humide appropriement,
Que de l’air elle prent & pesche:
La terre, proprement est seiche,
Appropriement froide elle est
Quelle prend de l’eau: si faict prest
Au feu de sa grand siccité.
Mais, comme je t'ay recité,
Le feu est noble & sur tous maistre
Et est cause de faire naistre,
Par sa chaleur,& donner vie.

Mais si fault il que je te die,
Qu'il n'est nul element actif,
Qui peut agir sans le passif.
Comme le feu en l’air agist,
Aussi l’air sur l’eau reagist
Et l’eau agist en l’air & terre,
Quand le feu veult esmouvoir guerre.
Or est terre mere & nourrice
De toutes choses, & tutrice.
Ce que soubz le ciel pourrira,
Si elle enfante nourrira.
Ce que chaleur luy mect au ventre
Et ne cesse jusques au centre
Incessamment de gouverner.
Tant ma voulu Dieu honorer:
Qui m’a donné telle puissance,
Que je fais à la quinte essence
Reduire tous les quatre arriere:
Lors se dict matiere premiere

Meslée generalement
Et par tout chascun élément.
Par mon art faiz reductions,
Dont viennent generations :
Mais les especes revenues
Sont en la masse contenues.

Pour ce cil qui réduire veult
Les elementz, certes il ne peult
En la matiere primeraine,
Sans moy, quelque labeur & peine
Qu’il sceust prendre & se deubt tuer :
Car en moy est de transmuer
Leurs especes & leurs elementz.
Si tu dis autrement,tu mentz.
Tu ne scaurais, quant à substance,
Approprier propre influence,
Ny en rien proportionner
Les elementz, ou leur donner
La forme, selon le merite
Que la matiere bien merite.

C’est moy qui forme creature,
Et donne matière & nature :
Je fais par mes secretz celestes
Oeuvres perfaictes & honnestes.
Dont aucuns voyant mes oracles,
Les ont jugez quasi miracles.
Comme il appert en l’elixir,
Dont tant de biens on voit ussir:
Car les vertuz & qualitez
Qu'il ha, je les ay limitez :

Ny onvques nul art mechanique
N’eut le scavoir ou la practique,
D’avoir multiplications
Et si tres nobles actions.
Si doibt l'homme prudent & sage
Considerer que tel ouvraige,
Tele vertu, tele science
Ne se peult, sans L’intelligence
Des corps celestes, à fin duyre,
Et sans leur puissance conduire :
Autrement seroit abuser.

Qui vouldroit sans moy en user,
Ou prendroit il son influence,
Pour infuser tele substance ?
Comme ferait la mixtion,
Et la vraye proportion
Des elementz ? nul ny ha signe,
Comme bien le dict Avicenne,
En son De viribus cordis,
Au deuxiesme : voicy ses dictz:
Vivons tant que vivre pourrons,
Tele oeuvre entendre ne scaurons
Comme de proportioner
Elementz & mixtioner.
Ainsi le dict : bien m'en souvient:
Jamais nul homme ny advient.
C’est un secret à moy donné,
Qui n'est à l’homme h abandonné :
Car par mes vertus, souvent faiz
Qu'imperfaictz deviennent perfaictz:

Soit un metal ou corps humain,
Je le perfaiz & rendz tout sain.
Je faiz temperance infuser,
Et les quatre symboliser:
Des contraires je faiz accordz
Ou jamais il n'y à discordz.
C'est la belle chaine dorée.
Que j'ay circulant decorée
Par mes vertus celestieles,
Et leurs formes substantiales.
Telement & si bien j'y oeuvre
Que tout mon pouvoir se descœuvre,
Voire si noble et si perfaict,
Que d'homme ne seroit point faict
Sans moy, sans mon art & scavoir,
Quelque bon sens qu’il sceut avoir.

Vien ça, toy qui dis scavoir tout,
Et qui entends venir à bout
De ma science tant notable,
Disant, je feray l’or potable
Par feu de charbon, baing marie
En mes fourneaux: Saincte marie
Je mesbahis de ton erreur:
Par ta foy n'as tu point d horreur,
En considerant mes ouvraiges,
Et voyant cuire tels breuvaiges
Dedens tes vaisseaux & phioles
Plus creuses que ne sont violes,
Du temps perdu & des despences ?
Je ne scay moy à quoy tu pences

Mon filz: aye pitié de toy
Je te supplie, & pence à moy.
Entends bien ce que te diray :
Car de rien je ne mentiray.

Regarde un peu escoutes or',
Et tu verras bien comme l'or,
Qui est si noble & precieux,
A prins sa belle forme es cieulx,
Et sa bonne matiere en terre :
Si faict la belle gemme & pierre,
Comme Rubis & Dyamantz.
Tout se faict des quatre elementz,
Quant a matiere : & quant a forme,
Le ciel la qualité informe
En l’element ja contenue,
Par qui la forme est devenue
Noble par depuration
Et longtemps en perfection.
Et toutefois, telle noblesse,
Comme d’or & d’autre richesse,
Se faict par moy, j’en suis l’ouvriere :
Nul homme n'en scait la maniere.
Et, l'entendant, si ne scauroit
Dire comment il le ferait,
Ne quelle proportion prendre
Des elementz, ny bien entendre
Combien de feu, d’air, d’eau & terre
Sy est requis,ny ou les querre,
Ne bien mesler aucun contraire,
Non plus que les substances attraire :
Ny donner telles influences

Qu il convuient à telles essences.
Seulement si faire vouloit
Du fer, ou plomb, il ne scauroit :
Non pas la chose que soit moindre:
Jamais homme n’y sceut atteindre.
Comme donque fera il Lor,
S’il ne me robbe mon thesor?
Ce n'est au pouvoir de son art.
Et s'il le dict, cest un coquart :
J'entens par son art mechanique,
Il fault qu’il sache ma practique
Laquelle est naturelle, en somme,
Et que ne se faict de main d’homme.

Or donques, si l’or est si bon
Et se faict sans feu de charbon,
Et s’il est si noble tenu
Que sur tous est le mieux venu,
Et que chascun en faict thesor,
Tant les humains estiment l’or,
Toutesfoys il ne garist mie
Les metaulx, ny la ladrerie,
Ny ne faict transmutation
Des metaulx en perfection
De fin or, ne n'est si notable
De faire verre malleable,
Comme faict la tres noble pierre
Des philosophes, qu’on doibt querre.
Si est l’or, quant aux metaulx, faict
Par moy le plus noble & perfaict.

