Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/501-510

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Fascicules du tome 1
pages 491 à 500

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 500 à 510

pages 511 à 520



On appelle improprement Aristoloche creuse, petite Aristoloche ronde, les racines de deux espèces de fumeterre, nommée Fumaria radice cavâ & non carâ. Quoique ces racines aient beaucoup d’amertume, & qu’elles conviennent par leurs couleurs avec l’Aristoloche ronde ordinaire, on doit cependant distinguer ces deux racines, & ne les pas confondre. Parmi les Aristoloches ; on range encore deux à trois sortes de racines menues, brunes & fibreuses, dont l’odeur est très-forte & très-aromatique, & qu’on nous apporte de Virginie sous le nom de Vipérine de Virginie. Plukenet distingue fort bien ces trois variétés, & en donne des figures dans son Phytographia. On se sert de ces racines contre la morsure des bêtes venimeuses, dans les fièvres malignes & la petite vérole. Sa vertu alexipharmaque lui a fait donner le nom de Vipérine.

Outre ces espèces, il y en a plusieurs autres découvertes dans le Levant & en Amérique ; mais elles ne sont pas employées. Le P. Plumier connut en Amérique cette plante à sa racine, qui est amère, & c’est par-là, autant que par ses fleurs, qu’il la distingua de la Contrahierva, dont Nard, Ant. Rech. parle dans son VIII Livre, ch. 58, & qu’il crut avoir trouvée la première fois qu’il découvrit l’Aristoloche longue de l’Amérique, qu’il décrit ainsi pag. 91 & 92. Sa racine a plus d’un pied de long, & près d’un pouce d’épaisseur : elle est enfoncée droite dans la terre, & finit par quelques sous-divisions : son écorce est grosse & noire en dehors, & toute découpée en long par de longues fentes ; le dedans est jaunâtre, & d’un goût fort amer : les tiges qu’elle pousse sont menues, lisses, rondes, & rampent fort avant sur les haies : elles sont entrecoupées de plusieurs nœuds, à chacun desquels il y a une feuille taillée presque comme un fer à cheval, dont les deux bouts sont émoussés ; ces feuilles ont un peu plus d’un pouce d’étendue ; & leur pédicule a environ un demi pouce de long : elles sont lisses, membraneuses, d’un beau vert par dessus, un peu pales par-dessous, & chargées en long de deux ou trois nervures qui partent d’une petite côte qui est un alongement du pédicule. Les fleurs sont presque de la même figure que celles de nos Aristoloches, mais beaucoup plus élargies dans leurs ouvertures, ayant aussi la langue pointue, & plus étendue : elles sont jaunes pâles, & veinées de rouge brun. Le fruit est gros comme un œuf de pigeon, ayant une pointe émoussée vers le bout d’en bas : il est divisé en six angles arrondis, dont le dos est surchargé d’une arête ronde & élevée : il est aussi divisé en dedans en six cellules pleines de semences noires, plates, fort minces, arrondies par un bout & pointues par l’autre, rangées de plat les unes sur les autres. Je l’ai vue en fleur en Novembre & en Décembre, & en fruit en Février & Mars. P. Plum. Il l’appelle Aristoloche longue, montante, à feuilles en fer de cheval.

ARISTOPHANEÏON. s. m. C’est le nom d’un emplâtre émollient, composé de quatre livres de poix, de deux livres d’apochyma, d’une livre de cire, d’une once d’opopanax, & d’une demi-pinte de vinaigre. Ἀριστοφανειον. Dict. de James.

ARISTOTE. s. m. Nom propre d’homme, célèbre Philosophe de l’antiquité, qui fut surnommé le Prince des Philosophes. Aristoteles. Ce nom s’est formé du latin, ou du grec par apocope, c’est-à-dire, par le retranchement de la dernière syllabe, contre l’usage de notre langue. Car on dit Praxitéle, Pyrgotéle, & non point Arisotéle ; mais Aristote. Philippe souffroit qu’Aristote lui fit des leçons sur l’art de régner. Tourr.

ARISTOTÉLÈS. s. f. C’est le nom que les Astronomes donnent à une des taches de la lune, qui est la vingt-troisième dans le catalogue du P. Riccioli.

ARISTOTÉLICIEN, ENNE. s. m. & f. Philosophe qui suit la doctrine, les sentimens & la méthode d’Aristote. Aristotelicus, a, um. Caracalla avoit la fantaisie de vouloir imiter le grand Alexandre ; & parce qu’on disoit qu’Aristote avoit contribué à la mort de ce conquérant, il haissoit tous les Aristotéliciens. Tillem.

Ce mot est aussi adjectif. Un philosophe, un dogme Aristotélicien. La secte Aristotélicienne. Molière, dans son Mariage forcé, introduit un Philosophe Aristotélicien qui dispute avec chaleur, pour savoir s’il faut dire la forme ou la figure d’un chapeau.

☞ ARISTOTÉLISME. s. m. Doctrine d’Aristote & de ses partisans, qui a été en vogue dans les écoles jusqu’au temps de Descartes.

ARITÉNOÏDE. s. f.. Aritenos. Terme d’Anatomie. C’est le troisième des cartilages du larynx, ainsi appelé, parce qu’il ressemble au bec d’une aiguière ; il est placé dans le tiroïde, & est soutenu par l’annulaire : il ferme la partie postérieure du larynx. Dionis.

ARITÉNOÏDIEN. s. m. M. Dodard, Acad. des Sciences, 1700. Mem p. 268, &c. écrit Aritænoidien. Terme d’Anatomie, qui se dit d’une paire des muscles fermeurs du larynx. La première paire des fermeurs sont les petits Ariténoidiens, nommés Ariariténoïdiens, à cause qu’ils prennent leur origine de la partie postérieure & inférieure de l’Ariténoïde, & s’insèrent obliquement au même cartilage pour le resserrer. Dionis.

ARITHMANTIE. s. f. Arithmanthia. C’est l’art de deviner, de connoitre & de prédire par les nombres. Cardan l’appelle Arithmomantie, Arithmomantia, & cela est mieux ; car ce nom vient d’ἀριθμος, & de μαντεία, qui veulent dire nombre & divination ; d’où se doit former Arithmomantie, & non pas Arithmantie. L’Arithmomancie, comme les autres divinations semblables, est une extravagance. La Gématrie, qui est la première espèce de la cabale judaïque, est une sorte d’Arithmomantie.

ARITHMÉTICIEN, ENNE. s. m. & f. Qui enseigne, ou qui sait bien l’Arithmétique. Arithmeticus. Les principaux Arithméticiens, ou Auteurs qui ont traité de l’Arithmétique, sont Diophante, imprimé à Toulouse avec les Commentaires de Bachet, & les observarions de Fermat ; Tacquet Jés. dont l’Arithmétique, qui est en latin, a éte traduire en Anglois, Wingate, Williford, Moor, Parson, Jeak Wel, Ward, Newton, Arithmetica universalis, à Cambridge 1707.

ARITHMÉTIQUE. s. f. ☞ Science des nombres : science qui fait partie des Mathématiques, qui considere les propriétés des nombres, & apprend à calculer avec facilité. Arithmetica. L’Arithmétique & la Géométrie sont les fondemens de toutes les Mathématiques. Les quatre premières règles d’Arithmétique sont l’addition, la soustraction, la multiplication & la division. Toute l’Arithmétique est renfermée dans ces quatre règles : car les règles de trois, de compagnie, d’alliage, de fausse position, & l’extraction des racines carrées & cubiques, ne se font que par les diverses applications de ces quatre premières règles. Il faut ajouter, que bien que ces quatre règles soient fort simples, elles ne laissent pas de paroitre obscures, même après les définitions que l’on en donne, à moins qu’elles ne soient appliquées à quelque exemple. Roh. Il y a une Arithmétique mémoriale. Charlemagne amena de Rome des Maîtres de Grammaire & d’Arithmétique, & établit partout des écoles. Fleur.

Arithmétique théorique. C’est la science des propriétés & des rapports des nombres abstraits, avec les démonstrations des différentes règles.

Arithmétique pratique. C’est celle qui ne s’en tient pas à la simple spéculation, mais qui passe à l’exécution, & apprend à faire les différens calculs, les différentes opérations.

Arithmétique numérale. C’est celle qui emploie les chiffres ordinaires dans les opérations.

Arithmétique instrumentale. C’est celle où les règles communes s’exécutent par le moyen de certains instrumens imaginés pour abréger les opérations.

Arithmétique spécieuse, ou littérale. C’est celle qui emploie les lettres de l’alphabet. Voyez Algèbre.

Arithmétique binaire. C’est une invention de M. Leibnitz. Le calcul ordinaire se fait suivant la progression de dix en dix. On se sert de dix caractères: 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Et puis allant à dix, on recommence, & l’on écrit dix par 10 ; dix fois dix ou cent, 100 ; dix fois cent ou mille, 1000 ; dix fois mille par 10000, & ainsi de suite. Au lieu de la progression de dix en dix, l’Arithmétique binaire emploie la progression de deux en deux, la plus simple de toutes, & M. Leibnitz prétendoit qu’elle sert à la perfection des nombres. On n’y emploie point d’autres caractères que 0 & 1, & puis allant à deux, l’on recommence. C’est pourquoi deux s’écrit par 10, & deux fois deux ou quatre par 100, & deux fois quatre ou huit par 1000, & deux fois huit ou seize par 10000, & ainsi de suite, comme on le voit dans la table qui suit, & qu’on peut continuer tant que l’on voudra.

0 0 0 0 0 0 0
0 0 0 0 0 1 1

0 0 0 0 1 0 2
0 0 0 0 1 1 3

0 0 0 1 0 0 4
0 0 0 1 0 1 5 On voit ici d’un coup-d’œil la raison d’une propriété célèbre de la progression géométrique double en nombres entiers, qui est que si l’on n’a qu’un de ces nombres de chaque degré, on en peut composer tous les autres nombres entiers au-dessous du double du plus haut degré.
0 0 0 1 1 0 6
0 0 0 1 1 1 7

0 0 1 0 0 0 8
0 0 1 0 0 1 9
0 0 1 0 1 0 10
0 0 1 0 1 1 11
0 0 1 1 0 0 12
0 0 1 1 0 1 13
0 0 1 1 1 0 14
0 0 1 1 1 1 15

0 1 0 0 0 0 16
0 1 0 0 0 1 17
0 1 0 0 1 0 18
0 1 0 0 1 1 19
0 1 0 1 0 0 20
0 1 0 1 0 1 21
0 1 0 1 1 0 22
0 1 0 1 1 1 23
0 1 1 0 0 0 24
0 1 1 0 0 1 25
0 1 1 0 1 0 26
0 1 1 0 1 1 27
0 1 1 1 0 0 28
0 1 1 1 0 1 29
0 1 1 1 1 0 30
0 1 1 1 1 1 31

1 0 0 0 0 0 32


Car c’est ici comme si on disoit que 111 ou 7 est la forme de 4, de 2 & d’un. 100 4
10 2
1 1


111 7
 
Et que 1101 ou 13 est la forme de 8, 4 & un. Cette propriété sert aux essayeurs pour peser toutes sortes de masses avec peu de poids, & pourroit servir dans les monnoies pour donner plusieurs valeurs avec peu de pièces. 1000 8
100 4
1 1


1101 13


Cette expression des nombres étant établie, sert à faire très-facilement toutes sortes d’opérations.

