Dictionnaire de théologie catholique/ADAM

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 190-199).
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1. ADAM, nom hébreu signifiant de soi homme, comme le mot grec àvôptouo ; et le mot latin homo, mais devenu par appropriation le nom personnel de celui qui fut le premier homme et le père du genre humain. Prise dans son ensemble, la monographie d’Adam présente des aspects multiples qui donnent lieu à des études de détail. On peut voir en lui le père naturel ou propagateur du genre humain, et cette considération mène à tout ce qui se rapporte à l’homme en général, à l’espèce humaine : antiquité, nature, origine, état primitif, unité d’espèce et de souche, etc. ; tout ce courant d’idées appartient à l’article Homme. On peut ensuite voir dans Adam le chef moral ou juridique de l’humanité élevée gratuitement à l’état de justice originelle, placée par Dieu dans l’heureux séjour du paradis terrestre, puis déchue par la faute de nos premiers parents ; questions de première importance, mais qui reviennent aux articles JUSTICE ORIGINELLE, PARADIS TERRESTRE, PÉCHÉ ORIGINEL. Knlin, on peut voir dans Adam cet être individuel qui sortit immédiatement des mains du créateur, et eut sa vie distincte, personnelle ; et là encore il offre matière à une assez large étude théologique. On peut la ramener aux idées suivantes :
I. Création du premier homme.
II. Son élévation à l’état surnaturel.
III. Son péché.
IV. Son repentir et son salut.
V. Lieu de sa sépulture.
VI. Adam figure de Jésus-Christ.

I. Création du premier homme.

Le livre de la Genèse énonce clairement la création d’Adam, I, 27 : Et creavit Deus hominem ad imaginem suam ; et il, 7 : Forniavit igitur Dominus Deus hominem de limo terrai. L’interprétation catholique de ces passages établit, comme dogme de foi, la création proprement dite de l’àme d’Adam, et comme doctrine commune aux Pères et aux théologiens, une action divine immédiate dans la formation de son corps. Gen., i, 26, 28 ; ii, 7. Voir Transformisme.

I. les anges ont-ils eu part a sa création ?

Ceci supposé, on s’est demandé si cette action immédiate de Dieu excluait toute coopération des anges dans la formation du premier corps humain. En principe, la réponse dépend du sens qu’on donne à la question. Une coopération qui consisterait à organiser ou à former un vrai corps humain est inadmissible ; dans des limites inférieures, elle ne serait pas impossible, comme l’insinue saint Augustin, De Genesi ad litt., l. IX, c. XV, P. L., t. xxxiv, col. 403, et c’est là également tout ce qu’affirme saint Thomas d’Aquin, Sum. theol., I a, q. xci, a. 2, ad l um : Potuit tamen fieri, ut aliquod ministerium in formalione corporis primi hominis angeli exhibèrent, sicut exhibebunt in ultima resurrectione, pulveres colligendo. Mais, en fait, la Genèse ne fait aucune mention d’une coopération semblable, et en général les Pères l’ignorent. Cf. Suarez, De opère sex dierum, l. III, c. I, n. 4 sq. Ce qu’il faut certainement exclure, c’est cette opinion juive, que Dieu aurait eu les anges en vue, comme l’idéal suivant. lequel l’homme devait être formé, et qu’il leur aurait adressé des paroles : Faisons l’homme à notre ressemblance. C’est à sa propre image que Dieu fit Adam : Et creavit Deus hominem ad imaginem suam ; ad imaginem Dei creavit illum. Voir entre autres, saint Basile, Hom., ix, in Hexæm., n. 6, P. G., t. xxix, col. 206, et saint Jean Chrysostome, Hom., viii, in Gen., n. 2, P. G., t. iii, col. 71.

II. CONDITIONS SUBJECTIVES OU FUT CRÉÉ ADAM.

Dans quelles conditions subjectives furent créés le corps et l’âme d’Adam ?

Principe. —

Un principe régit toute cette question dans la théologie patristique et scolastique : Le premier homme fut créé parfait. Cette perfection se mesure, soit sur ce qui convenait absolument à une nature humaine sortant des mains du créateur, soit sur ce qu’exigeait relativement dans Adam, sa mission de père et d’éducateur du genre humain.

Corps. —

Conformément à ce principe, son corps nous est représenté comme un chef-d’œuvre du divin ouvrier pour les proportions, la beauté, la grandeur et la majesté. Mais la critique, comme la saine théologie, rejette ces récits légendaires ou fantastiques sur la taille gigantesque d’Adam, qu’on rencontre chez des écrivains orientaux et qui s’inspirent de sources rabbiniques ou talmudiques. Au Xe siècle, l’évêque syrien Moses Bar Cepha nous donne un remarquable échantillon de ces singulières opinions, dans son livre De paradiso, part. I, c. xiv, P. G., t. exi, col. 498. Dans la supposition que le paradis terrestre se trouvait au delà de l’océan, la question se posait : Comment nos premiers parents ont-ils passé sur le continent ? Et les partisans de la taille gigantesque de répondre imperturbablement, qu’ils avaient passé la mer à pied : per vadosum mare pedibus commeasse, quum essent staturm procerissimæ. Quelques-unes de ces fables reposent sur une fausse interprétation de textes bibliques, comme on peut le voir dans Benoît Pereyra, In Genesim, l. IV, Disputatio de formations et prsestantia corporis humani, q. iii, n. 99-100.