Ainsi donc, si tu ne scais faire

Un peu de plomb, a lexemplaire
De moy,ou quelque petit grain,
Ou de quelque herbe un tout seul brin,
Ou encor'moins faire du fer,
Comment te veulx tu eschauffer
A faire ce qui est plus noble?
Et dont on f dici ducat & mblei
Et si tu dis, je ne veulx mye
Faire l’or, mais bien lalchimie:
Je respondz à toy non scavant,
Que tu es plus fol que devant.
N’as tu entendu que j'ay dict
Que mon secret t'est interdict?
Car ce que se faict par nature,
Ne se faict point par creature.
Et qui plus est si l'or j'ay faict
Des sept metaulx le plus perfaict,
Ce que tu ne scauroys entendre,
Comment ose tu entreprendre
De vouloir faire par tes faictz
Ce que perfaict les imperfaictz,
Et en qui j'ay mis la puissance
De transmuer toute l essence
Des metaulx, en bon fin or,
Et ce que je tiens en thesor
Le plus cher que Dieu ma donne ?

Or es tu bien desordonné,
Si tu ne cognois & entendz
Que ce hault bien, ou tu prétendz
En tant qui touche à creature,

Est le grand secret de nature,
Soit en metal, pierre, herbe, ou beste,
Qui descend de vertu celeste.
Bien il y pert: car il garist
L’homme de tous maulx, & nourrist:
Il perfaict metaulx imperfaictz,
Par ses vertus & haultains faictz
Que j'y metz par mon grand scavoir,
Et du thesor de mon avoir.
S’il est donc si perfaict en soy
Qu'il n'en est un pareil, dis moy
S'il ne fault que tele science
Vienne de haulte intelligence:
Veu que nul ne scait faire l’or,
Et que cestuy est le thesor
Des thesors voire incomparable?
C'est un erreur irreparable.
Car si tu ne peus porter dix
Et veulz porter cent, je te dis
Que tu te tue coeur & corps
Ce faisant: sache tes effors.

Mon filz, c’est toute ma science,
Mon hault scauoir, & ma puissance,
Que je prens es cieulx simplement,
Et le fimple de l'element:
C'est une essence primitive
Et quinte en l’elementative,
Que je fais par reductions,
Par temps & circulations
Convertissant le bas en hault,

Froit & sec en humide & chault,
En conservant pierre & metal
Soubz son humide radical.
C’est par le mouvement des cieulx :
Tant sont nobles & precieux.
Et saches que les elementz
Ont des cieulx leurs gouvernementz,
Obeissans, par convenance,
Elementz à leur influence.
Et plus est pure ma matiere,
Plus suis par les cieulx grande ouvriere.

Cuide tu que sus ton fourneau,
Ou sont mis ta terre & ton eau,
Et que par ton feu & chaleur,
Par ta blanche ou rouge couleur,
Tu face de moy ton plaisir,
Pour parvenir à ton desir ?
Cuides tu les cieulx emouvoir
Et leurs influences avoir
Pour infuser dedens tes drogues ?
Cuides tu que ce soient orgues,
Qu'on faict chanter à tout les dois?
C'est trop cuider en ton lourdoys.
Ne scais tu bien que au mouvement
Des cieulx est un entendement,
Qui haça bas intelligence,
Et qui faict, par son influence,
A toutes choses avoir estre.

Cy te prie vouloir cognoistre
Que haultes choses de haut lieu

Procedent de moy, de par Dieu:
Et ne cuide que art manuel
Soit si perfaict que naturel:
Car son sens est trop nud & linge :
Si me contrefaict comme un singe.
Pence tu que pour distiller,
Ou pour dissouldre, & congeler
De ta matière en ton vaisseau,
Ou pour tirer de l’huile l'eau,
Soit que belle & claire la voye,
Que tu ensuyves bien ma voye ?
Mon filz, tu es trop abusé :
Car quand ton temps auras usé
A faire tous les meslementz,
Et separer les elementz,
Ton huile, ton eau,& ta terre,
Tu n’as rien faict. certes tu erre.
Scais tu pourquoi ? car ta matiere
Ne scauroit demye heure entiere
Soustenir du feu la chaleur :
Tant est de petite valeur :
Toute sen ira en fumée,
Ou en feu sera consommée.

Mais la matiere dequoy j'oeuvre,
Est infallible à toute espreuve,
Quelque feu ardant que ce soit,
Ains du feu tout son bien recoit.
Et si vient l’eau de seiche souche.
Que rien ne mouille qu’elle touche,
Ny ne s’en vole, ny recule.

Ne son huile jamais ne brusle :
Tant sont mes elementz perfaictz.
Ainsi n’est de ce que tu fais :
Aussi n'est ce pas ton office,
De manier mon artifice.

Pour conclusion je te dis,
Si tu veulx bien noter mes dictz,
Je ne te veulx point abuser,
Que tu ne scaurois infuser,
Par ton feu artificiel,
La grand chaleur que vient du ciel :
Ny par ton eau, huile, & terre,
Tu ne scaurois matiere acquerre
Que peut recevoir influence,
Pour luy donner telle substance.
C'est don de Dieu, donné es cieulx
Aulx elementz à qui mieulx mieulx
Conservé en la simple essence,
Dont nul que moy n'a cognoissance,
Fors l’home, qui en moy se fie,
Et qui scait bien pholosophie.

Mon filz, je ne diray qu'un mot :
Ce scait le createur qui m'ot,
C’est que l’œuvre se fait entiere
D'une seule & vile matiere
Homgenée, en seul vaisseau
Bien clos & en un seul fourneau,
En soy contient qui la perfaict,
Et par seul regime le faict.
Or voy la generation

De l’home & sa perfection,
Ou tout mon sens y habandonne,
Et le scavoir que Dieu me donne :
Car faire scais d’une matiere
L'espece humaine, non entiere.
Je forme le corps seulement,
Voire si tres subtilement,
Que Platon, aussi Aristote
N'y entendirent jamais note.
Je fais os durs, dentz à macher,
Le foye mol, aussi la chair,
Les nerfs froidz, le cerveau humect,
Le coeur chault, ou Dieu vie mect,
Les boyaux, & toutes les veines,
Arteres de rouge sang pleines.