Pour l’addition par exemple. 110 6   101 5   1110 14
111 7 111 7 10001 17
1101 13 1100 12 11111 31
 
Pour la soustraction. 1101 13 10000 16 11111 31
111 7 1011 11 10001 17
110 6 101 5 1110 14
 
Pour la multiplication. 11 3 101 5 101 5
11 3 11 3 101 5
11 101 101
111   1011   10101  
1001 9 1111 15 11001 25


Pour la division.   15 1111 101 5
3 1111    
   11      


Et toutes ces opérations sont si aisées, qu’on n’a jamais besoin de rien essayer ni deviner, comme il faut faire dans la division ordinaire. On n’a pas besoin non plus de rien apprendre par cœur, comme il faut faire dans le calcul ordinaire, où il faut savoir, par exemple, que 6 & 7 pris ensemble font 13, & que 5 multiplié par trois donne 15, suivant la table d’une fois un est un, qu’on appelle Pythagorique. Mais ici tout cela se trouve & se prouve de source, comme l’on voit dans les exemples précédens sous les signes & .

Cependant il ne faut point introduire cette manière de compter à la place de la pratique ordinaire par dix : car outre qu’on est accoutumé à celle ci, on n’y a pas besoin de chercher ce qu’on a déjà appris par cœur. Ainsi la pratique par dix est plus abrégée, & les nombres y sont moins longs. Et si l’on étoit accoutumé à aller par douze & par seize, il y auroit encore plus d’avantage : mais le calcul par deux, c’est-a dire, par 0 & par 1, en récompense de la longueur, est le plus fondamental pour la science, & donne de nouvelles lumières qui se trouvent utiles ensuite, même pour la pratique des nombres, & sur-tout pour la Géométrie, dont la raison est que les nombres étant réduits aux plus simples principes, comme 0 & 1, il paroit partout un ordre merveilleux. Par exemple, dans la table, même des nombres on voit en chaque colonne régner des périodes qui recommencent toujours. Dans la première colonne c’est 0 1, dans la seconde c’est 0011, dans la troisième 00001111, dans la quatrième 0000000011111111, & ainsi de suite. Et l’on a mis de petits zéros dans la table, pour remplir le vide au commencement de la colonne, & pour mieux marquer ces périodes. On a mené aussi des lignes dans la table, qui marquent que ce que ces lignes renferment, revient toujours sous elles. Il se trouve encore que les nombres carrés, cubiques & d’autres puissances, item les nombres triangulaires, pyramidaux, & autres nombres figurés, ont aussi de semblables périodes ; de sorte qu’on en peut écrire les tables tout de suite sans calculer. Or une prolixité dans le commencement, qui donne ensuite le moyen d’épargner le calcul, & d’aller à l’infini par règle, est infiniment avantageuse. Leibnitz, Mém. de l’Acad. des Sc. 1703. M. Leibnitz a fait remarquer que l’on va plus loin dans la science des nombres par une arithmétique, qui ne compte que jusqu’à deux, que par notre arithmétique qui compte jusqu’à dix. M. Pellican a fait un traité intitulé, Arithmeticus perfectus, quitria numerare nescit, seu arithmetica dualis, &c à Prague.

Les Indiens sont assez versés dans l’arithmétique ; mais ce n’est que dans ce qui regarde la pratique. Ils apprennent l’art de compter dès leurs plus tendre jeunesse ; & sans se servir de la plume, ils font par la seule force de l’imagination toutes sortes de comptes sur leurs doigts. Je crois pourtant qu’ils ont quelque méthode mécanique qui leur sert de règle pour cette méthode de calculer. Lettres Édifiantes.

Les Chinois n’emploient point le zéro dans leur arithmétique. Ils n’en pratiquent guère les règles par le calcul ; mais ils se servent d’un instrument composé d’une petite planche d’un pied & demi de long, sur le travers de laquelle ils passent six à douze petits bâtons coulans : en les assemblant, ou en les retirant les uns des autres, ils comptent à-peu-près comme nous ferions avec des jetons, avec tant de facilité, qu’ils suivent sans peine un homme, quelque vite qu’il lise un livre de compte, & à la fin on trouve l’opération toute faite, & ils ont leur manière d’en faire l’épreuve. P. Le Comte.

Les Musulmans disent qu’Enoch, qu’ils appellent Edris, est l’inventeur de l’arithmétique.

Ce mot vient du grec ἀριθμὸς, numerus, nombre.

Arithmétique ; adj. Qui appartient à l’arithmétique. Arithmeticus. Nombre arithmétique. Figure arithmétique. progression, proportion arithmétique.

ARITHMÉTIQUEMENT. adv. D’une manière arirhmétique. Arithmeticè. Démontrer arithmétiquement. quantités proportionnelles arithmétiquement.

ARITHMOMANTIE. Voyez Arithmantie.

☞ ARIUS. Prêtre de l’Eglise d’Alexandrie. Voyez Arianisme & Ariens.

ARIZA. Bourg d’Arragon, en Espagne. Ariza, Ariobriga. Il est aux frontières de la vieille Castille, sur le Xalon, au-dessus de Calatajud. L’ancienne ville d’Arsi ou Arci, est Ariza ou Arcos, ville de la vieille Castille, à la source du Xalon.

ARK.

ARKEL, ou ARKLE. La terre d’Arkel ou d’Arkle. contrée du Brabant impérial. Herculis tractus ou pagus. Il est dans le quartier d’Anvers, au voisinage de la seigneurie de Malines. La ville de Lière ou Lire est le lieu principal.

ARKI. Nom de ville. Archium. Il y a deux villes de ce nom, dans la Turquie en Europe, toutes deux sur la Save qui les sépare l’une est en Bosnie, au confluent du Bosara & de la Save ; l’autre est en Esclavonie.

ARL.

☞ ARLANC. Bourg de France, en Auvergne, élection d’Issoire, généralité de Riom.

ARLANZA. Petite rivière d’Espagne. Arlanza. Elle est dans la vieille Castille, part de la ville de Lara où est sa source, & après avoir arrosé la ville de Lerme, elle va se rendre dans l’Arlanzon.

ARLANZON. Rivière d’Espagne. Arlanzo. Elle a son cours dans la vieille Castille, où elle baigne Burgos : ensuite de quoi, grossie de l’Arlanza, elle va grossir elle-même la Pizuerga, aux confins du royaume de Léon.

ARLEBERG. Montagne qui fait partie des Alpes Rhétiques. Arula. Elle s’étend dans le Tirol, entre le lac de Constance, le Rhin, le Brégents, l’Ill & l’Inn. Ce nom est formé du nom latin Arula, & du mot allemand Berg, qui signifie montagne. Souvent le a latin se change en e muet, qui se retranche ensuite.

☞ ARLEQUIN. s. m. personnage qui, dans la Comédie italienne, fait le rôle de bouffon, pour divertir le peuple par ses plaisanteries. On donne aussi ce nom aux valets des danseurs de corde, & qui ont des habits bigarrés & chargés de pièces de différentes couleurs.

☞ Ce nom vient d’un fameux Comédien Italien, qui vint à Paris sous Henry III. Comme il alloit souvent chez Messieurs de Harlay, ses compagnons l’appelèrent Harlequino, c’est-à-dire, petit Harlay, nom qui est demeuré à ses successeurs dans le même métier. Men.

☞ On a donné le nom d’Arlequin à un petit oiseau, à cause de la variété des couleurs de son plumage.

ARLEQUINADE. s. f. Scurrilitas. Bouffonnerie d’Arlequin, soit dans les paroles, soit dans le jeu. Les Italiens se contentent de faire un plan pour la distribution des rôles ; & dans le temps de la représentation, chaque acteur produit sur le champ ce qui lui convient ; ensorte qu’à cet égard les Comédies Italiennes ressemblent parfaitement aux conversations & aux entretiens ordinaires … Ils ont cependant des pièces sérieuses, & même des Tragédies, dont les rôles sont appris par cœur. Mais outre qu’elles leur paroissent moins propres, les arlequinades qu’ils y mêlent souvent, défigurent ces sortes de représentations Merc. Févr. 1726.

ARLES. Arelate, Arelas, Arelatum. Ville de France, dans la Provence & sur le Rhône. Arles est une ville très-ancienne. Quelques Auteurs fabuleux prétendent qu’elle a été bâtie par Arule petit fils de Priam, ou pour le moins par Arel fils de Gad, Gen. XLVI, 16. D’autres croient qu’elle fut fondée par les Phéniciens, de même que Marseille, & à-peu-près au même temps. Pline la nomme Sextanorum Colonia, c’est-à-dire, colonie des soldats de la sixième légion, parce que les Romains y conduisirent une colonie des soldats de cette légion. Scaliger prétend qu’elle fut nommée Constantia par Constantin le Grand ; & Aviénus dit que les Grecs l’ont appelée Théline, c’est-à-dire, Mamillaire, tant à cause de sa forme, qu’à cause de ses richesses, & de l’abondance de toutes choses qui s’y trouvoient.

Le nom Arles s’est formé du latin Arelas. Gassendi, dans la vie de M. Peirese, dit, que le nom d’Arles vient ou du grec ἄρης, Mars, & Λαὸς, peuple, c’est-à-dire, peuple de Mars, & belliqueux, ou de ara lata, autel large ; ou enfin de la langue britannique, dans laquelle ce nom signifie une ville située dans un lieu marécageux. Gassendi a pris ceci de Cabden, qui dit qu’en breton Ar signifie sur ; & lait, humide, marécageux. Bochait embrasse ce sentiment de Cabden dans son Chanaan. Liv. I, ch. 42, & tire le mot breton lait de l’hébreu ou phénicien, לחות, lahhuth, qui signifie la même chose. Chorier, dans son Histoire de Dauphiné, T. I, pag. 92, convient que Arelas, nom de la ville d’Arles, signifie dans l’ancienne langue celtique, une ville bâtie en une terre marécageuse ; mais il veut qu’il vienne d’ἀρὰ, auprès, & d’ἕλος, une palus ou un marais.