Adam fut créé à l’état adulte. Saint Augustin énonce la question, sans la trancher, dans le De Genesi ad litt., l. VI, c. xiii, n. 23, P. L., t. xxxiv, col. 3’t8 ; mais il est plus expressif dans un autre ouvrage, De peccator. merit. et remiss., l. I, c. xxxvii, P. L., t. xliv, col. 144) : Non parvulus factus est, sed perfecta mole membrorum. Un état d’enfance n’a guère de sens que dans le cas d’une production naturelle par voie de génération. Au reste, l’ensemble des détails que fournit la Genèse sont significatifs : aussitùt après sa création, Adam nous apparaît capable de travailler la terre et apte à la fin du mariage. C’est abuser de cette expression : Infans enim fuit, dont se sont servis quelques Pères, en particulier saint Irénée, Cont. hær., l. IV, c. xxxviii, P. G., t. vii, col. 1105, que de l’appliquer à la condition physique du premier homme ; chez Irénée, elle signifie qu’il n’eut pas dès le début toute la perfection finale dont il était susceptible ; dans la pensée des autres Pères, elle se rapporte aux qualités de simplicité et d’innocence enfantine qui ornaient Adam avant sa chute. Voir dom Maran, Prsefat. in opéra S. Justini, part. II, c. v, P. G., t. VI, col. 43 ; Petau, De opificio sex dierum, l. II, c. ix. A quel âge répondait exactement le degré de développement physique possédé par le corps d’Adam au jour de sa création, c’est ce qu’il est superflu et même impossible de déterminer : pour des raisons diverses, les conjectures varient d’une trentaine à une soixantaine d’années. Pereyra, op. cit., n. 97 ; Suarez, n. 5-6.

Saint Augustin signale une singulière opinion qui, de son temps, eut cours dans le peuple ; sur une interprétation trop littérale de ces paroles que la Genèse dit de nos premiers parents après leur chute, iii, 7 : « Et leurs yeux s’ouvrirent, et ils s’aperçurent de leur nudité, » on se figura qu’Adam et Eve avaient été créés aveugles : Neque enim ceeci creati erant, ut imperitum vulgus opinatur. De civit. Dei, l. XIV, c. XVII, P. L., t. xli, col. 425. Le grand docteur réfute cette ineptie, et rétablit le vrai sens du texte, au même endroit et en divers autres passages de ses écrits. De Gènes.’ad. litt., l. XI, c. xxxi, P. L., t. xxxiv, col. 415 ; De nupt. et concup., l. I, c. v, P. L., t. xliv, col. 416, etc.

Intelligence.

A la perfection naturelle d’Adam se rattachent, comme un corollaire des plus importants, les dons intellectuels dont son àme fut enrichie par le créateur. On distingue la science inftise et la science acquise ou expérimentale. Que le premier homme ait été capable de cette dernière, nul n’a jamais songé à le nier ; la question ne saurait porter que sur la science infuse, et les conditions spéciales dans lesquelles s’est trouvée l’intelligence d’Adam au jour de sa création. Faut-il concevoir le père du genre humain comme ces êtres primitifs que le rationalisme nous montre vivant dans un état sauvage et voisin de la bête ? Faudrait-il, du moins, le concevoir comme Hirscher, Gùnther et quelques autres catholiques qui, tout en reconnaissant dans Adam une faculté intellective parfaite, la soumettent toutefois à la loi commune d’un développement progressif, et, par suite, lui refusent la science infuse ? Ce n’est assurément pas là l’idée que nous donnent la sainte Écriture et les Pères. C’est à nos premiers parents qu’il convient d’appliquer d’une façon toute particulière, sinon exclusive, ce passage de l’Ecclésiastique, xvii, 1, 5-6 : « Dieu forma l’homme de la terre, et il le fit à son image… Il lui forma une aide de lui-même ; il leur donna le discernement, une langue, des yeux, des oreilles et un esprit pour penser, et il les remplit de science. Il créa en eux la science de l’esprit, remplit leur cœur de sagesse et leur fit connaître les biens et les maux. » Pour ce qui est d’Adam en particulier, les saints Pères voient un indice non équivoque de sa portée intellectuelle dans ce fait que la Genèse, ii, 19-20, nous le représente, aussitôt après la création, donnant aux animaux et aux oiseaux des noms qui leur convenaient parfaitement. Eusèbe, Præparat. evang., l. XI, c. vi, P. G., t. xxi, col. 856 ; S. Jean Clirysost., In Gen., homil. xiv, n. 5, P. G., t. un, col. 110-117 ; Severianus de Gabala, Orat., vi, n. 2, P. G., t. lvi, col. 486 : S. Augustin, Opus imperf. contra Julian., l. LI, c. i, P. L., t. xlv, col. 1432 ; Serenns, dans Cassien, Collât., viii, c. xxi, P. L., t. xlix, col. 757-758. Aussi, saint Augustin ne craint-il pas de dire qu’auprès de celui d’Adam, nos esprits les plus subtils ne sont que lourdeur, plumbei judicantur. Opus imperf., l. IV, c. lxxv, P. L., t. xlv, col. 1381. Et saint Cyrille d’Alexandrie affirme expressément que le chef du genre humain n’acquit pas la science successivement, comme nous, mais qu’au moment même de sa création, le Verbe de Dieu projeta sur lui ses rayons lumineux et lui communiqua une intelligence parfaite. In Joann., l. I, c. IX, P. G., t. lxxiii, col. 127.