Brief, le tout d'un seul vif argent,
Masculin soulphre tresagent,
Fais un seul vaisseau maternel,
Dont le ventre en est le fournel.
Vray est que l'home, par son art
M’aide fort, quand en chaleur ard,
En infusant en la matrice
La matiere qu’y est propice :
Mais autre chose ny scait faire.
Ainsi est il de ton affaire :
Car qui scet matiere choisir,
Telle que l'oeuvre en à desir,
Bien preparée en un vaisseau
Fort clos, & dedens son fourneau,
Le tout fourni, plus ne differe.

Car toy & moy debvons perfaire :
Pourveu que chaleur tu luy donne,
Comme philosophie ordonne.
Car la gist tout: je t'en advise.
Pourtant fault bien que tu y vise:
En feu que lon dict epsesis,
Pepsis, Pepansis, optesis.
Feu naturel,contre nature,
Non naturel, & sans arsure,
Feu chauld & sec, humide & froit,
Penses y & le fais adroict.

Sans matiere & sans propre feu,
Tu n'entreras jamais en jeu.
La matiere je te la donne:
La forme fault que tu l'ordonne,
Je ne dis pas substanciale,
Ny aussi forme accidentale :
Mais forme de faire vaisseau,
Et de bien former ton forneau.
Fais par raifon ce qu’est propice,
Et par naturel artifice.

Aide moy, & je t’ayderay :
Comme tu feras, je feray :
Ainsi que j’ay faict à mes filz,
Dont ilz ont receu les prouffictz:.
A cause que, sans vitupere,
Ont ensuyvi & mere & pere,
Obeissans à mes commands.
Comme tu peux veoir es romans
De Jehan de Meung qui bien m’apprenne.


Et tant les sophistes reprenne:
Si faict ville neusve, & Raimon,
Qui en font notable sermon,
Et Morien le bon Romain,
Qui sagement y mit la main:
Si fist Hermes, qu'on nomme pere,
A qui aucun ne se compare:
Geber philosophe subtil,
A bien usé de mon oustil,
Et tant à escript de beaux dictz,
Et d’autres, plus que je ne dis,
De cette tres noble science:
Lesquelz ont par experience
Prouvé que l'art est veritable,
Et la vertu grand' & louable.
Tant de gens de bien l'ont trouvée,
Qui veritable l'ont prouvée
Dont je me tais pour abreger.

Or, mon filz, si tu veux forger
Et commencer œuvre si noble,
Il ne te fault ducat ny noble,
Au moins en grande quantité:
Suffist que sois en liberté,
Et en lieu quite soit propice,
Que nul sache ton artifice.
Prepare à droict bien ta matiere
Toute seule mise en pouldriere
En seul vaisseau, avec son eau,
Bien close, & dedens son fourneau,
Par un regime soit menée

Es

D’une chaleur bien attrempée,
Laquelle fera l’action :
Et froid la putrefaction:
Car pour grande frigidité
Ne scauroit tant la siccité
Resister contre tel agent,
Que ne soit tost le vif argent,
Par connexion ordonnée,
Faict un subject homogenée
Reduict en premiere matiere.

Soit ton Intention entiere
D’ensuyvre ta mere nature :
Que Raison soit ta nourriture :
Ta guide soit philosophie.
Et si tu le fais, je t’affie
Tu auras matiere & moyen
De pervenir à ce hault bien.
Et de chose que bien peu couste
Tu ouvreras, mais que tu gouste
Mes principes. Voy comme j’ouvre :
Regarde l’Aristote, & ouvre
Le tiers & quart des metheores :
Aprens phisique, & voy encores
Le livre de generation,
Aussi celuy de corruption,
Le liure du ciel & du monde.
Ou la maticre ejî belle & monde.
Car si tu ne vois & entendz,
Certes, mon filz, tu pers le temps.
Et pour mieux scavoir les manieres,

Voir te fault celuy des minieres
Que fit mon gentil filz, Albert,
Qui tant sceut & tant fut expert
Qu’en son temps il me gouvernoit,
Et de mes faictz bien ordonnoit:
Comme il appert en celuy livre.
Or doncques, si tu es delivre.
Es minieres souvent liras,
Et la de mes secretz verras
Que nulle pierre ne s’engendre
Que des elementz, par son genre.

Aprens,aprens à me cognoistre
Premier que de te nommer maistre.
Suis moy,qui suis mere nature
Sans laquelle n'est creature.
Qui peust estre, ny prendre essence,
Vegeter, monter en croissance,
Ny avoir ame sensitive
Sans ciel & l’elementative.
Et pour cognoistre telz effectz,
Il te convient porter le faiz
D’estudier & travailler
En philosophie & veiller.
Et si tu scais tant par ses uz,
Que tu cognoisse les vertus
Des cieulx, & leurs gradz actions:
Des elementz les passions,
Et parquoy ils sont susceptibles:
Qui sont les moyens convertibles:
Et qui est cause de pourrir,

Et d’engendrer, & de nourrir:
De leur essence, & substance:
Tu auras de l’art cognoissance.
Combien que suffist seulement
D’avoir vu bel entendement,
En considerant mes ouvrages.

Mais n'ont pas euz tous clers & sages
Ce don de Dieu par leur science :
Ains ceulx de bonne conscience,
Qui m'ont suyvie avec Raison,
L’ont eue par longue saison,
En ayant patience bonne,
Attendans le temps que j'ordonne.

Fais doncques ce que te dis or,
Si tu veux avoir le thesor
Qu’ont eu les vraisz phisiciens,
Et philosophes anciens.
Cest le thesor & la richesse,
De plus grand’vertu & noblesse
Que puis les cieulx jusques en terre,
Par art l’homme pourroit aquerre.
C’est un moyen entre mercure
En metal que je prens en cure :
Et par ton art, & mon scavoir,
Perfaisons un si noble avoir.
C'est le fin & bon or potable,
L’humide radical notable :
C’est souveraine medecine,
Comme Salomon le designe,
En son livre bien autentique

Que lon dict Ecclesiastique:
Et la tu trouveras le tiltre
Au trente huictiesme chapitre :
Dieu la créa: en terre est prise :
L'homme prudent ne la desprise.
Il l'a mise dens mes secretz:
Et la donne aux sages & discretz.