Arles, devenue colonie romaine, fut le siège du Préfet du prétoire dans les Gaules. Constantin en fit ensuite le siège de l’Empire dans les Gaules. A la décadence de l’Empire, les Rois de Bourgogne s’en emparèrent. Théodoric, Roi des Visigoths, y demeura longtemps, & l’orna beaucoup. Arles eut dans la suite ses Rois particuliers. Les médailles sur lesquelles on trouve Par. Parl. Sarl. Sar. sont, à ce que l’on prétend, des monnoies d’Arles, & ces lettres s’expliquent par les Antiquaires, Percussus Arelate, ou plutôt, populus Arelatensis, Senatus Arelatensis. Tar. Tributum Arelatensium.

Le Royaume d’Arles, regnum Arelatense. Le royaume d’Arles a encore porté le nom de royaume de Provence, & de royaume de Bourgogne Cis-Jurane, c’est à dire, d’en-deçà du mont Jura, Provinciæ ou Burgundiæ Cis-Juranæ regnum. Voyez Bourgogne. Il comprenoit la Provence, le Dauphiné, la Savoie, le Lyonois, la Bresse, le Bugey, & le Valromey. L’Evêque d’Arles étoit autrefois Vicaire du Pape dans les Gaules. Fleury. Cet état commença en 879, & Bozon en fut Roi en 931. Le royaume d’Arles ou de la Bourgogne Cis-Jurane, fut uni au royaume de la Bourgogne Trans-Jurane, dans la personne de Rodolphe II. Depuis 1032, jusqu’en 1379, le royaume d’Arles, fut possédé par les Empereurs, qui retinrent encore le nom de Rois d’Arles. Frédéric II en fut privé par son schisme & son hérésie ; & avant sa mort, qui arriva en 1248, on trouve des titres datés du règne d’Alphonse, Comte & Marquis de Provence ; Imperante Frederico schismatico, & in Provincia regnante Domino Alphonso Comite & Marchione Provinciæ. En 1245 les États de Provence & de Forcalquier passerent aux Comtes d’Anjou Rois de Sicile, par le mariage de Béatrix, Comtesse de Provence & de Forcalquier, avec Charles I, frère de S. Louis, & en 1481, il fut réuni à la couronne par le testament que fit en faveur de Louis XI, Charles III, Comte de Provence.

Boris a fait la Couronne Royale d’Arles. Honoré Bouche parle fort au long du royaume d’Arles, au premier Tome de son Histoire de Provence, Liv. VI, & suivans. Saxi a fait l’Histoire des Archevêques d’Arles sous le titre de Pontificium Arelatense. Voyez Grégoire de Tours, Liv. IX, ch. 30, 40 42. Fortunat, Liv. V, ch. 2. Cassiodore, Liv. VIII, ép. II. Méla, Liv. II, ch. 5. Pline, Liv. III, ch. 4. Strabon, Liv. IV. La longitude d’Arles est 22d. & sa latitude 43d, 34′. C’est l’Académie des Sciences qui l’a déterminé ainsi.

Arles, Bourg du Roussillon, en France. Arula. Il est au pied des Pyrénées, sur le Tech.

☞ ARLESHEIM. Ville de Suisse, dans l’Evêché de Bâle, & dans la Seigneurie de Birseck, dont elle est le principal endroit.

ARLET. s. f. Espèce de cumin dont il se fait un assez grand négoce aux Indes Orientales, particulièrement à Surate.

ARLEUX. Petite ville d’Artois. Arlodium, Arlusium, Arensium. Elle est aux confins de la Flandre & du Hainaut, entre Cambrai & Douai.

ARLON. Petite ville ou bourg du duché de Luxembourg. Arelaunum, Arlunum. Elle est au midi de Bastoigne.

On prétend que ce nom vient d’Ara-lunæ, ou Ara-luna, autel de la lune, & que les habitans de Trèves y avoient érigé un autel à la lune, qu’ils y venoient adorer.

ARM.

ARMA. Ville du royaume de Popayan, dans l’Amérique méridionale. Arma. Elle est sur le bord de la Cauca, entre les villes de Cali & de Santa-Fé d’Antiochia. Arma est capitale d’une petite province qui porte son nom.

ARMADABATH, AMADABAT, HARIMEDAVAT. Ville du Mogolistan. Armadabatha, Amadabara, Harimédevata. Elle est capitale du royaume de Guzarate, à dix-huit lieues de la ville & du golfe de Cambaye. Quelques Géographes croient que c’est l’ancienne Barbari.

ARMADELLE ou ARMADILLE. Tatu ou Tatou. Animal quadrupède, du Brésil, gros comme un chat. Il a le museau de cochon, la queue d’un lézard, les pieds d’un hérisson. Il est armé d’un haleret à écailles dures, dans lequel il se retire comme les tortues, d’où les Espagnols l’ont appelé Armadillo ; c’est-à-dire, armé de toutes pièces. Il séjourne dans les cavernes, ou dans les eaux comme amphibie. Le P. du Tertre, Histoire des Antilles, Tr. VI, c. I, §. 5, écrit Armandille. Celui qu’il décrit, est différent de celui qu’a décrit Rochefort. Ce Pere dit que celui de cet Auteur étoit celui du Brésil. Rochefort, dit-il, le fait trop gros ; il ne lui donne que trois bandes, ou trois cercles qui l’environnent, bien qu’il en ait dix. Il lui met cinq ongles à chaque pied, quoiqu’il n’en ait que quatre. La queue qu’il lui donne, est trop courte ; elle est plus longue que son corps, & toute divisée par nœuds, & par cercles d’écailles ; les épaules & les hanches sont couvertes d’une écaille, qui descend jusqu’à la sortie des pattes. Cette écaille est grise, & toute semée de petites taches blanches, comme des lentilles. Tout le milieu du corps entre ces deux écailles est environné de dix bandes d’écailles dures, larges d’un pouce, & tout traversé de pointes ou rayons aigus. Toutes ces bandes sont jointes l’une à l’autre, & aux deux écailles, par un cuir mêlé de tendons nerveux, qui lui laissent le mouvement fort libre, en sorte qu’il se plie, se tourne, & se met en boule quand il lui plaït. Il a deux rangs de dents tranchantes dans la gueule. Ces écailles tiennent de l’os & du cartilage, mais les moindres dragées les percent ; & s’il y en a qui résistent aux coups de feu, comme le dit Rochefort, ce n’est pas dans les Iles. Cet animal territ comme le lapin, & ne paroît point pendant un tiers de l’année. Il vit de patates, de cannes de sucre, de fruits, de poules & de poulets. Quand les chiens l’atteignent, il retire ses quatre pattes & sa tête dans son ventre, & se met en boule. Il n’y a point de main assez forte pour ouvrir cette boule. Il faut le mettre auprès du feu pour lui faire montrer le nez. Quand il rencontre un homme en son chemin, il fuit devant lui. Si l’homme s’arrête, il fouit en terre, essayant de temps en temps si le trou est assez grand pour se cacher. Lorsqu’on voit qu’il entre plus qu’à demi-corps, il faut frapper des mains & courir sur lui : il se fourre incontinent dedans, & se laisse prendre par la queue sans aucune résistance. Sa chair est blanche, grosse, tendre, délicate, & bien meilleure que celle du cochon de lait : on en fait rôtir de tout entiers : on en met dans le potage ; on en fait des hachis, des pâtés, &c.

Ximénès écrit que les lames ou bandes qui l’environnent, étant mises en poudre subtile, & prises plusieurs fois le poids d’un écu dans une décoction de sauge, provoquent la sueur, & sont un souverain remède contre la vérole ; que le dernier os qui joint la queue au corps, mis en poudre & en masse, avec un peu de vinaigre rosat, guérit la surdité, en mettant gros comme la tête d’une épingle de cette masse avec du coton dans l’oreille. De Rochefort a mal entendu cet Auteur, quand il a dit qu’il falloit mettre un petit os de la queue dans l’oreille avec du coton ; car cet os est vingt fois plus grand que le trou de l’oreille. Quelques uns lui donnent aussi la vertu du dictamne de Crète, qui attire les épines, ou fers de flèches des plaies. P. Du Tertre. Il est faux, suivant le P. Labat, que cet animal ne puisse vivre que dans la Grenade ; que quand on le transporte, sitôt qu’il vient devant l’île de S. Vincent, les forces lui manquent, & qu’il meurt, ou avant que d’arriver à la Martinique, ou en y descendant à terre. Le P. Labat a relevé dans ses Voyages, tom. II, p. 387, cette erreur du P. Du Tertre. Il fait la description d’un Armadelle, qu’il dit avoir vu bien vivant, & bien mangeant au fort S. Pierre de la Martinique en 1704.

ARMADILLE. s. f. Sorte de frégate légère, dont se servent les Espagnols dans les Indes Occidentales. On le dit aussi de la flotte que le Roi d’Espagne entretient dans ce pays-là, ☞ pour la garde de la nouvelle Espagne, & pour empêcher le commerce des étrangers dans ses possessions. Il y a une Armadille à Carthagène, & une à Callao.

ARMAGH, ou ARMAGHI. Ville de l’Ultonie, en Irlande. Armacha, Ardimacha. Elle est presque ruinée. Cette ville a séance & voix au Parlement d’Irlande. Elle est dans le comté d’Armagh. Son Archevêque est Primat de toute l’Irlande. Usserius, dont nous avons une chronologie des Annales de l’ancien Testament, & d’autres ouvrages, étoit Achevêque d’Armagh. Qui est d’Armagh, Armachanus, a, um.

Le comté d’Armagh est une province de l’Ultonie, en Irlande. Comitatus Armachanus. Il a celui de Downe au levant, celui de Lénoch au midi, le lac de Neaug au nord, & les comtés de Montaghan & de Tirone au couchant.

ARMAGNAC. Armeniacensis Comitatus. Contrée de la Gascogne occidentale, avec titre de Comté, que quelques-uns appellent Armanicus Tractus. On prétend que ce sont les peuples de l’Armagnac que César appelle Aremaricos.