La raison intime de cet insigne privilège se tire de la mission qui incombait à Adam, comme père et éducateur du genre humain : « De même, dit saint Thomas, I a, q. xciv, a. 3, que le premier homme fut formé dans un état parfait quant au corps, pour être aussitôt en état de propager la nature humaine, de même il fut formé dans un état parfait quant à l’âme pour être en état d’instruire et de gouverner les autres. » En vertu de ce même principe, le docteur angélique donne pour objet à la science d’Adam tout ce que l’homme est naturellement susceptible d’apprendre, omnium scientiarum in quibus homo natus est instrui ; il lui refuse ce qui dépasse la portée naturelle de l’intelligence humaine, comme les pensées du cœur ou les futurs contingents, et ce qui n’est pas nécessaire pour la direction de la vie. De plus, comme il le remarque ailleurs, Qusest. disput., q. xviii, De veril., a. 4, il ne s’agit pas nécessairement ici d’une science réduite en acte, mais des principes subjectifs de la connaissance, de ce qui dans l’Ecole s’appelle Yhabitus : Quidquid unquam homo aliquis de cognitionc eorum naturali ingenio assequi potuit, hoc totum Adam naturali cognilione habitualiter scivit. Ce qui n’exclut pas l’ignorance expérimentale des choses qui ne s’apprennent que par l’usage et la réllexion. Ces considérations permettent de réduire la science du premier homme au degré de perfection relative qui lui convenait pour qu’il pût instruire et gouverner les autres d’une manière conforme à son état et à sa mission. Aller plus loin en attribuant à cette science une perfection absolue, ce serait, semble-t-il, trop conclure du principe posé. Des théologiens récents ont fait à ce propos de justes remarques. Voir Christ. Pesch, Prselectiones dogmaticæ, t. iii, n. 211-212. En particulier, la perfection intellectuelle d’Adam allait-elle jusqu’à exclure la possibilité de toute erreur positive ? C’est là une question secondaire où l’accord n’est pas complet. L’opinion courante tient pour l’affirmative insinuée par saint Augustin, De lib. arbilr., l. III, c. xviii, n. 52, P. L., t. xxxii, col. 1296, et soutenue par saint Thomas, I a, q. xciv, a. 4 ; d’autres suivent cependant l’avis contraire, regardé comme suffisamment probable par saint Bonaventure, In IV Sent., l. II, dist. XXIII, a. 2, q. II.

Volonté.

A la perfection de l’intelligence répondait, chez noire premier père, une perfection proportionnée de la volonté, que l’Écriture et les saints Pères expriment d’ordinaire par l’idée de rectitude. D’une façon [dus précise elle emporte en Adam l’existence de toutes les vertus morales, sinon quant à l’exercice, du moins quant au principe, Vhabitus. Aussi, saint Jean Damascène nous le montre-t-il muni virtutum génère decoratum. De fide orthod., I. II, c. xii, P. G., t. xciv, col. 922. L’École n’a fait que développer cette idée. S. Thomas, III a, q. xcv, a. 3 ; Suarez, l. III, c. XI.

Langage.

Enfin ce fut une opinion assez commune parmi les théologiens des diverses confessions, que le premier homme reçut, avec la science infuse, la révélation d’une langue toute formée, la langue hébraïque. Mais cette opinion n’a de fondement ni dans la sainte Écriture ni dans la tradition. Ceux des Pères qui ont traité la question, attribuent à l’homme l’invention du langage. S. Augustin, De ordine, l. II, c. XII, n. 35, P. L., t. xxxii, col. 10Il sq. ; S. Grégoire de Nysse, Contra Eunom., l. XII, P. G., t. xlv, col. 975, 991 sq., 1006. Et c’est bien là ce qui paraît plus vraisemblable. Pesch, p. 214-216. Au reste, l’étude générale de la relation, plus ou moins nécessaire, qu’il peut y avoir entre la connaissance humaine et le langage, appartient aux articles Langage (Origine du), Traditionalisme, Fidéisme.

II. Élévation d’Adam a l’état surnaturel.

Dieu ne se contenta pas de prodiguer au chef-d’œuvre sorti de ses mains les dons de la nature ; il y joignit ceux de la grâce par l’élévation du premier homme à l’état surnaturel.

Élévation à l’état de grâce.