Combien qu'ilz sont moins orateurs,
Et qui se cuident grans docteurs
En tres haulte Theologie,
Sans la basse philosophie,
Qui en font par tout leur risée.
Des medecins est deprisée,
Qui se mocquent de L’alchymie,
Las ils ne me cognoissent mye,
Et n’ont pas faict de l’art esprenne,
Comme Avicenne, & Villeneufve,
Et plusieurs grans physiciens,
Bons medecins tres anciens.
Tel s’en mocque qui n'est pas sage
Et qui n'a pas veu le passage
Que bons médecins ont passez.
Les mocqueurs n’ont pas sceu assez
Pour cognoistre tele racine
Et tant louable medecine,
Que guarist toute maladie,
Et qui la, jamais ne mandie.
Bien est heureuse la persornne
A qui Dieu temps & vie donne
De pervenir à ce hault bien,

Et posé qu'il soit ancien.
Car Geber dict, que vieulx estoyent
Les philosophes qui l’avoyent,
Mais toutesfois en leurs vieulx jours
Ils jouissoyent de leurs amours.
Et qui la possede, largesse
De tous biens ha, & grand’ richesse.
Seulement d’une once & d’un grain
Toujours est riche, & toujours sain.
En fin se meurt la creature,
De Dieu contente & de Nature.
Cest medecine cordiale,
Et teinture plus qu'aureale.
Cest l’elixir, l’eaue de vie,
En qui tout’ oeuvre est assouvye,
Cest l’argent vif, le soulphre & l’or,
Qui est caché en mon thesor.
Cest le bel huile incombustible,
Et le sel blanc fix & fusible.
Cest la pierre des philosophes
Qui est faicte de mes estoffes :
Ny par aucune geniture
Trouver se peut que par nature
Et par art de scavoir humain
Qu'il administre de sa main.
Je te le dis : je te l'annonce,
Et hardiment je le prononce,
Que sans moy, qui fournis matiere,
Tu ne feras onc œuvre entiere :
Et sans toy, qui sers & ministre,

Je ne peux seule l’oeuvre tistre.
Mais par toy & moy, je t'asseure
Que tu auras l’œuvre en peu d’heure.

Laisse souffleurs, & sophistiques,
Et leurs œuvres Diaboliques.
Laisse fourneaux, vaisseaux divers
De ces souffleurs faulx & pervers:
Je te prie tout en premier,
Laiffe leur chaleur de fumier :
Ce n'est profitable ny bon,
Non plus que leur feu de charbon.
Laisse metaulx & atramentz:
Transmue les quatre elementz
Soubz une espece transmuable,
Qu'est la matiere tres notable
Par philosophes designée.
Et des ignares peu prisée.
Semblable à l'or est par substance,
Et dissemblable par essence.
Les elementz convertiras,
Et ce que tu quiers trouveras,
J’entends que les bas tu sublimes,
Et que les haultz tu face infimes.

Tu prendras donc ce vif argent
Mixte en son soulphre tres agent,
Et mettras tout en seul vaisseau
Bien clos, dedens un seul fourneau,
Qui fera au tiers inhumé :
Garde qu’il ne soit enfumé :
Sur un feu de philosophie.

RESPONCE DE l’ALCHYMSTE.
Fais ainsi, & en moy te fie :
Laisse doncques toute autre espece,
Je t’en supplie, mon filz, laisse,
Et ne prens fors celle matiere
Dont se commence la miniere.
Plus ne t'en dis:mais je te jure
Mon Dieu, qu’il fault suyure nature.

LA RESPONCE DE l’ALCHIMYSTE, À NATVRE.

Comme l’artiste honteux est doulx
Est devant Nature à genoulx
Demandant pardon humblement
Et la merciant grandement.

L’ALCHYMISTE,
Ma tres doulce mere Nature
La plus perfaicte creature
Que Dieu créa apres les anges,
Je vous rends honneur & louanges

Je cognois icy & confesse
Que yous estes mere & maistraisse
Gouvernante du macrocosme,
Qui fut crée pour microcosme.
Le premier, !e monde se nomme :
Et microcosme, en grec, cest l’homme.
Vous fustes, tant estess habile,
Mise hault au premier mobile,
Qu’avec le doigt vous remuez,

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PETIT TRAICTE

D’ALCHIMYE, INTITVLE


LE SOMMAIRE PHILOSOPHIQUE

de Nicolas Flamel.



QVi veult avoir la cognoiſſance
Des metaulx & vraye ſcience
Comment il les fault tranſmuer
Et de l vn à lautre muer,
5Premier il convient qu’il cognoiſſe
Le chemin & entiere addreſſe
De quoy ſe doivent en leur miniere
Terrestre former, & maniere.
Ainſi ne fault il point qu’on erre
10Regarder es veines de terre
Toutes les tranſmutations
D’on ſont forméz en nations.
Par quoy tranſmuer ilz ſe peuuent
Dehors les minieres, ou ſe treuuent
15Eſtans premier en leurs eſpritz :
Aſſavoir, pour n’eſtre repris,
En leur ſoulphre & leur vif argent,
Que nature ha faict par art gent.
car tous metaulx de ſoulphre sont
20Forméz & vif argent qu’ilz ont.
Ce sont deux ſpermes des metaulx
Quelz qu’ilz ſoyent, tant froids que chauldz.

L’vn eſt maſle, lautre femelle :
Et leur complexion eſt telle.
25Mais les deux ſpermes deſſuſdictz,
Sont compoſéz, ceſt sans redictz,
Des quatre elemens, ſeurement
Cela i’afferme vraiement.
Ceſt aſcavoir le premier ſperme
30Maſculin, pour ſcavoir le terme,
Qu’en philosophie, on appelle
Soulphre, par vne facon telle,
N’eſt autre choſe que element
De lair & du feu ſeulement.
35Et est le ſoulphre fix, semblable
Au feu, ſans eſtre variable,
Et de nature metalique :
Non pas ſoulphre vulgal inique :
Car le ſoulphre vulgal, n’a nulle
40Subſtance (qui bien le calcule)
Metalique, à dire le vray.
Et ainsi ie le prouveray.
L’autre ſperme, qu’eſt feminin,
C’eſt celuy, pour ſcavoir la fin,
45Qu’on ha couſtume de nomer
Argent vif, & pour vous ſommer,
Ce n’eſt ſeulement que eaue & terre,
Qui ſ’en veult plus à plain enquerre.
Dont pluſieurs hommes de ſcience
50Ces deux ſpermes la ſans doubtance,
Ont figuréz par deux dragons,
Ou ſerpens pires, ſe dict on.