☞ ARMANCE. Rivière de France, en Champagne, dans l’Élection de S. Florentin. Elle a sa source près de Chaource, & se perd dans l’Armanson, ou Armançon.

ARMAND. s. m. Nom propre d’homme. Armandus. Armand, Cardinal, Duc de Richelieu, a été un des plus grands hommes que la France ait jamais eus.

Daphnis, Armand n’est plus : Armand qui des neuf sœurs
Aima si constamment les célestes douceurs ;
Qui combla de bienfaits ces filles de mémoire,
Qui les combla d’honneurs, qui les combla de gloire.
Daphnis, Armand est mort. Ménage.

Armand. s. m. Terme de Manége. C’est une espèce de bouillie, ou de remède pour un cheval malade, qu’on lui fait entrer dans le gosier pour lui donner de l’appétit & des forces.

ARMANSON. Rivière de France. Armensio. Elle sort du duché de Bourgogne, près de Sémeur : elle passe en Champagne, & baigne Tonnerre, & se perd dans l’Yonne au-dessus de Joigny.

ARMARIER. s. m. Nom d’un Officier dans quelques Abbayes. Armarius. L’Armarier de l’Abbaye de S. Victor de Marseille a deux Prieurés. P. Hélyot, T. V. p. 165. Il y avoit aussi à Clugni un Armarier qui conservoit dans une armoire, dans le cloître, les livres à l’usage de l’église. Id. p. 100. Ce dernier exemple montre quel étoit l’office de l’Armarier, & d’où vient ce mot, savoir, d’armorium, armoire.

ARMARINTE. s. f. Cachrys, os, ou Libanotis, Cachryophoros. Plante ombellifère, vivace. Sa racine est assez grosse, longue, branchue, laiteuse, & blanche en dedans, acre au goût. Elle pousse plusieurs feuilles, qui se découpent en plusieurs lanières, à peu-près comme celles de la queue de pourceau, mais plus charnues, d’un vert plus brun : d’entre ses feuilles s’élève une tige haute de trois ou quatre pieds, garnie de feuilles pareilles à celles du bas, si ce n’est que les découpures, ou lanières, sont plus longues & plus étroites. Cette tige est cannelée en dehors, fongueuse en dedans, & se divise en quelques branches terminées par des ombelles de fleurs jaunes, auxquelles succède un fruit composé de deux semences un peu plates, semblables à des grains d’orge. Elles sont couvertes d’une matière spongieuse, lisse & ovale dans quelques espèces, cannelées dans quelques autres. La décoction de ces fruits sert à teindre les cheveux en jaune doré.

ARMATEUR. s. m. Pirata, est le commandant de quelque vaisseau armé en guerre, pour courir sur les vaisseaux du parti contraire. C’est une espèce de pirate ; mais qui a pourtant une commission, ou pouvoir de faire un armement. On comprend sous ce nom ceux qui sont intéressés à cet armement, qui arment à leurs frais ce vaisseau, pour aller en course ; & par extension on le dit du vaisseau même. On l’appelle aussi Capre, avec cette différence, que capre ne se dit que d’un très-petit bâtiment destiné à aller en course ; & armateur se dit des plus grands bâtimens corsaires, & armés par des particuliers.

ARMATURE. s. f. Terme de Lithologie. C’est dans les pierres figurées une croûte métallique & luisante qui les couvre, & qui paroit avoir été avec la pierre même. Armatura.

Armature. Terme d’Architecture. On se sert de ce mot dans l’Architecture, pour signifier les barres, clefs, boulons, étriers, & autres liens de fer, dont on se sert pour fortifier une poutre éclatée, & pour retenir un grand assemblage de charpente.

☞ On le dit de même en termes de Fondeurs, de l’assemblage des différentes barres de fer qui servent à porter le noyau d’une statue de bronze.

ARME. s. f. Tout ce qui sert dans le combat, soit pour attaquer, soit pour le défendre. Arma. Arme offensive, comme épée, pistolet, Arma ad nocendum. Arme défensive, comme bouclier, cuirasse. Arma ad tegendum. Arme à feu, le mousquet. Arme de trait, l’arc, l’arbalète. Arme à hampe, la hallebarde, la pique, la lance, &c. Un trophée d’armes. Des armes enchantées.

On s’en sert au pluriel en une plus étroite signification, pour marquer seulement les armes défensives d’un homme de guerre, comme la cuirasse & le pot. Il est allé à la tranchée, tout nu, & sans armes. Il avoit des armes à l’épreuve. Il reçut un coup dans ses armes.

☞ ARME, ARMURE, synonymes. Arme, dit M l’Abbé Girard, est tout ce qui sert au soldat dans le combat, soit pour attaquer, soit pour se défendre. Armure n’est d’usage que pour ce qui sert à le défendre des atteintes ou des effets du coup, & seulement dans le détail, en nommant quelque partie du corps. On dit, par exemple, une armure de tête, une armure de cuisse. Mais on ne dit pas en général les armures, on se sert alors du mot armes.

☞ On n’alloit autrefois au combat qu’après avoir revêtu de son armure particulière chaque partie de son corps, pour empêcher ou diminuer l’effet de l’arme offensive : aujourd’hui on y va sans toutes ces précautions. Est-ce valeur ? Etoit-ce poltronnerie ? Je ne le crois pas ; le goût & la mode ont décidé de ces usages ainsi que de tous les autres, Voyez Armure.

☞ On dit, être bien sous les armes ; pour dire, avoir bonne grâce quand on est armé, quand on a la pique à la main, ou le mousquet sur l’épaule.

Aux Armes. Cri par lequel on avertit une troupe de gens de guerre de prendre les armes. Crier aux armes. Ad arma conclamare.

☞ Faire passer un soldat par les armes, c’est le faire mourir à coups de fusil, par le Jugement du conseil de guerre. Plombeis glandibus necare.

Procope fait une description des armes de l’ancienne Infanterie Françoise, & de leur manière de combattre, qui a assez de rapport à celle que Sidoine Apollinaire en avoit faite plusieurs années auparavant. Ils n’ont, dit Procope, ni arc, ni flèche ; mais un bouclier à une main, & une hache dans l’autre, dont le fer est fort gros & a deux tranchans ; le manche est de bois & fort court ; au premier signal du combat, dès qu’ils sont à portée, chacun lance sa hache contre le bouclier de celui qu’il attaque, le casse, & alors mettant l’épée à la main, il se jette sur lui & le tue. P. Dan. Les armes des anciens François étoient la hallebarde, la massue, la fronde, le maillet, l’angon, la hache, l’épée. Les François étoient si agiles qu’ils tomboient sur leur ennemi aussitôt, pour ainsi parler, que le trait qu’ils lançoient sur lui. Leurs épées étoient si larges, & l’acier en étoit si fin, qu’elles coupoient un homme en deux. Pour armes défensives ils n’avoient que le bouclier, fait d’un bois léger & poli, & couvert d’un bon cuir bouilli. Le Gendre. Jean V, Duc de Bretagne, dans un édit du 20 Mars 1424, fait ainsi le dénombrement des armes en usage en ce temps-là : ceux qui sauroient tirer de l’arc, qu’ils aient arc, trousse, cappeline, coustille, hache ou mail de plomb, & soient armés de fortes Jacques, garnies de laisches, chaînes, ou mailles, pour couvrir les bras ; & ceux qui ne savent tirer de l’arc, qu’ils soient armés de Jacques, & aient cappelines, coustilles, haches, ou bouges ; & avec ce aient paniers de tremble, ou autre bois plus convenable, qu’ils pourront trouver, & soient les paniers longs à couvrir haut & bas. Louis XI, en 1480, ou 1481, introduisit en France les armes des Suisses, c’est-à-dire, la hallebarde, la pique, & les larges épées, qui lui parurent plus propres pour la guerre, avec les arquebuses ; & il commença à abolir l’usage de l’arc & de la flèche. P. Dan. Jusque bien avant dans le XIe siècle, il n’étoit point permis d’entrer dans l’église avec des armes ; on les laissoit à la porte, quand on en avoit.

Il y a une apologie pour M de la Rocheposay Évêque de Poitiers, contre ceux qui disent qu’il est défendu aux Ecclésiastiques de porter les armes. L’Auteur de ce Livre qui parut Sans nom, in-8o, l’an 1615, & que quelqu’un a appelé l’Alcoran de l’Evêque de Poitiers, est le fameux Jean Du Vergier de Haurane, Abbé de S. Cyran. C’est le premier de ses ouvrages. De Vig. Mar.

Nicod dérive ce mot d’une phrase latine, quòd operiant armos, parce qu’elles couvrent les épaules, ou les flancs. Mais il est plus naturel de le dériver du latin arma, que Varron dérive ab arcendo, eò quòd arceant hostes. Et le P. Pezron enchérissant sur Nicod dit, si qu’arme vient du celtique arm, qui signifie la même chose, & que tout cela vient du mot celtique armm, qui signifie toute l’épaule jusqu’au poignet de la main, & d’où est venu armilla, bracelet, qu’on met sur le poignet, & qui étoit beaucoup en usage chez les Celtes & les anciens Peuples ; que d’armm, épaule, s’est fait arme, parce qu’anciennement les armes ordinaires, telles qu’étoient le bouclier, le carquois & les flèches, se portoient sur les épaules. Pezr. Ant. des Celt. Guichard tire ce nom arme, de l’hébreu הרם haram, qui signifie, tuer, perdre, détruire, ravager.

Voyez dans Du Cange un inventaire tiré des registres de la Chambre des Comptes de l’an 1316, où est fait un dénombrement fort curieux de plusieurs armes anciennes du Roi, maintenant inconnues, & hors d’usage. On tient que les premières armes étoient de bois, & qu’on s’en servoit seulement contre les bêtes ; que Nembroth, le premier tyran du monde, les employa contre les hommes ; & que son fils Bélus fut le premier qui fit la guerre, d’où, selon quelques-uns, elle a été appelée bellum. Diodore croit que Bélus est le même que Mars, qui le premier dressa des soldats. Et Josephe dit que Moyse fut le premier qui arma les troupes avec du fer, leur donnant en Egypte le bouclier, & le pot en tête. On s’est servi autrefois d’armes d’airain & même de pierre, avant que les armes de fer fussent en usage.