Cette élévation comprend tout d’abord ce qui forme comme l’essence même de cet état, c’est-à-dire la grâce sanctifiante avec tout ce qui l’accompagne inséparablement. C’est là une vérité de foi, intimement liée à deux dogmes fondamentaux, le péché originel et la rédemption du genre humain par Jésus-Christ. Le second concile d’Orange, tenu en 529 contre les semipélagiens, l’avait déjà suffisamment indiqué dans son 19e canon, Denzinger, Enchiridion, n. 162, mais le concile de Trente l’exprime plus nettement en deux endroits. Ainsi, nous lisons dans le décret concernant le péché originel, sess. V, can. 1 et 2, « qu’Adam, le premier homme, ayant transgressé le commandement de Dieu dans le paradis, est déchu de l’état de sainteté et de justice dans lequel il avait été établi… qu’il a perdu ainsi, pour nous comme pour lui même, la justice et la sainteté qu’il avait reçue. » Puis, nous apprenons par le c. 7 de la VIe session, que cette justice et cette sainteté consistent essentiellement dans la réception de la grâce sanctifiante et des dons qui l’accompagnent ; ceux qui sont régénérés par le baptême, nous sont dépeints « recevant cette justice chrétienne, qui est la vraie justice, comme te robe première qui leur est donnée par Jésus-Christ, à la place de celle qu’Adam a perdue pour lui et pour nous, par sa désobéissance ».

Toute cette doctrine, si nettement formulée par l’Église, repose surtout sur cette grande idée, scripturaire et patristique : Jésus-Christ est le second ou le nouvel Adam, parce qu’il nous a renouvelés dans cet état de justice et de sainteté intérieure, que le premier ou l’ancien Adam avait reçu, puis perdu par son péché, pour lui et pour toute sa race. Rom., v, 9-21 ; II Cor., v, 15-21 ; Eph., i, 4-12 ; Col., i, 12-22 ; et plus spécialement Eph., iv, 22-24 ; Col., iii, 9-10. Cet état de justice et de sainteté intérieure consistant essentiellement dans la grâce sanctifiante, il s’ensuit que celle-ci l’ut donnée au premier homme avant sa chute. Saint Jean Damascène résume l’enseignement des Pères, quand il dit, De fide orth., l. II, c. xxx, P. G., t. xciv, col. 975 : « Le souverain artisan qui forma l’homme, lui infusa sa grâce divine, et par elle se communiqua lui-même à sa créature, » divinam ci gratiam suam impertiens seque per eam ipsi commun ira us. Ce sciait évidemment aller contre cet enseignement si clair de notre foi, que de faire consister la sainteté primitive de l’homme dans une justice purement naturelle ou purement extrinsèque, mais l’étude de ces erreurs, baianistes, jansénistes, hermésiennes ci gunthériennes, se rapportent plus directement à la question de la justice originelle. Cf. Katschthaler, Theologia dogmatica calholica specialis, Ratisbonne, 1877, l. l, p. 2, n. 260.

Moment de cette élévation.