L’vn ayant des ailes terribles,
L’autre ſans aile, fort horrible.
55Le dragon figuré ſans aile,
Eſt le soulphre, la choſe est telle,
Lequel ne ſen vole iamais
Du feu, voyla le premier metz.
Lautre ſerpent qui ailes porte,
60C’eſt argent vif, que vent emporte,
Qui est ſemence feminime
Faicte deaue & terre pour mine.
Pour tant au feu point ne demeure,
Ains ſen vole quand veoit ſon heure.
65Mais quand ces deux ſpermes diſjointz
Sont aſſembléz & bien conjointctz,
Par vne triumphante nature,
Dedans le ventre du mercure,
Qu’est le premier metal formé,
70Et eſt celuy qui eſt nomé
Mere de tous autres metaulx,
Philoſophes de montz & vaulx
Lont appelle dragon volant :
Pource que vn dragon, en allant,
75Qu’est enflambé avec ſon feu,
Va par lair iectant peu à peu
Feu & fumée venimeuſe
Qu’eſt une chose fort hydeuſe
A regarder telle laydure :
80Ainſi pour vray faict le mercure,
Quand il est ſur le feu commun,
C’eſt à dire, en des lieux aulcun,

En un vaiſſeau mis & posé
Et le feu commun diſposé,
85Pour luy allumer promptement
Son feu de nature aſprement,
Qu’au profond de luy eſt caché,
Alors ſi vous voulez tacher
Veoyr quelque choſe veritable
90Par feu commun dit vegetable,
L’un enflambera par ardure
Du mercure feu de nature.
Alors, ſi eſtes vigilant,
Verrez par l’air iectant, courant,
95Une fumée venimeuſe,
Mal odorante, & maligneuſe,
Trop pire, enflambe & en poyſon
Que n’est la teſte d’un dragon
Sortant à coup de Babylonne
100Qui deux ou troys lieues environne.
     Autres philoſophes ſcavans,
Ont voulu chercher tant avant,
Qu’ilz l’ont figuré en la forme
D’vn lyon volant, ſans difforme.
105Et l’ont auſſi nommé lyon :
Pource qu’en toute region
Le lyon devore les bestes
Tant ſoient gentes & propretes
En les mangeant à ſon plaiſir,
110Quant d’elles il ſe peut ſaiſir,
Sinon celles qui ont puiſſance
Contre luy ſe mettre en deffence,

Et resister par grande force
A sa fureur, quand il les force :
115Ainsi que le mercure faict.
Et pour mieux entendre l’effect,
Quelque metal que vous mettéz
Avecques luy, ces motz notéz,
Soudain il le difformera,
120Devorera, & mangera.
Le lyon faict en telle sorte.
Mais sur ce point, je vous enhorte
Qu’il y a deux metaulx de priz
Qui sur luy emporte le priz
125En toutale perfection,
L’un on nonme or sans fiction :
L’aultre argent ce ne nye aulcun,
Tant est il notoire à chascun,
Que si mercure est en fureur,
130Et son feu allumé d ardeur,
Il devorera par ses faitz
Ces deux nobles metaulx perfaictz,
Et les mettra dedans son ventre.
Ce nonobstant, lequel qu’y entre,
135Il ne le consumera point.
Car, pour bien entendre ce poinct,
Ilz font plus que luy endurciz
Et perfaictz en nature aussi.
Mercure est metal imperfaict :
140Non pourtant qu’en luy ayt defaict
Substance de perfection.
Pour vraye declaration

L’or commun si vient du mercure,
Qu’est metal perfaict, je lasseure.
145De l'argent je dy tout ainsy
Sans alleguer ne cas ne sy.
Et aussi les aultres metaulx
Imperfectz, croissanz, bas & haultz,
Sont trestous engendrez de luy.
150Et pource il ny à celuy
Des philosophes, qui ne dise
Que c’est la mere sans fainctise
De tous metaulx certainement.
Parquoy convient asseurément
155Que des que mercure est formé,
Qu’en luy soit sans plus informé
Double substance metallique,
Cela clairement je replicque.
C’est tout premierement, pour l’une,
160La substance de basse lune,
Et apres celle du soleil,
Qui est un metal non pareil.
Car le mercure sans doubtance
Est formé de ces deux substances,
165Estantz au ventre en esperit
Du mercure que j’ai descript.
Mais tantost apres que nature
Haforme iceluy mercure,
De ces deux espritz desusdictz,
170Mercure, sans nulz contreditz,
Ne demande qu’a les former
Tous perfaitz, sans rien difformer,

Et corporelement les faire,
Sans soi d’iceulx vouloir deffaire.
175Puys quand ces deux espritz s’esveillent,
Et les deux spermes se reveillent,
Qui veulent prendre propre corps :
Alors il fault estre records,
Qu’il convient que leur mere meure,
180Nomé mercure, sans demeure :
Puis le tout bien, verifié,
Quand mercure est mortifié
Par nature, ne peult jamais
Se vivifier, je prometz,
185Comme il estoit premierement,
Ainsi que dient certainement
Aulcuns triomphans alchymistes,
Affermantz, en paroles mistes,
De mettre les corps imperfaitz,
190Et aussi ceux qui son perfaitz,
Soubdain en mercure ceurant.
Je ne dys pas que aulcun d’eulx ment :
Mais seulement, sauf leurs honneurs,
Pour certain ce sont vrays jengleurs.
195Il est bien vray que le mercure
Mangera par sa grande cure
L’imperfaict metal, comme plomb,
Ou estaing : cela bien scait on :
Et pourra sans difficulté
200Multiplier en quantité :
Mais pour tant sa perfection
Amoindrira sans fiction,
Et mercure ne sera plus

Perfaict: notéz bien le surplus:
205Mais si mortifié estoit
Par art, autre chose seroit,
Comme au cynabre, ou sublimé,
Je ne me veulx pas animé
Que revivifier ne se peusse.
210Telle verité ne se musse:
Car en le congelant par art,
Les deux spermes, soit tost ou tard,
Du mercure, point ne prendront
Corps fix, ny aussi retiendront
215Comme es veines ilz font de la terre.
Ains pour garder que nully n’erre
Si peu congelé ne peult estre
Par nature, à dextre ou senestre,
Dedans quelque terrestre veine,
220Que le grain fix soubdain ny vienne,
Qui produira des deux espermes
Du mercure, entier & vray germe:
Comme es mynes de plomb voyez
Si vous y estes convoyéz.
225Car de plomb il n’est nulle myne
En lieu ou elle se confine,
Que le vray grain du fix ny soit,
Ainsi que chascun l’appercoit,
Cest ascavoir le grain de lor
230Et de largent, qu’est un thesor
En substance & nourriture:
A chascun telle chose est seure.
La prime congelation