Armes doubles. s. f. pl. Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on fait des armes doubles. On en voit dans des cabinets d’armes, gardées par curiosité, comme des pistolets ajustés avec une épée, d’autres avec un sabre, d’autres avec une hache d’armes. A la hache d’armes le manche creux fait le canon du pistolet, & à l’épée, ou au plan de la lame, est appliqué le canon ou pistolet vers la garde.

Armes courtoises. Les armes dont on se servait autrefois dans les tournois. C’étaient ordinairement des lances sans fer, des épées sans taillant ni pointe ; souvent des épées de bois, quelquefois des cannes. Le Gendre. Sur la fin du tournoi se faisoient les joutes sans annonce, sans prix, sans défi, & avec des armes courtoises, c’est-à-dire, qui ne blessoient point. Le Gendre.

Armes à outrance. C’étoit un duel, comme les joutes ; mais un duel de six contre six, quelquefois de plus ou de moins, presque jamais de seul à seul. Duel fait sans permission, avec des armes offensives entre gens de parti contraire, ou de différente nation, sans querelle qui eut précédé, mais seulement pour faire parade de ses forces & de son adresse. Un héraut d’armes en alloit porter le cartel, dans lequel était marqué le jour & le lieu du rendez-vous, combien de coups on devoit donner, & de quelles armes on se devoit servir. Le défi accepté, les parties convenoient des juges. On ne pouvoit remporter la victoire qu’en frappant son antagoniste dans le ventre, ou dans la poitrine. Qui frappoit aux bras & aux cuisses, perdoit ses armes, & son cheval, & étoit blâmé par les Juges. Le prix de la victoire étoit la lance, la cotte d’armes, l’épée, ou le casque du vaincu. Ce duel se faisoit en guerre & en paix. A la guerre, avant une action, c’en étoit comme le prélude. On en voit quantité d’exemples, tant dans l’Histoire de S. Louis, que dans celle de ses successeurs, jusqu’au règne de Henri II. Le Gendre.

Le Pas d’Armes. Autre combat qui se faisoit avec plus de cérémonie que celui des armes à outrance. Un Roi d’armes & ses hérauts alloient en faire les annonces à la Cour, dans les grandes villes, & dans les pays étrangers, longtemps avant qu’il fût ouvert. Ce Pas étoit un passage, d’ordinaire en rase campagne ; quelquefois un Chevalier seul, souvent deux ou trois ensemble, entreprenoient par vanité de le défendre contre tous venans. Le Pas étoit formé par une barricade. A la tête de ces barricades étoit l’Ecu des Tenans, & à côté six autres Ecus de couleurs toutes différentes, qui marquoient les divers combats à la lance, à l’épée, au poignard, à la demi pique, à pied, ou à cheval, qu’on étoit prêt de soutenir. Le Gendre. Le Pas de l’arc triomphal fut entrepris ainsi à Paris dans la rue S. Antoine en 1514, aux secondes noces de Louis XII. Id.

Armes. On appelle aussi armes, les défenses naturelles des animaux, les griffes, les dents, les aiguillons, les cornes, les défenses des éléphans, le bec des oiseaux.

Armes. Selon leur signification, en droit, s’entend de tout ce qu’un homme en colère prend dans sa main, pour jeter à quelqu’un, ou pour le frapper. Bâton, pierre, &c.

Armes, signifie aussi la profession, le métier d’un homme de guerre. Militia. C’est le devoir d’un gentil’homme de suivre, de porter les armes.’Veut on qu’un homme né parmi les armes n’ait rien de soldat que quand il voit les ennemis ? Le Ch. de M. Cet homme est né pour les armes. Faire ses premières armes, c’est faire sa première campagne. ☞ Brantôme est le premier Ecrivain qui ait fait usage de cette expression. Après bien des contradictions elle a passé en usage.

Il faut cependant observer que faire ses premières armes, ne se dit que dans un style un peu élevé ; & qu’en parlant de quelqu’un dans un discours familier on devroit plutôt dire, il fit ses premières campagnes dous M. de Turenne. Bouhours.

Armes, se prend encore pour les exploits de guerre, pour les actions éclatantes que l’on fait par le moyen des armes. Facta bellica. C’est uniquement à ses armes qu’il est redevable de sa fortune, & de son élévation.

Achille au sang d’Hector doit l’éclat de ses armes,
Et vous n’êtes tous deux connus que par mes larmes.

Racin.

Armes, se dit aussi pour courage, valeur ; pour cette espèce de vertu qui n’est d’usage que dans la guerre. Il n’y a point de lieu où vous n’ayez signalé vos armes. Ablanc. C’est-à-dire, où vous n’ayez donné des marques éclatantes de bravoure.

☞ On appelle suspension d’armes, la cessation de toutes sortes d’actes d’hostilités entre deux partis opposés. Induci. Voyez Trêve.

On appeloit autrefois, hommes d’armes, des cavaliers nobles, dont on faisoit des compagnies d’ordonnance. Ils portoient des lances, & étoient pésamment armés : leurs chevaux l’étoient aussi.

Héraut d’armes, ou Roi d’armes, &c Poursuivant d’armes. Voyez Héraut, Roi, & Poursuivant, à leur ordre, où ces mots sont amplement expliqués.

Armes, en termes d’Escrime. Maître d’armes, ou Maître en fait d’armes ; celui qui montre à faire des armes, Maître d’Escrime. Lanista. Faire des armes, tirer des armes, s’exercer à l’Escrime. Gladiis præpilatis batuere. Gladiatoriam umbratilem exercere. Avoir les armes belles, faire des armes de bonne grâce.

☞ Le mot d’armes, se dit dans un sens figuré de tout ce qui sert à attaquer, à combattre, à détruire un parti, une opinion, une erreur, une passion. Voilà un habile homme, qui fournit des armes à son ennemi contre soi même. Ablanc. Vous vous servez des armes des hérétiques, que l’Eglise a brisées tant de fois. Nicol. Ces hérétiques ont tant d’erreurs, qu’ils fournissent eux-mêmes des armes pour les combattre. Les bons exemples sont les meilleures armes pour combattre les pécheurs. L’innocence de la vie, la constance dans les tourmens, étoient les seules armes que les martyrs opposoient aux tyrans. Contre un pareil malheur la constance est sans armes.

Armes, se dit dans le même sens de tout ce qui est capable de nous engager, de nous charmer, de nous séduire. Les caresses d’une jolie femme sont des armes bien puissantes.

Ce n’est que par des pleurs que vous me répondez
Vous fiez-vous encore à de si foibles armes ?

Racine.

☞ On dit en ce sens, faire tomber les armes des mains à quelqu’un, le fléchir, l’apaiser. Les soumissions qu’on lui a faites, lui ont fait tomber les armes des mains.

☞ On dit d’une femme extrêmement parée, qu’elle est sous les armes.

☞ On dit proverbialement, faire armes de tout, c’est-à-dire, se servir de toutes sortes de moyens pour réussir dans ses desseins. Les armes sont journalières ; peur dire, que tantôt on bat, & que tantôt on est battu : ce qui se dit aussi figurément de ceux qui ne font pas toujours heureux, ou qui ne réussissent pas toujours également bien. Mettre les armes entre les mains d’un furieux ; pour dire, lui donner quelque chose dont il abuse. C’est le sort des armes ; pour dire, c’est un malheur, un hasard de la guerre. On dit aussi populairement s’escrimer des armes de Samson, c’est-à-dire, jouer des mâchoires, parce que Samson défit les Philistins avec une mâchoire d’âne : on le dit aussi avec les armes de Caïn, par la même raison, à cause, que Caïn tua son frère, à ce que l’on prétend, avec une semblable mâchoire.

Armes. Terme de Blason qui n’a point de singulier. Ce sont des marques d’honneur qui se mettent sur les écus, & sur les enseignes, pour distinguer les états, & les familles nobles. Gentilitii scuti insignia, Gentis symholum, Gentis insigne, Gentis tessera, ou Gentile symbolum, &c. Gentilitia tessera, &c. Scutum tesserarium, hieroglyphicum, ou symbolicum Gentis parma symbolica, scutaria imago, icon, tessera. Scutarium insigne. Le blason est la science qui apprend à connoitre, & à bien parler des armes. Trois fleurs-de-lis d’or en champ d’azur, sont les armes de France. Les aigles sont les armes de l’Empire. Il a fait un tel son héritier, à la charge de porter son nom & ses armes. Un tel est chef du nom & des armes d’une telle maison. Armes pleines, ce sont celles qui sont entières, nettes & nues, d’une pièce, & d’un tenant, qui n’ont aucunes brisures, divisions, altérations, ni mélanges. Insignia pura, integra, plena. Les armes de France sont armes pleines, pures, entières. Armes brisées, infractæ, violatæ, temeratæ imaginis symbolum scutarium, oblisæ superficiei typus tesserarius. Les armes des Princes du Sang, comme Anjou, Orléans, Bourbon, ne sont pas pures & pleines, mais brisées du bâton, qui autrefois, pour exprimer mieux la brisure, portoit de biais sur les lys. Monet. Dans l’ancienne coutume de Normandie, on trouve que les armes pleines d’un chevalier ou de celui qui possédoit un fief de haubert, étoit le cheval, le haubert, l’écu, l’épée, & le heaume : & pour celui qui n’étoit point chevalier, ou qui n’avoit point de fief de haubert, c’étoit le roucin, le gamboison, le chapel & la lance. Armes chargées, sont celles qui sont pures & pleines, & auxquelles on a ajouté de nouvelles pièces pour marque d’honneur, & en vue de quelque belle action. Insignia adjectione distincta. Il y a aussi des armes parties, partita. Ecartelées, Quadripartita. Coupées, Transversè bipartita, &c. expliquées à leur ordre. Armes fausses, sont celles qui ne sont pas selon les règles du blason. comme lorsqu’on met métal sur métal, & couleur sur couleur. Adulterina, adulterinum, spurium, improbum, vitiosum, insolens scutum tesserarium. Les armes seroient fausses en France, qui auroient au champ, ou au blason, autres métaux, pannes, couleurs, que les coutumiers de cette nation, ou bien si les matériaux d’armes étoient autrement alliés & composés entre eux que ne porte notre usage. Les cas privilégiés exemptent de fausseté les armes de certains grands personnages composées de métal sur métal, couleur sur couleur, ès pièces notables de l’écu. Monet. On les appelle aussi des armes à enquerre. Insignia de quibus inquirendum. Armes vraies, légitimes, pures. Gentilis scuti symbolum genuinum, germanum, legitimum. Les armes les plus simples & les moins diversifiées sont les plus nettes & les plus nobles. C’est par cette raison que Garcias Ximenés, premier Roi de Navarre, & ses successeurs portèrent quelques siècles, de gueules simplement sans aucune figure ; & la maison d’Albret, issue de ces Rois, continua les mêmes armes jusqu’à Charles VI, qui les leur écartela de semé de France. Monet.