A quel moment Adam reçut-il la grâce sanctifiante ? La révélation ne donne pas de réponse précise ; au moyen âge, il y eut même partage d’opinions. De grands théologiens, comme Hugues de SaintVictor, Pierre Lombard, Sent., . II, dist.XXlV, saint Bonaventure, Scot, soutenaient que le premier homme fut créé dans un état de rectitude naturelle et qu’avant de recevoir la grâce sanctifiante, il dut s’y disposer par ses actes. Ils invoquaient surtout des raisons de convenance, dont la principale ressort de l’énoncé même de leur opinion : la sanctification propre à un adulte demande qu’il y ait de sa part une disposition préalable, et celle-ci ne se conçoit pas sans intervalle de temps entre la formation de l’homme et son élévation à l’état surnaturel. A l’encontre, Albert le Grand, saint Thomas, I a, q. xcv, a. 1, et toute son école admettaient la création et la sanctification simultanée du premier homme. Les Pères du concile de Trente ont évité à dessein de trancher cette controverse. Pallavicini, Hist., l. VII, c. ix, n. 1 ; Massarelli-Theiner, Acta genuina ss. œcumenici concilii Tridentini, Agram (1874), t. i, p. 131, 136, 146. Mais la seconde opinion est devenue courante en théologie ; elle se recommande par des raisons qui semblent prépondérantes. En général, les Pères la favorisent, soit en l’affirmant expressément, comme saint Basile, Adv. Eunom., l. V, P. G., t. xxix, col. 727, et saint Hilaire, cité par saint Augustin, Contra Jidian., l. II, c. viii, P. L., t. xliv, col. 692 ; soit en la supposant dans les interprétations qu’ils nous donnent de certains textes. Ainsi, dans le passage de l’Ecclésiaste, vii, 30, où il est dit que Dieu fit l’homme droit, ils verront cette droiture ou rectitude parfaite qui est due à la sainteté surnaturelle. S. Augustin, De corrept. et grat., , c. xi, n. 32, P. L., t. xliv, col. 370. Dans ce texte de la Genèse, i, 26 : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance, » ou cet autre del’Épître aux Éphésiens, iv, 21 : « Revêtez-vous de l’homme nouveau, qui a été créé selon Dieu dans la justice et la vraie sainteté, » ils verront cette image parfaite ou ressemblance surnaturelle que la grâce sanctifiante mit dans le premier homme au jour de sa création et que Jésus-Christ rétablit en nous. S. Irénée, Cont. User., l. V, c. x, n. 1, P. G., t. vii, col. 1148 ; S. Basile, Sermo ascel., n. 1, P. G., t. xxxi, col. 870 ; S. Grégoire de Nysse, Deopi/ic. hom., c. xxx, P. G., t. xliv, col. 255 : S. Cyrille d’Alexandrie, In Joa., l. II, c. i, P. G., t. lxxiii, col. 203 ; S. Jérôme, In Eph., iv, 30, P. L., t. xxvi, col. 514 ; S. Augustin, De Gen. ad. litt., l. VI, c. xxiv, n. 35, P. L., t. xxxiv, col. 353, etc. De même encore, quand la Genèse, ii, 7, nous parle d’un souffle de vie communiqué au premier homme : Et inspiravit in faciem ejus spiracidum vitse, ils verront la grâce sanctifiante, don du Saint-Esprit et principe de la vie surnaturelle. S. Basile, loc. cit. ; S. Cyrille d’Alexandrie, De Trinit. dialog., c. iv, P. G., t. lxxv, col. 907. On peut, à la vérité, douter, et même nier, que ces Pères aient voulu donner alors le sens littéral, premier, de ces textes. Suarez, l. III, c. ix, n. 29 sq. ; Petau, De opific, l. II, c. n-iv ; Scheeben, Dogmatique, traduct. de l’abbé P. Bélet, Paris, 1881, t. iii, n. 313 sq. Mais ceci n’infirme pas la preuve d’autorité dans la question présente ; car du moment où ils appliquent ces passages à la sanctification d’Adam sortant des mains du créateur, ils supposent nécessairement cette sanctification soit en vertu du contenu implicite de ces textes, soit à titre de vérité connue par ailleurs. Le second concile d’Orange parle lui-même de cette intégrité dans laquelle la nature humaine avait été faite, in qua est condita ; et c’est dans le même sens que saint Augustin donne à la grâce d’Adam l’épithète de naturelle, c’est-à-dire attachée à la nature humaine dans son origine. De spirit. et litt., c. xxvii, P. L., t. xliv, col. 2 L 19.

Cette élévation primitive d’Adam à l’état surnaturel n’a rien que de convenable. Dieu le destinant à une fin du même ordre, il était juste qu’il le mît dès le début sur la voie et lui donnât dans la grâce sanctifiante des moyens d’action proportionnés. N’est-ce pas pour la même raison que saint Augustin nous montre Dieu créant les anges et les sanctifiant en même temps, s’nuul ils et condens naturam et largiens gratiam ? De civit. Dei, l. XII, c. ix, n. 2, P. L., t. xli, col. 357. Au reste dans cette supposition, il n’est pas nécessaire de nier ce que la première opinion a de sérieux. Si quelques théologiens, comme Dominique Soto et Molina, ne voient pas la nécessité d’une disposition préalable ou coopération de la part d’Adam, le plus grand nombre la maintient, car c’est un mode de sanctification plus parfait en soi, et plus convenable aussi à un adulte, non moins qu’à la nature de la grâce sanctifiante qui dit amitié entre Dieu et l’homme. Mais il ne s’ensuit pas qu’il faille, à proprement parler, un intervalle de temps. Tout en admettant la simultanéité physique de l’acte créateur et de l’acte sanctificateur, on peut, dans l’unique instant réel où tout se passe, concevoir une certaine virtualité où se placent les actes qui auraient accompagné, chez Adam, l’infusion de la grâce sanctifiante. Deux remarques de saint Thomas aideront à comprendre ce point délicat. Entre la forme et la disposition qu’elle peut supposer dans le sujet, il y a tout au moins un rapport de subordination, ordo naturæ, mais non pas nécessairement un rapport de temps, ordo lemporis. Ia-IIæ, q. cxiii, a. 8. Par ailleurs, le mouvement de la volonté n’emportant pas l’idée de continu, ne suppose pas non plus de succession de temps. I a, q. xcv, a. If ad 5um. Rien n’empêche donc que, même au premier instant de sa création, il y ait eu, de la part du premier homme, coopération à la grâce. Comme l’âme du Christ, au moment de l’incarnation, comme l’âme de la très sainte Vierge Marie, dans son immaculée conception, l’âme d’Adam nous apparaît, dans cet unique instant, d’une virtualité si riche, tout à la fois créée par Dieu, adhérant à lui sous l’action de la grâce actuelle par un acte d’intense charité et sanctifiée par la grâce habituelle dans cet acte même d’adhésion à sa fin suprême. Cf. Suarez, c. xix.

Conséquences de cette élévation.