Du mercure, est mine de plomb
235Et aussi la plus convenable
A luy la chose est veritable:
Pour en perfection le mettre,
Cela ne se doibt point obmettre,
Et pour tost le faire venir
240Au grain fix, et toujours tenir.
Car, comme paravant est dict,
Mine de plomb sans contredict
N’est point sans grain fix pour tout vray
D’or et d’argent: cela je scay:
245Lesquelz grains nature y a mis
Ainsi comme Dieu l’a permis:
Et est celuy la seurement
Qui multiplier vrayement
Se peult, sans contradiction,
250Pour venir en perfection,
Et en toute entiere puissance,
Comme scay par l’expérience,
Et cela pour tout vray j’asseure.
Luy estant dedens son mercure,
255C’est à dire non separé
De la mine, mais bien paré.
Car tout metal en mine estant
Est mercure, j’en dis autant,
Et multiplier se pourra
260Tant que la substance il aura
De son mercure en verité.
Mais si le grain fix est osté
Et separé de son mercure

Qui est sa mine, bien l’asseure,
265Il sera ainsi que la pomme
Cueillie verde, et voila comme
Dessus l’arbre en verité,
Avant quelle ayt maturité,
Quand vous voyez passez la fleur,
270Le fruict se forme, soyéz sur,
Lequel apres pomme est nommée
De toute gens, et renommée.
Mais qui la pomme arracheroit
Dessus l’arbre, tout gasteroit
275A sa prime formation :
Car homme n'a eu notion
Par art ny aussi par science
Qu’il sceusse donner la substance,
Ne jamais la peusse perfaire
280De meurir, comme pouvoit faire
Basse nature bonnement,
Quand elle estoit premierement
Dessus l’arbre, ou sa nourriture
En substance avoit par nature.
285Pendant doncques que lon attend
La saison de la pomme estant
Sur son arbre ou elle s’augmente
Et nourrist venant grosse et gente,
Elle prend aggreable saveur,
290Tirant tousjours à soy liqueur,
Jusques à ce quelle soit faicte
De verde bien meure et perfaicte.
Semblablement metal perfaict,

Qu'est or, vient à un mesme effect,
295Car quand nature a procrée
Ce beau grain perfaict et crée
Au mercure, soyéz certain
Que tousjours tant soir que matin
Sans faillir il se nourrira,
300Augmentera, et perfera
En son mercure luy estant:
Et fault attendre jusques à tant
Qu’il y aura quelque substance
De son mercure sans doubstance:
305Comme faict sur l’arbre la pomme.
Car je faiz scavoir à tout homme,
Que le mercure en verité
Est l’arbre, notéz ce dicté,
De tous metaulx, soyent perfaictz,
310Ou aultres qu'on dict imperfaictz:
Pourtant ne peuvent nourriture
Avoir, que leur seul mercure.
Par quoy je dy, pour deviser
Sur ce pas, et vous adviser,
315Que si vouléz cueillir le fruict
Du mercure, qu'est sol qui luist,
Et l’une aussi pareillement,
Si qu’ilz soyent separément
Loingtains en aucune maniere,
320L’un de l’aultre sans tarder guiere,
Ne pencéz pas les reconioindre
Ensemble, n’aussi les y joindre

Ainsi comme avoit faict nature
Au premier: de ce vous asseure:
325Pour iceulx bien multiplier
Augmenter sans point varier.
Car quand metaulx sont separéz
De la mine, à part trouveréz
Chascun comme pommes petites,
330Cueillies trop verdes et subites
De l’arbre, lesqueles jamais
N’auront grosseur je vous promectz.
Le monde à assez cognoissance
Par nature et expérience
335Du fruict des arbres vegetaulx,
Et ne font point ces motz nouveaulx,
Que des que la pomme, ou la poire
Est arrachée, il est notoire,
De dessus l’arbre ce seroit
340Folie qui la remettroit
Sur la branche pour r’engrossi
Et perfaire: folz font ainsi,
Et gens aveuglés sans raison,
Comme on veoit en maint maison.
345Car lon scait bien certainement
Et à parler communément,
Que tant plus elle est maniée
Tant plus tost elle est consommée.
Cest ainsi des metaulx vrayement:
350Car qui vouldroit prendre l’argent
Commun et l’or, puis en mercure
Les remettre, feroit stulture.

Car quelque grand subtilité
Qu’on aye, aussi habilité
355Ou regime qu’on penseroit,
Abusé on si trouveroit:
Tant soit par eau ou par ciment
Ou aultre sorte infiniment
Que lon ne scauroit racompter
360Tousjours se seroit mescompter
Et de jour en jour à refaire
Comme auscuns folz sur cest affaire
Qui veullent la pomme cueillie
Sur la branche estre rebaillée
365Et retourner pour la perfaire:
Dont s’abusent à cela faire.
    Nonobstant que aucuns gens se avans
Philosophes et bien parlans
Ont tres bien parlé par leurs dictz,
370Disantz sans aucuns contredictz
Que le soleil, avec la Lune,
Et mercure, qu’est oportune,
Conjoinctz, tout metaulx imperfaictz
Rendront en œuvre bien perfaictz:
375Ou la plus grand part des gens erre
N’ayant aultre chose sur terre
Soyent vegetaulx, animaulx,
Ou pareillement mineraulx,
Que ces trois estans en un corps.
380Mais les lisantz ne font records
Que iceulx philosophes entenduz
N’ont pas telz motz dictz ny renduz

Pour donner entendre à chascun
Que ce soit or n’argent commun,
385Ny le vulgal mercure aussi:
Ilz ne l’entendent pas ainsi.
Car ilz scavent que telz metaulx
Sont tous mortz, pour vray, sans defaulx,
Et que jamais plus ne prendront
390Substance: ainsi demoureront
Et l’un à l’autre n’aydera
Pour le perfaire, ains demeurera.
Car il est vray certainement
Que ce sont les fruictz vrayement
395Cueilliz des arbres avant saison
Les laissant la pour tel raison:
Car dessus iceulx en cherchant
Ne trouvent ce qu’ilz vont querant.
Ilz scavent assez bien, que iceulx
400N’ont aultre chose que pour eulx:
Parquoy sen vont chercher le fruict
Sur l’arbre qui à eulx bien duict,
Lequel s’engrosse et multiplie
Dejour en jour, tant qu’arbre en plie.
405Joye ont de veoir tele besongne.
Par ce moyen l’arbre on empoigne,
Sans cueillir le fruict nullement,
Pour le replanter noblement
En autre terre, plus fertile,
410Plus triumphante, et plus gentille,
Et que donner a nourriture
En un seul jour par adventure