On appelle armes parlantes, celles où il y a quelques figures qui font allusion avec le nom de la famille. Vocalia insignia, tesseræ eponymæ, loquentes, paronymæ, loquaces, synonymæ. Comme De la Tour d’Auvergne, qui a une tour ; de Créqui, qui a un créquier, de la maison de Prado en Espagne, qui a pour champ un pré ; de la maison de Mailli, qui a des maillets. La plupart des Auteurs tiennent que ce sont les plus nobles & les plus légitimes, comme il se prouve par une infinité d’exemples rapportés par les Pères de Varenne & Menestrier. Mais elles sont moins nobles quand elles tiennent du Rébus de Picardie, comme il y en a plusieurs ; c’est-à-dire, lorsqu’il y a une multiplicité de pièces qui composent le nom de celui qui les porte ; parce que les anciens Seigneurs croyoient que leurs noms étoient assez illustres pour se faire connoître par eux-mêmes, au lieu de les expliquer par une multiplicité de figures & de blasons. Guillot Lymare Charbonnier, portoit de sable à la coquille de pourpre, avec cette devise, De charbon chevance ; c’est-à-dire, bien, richesse, Ex carbone res, ou opes.

Armes a enquerre, sont celles où il y a quelque chose qui est contre les règles ordinaires du blason, & qui donne curiosité de s’enquérir pourquoi on les a faites ainsi. Tesseræ, ou symbolæ, ou scutariæ imagines postulatitiæ, ou postulatoriæ ; extraordinarii nexùs metallici symbolum, scutarium ; inusitatæ commissionis pigmentaria tessera, scutaria. Godefroy de Bouillon porta d’argent à la grande croix potencée d’or : ce furent des armes à enquerre, qui lui furent données par les Seigneurs François qui l’accompagnoient, pour marque de sa valeur incomparable à la conquête du royaume de Jérusalem, & pour donner sujet de la connoître à ceux qui s’enquerroient de la nouveauté de ces armes. Monet. Les armes de la maison de Montmorenci furent aussi des armes à enquerre : jusqu’à Matthieu II, c’étoit une grande croix d’argent dans un champ d’or. Elles étoient fondées sur la prérogative de cette illustre famille, qui est d’avoir donné à la Gaule les premiers Chevaliers chrétiens.

Armes d’une pièce d’un tenant de blason ; ce sont celles qui ne sont point parties ni en long, ni en large, unius paginæ, unius & continentis plagulæ, haud intercisi laterculi scutarium hieroglyphicum.

Armes parties, armes tiercées, armes écartelées, armes coupées, taillées, armes tranchées. Voyez ces mots en leur place ; & en général Armoiries.

Armes, ou Armoiries diffamées, ou déchargées. Ce sont des armes auxquelles on a retranché quelque chose, pour marque de honte & par punition. Telles furent celles de Jean d’Avénes, qui en présence de saint Louis, avoit injurié sa mere Marguerite, Comtesse de Flandre. Il fut condamné à porter le lion de ses armes morné, c’est-à-dire, sans ongles & sans langue.

Le Cap des Armes, capo delli armi. Cap du royaume de Naples, en Italie. Leucopatra, regium ou armorum promontorium. Il est sur la côte méridionale de la Calabre Ultérieure, précisément au point qui regarde la Sicile. ☞ Nombre considérable de troupes d’infanterie & de cavalerie jointes ensemble sous la conduite d’un général, pour agir contre l’ennemi.

ARMÉE. s. f. Ce qui regarde l’armée de terre. Exercitus, copiæ. Pour l’armée de mer, ou navale, c’est une certaine quantité de vaisseaux de guerre, équipés & montés par un certain nombre de troupes commandées par un amiral, aidé de plusieurs officiers qui sont sous lui. Classis. ☞ Quand le nombre des vaisseaux ne passe pas douze ou quinze, on dit une escadre. Le mot de flotte convient mieux à un certain nombre de vaisseaux réunis pour naviger ensemble. Armée composée de vieilles troupes. Veteranorum exercitus. Armée composée de gens ramassés à la hâte & sans choix, Tumultuarius, collectitius exercitus. Armée rangée en bataille. Acies instructa. La tête, la queue. Primum, extremum agmen. Les ailes. Alæ, cornua. Le corps de l’armée. Acies. Lever, mettre sur pied une armée. Entretenir, faire subsister une armée. L’armée marche, l’armée avance, l’armée campe. Faire la revue d’une armée. Commander une armée. Défaire une armée. Recueillir, rassembler les débris d’une armée. Cette armée si florissante, & qui avoit été levée avec tant de frais, lut entièrement défaite. L’armée navale étoit belle en apparence, mais dénuée de soldats & de matelots. L’état de l’armée, c’est l’état des dépenses qui se doivent faire, tant pour lever une armée, que pour l’entretenir de solde, de vivres & de munitions. On tient que l’armée que Xerxès mena en Grèce, étoit de onze cent mille hommes. Nos armées ne passent pas, pour l’ordinaire, vingt mille hommes, disoit un Lacédémonien ; mais à nous voir dans la mêlée, à compter les morts de nos ennemis, on diroit que nous sommes toujours plus de cent mille hommes.

☞ On appelle armée royale, une armée nombreuse qui marche avec un train d’artillerie.

Armée du siége, celle qui est occupée à faire un siége.

Armée d’observation, la partie d’une armée qui couvre un siège, & s’oppose aux ennemis pendant que l’autre attaque la place.

Armée du secours, celle qui marche pour secourir une ville assiégée.

☞ Dans l’écriture. Dieu est appelé le Dieu des armées.

Les armées de France, sous les enfans de Clovis, étoient composés de divers corps de troupes que fournissoient chaque province, à peu près comme nous voyons aujourd’hui les armées de l’Empire, composées des troupes des cercles, qui fournissent chacun leur contingent. P. Dan. Les armées étoient autrefois composées des vassaux des Seigneurs, qui faisoient plus de deux cent mille hommes. Quand chacune de ces troupes avoit servi vingt-cinq, trente, quarante jours, selon l’usage du pays, ou selon les devoirs du fief, les Seigneurs les ramenoient chez eux. Le Gendre. Le gros des armées françoises sous les Mérovingiens, n’étoit que de l’infanterie. Sous Pépin & sous Charlemagne il y avoit dans les armées un nombre à peu près égal de gens-d’armes, & de fantassins ; mais depuis que dans la décadence de la Maison Carlovingienne, les fiefs furent devenus héréditaires dans les familles, les armées de la nation n’étoient presque que de cavalerie. Id.

Armée, se dit aussi figurément d’une multitude. Multitudo. J’avois prié trois personnes à dîner, ils sont venus une armée. Expression familière.

ARMELINE. s. f. Peau qui vient de Laponie, & qui est très-fine & très-blanche, & fort propre à faire de belles fourrures.

☞ ARMEMENT. s. m. Corps considérable de troupes, fourni de toutes sortes de provisions, soit pour le service de terre, soit pour le service de mer. Le Roi fait un grand armement ; il augmente le nombre de ses troupes, & fait de grands amas de munitions de guerre & de bouche. Armement par terre. Armement sur mer, ou naval. Armement par mer & par terre. Apparatus belli. Belli comparatio.

Armement, se dit aussi de l’équipement des vaisseaux de guerre, de la distribution ou embarquement des troupes qui doivent monter chaque vaisseau. Classis instructio. On le dit aussi de l’équipage même. Navales copiæ. Tout l’armement se révolta contre le capitaine. L’état d’armement est la liste de tous les officiers qui doivent servir ; ou de tous les agrès & apparaux que l’on juge nécessaires.

Armement, se dit aussi des vaisseaux marchands, que l’on équipe pour les voyages de long cours.

Armement, se dit aussi des frais nécessaires pour équiper un vaisseau. Cet armement a tant coûté ; & même du temps de l’armement. L’armement ne durera que quatre mois.

☞ Dans une fable on a employé le mot d’armement pour arme. Arma.

Amour voulant lever un régiment,
Battait la caisse autour de ses domaines :
Soins & soupirs étaient ses capitaines
Flèches & dards étaient son armement.

Ces mots viennent d’arma, qui signifie armes.

☞ ARMENCE. Vallée de Suisse, au pays de Valais, du côté gauche du rhône. Le lieu principal est Armence, qui donne le nom à la vallée.

ARMÉNIE. Armenia. Grand pays de l’Asie, entre la Syrie, l’Asie mineure, ou Anatolie, la Mésopotamie & la Géorgie. Elle se divise en grande & en petite Arménie. La grande Arménie étoit autrefois bornée au midi par les monts Taurus & Niphates, qui la séparoient de la Mésopotamie & de la Syrie ; au levant par les monts Caspiens & la mer Caspienne ; par la rivière de Kur, ou de Cyrus, avec les monts appelés Moschiques au septentrion ; au couchant par l’Euphrate & une petite patrie de la mer noire, qui la séparoient de l’Arménie mineure. La petite Arménie, Arménie mineure, minor Armenia, étoit une partie de l’ancienne Cappadoce dans l’Asie mineure. Elle avoit au couchant & au nord le reste de la Cappadoce ; au levant de la grande Arménie, l’Euphrate entre deux au midi la Cilicie & la Syrie. L’Antitaurus partage l’Arménie mineure en deux. La partie méridionale porte aujourd’hui le nom de Bozoch, & la septentrionale celui de Peggian. L’une est appelée le Beglerbeglic de Mara, & l’autre le Beglerbeglic de Siwas.

ARMÉNIEN, ENNE s. m. & f. Armenus, a. Nom de peuple & de secte. La plupart des Arméniens depuis plus de cent ans n’ont aucune demeure arrêtée. Depuis que Scha-Abas, Roi de Perse a conquis leur pays, ils se sont dispersés en divers lieux de la Perse, & des états du Grand-Seigneur, & même en quelques endroits de l’Europe. Leur principal emploi est la marchandise. M. le Cardinal de Richelieu avoit eu dessein d’en établir en France pour augmenter le commerce ; & ce fut dans cette vue qu’il y fit imprimer quelques livres en langue arménienne. Les Arméniens sont proprement les peuples de la grande Arménie, qui sont bons, simples, sans façon, épargnans, industrieux, & qui s’attachent fort au commerce. Maty.