Il suffit maintenant d’énoncer quelques conséquences qui résultèrent pour Adam de son élévation à l’état surnaturel. Aux dons insignes qui ornaient déjà son intelligence et sa volonté, s’ajoutèrent ces vertus infuses, théologales et morales, qui forment le noble et inséparable cortège de la grâce sanctifiante. En particulier, la foi s’implanta dans cette âme, comme la boussole d’une vie désormais orientée vers Dieu, fin surnaturelle. Adam crut certainement en Dieu fin et rémunérateur suprême, Hebr., xi, 6 ; vraisemblablement il connut le mystère de la très sainte Trinité, et même celui de l’incarnation, mais en tant qu’il se distingue du mystère de la rédemption. En un mot, saint Thomas assigne pour objet à la foi du premier homme ce qui lui était bon de connaître pour pouvoir diriger sa vie d’une façon conforme à l’état où il se trouvait, quanta erat nccessaria ad gubernalionem vitse humanse secundum station illum. I a, q. xcv, a. 3 ; ll a II*, q. ii, a. 7 ; Suarez, c. xviii.

Enfin pour avoir une idée complète du chef-d’œuvre que fut Adam avant sa chute, il faudrait joindre aux dons proprement naturels ou surnaturels les privilèges appelés communément préternaturels, l’intégrité ou absence de concupiscence, l’immortalité, l’impassibilité, la félicité relative du paradis terrestre. Mais, comme tous se rapportent à l’état de justice originelle, il suffit de les indiquer ici, en faisant cette remarque : les théologiens ont une si haute idée de la perfection qui résultait de tout cet ensemble de dons insignes de l’intelligence et de la volonté, que la pluplart, suivant en cela saint Thomas, Ia-IIæ, q. lxxxix, a. 3, affirment une sorte d’incompatibilité, au moins morale, entre le péché véniel, et l’état de justice originelle, qui exclut tout mal du corps et de l’àme. Le fait qu’Adam ait pu pécher mortellement ne renverse pas cette assertion, car le péché mortel détruisant l’état même de justice originelle, la question de conciliation entre les conséquences de ce péché et le bonheur du paradis terrestre ne se pose plus ; il en serait autrement dans l’hypothèse du péché véniel seul.

III. Péché d’Adam.

Épreuve et faute d’Adam.

Apres qu’il eut formé l’homme, Dieu le prit et le plaça dans un jardin de délices, pour qu’il en prit soin et en fût le gardien. Et voici ce qu’il lui prescrivit : « Mange de tous les fruits du paradis, mais ne touche point à l’arbre de la science du bien et du mal, car du jour où tu mangeras de ce fruit, la mort sera ton partage. » Gen., il,’15-17. Ce fut là l’épreuve que le Seigneur voulut imposer au premier homme, comme à sa compagne Eve, avant de leur accorder la couronne de la suprême félicité. Il y avait précepte strict et grave, comme le prouvent assez la sanction qui l’accompagnait et les conséquences qui devaient résulter de la désobéissance. Cette gravité ne venait pas, il est vrai, de l’objet mémo du précepte, mais de sa fin : Dieu voulait affirmer et faire reconnaître son droit inaliénable de maître suprême. Suivant la pensée des Pères, de saint Jean Chrysostoine en particulier, In Gen., homil. xiv, n. 3, P. G., t. lui, col. 115, il en usait envers le premier homme, comme un maître généreux qui céderait un superbe palais, à la seule condition pour le donataire de reconnaître son droit de suzeraineté par une modique redevance. Combien de temps dura l’épreuve, c’est ce qu’on ne saurait dire sans se jeter dans l’arbitraire. Suarez, l. IV, c. vin. Il ne semble pas qu’elle ait été longue, et elle ne fut pas heureuse. Eve, habilement tentée par le démon, succomba, et entraîna son mari dans sa chute, deditque viro suo, qui comedit. Gen., iii, 1-7. Ce péché du premier homme s’appelle le péché originel au sens causal, peccatum originale originans. C’est comme tel, dans Adam, que nous devons l’étudier.

Possibilité du péché d’Adam. —

La première question qui se pose, c’est la possibilité même de cette faute. Comment concevoir, dans cette volonté si droite, une pareille faiblesse ? dans cette intelligence si riche, une pareille erreur ? dans cette nature exempte de concupiscence, un mouvement désordonné soit à l’égard du fruit défendu, soit même à l’égard d’Eve, la séduisante provocatrice ? Dans cette difficulté, il faut d’abord faire la part des suppositions inexactes ou gratuites. Ces dons si relevés de la volonté, de l’intelligence et de la nature n’existèrent en Adam et Eve qu’avant leur premier péché ; or, rien n’autorise à dire que ce premier péché ait été accompagné d’un mouvement de concupiscence ou d’une erreur spéculative du jugement. L’homme, par le seul fait qu’il est libre, peut, par sa propre volonté, se porter vers un bien apparent, alors même que l’intelligence lui montre qu’il a tort ; c’est l’erreur pratique, inséparablement jointe à tout choix mauvais, mais il n’y a pas nécessairement davantage : Video meliora proboque, détériora sequor… Reste donc la faiblesse de la volonté, et là, c’est le grand et mystérieux problème de la liberté créée qui se dresse devant nous : Deus ab initia constitua hominem, et reliquit eum in manu consilii sui. Eccle., xv, 14. La créature, si riche qu’elle soit des dons de la nature et de la grâce, reste libre, tint qu’elle n’est pas définitivement fixée au bien suprême par la vision béatifique, de s’arrêter en elle-même et de se détourner de Dieu ; elle peut toujours dire, théoriquement ou pratiquement : l’as de maître, non serviam. Les anges étaient incontestablement plus parfaits qu’Adam, et beaucoup sont tombés.