Au fruict, qu’en cent ans il n’auroit
Si au premier terrover estoit.
415Par ce moyen donc fault entendre,
Que le mercure il convient prendre,
Qui est l’arbre tant estimé,
Veneré, clamé, et aimé,
Ayant avec luy le soleil
420Et la lune d’un appareil,
Lesquelz separéz point ne font
L’un de l’autre, mais ensemble ont
La vraye association:
Apres sans prolongation
425Le replanter an autre terre
Plus pres du Soleil, pour acquerre
D’iceluy merveilleux prouffit,
Ou la rosée luy suffist.
Car la ou planté il estoit,
430Le vent incessamment battoit
Et la froidure, en telle sorte
Que peu de fruict fault qu’il rapporte:
Et la demeure longuement,
Pourtant petitz fruictz seuleument.
435     Les philosophes ont un jardin
Ou le Soleil soir et matin
Et jour et nuict est à toute heure
Et incessament y demeure
Avec une doulce rosée,
440Par laquelle est bien arrosée
La terre pourtant arbres et fruictz
Qui la font plantéz et conduictz

Et prennent deue nourriture
Par une plaisante pasture.
445Ainsi de jour en jour s’amendent
Recepvuantz fort doulce prebende,
Et la demeurent plus puissantz
Et fortz, sans estre languissantz
En moins d’un an, ou environ,
450Qu’en dix mil, cela nous diron,
N’eussent faict la ou ilz estoyent
Plantez ou les froictz les battoyent.
Et pour mieux la matiere entendre,
C’est à dire qu’il les fault prendre,
455Et puis les mettre dens un four
Sur le feu ou soyent nuict et jour.
Mais le feu de bois ne doibt estre
Ny de charbon: mais pour cognoistre
Quel feu te sera bien duisant,
460Fault que soit feu clair et luisant,
Ny plus ny moins que le Soleil.
De tel feu feras appareil:
Lequel ne doibt estre plus chauld
Ny plus ardent, sans nul default,
465Mais tousjours une chaleur mesme
Fault que soit, notez bien ce théme:
Car la vapeur est la rosée,
Qui gardera d’estre alterée
La semence de tous metaulx.
470Tu vois que les fruictz vegetaulx
S’ilz ont chaleur trop fort ardente
Sans rosée en petite attente

Sec & transy demourera
Le fructit sur la branche, et mourra,
475Ou en nulle perfection
Ne viendra, pour conclusion.
Mais sil est nourry en chaleur
Avec une humide moisteur,
Il sera beau et triumphant
480Sur larbre ou prent nourrissement.
Car chaleur et humidité
Est nourriture en verité
De toutes choses de ce monde
Ayant vie, sur ce me fonde,
485Comme animaulx et vegetaux
Et pareillement mineraux.
Chaleur de boys et de charbon,
Cela ne leur est pas trop bon.
Ce sont chaleurs fort violentes
490Et ne sont pas si nourrissantes
Que celle qui du Soleil vient:
Laquelle chaleur entretient
Chascune chose corporelle,
Pour autant quelle est naturelle.
495Parquoy philosophes scavans
Et de nature cognoissans,
Nont autre feu voulu eslire
Pour eulx, à la verité dire,
Que de nature aulcunement
500Laquelle ilz suivent mesmement.
Non pas que philosophe face
Ce que nature fait et trace

Car nature ha toupte chose
Crée, comme ici je lexpose,
505Tant vegetaulx que mineraulx,
Semblablement les animaulx,
Chascun selon son vray degré
Generante ou elle à priz gré
Comme s’estend sa dominance.
510Non pas que je donne sentence
Que les homes par leurs artz font
Choses natureles et perfont.
Mais il est bien vray quand nature
A formé par sa grande facture
515Les choses devant dictes, l’home
Luy peut ayder, et entendz comme,
Apres par art, à les perfaire
Plus que nature ne peut faire.
Par ce moyen les philosophes
520Scavans et gens de grosse estoffe,
Pour du vray tous vous informer,
Autrement n’ont voulu œuvrer,
Qu’en nature avec la lune
Au mercure mere opportune,
525Duquel apres en general
Font mercure philosophal,
Lequel est plus puyssant et fort,
Quand vient à faire son effort.
Que n’est pas celluy de nature.
530Cela scavent les creatures
Car le mercure devant dit
De nature sans nul desdit,

N’est bon que pour simples metaulx
Perfaictz imperfaictz froids ou chaulds.
535Mais le mercure du scavant
Philosophe, est si triumphant,
Que pour metaulx plus que perfaictz
Est bon, et pour les imperfaictz
A la fin pour les tous perfaire
540Et soubdainement les refaire,
Sans y rien diminuer
Adjouster mettre ny muer.
Comme nature les à mis
Les laisse sans rien estre obmitz.
545Non que je dye toutefoys
Que les Philosophes tous troys
Les conjoignent ensemble pour faire
Leur mercure, et le perfaire
Comme font un taz d’alchymistes
550Qui en scavoir ne sont trop mistes,
Ny aussi beaucoup sage gent
Qui prenent lor commun, largent,
Avec le mercure vulgal,
Puis apres leur font tant de mal
555Les tourmentant de tele sorte,
Qu’il semble que fouldre les porte:
Et par leur folle fantasie
Abusion et resverye,
Le mercure en cuydent faire
560Des philosophes et perfaire:
Mais jamais pervenir ny peuvent,
Ainsi abusez ilz se trouvent,

Qui est la premiere matiere
De la pierre, et vraye miniere.
565Mais jamais ilz ny parviendront
Ne aulcun bien y trouveront
S’ilz ne vont dessus la montaigne
Des sept, ou n’y a nulle plaine
Et par dessus regarderont
570Les six que de loing ilz verront:
Et au dessus de la plus haulte
Montaigne, cognoistront sans faulte
L’Herbe triomphante royale
Laquelle est nommé minerale
575Aulcuns philosophes et herbale.
Appellée est saturniale:
Alias.lecter.Mais laisser le marc il convient
Et prendre le jus qui en vient
Pur et nect: de cecy t’advise
580Pour mieux entendre ceste guyse:
Car d elle tu pourras bien faire
La plus grand part de ton affaire.
C’est le vray mercure gentil
Des philosophes tressubtil,
585Lequel tu mettras en ta manche.
En premier toute l’œuvre blanche,
Et la rouge semblablement,
Si mes ditz entends bonnement.
Esliz celle que tu vouldras
590Et soyez seur que tu lauras.
Car des deux n’est qu’une pratique
Qu’est souveraine et authentique.