Par rapport à la religion, on distingue les Arméniens francs & les Arméniens schismatiques. Les premiers sont catholiques & soumis au Pape. Ils ont un Archevêque à Naksivan en Perse, & un autre à Lembourg en Pologne. Les autres ont deux Patriarches, l’un à Erchémiazin, monastère près de la ville d’Irva, l’autre à Cis, ou Sis, dans la Natolie. Uscan Evêque d’Uscouench étoit à Amsterdam en l’année 1664, où il a imprimé quelques livres arméniens, & entre autres une Bible arménienne pour en faire commerce. Il avoit eu cette commission de son Patriarche, parce que les Bibles en cette langue n’étant auparavant qu’en manuscrit, étoient fort rares & fort chères. Il passa d’Amsterdam à Paris, où il obtint de M. Séguier, Chancelier de France, un privilège pour imprimer les livres arméniens de ceux de sa nation. Et en effet, depuis ce temps-là ils ont eu une Imprimerie arménienne à Marseille, où ils se sont établis pour le commerce.

M. Simon, qui a connu cet évêque Arménien, dit au chap. 22 de son Histoire de la créance & coutumes des nations du Levant : Que la cour de Rome fut surprise de ce qu’on lui avoit accordé si facilement en France un privilège pour faire imprimer toutes sortes de livres arméniens ; parce qu’il se pouvoit faire qu’il imprimât des livres qui appuyassent leurs erreurs. Mais outre que leur privilège étoit limité, & qu’il ne leur permettoit d’imprimer rien qui ne fût orthodoxe, leurs livres, avant que d’être mis sous la presse, étoient revus par un homme que Rome avoit envoyé exprès pour cela à Marseille, & qui en conféroit avec le grand-Vicaire de l’Evêque. Ce qui a introduit quelques changemens dans leurs livres, & dont mêms ils se sont plaints, ayant porté cette affaire jusqu’au conseil du Roi.

A l’égard de leur croyance, Galanus, clerc régulier, en a traité fort au long, dans un livre qu’il a fait imprimer à Rome en arménien & en latin, touchant la réunion de l’Eglise arménienne avec l’Eglise romaine. Cet ouvrage est divisé en deux parties, dont la première n’est qu’un extrait des Histoires des Arméniens. Mais comme ils ont été partagés en deux sectes depuis plusieurs siècles, & qu’ils ont eu souvent recours à Rome, leurs Histoires ne sont pas toujours exactes. Par exemple, ils produisent un acte de réunion entre l’Eglise romaine & l’arménienne, sous l’Empereur Constantin & Tiridate Roi d’Arménie. Sylvestre occupoit alors le siège de Rome, & Grégoire, qui est le grand Patriarche des Arméniens, occupoit celui d’Arménie. Mais il y a plusieurs choses dans cet acte qui paroissent fabuleuses. Il y a bien de l’apparence qu’il a été fabriqué, au moins pour la plus grande partie, dans les siècles suivans, & principalement au temps du Pape innocent III, lorsque l’Eglise Arménienne voulut se réunir avec l’Eglise romaine. Cependant les Arméniens, comme l’a remarqué Galanus, se servent de cet acte pour montrer l’antiquité de leur Patriarche, qui fut établi, selon eux, par le Pape Sylvestre, & ils l’ont même produit dans leurs disputes contre les Grecs.

Les Arméniens sont de la secte des Monophysites, qui ne reconnoissent qu’une nature en Jésus-Christ ; & quoiqu’ils soient la plupart fort ignorans en matière de Théologie, ils ne laissent pas de parler assez raisonnablement du mystère de l’incarnation, & du concile de Calcédoine, qu’il ne reçoivent point. Quelques missionnaires que Brérewood a copiés, leur attribuent plusieurs erreurs dont ils sont fort éloignés : il n’est pas vrai qu’ils nient la présence réelle dans le sacrement de l’Eucharistie, comme le rapporte Brérewood, après un méchant Auteur ; car les Arméniens & les autres orientaux n’ont jamais eu aucune dispute entre eux sur ce mystère, & comme ils n’ont point eu de Bérengariens à combattre, ils sont demeurés dans les termes généraux du changement des symboles au corps & au sang de notre Seigneur. Toute la dispute qu’ils ont avec les Grecs au sujet de l’Eucharistie, consiste en ce qu’ils ne mettent point d’eau avec le vin en célébrant la Liturgie, & qu’ils consacrent en pain sans levain à l’imitation des Latins.

Brérewood accuse aussi, sans raison, les Arméniens & les Abyssins de ne point manger des animaux qui sont estimés immondes dans la loi de Moyse. Ce qui a pu donner occasion à cette croyance, c’est que toutes les sociétés chrétiennes d’Orient s’abstiennent de manger du sang & des viandes étouffées, sans qu’il y ait en cela aucune superstition. On pourroit reprendre avec plus de justice dans les Arméniens, l’attache scrupuleuse qu’ils ont à de certains jeûnes qui sont chez eux très-fréquens. On croiroit, à les entendre parler des jeûnes, que toute la religion consisteroit à jeûner.

L’ordre monastique est dans une grande vénération parmi les Arméniens, depuis qu’un de leurs Patriarches, nommé Niersès, y introduisit celui de S. Basile. Mais une partie d’entre eux s’étant réunie à l’Église romaine, ils ont changé leur ancienne règle, pour suivre celle des religieux Dominicains. Celui qui donna occasion à cette reformation, fut un religieux Dominicain, nommé Barthélemi, qui fit de grands progrès dans l’Arménie sous le Pape Jean XXII. Il attira à lui par les prédications plusieurs moines, dont il se servit pour réunir ensemble les deux Églises.

Ce fut en ce temps-là que l’Ordre de S. Dominique fut établi dans l’Arménie, & l’on appela les Moines Frères-unis, à cause de la nouvelle réunion. Ces Frères-unis s’acquirent en peu de temps beaucoup de réputation. Ils bâtirent des monastères, non-seulement dans l’Arménie & dans la Géorgie, mais aussi au delà du Pont-Euxin, & principalement à Caffa, qui étoit alors de la dépendance des Génois. Mais depuis que les Turcs & les Persans se sont rendus les maîtres de ces pays-là, le nombre des Frères-unis est fort déchû, & il en reste assez peu qui se sont retirés dans la province de Nascivan, en la grande Arménie ; & enfin se voyant réduits à l’extrémité, ils le sont unis avec les religieux Dominicains de l’Europe. Ils sont maintenant soumis au général de cet Ordre, qui y envoie un supérieur provincial.

L’Auteur de l’Ambassade de D. Garcias de Silva Figuéroa, en Perse, dit que la religion des habitans de la nouvelle Zulpha, qui sont Arméniens de naissance, est la chrétienne ; mais qu’il y en a fort peu qui reconnoissent le Pape, retenant presque tous leur ancienne religion ; qu’il y en a cependant quelques-uns, non-seulement dans Zulpha, mais aussi parmi ceux qui sont demeurés dans la grande Arménie à deux journées de la ville d’Erva, qui en est la capitale, particulièrement en un certain canton composé de 12 villages auprès de la ville de Maxivan, & que la plupart reconnoissent l’Église latine ; que l’on voit même en quelques-uns de ces villages des couvents de l’ordre de S. Dominique, aux Supérieurs desquels ils déférent & obéissent selon la discipline de l’Église romaine ; & qu’encore qu’ils aient un Evêque de leur nation Arménienne, il est aussi de même ordre, & n’est point marié, mais célèbre la Messe, & dit les même prières que ceux du même ordre ont coutume de dire en Europe ; que ces Arméniens sont appelés Francs, à cause de la religion catholique romaine qu’ils professent ; que les guerres ont fort désolé cette province, qu’il ne pense pas qu’il y reste plus de mille de ces Arméniens catholiques de tous âges, & de l’un & de l’autre sexe ; qu’environ un an avant que D. Garcie, Ambassadeur, arrivât à Ispahan, c’est-à-dire, en 1617, le Pape Paul V y avoit envoyé un religieux Dominicain, nommé F. Paul-Marie, homme savant, & de vie exemplaire, afin qu’il rétablît ce que le temps avoit altéré ou aboli aux cérémonies de l’Église latine ; que ces Arméniens se sont toujours conservés en la profession de la Religion romaine depuis le temps d’Ussum-Cassan roi de Perse, lequel avoit épousé Despoina, fille de Calojoannes Empereur de Trebizonde, & par conséquent chrétienne du Rit Grec ; que cette Princesse conserva sa religion, & favorisa toujours les chrétiens d’Occident, & particulierement les Ambassadeurs que la République de Venise envoya en ce temps-là à Ussum-Cassan, comme aussi le Pape Xiste IV, & Philippe Duc de Bourgogne ; que ce fut Barthélemi de Boulogne, le Dominicain dont nous avons parlé, qui sous Jean XXII, avoit ramené au giron de l’Église latine les villages dont nous avons fait mention ; que les Dominicains y avoient alors (en 1618) 3 ou 4 petits couvents, dont le supérieur est Evêque de Maxivan.

Les Arméniens font l’Office ecclésiastique en l’ancienne langue arménienne, qui est une langue rude & peu connue. Le peuple n’entend point cet ancien arménien, qui différe de l’arménien d’aujourd’hui. Ils ont aussi toute la Bible traduite en cette langue, & leur traduction a été faite sur la version grecque des Septante. Ils l’attribuent à quelques-uns de leurs docteurs qui vivoient vers le temps de S. Jean Chrysostôme, & entre autres à Moyse nommé le Grammairien, & à David surnommé le Philosophe. Enfin, ils font auteur de leurs caractères arméniens un saint Hermite nommé Mesrop, qui les inventa dans la ville de Balu, proche de l’Euphrate. Ce Mesrop vivoit en même temps que S. Chrysostôme. Leurs lettres majuscules sont des hiéroglyphes. Elles ont trois noms différens, selon qu’elles sont figurées. On les appelle florentes litteræ, lorsqu’elles représentent quelques fleurs. Quand elles représentent des animaux, des oiseaux, ou des reptiles, on les nomme Litteræ Belluinæ. Enfin le nom de Lettres capitales, Capitales litteræ, se donne à celles qui ne sont, à ce qu’il paroît à la simple vue, que le trait ou l’esquisse grossier des précédentes. Le Traducteur de M. Warburthon pense que ces lettres majuscules sont de vrais hiéroglyphes, qui étoient en usage chez les Arméniens avant l’invention des caractères alphabétiques : & qu’on pourroit comparer les lettres capitales, qui retiennent le contour des lettres majuscules, à cette espèce d’écriture courante des hiéroglyphes, dont se servoient les Egyptiens. Le P. Kircher croit au contraire, que ces lettres sont un effet de l’imagination des Peintres. L’alphabet éthiopien conserve aussi des hiéroglyphes. Essai sur les hiéroglyphes, p. 41. Toutes ces particularités touchant les Arméniens se trouvent plus au long dans les deux volumes composés par le P. Calanus, & dans l’Histoire des Religions du Levant, publiée par le sieur de Moni. Raynaldus a aussi inséré dans ses Annales plusieurs actes curieux qui regardent les mêmes Arméniens. On trouve de plus à la fin de l’Histoire du sieur de Moni, une notice des Églises qui dépendent du Patriarche d’Arménie résident à Egmiazin ; laquelle notice a été dictée à M. Simon par Uscan Evêque d’Uscouanch, & Procureur-Général de son Patriarche. Voyez aussi l’Ambassade de Dom Garcias de Silva Figuéroa en Perse, p. 194 & 282, de la traduction de Wicquefort.