Nature du péché d’Adam.

Mais quel fut le péché du premier homme ? La réponse projettera quelque lumière sur le problème qui vient d’être soulevé. En mangeant du fruit défendu, Adam pécha évidemment par désobéissance ; cette faute, Dieu la lui reproche, quand le coupable interpellé s’excuse de s’être caché, sur la honte que lui cause sa nudité : (Juis enim indicavit tibi quod nudus esses, nisi quod ex ligno de quo prseceperam tibi ne confédérés, comedisti ? Gen., iii, 11. Mais cette désobéissance eut un mobile intime ; ce qu’il fut ne nous a pas été expressément révélé. Sans aucun doute Adam fut faible en face d’Eve ; il y eut de sa part complaisance coupable, Dieu le lui rappelle au moment du châtiment, iii, 17 : Quia audisti vocem uxoris tuse et comedisti de ligno… Des Pères et des théologiens ont même vu là le premier péché. Il semble pourtant que le mobile initial, chez Adam, comme chez Eve, ait été ipielque chose de plus intime, un sentiment d’orgueil développé par ces paroles du tentateur, iii, 5 : Erilis sicut dii, scientes bonum et malum. La sainte Écriture l’insinue, au livre de Tobie, iv, 14, quand ce saint homme fait à son fils cette recommandation : « Ne soutire jamais que l’orgueil domine dans ta pensée ou dans tes paroles, car c’est en lui que toute ruine a pris commencement, in ipsa enim inilium sumpsit omnis perditio. » Beaucoup de Pères sont fort explicites à ce sujet. Suarez, l. IV, c. il, ni. C’est, en particulier la doctrine de saint Augustin. « Le mal les avait atteints au dedans, remarque-t-il, De civit. Dei, l. XIV, c. xiii, P. L., t. xli, col. 420, avant qu’ils n’en vinssent à la désobéissance formelle, car une mauvaise action est toujours précédée d’une mauvaise volonté. Or, quel a pu être le principe de cette mauvaise volonté, sinon l’orgueil, puisque selon l’Écriture, tout péché commence par là ? » Et le même Père dit encore d’Adam, De Gen. ad lilt., l. II, c. v, P. L., t. xxxiv, col. 432 : « Il ne faut pas croire que le tentateur eût vaincu l’homme, s’il ne s’était d’abord élevé dans l’àme de celui-ci un orgueil qu’il aurait dû réprimer. » Cette doctrine a été suivie et magistralement développée par le docteur angélique. Dieu ayant créé nos premiers parents dans un état de justice et de sainteté où la chair était parfaitement soumise à l’esprit, la révolte dut commencer par ce dernier, c’est-à-dire par le désir déréglé d’un bien d’ordre spirituel. L’homme pécha principalement en désirant de ressembler à Dieu dans la science du bien et du mal, désir inspiré à nos premiers parents par un amour déréglé de leur propre excellence. Voir IIa-IIæ, q. clxiii, a. 1 et 2 ; Suarez, loc. cit.

Ainsi s’explique le péché d’Adam, d’après ceux des docteurs de l’Église qui ont le plus et le mieux étudié la question. Explication naturelle, qui répond bien à la suggestion diabolique : « Vous serez comme des dieux connaissant le bien et le mal. » Elle répond aussi à ces paroles que Dieu dit après la chute et où perce une allusion ironique, iii, 22 : « Voici qu’Adam est devenu comme l’un d’entre nous, connaissant le bien et le mal. » Il a fallu qu’on ignorât cette doctrine, pour rééditer de nos jours une objection vieille comme le pélagianisme, à savoir qu’il y a dans le procédé des théologiens catholiques un cercle vicieux, consistant à expliquer d’abord le péché originel par la concupiscence, puis, la concupiscence par le péché originel. Il n’en est rien ; le premier péché’d’Adam et d’Lve s’explique sans la concupiscence, mais ce premier péché commis, la concupiscence existe et peut avoir son rôle dans les péchés suivants, comme seraient, du côté d’Adam, une affection déréglée à l’égard de sa compagne et, du côté d’Eve, un mouvement de curiosité sensuelle et de gourmandise, ni, G : Vidit igitur mulier quod bonum esset lignuM ml vescendum, et pulchrum oculis, aspectuque delectabile.

Gravité du péché d’Adam.