Toutes deux se font par voye vue,
C’est ascavoir soleil et lune.
595Ainsi leur practique raporte
Du blanc et rouge, en telle sorte.
Laquelle est tant simple et aysée,
Qu’une femme fillant fuzée
En rien ne s’en destourbera
600Quand telle besogne fera,
Non plus qua mettre elle feroit
Couvez des œufz quand il fait froit
Soubs une poulle sans laver
Ce que jamais ne fut trouvé.
605Car on ne lave point les œufz
Pour mettre couver vielz, ou neufz
Mais ainsi comme ilz sont faict
Soubs la poulle on les met de faict.
Et ne fait on que les tourner
610Tous les jours et les contourner
Soubs la mere sans plus de plait
Pour soubdain avoir le poullet.
Le tout je l ay declaré ample.
Puis apres se met un exemple
615Premierement ne laveras
Ton mercure mais le prendras
Et le mettras avec son pere,
Qui est le feu ce mot t appere,
Sur les cendres, qui est la paile
620C est enseignement je te baille,
En un voyrre seul qu’est le nid
Sans confiture ny avyz

En seul vaysseau, comme dit est:
De l habitacle, entens que cest
625En un fournel faict par raison,
Lequel est nommé la maison,
Et de luy poullet sourtira
Qui de son sang te guerira
Premier de toute maladie,
630Et de sa chair, quoy que lon dye
Te repaistra, pour ta viande:
De ses plumes, affin que entende,
Il te vestira noblement
Te gardant de froid seurement:
635Dont prieray l’hault createur
Qu’il doint la grace à tout bon cœur
Dalchymistes qui sont sur terre,
Briefvement le poullet conquerre,
Pour en estre alimenté,
640Nourry et tresbien substanté.
Comme ce peu que Icy declare
Me vient du hault Dieu nostre pere,
Qui pour sa benigne bonté
Le m’a donné en charité:
645Dont vous faiz ce present petit,
Affin que meilleur appetit
Ayez cherchantz et fuyuantz train
Qu’il vous monstre soir et matin:
Lequel j’ay mis soubs un sommaire,
650Affin qu’entendiez mieulx l’affaire
Selon des philosophes sages
Les dictz, qu'entendez d avantage.

Je parle un peu ruralement:
Parquoy ie vous prie humblement
655De m’excuser & en gré prendre,
Et à fort chercher tousjours tendre.

F I N.




Aultres vers touchant le mesme art

l’auteur desquelz ne s’est nomé.


En mercure est ceque querons:
De luy eſprit & corps tyrons
Et ame auſsi, d’ou ſort teincture
Sur toutes aultres nette & pure.
C'eſt une humeur treſprecieuſe,
Rendant la personne Ioyeuſe.
Faicte est de terre, eau, air, & feu:
Le corps purgé, leſprit conceu
Apres vient la fontaine claire,
Que ne tient en ſoy choſe amere.
Au fond del’giſt le verd ſerpent,
Ou lyon verd, qui la s’ſspand.
Si on l’eſueille, il monte en hault:
Apres chet quand le cœur luy fault.
Tant il ſe laue & tant ſe baigne,
Que comme rouge appert ſa trongue:
Tant est laué d’eaue de vie,
Qu’apres on ne le cognoist mye.
Puis ſe tourne en pierre treſdigne,
Blanche premier, & puis citrine.
Tant amoreuſe eſt à la veoir,
Qu'on peut priſer ſon auoir.

Metz donc ta cuve En un fournel,
Au vray mercure Qui se faict bel
Qu’a faict nature. De jour en jour
Avec son pere Par vray amour
Faict son repaire, Sans nul secour,
Ou il prospere: Et se fixe
C’est pour perfaire Tout propice
Les imperfaictz Sans espice,
Ordz et infectz. Pour guerir
Mais fault que face Ton esprit
Que le deface Sans peril
De prime face: S’ainsi le fais
Pour le refaire Tous les infectz
Et satisfaire Seront perfectz.
A ton affaire. Dieu te doint grace
C’est le subject Et peu d'espace
Mys au vaissel Que le tout face.


FIN.




DEFENSE DE LA
SCIENCE VVLGAIREMENT
APPELLEE ALCHYMIE,
& des honneſtes perſonages
qui vaquent à elle : contre les
effortz que I. Girard mect
à les oultrager.




Apres que les preſentz autheurs de la transformation metallique, ont eſté mis en equipage pour recepvoir ornement de L’imprimerie, & de la ſourtir en public, Ilz m’ont ſemblé à bon droict requerir compagnie de quelque legitime défenſe, contre les detracteurs & calomniateurs de leurs profeßion. Mais de ma part ayant bon vouloir de leur ſatisfaire en ce que ie pourrois, ay conſideré que pour reſpondre equitablement à tous les uniques eſcriptz leſquels on trouveroit de telz adverſaires, beſoing ſeroit vſser d’aultre, & plus long langage que ce lieu ne demanderoit : & à ceſte cauſe (ſans en amener aultre) qu’il falloit icy ſe depourter d’entreprendre telle beſongne, & faire eſſay en vue moindre, ce neãtmoins meſme fin propoſer. Or eſt il certain que ie n’ay encore Page:De la transformation metallique.djvu/138Page:De la transformation metallique.djvu/139Page:De la transformation metallique.djvu/140Page:De la transformation metallique.djvu/141Page:De la transformation metallique.djvu/142Page:De la transformation metallique.djvu/143Page:De la transformation metallique.djvu/144Page:De la transformation metallique.djvu/145Page:De la transformation metallique.djvu/146Page:De la transformation metallique.djvu/147Page:De la transformation metallique.djvu/148Page:De la transformation metallique.djvu/149Page:De la transformation metallique.djvu/150Page:De la transformation metallique.djvu/151Page:De la transformation metallique.djvu/152Page:De la transformation metallique.djvu/153Page:De la transformation metallique.djvu/154Page:De la transformation metallique.djvu/155Page:De la transformation metallique.djvu/156Page:De la transformation metallique.djvu/157Page:De la transformation metallique.djvu/158