Arménien, enne. adj. Qui est de l’Arménie, qui appartient à l’Arménie. Armenus. Le Rit arménien. La Liturgie arménienne. La langue arménienne.

Arménienne. s. f. Pierre précieuse, qui est en quelque façon semblable au lapis, sinon qu’elle est plus tendre & n’a aucune veine d’or. On l’appelle aussi, Vert d’azur, à cause qu’il y a du vert mêlé avec du bleu. On la trouve dans le Tirol, dans la Hongrie, & dans la Transylvanie. Elle est en usage pour les ouvrages, & sert aussi en Médecine.

La terre arménienne, Armeniaca terra, c’est la même chose que l’arsénic rouge, selon Hoffman.

La couleur arménienne, Armenium pigmentum. Il ne faut point la confondre, dit Hoffman, avec la terre arménienne. C’étoit un minéral ou ingrédient friable, dont les Peintres se servoient autrefois pour peindre en bleu, Voyez Saumaise sur Solin, p. 1154 & suiv.

ARMÉNIQUE. Armenicus, Armeniacus. Surnom, & titre d’honneur que l’on donna à Néron, à M. Aurèle & à Luce Vère, comme le témoignent Capitolin, & les médailles, sur lesquelles on lit, NERO CÆSAR AUGUSTUS ; & au revers : ARMENIAC. Et, ANTONINUS AUG. ARMENIACUS. Et, IMP. L. AUREL. AUG… ARMEN. ou ARMENIA. ou ARMENIACUS. Capitolin dit Armenicus, & en françois il faut dire, Arménique, & non pas Arméniaque.

ARMENNA. Nom que l’on donne aux restes de l’ancienne Médiobriga. On les voit dans l’Alentéjo, en Portugal, près de l’Estramadure d’Espagne, & du bourg de Marvaon.

ARMENSEQUI, ou ARMENZA. Armentia alba. Autrefois Ville, & Siége épiscopal, aujourd’hui village d’Espagne, dans l’Alava, contrée de la vieille Castille.

ARMENTIÉRE. Armentariæ. Plusieurs écrivent Armentiéres, & d’autres Armentiers. C’est une ville des Pays-bas, dans la Flandre & sur la Lys. Armentières est restée à la France depuis la paix d’Aix la-Chapelle en 1668.

ARMER. v. a. Fournir un soldat d’armes convenables pour le combat. Armare, Armis instruere. Il a coûté tant pour armer une compagnie ; pour fournir des armes aux soldats qui la composent. ☞ Anciennement les Barons armoient leurs vassaux.

Armer, signifie aussi revêtir d’armes. Armis instruere. Armer quelqu’un de pied en cap, de toutes pièces. Soldat armé de toutes pièces. Cataphractus miles.

Armer, donner occasion de prendre les armes. L’intérêt de la Religion a souvent armé les peuples les uns contre les autres.

Armer, se dit des armes mêmes, du fusil & du mousquet, qu’on met en état pour tirer. Parare, Disponere. En garnison, dès que la retraite est battue, & qu’une Sentinelle veut reconnoître quelqu’un à la portée de l’entendre, il doit crier d’une voix forte & mâle, Qui va là ? en présentant ses armes le pouce sur le chien du fusil, afin d’être prêt, s’il en étoit besoin, à l’armer, pour tirer sur ceux qui voudroient le surprendre. Bombelles. Le Sergent fera avancer les soldats ayant leur fusil sur le bras gauche, & le pouce droit sur le chien, pour être prêts à l’armer en cas de besoin. Id.

Armer, employé absolument, signifie se préparer à la guerre, lever des troupes, des soldats. Adornare bellum. Copias cogere. Milites colligere. On arme de tous côtés. Les Princes Chrétiens arment de toutes parts. Dans ce sens il est neutre.

En termes de Marine, armer un vaisseau, signifie, l’équiper de toutes les choses nécessaires, comme vivres, munitions, soldats, matelots, pour voyager, & pour combattre. Armer un canon, c’est y mettre le boulet. Armer les avirons, c’est les mettre sur le bord de la chaloupe prêts à servir.

Armer, dans les arts & métiers. Garnir une chose avec une autre, pour lui donner de la force ou la rendre plus propre à l’usage auquel elle est destinée. On arme une pierre d’aiman pour augmenter sa force, en appliquant à chacun de ses pôles une plaque d’acier terminée par un bouton. Magnetim chalybe instruere, armare. Voyez au mot Aiman les causes physiques de cette augmentation de forces dans un aiman armé. On arme une poutre de plusieurs bandes de fer pour la fortifier. On arme une meule de moulin de liens de fer, une massue de pointes de fer.

☞ On le dit à peu-près dans le même sens de tout ce qui peut servir de défense. Il arma ses tours de parapets & de claies en flanc & sur le devant. Munire, communire.

☞ En termes de Fauconnerie, armer l’oiseau, c’est lui attacher des sonnettes.

Armer, dans un sens figuré, signifie rendre plus fort, plus redoutable. Pour contenir les hommes dans leur devoir, il a fallu leur montrer un vengeur tout puissant, armé de foudres & d’éclairs. S. Evr.

L’ardeur de se montrer, & non pas de médire,
Arma la vérité du vers de la satire. Boil.

Quand je verrai ses yeux armés de tous leurs charmes,
Me souviendrai-je alors de mon triste devoir. Rac.
Il faut d’un noble orgueil armer votre courage. Id.

Armer, signifie encore au figuré, animer, irriter, soulever. Irritare, commovere, incitare. Le Roi est devenu si redoutable, qu’il a armé la jalousie de tous ses voisins contre lui. Ses vices ont armé tous les honnètes gens contre lui. Armer le fils contre le père, l’ami contre l’ami.

Et qu’ont produit mes vers de si pernicieux
Pour armer contre moi tant d’auteurs furieux ?

Boil.

Armer, avec le pronom personnel, signifie au propre, se munir d’armes offensives ou défensives ; quelquefois prendre les armes, faire la guerre. Dans la première acception, on dit s’armer d’une épée, d’un bâton, d’un pistolet. Munire se, instruere. Dans la seconde on dit s’armer contre son Souverain. Il n’est jamais permis à des sujets de s’armer contre leur Prince. Arma capere.

s’Armer, dans le sens figuré, signifie se fortifier par avance, se munir, se précautionner contre tout ce qui peut nuire ou incommoder, contre le chaud, contre le froid, contre les injures de l’air, &c. Munire se, se defendere, protegere. Il s’est armé d’une robe fourrée contre l’hiver, d’un manteau contre la pluie.

☞ On dit à peu-près dans le même sens, s’armer contre les accidens de la fortune, contre les disgrâces ; se précautionner contre les événemens fâcheux qui peuvent arriver. S’armer de patience, de résolution, de courage ; se préparer à soutenir avec courage tout ce qui peut arriver. S’armer de la prière, s’armer du signe de la croix : employer ces moyens pour, &c. Adhibere.

Armer, en termes de Manége, se dit d’un cheval qui se défend contre le mors, & qui pour cela courbe son encolure jusqu’à appuyer les branches de la bride contre son poitrail, pour défendre ses barres & sa bouche, & ne pas obéir à la main du cavalier. Quand un cheval s’arme, il le faut galoper fort vîte, & le faire aller terre-à-terre, pour lui faire passer ses fantaisies. Newc. J’ai eu des chevaux qui s’armoient contre le mors autant qu’il étoit possible, & qui étoient aussi sensibles à la main & aussi légers qu’on pouvoit désirer. Id. On dit aussi qu’il s’arme des lèvres, quand il couvre ses barres avec ses lèvres ; afin de rendre l’appui du mors plus sourd & moins sensible. On dit aussi, que la lèvre arme la barre ; pour dire, qu’elle la couvre.

ARMÉ, ÉE. part. Il a les significations de son verbe, en latin comme en françois.

On dit d’un vaisseau, qu’il est armé en guerre, armé en course ; pour dire, qu’il est équipé pour la guerre, ou pour la course ; qu’un Prince est demeuré armé ; pour dire, qu’il n’a point licentié ses troupes après la paix ; & d’un cavalier, qu’il est armé à crû. Légérement armé, ou armé à la légère, pesamment armé. Levis, gravis armuturæ. Armé contre le froid. Armé de constance, de griffes, de dents. Un aiman armé, c’est un aiman garni de deux petits morceaux de fer, qui en augmentent la vertu. On dit aussi des poissons, qu’ils sont armés ; pour dire, qu’ils sont couverts d’écailles. On dit à la chasse, qu’un chien est armé, quand il est couvert pour attaquer un sanglier.

Armé, en termes de Blason, se dit des animaux à quatre pieds, & des dragons, en parlant de leurs ongles, de leurs dents, & des autres parties que la nature leur a donnés pour défenses. Unguibus armatus, instructus. Le lion blasonne armé, lorsque ses ongles sont d’un autre émail que celui de son corps. On le dit aussi de la défense d’un sanglier. On le dit aussi des griffons, des aigles, & même des flèches & autre armes dont les pointes sont d’autres émail que le fût.

On dit proverbialement d’un poltron, qu’il est armé jusqu’aux dents.

Poisson armé. Il y a le long de toutes les côtes des Indes Orientales diverses sortes de poissons, qui n’ont