La gravité de la faute d’Adam ressort de la nature même de son péché et des circonstances qui l’accompagnèrent : « Il y eut mépris du commandement de Dieu, qui avait créé l’homme, qui l’avait fait à son image, qui lui avait donné l’empire sur les autres animaux, qui l’avait placé dans le paradis, qui l’avait comblé de toute sorte de biens, qui ne l’avait point charge’de préceptes nombreux, graves ou difficiles, mais ne lui en avait imposé qu’un seul, de courte durée et très facile. » S. Augustin, De civit. Dei, l. XIV, c. xv, P. L., t. xli, col. 422. La responsabilité fut énorme par les conséquences qu’elle entraîna pour le genre humain, dont Adam était le chef moral et juridique ; sous ce rapport le péché de celui-ci, moindre à d’autres titres, l’emporte en gravité sur celui d’Eve. S. Thomas, a. 4 ; Suarez, c. v.

Conséquences du péché d’Adam.

Ces conséquences sont tout ce qu’emporte le péché originel considéré dans les descendants du premier homme, peccatum originale originatum ; mais elles s’appliquèrent tout d’abord à la personne même d’Adam. Gen., iii, 7-24. Il sentit le feu de la concupiscence s’allumer dans ses membres désormais insoumis ; il apprit l’état d’inimitié que sa faute avait créé entre Dieu et lui, et la puissance que le démon avait acquise sur sa race déchue ; il entendit prononcer sur lui et les siens l’arrêt solennel qui les condamnait aux souffrances de toute sorte, et finalement à la mort ; puis il dut quitter l’heureux et facile séjour du paradis terrestre, pour aller habiter et travailler à la sueur de son front dans une terre privée désormais de la bénédiction primitive. Le Concile de Trente a résumé toutes ces conséquences dans le 1 er canon de sa V" session, dont l’objet est le péché originel ; il définit « qu’Adam, le premier homme, ayant transgressé le commandement de Dieu, dans le paradis, est déchu de l’état de sainteté et de justice, dans lequel il avait été établi ; que, par ce péché de désobéissance et cette prévarication, il a encouru la colère et l’indignation de Dieu, et en conséquence la mort, dont Dieu l’avait auparavant menacé, et avec la mort, la captivité sous la puissance du diable, qui depuis a possédé l’empire de la mort ; et que par cette offense et cette prévarication, Adam a subi un état de déchéance quant au corps et à l’âme ». Denzinger, Enchiridion, n. 670.

Pour bien comprendre le sens de ces dernières paroles, il faut remarquer que toutes les conséquences j énumérées par la Genèse et par le concile, atteignirent Adam, non dans sa nature humaine prise en elle-même ou dans ce qui la constitue foncièrement, mais dans cette nature, telle qu’elle existait avant la chute, c’est-à-dire surélevée et enrichie de tous les dons propres à la justice et à l’intégrité originelle ; c’est cet Adam historique, cet homme primitif, surélevé et intègre, dont il faut dire qu’il a subi un état de déchéance quant au corps et à l’âme. Car il perdit les dons préternaturels attachés à la nature même comme apanage de la justice originelle, l’intégrité, l’immortalité, l’impassibilité. Perdit-il aussi les dons préternaturels attachés à sa personne, comme ces sciences infuses de l’ordre naturel qu’il avait reçues en sa qualité de chef et d’éducateur du genre humain ? Les documents révélés se taisent sur ce point. Adam déchu gardait cette mission primitive, mais la condition du genre humain n’était plus la même qu’au paradis terrestre ; tout autre aussi, par conséquent, devenait le rôle d’Adam chef et éducateur. Que dut-il garder de sa science primitive et, s’il la garda tout entière, quel usage en put-il faire désormais ? Saint Jean Chrysostome dit en passant, In Joa., homil. vii, n. 1, P. G., t. lix, col. 63, que, loin d’acquérir une science plus grande en mangeant du fruit défendu, Adam ne perdit pas peu de celle qu’il possédait auparavant. La question reste obscure et incertaine, et par le fait même on ne saurait apprécier sûrement le degré de science que le premier homme possédait avant sa chute, par l’idée que les documents postérieurs pourraient nous donner de son état intellectuel ou de celui de ses descendants immédiats.

Dans l’ordre strictement surnaturel, Adam perdit la grâce sanctifiante et tout ce qui ne va pas sans elle, la charité, les vertus morales infuses et les dons du Saint-Esprit. Y eut-il aussi perte de la foi et de l’espérance ? Un certain nombre de Pères anciens l’affirment, dans la persuasion qu’Adam, comme Eve, mais après elle, crut aux paroles du serpent et douta de la véracité divine. Mais d’autres trouvent que rien dans la sainte Écriture n’autorise vraiment cette manière de voir ; saint Paul, entendu sans ambages, semble bien affirmer le contraire, quand il dit que la femme fut séduite, mais non pas Adam, I Tim., il, 14 : Adam non est seductus, mulier autem seducta in prsevaricatione fuit. C’est surtout l’opinion de saint Augustin, De Gen. ad lit., l. XI, c. xlii, P. L., t. xxxiv, col. 452 ; De civit. