Description du département de l’Oise/Formerie

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P. Didot l’ainé (1p. 102-105).
FORMERIE.


A l’ouest de Grandvilliers, à l’extrémité du département, est la commune de Formerie, dont le sol est aquatique et froid : l’exploitation du terrain très humide est assez facile. On néglige les plantations dans les champs ; on cultive beaucoup d’arbres dans les vergers voisins des habitations. Les récoltes médiocres nourrissent à peine un-quart des habitants : il faut un double engrais pour échauffer le terrain, qu’au printemps on couvre de cendres, de tourbes, et de plâtres.

L’ouragan du 18 brumaire an 8 renversa dans ce pays plus de deux mille pieds d’arbres fruitiers.

Le peu de succès des moutons espagnols du citoyen Pretzer donne contre eux des préjugés, que de nouvelles expériences et la raison détruiront bientôt.

Le seul bois remarquable des environs de Formerie appartenoit jadis au comte de Barbanson ; sa surface est de deux cents trente-deux arpents ; il étoit célèbre par la beauté de ses chênes, que leur acquéreur a détruits sans ménagement.

Il n’existe dans les environs que la rivière de Canny, qui traverse S.-Samson, et se perd dans le Thérain.

On vante la propreté intérieure des habitations champêtres des environs de Formerie.

Les hommes y sont vifs, laborieux, industrieux, robustes : point d’épidémies dans ce pays ; il n’est pas rare d’y voir des êtres de quatre-vingts à quatre-vingt-dix ans.

Les jours de fêtes et les dimanches l’usage des hommes mûrs est de se réunir au cabaret : on y fait une partie de cartes ; un pot de cidre est le prix du vainqueur ; c’est ce qu’ils appellent faire l’estaminet, terme de leur ancien patois. Leur imagination saisit les objets avec plus ou moins de justesse, mais elle s’enflamme au premier choc ; disposition assez générale en Picardie, si vous en exceptez Beauvais : delà le proverbe qu’on applique aux vrais Picards, Ils ont la tête près du bonnet.

Les jeunes filles aiment la danse avec passion ; rien ne les arrête quand il s’agit de se rendre à quelque fête patronale.

Des charlatans errent quelquefois dans la campagne et dans les marchés ; le paysan s’y laisse prendre comme l’habitant de Paris. Quelques uns de ces charlatans font usage de ce qu’ils nomment corne de vérité ; c’est un long tube de fer-blanc dont ils posent l’embouchure sur l’oreille du bénévole auditeur : ils débitent par l’autre extrémité du tube des grossièretés que la femme la plus hardie n’oseroit répéter ; mais elle a payé ses sottises, elle laisse attraper les autres.

Les petites communes de l’arrondissement de Formerie sont renommées par leurs fabriques de bas à l’aiguille ; Blargies et Campeaux excellent dans ce genre de travail. Ces objets se portent au marché de Feuquieres, d’où ils passent dans le Soissonnois, au Havre, et dans le département de la Seine-Inférieure.

Il y a sept ou huit ans qu’une riche manufacture de coton employoit une partie des habitants de Formerie elle n’existe plus, et laisse dans la misère une multitude d’ouvriers qu’elle avoit formés.

La bonneterie étoit la principale branche du commerce de Formerie : on y faisoit une grande quantité de souliers. Ces établissements cessent malheureusement d’être en vigueur.

En 1703, à l’exception de cinq à six maisons, cette commune fut entièrement dévorée par les flammes.

Formerie faisoit jadis un commerce considérable avec Rouen et la basse-Bretagne.

Les souterrains du château sont très anciens. Les habitants desireroient qu’on logeât la gendarmerie dans une partie de ce bâtiment national.

Les nombreux bestiaux qu’on nourrit dans ce canton y sont engraissés pour Paris.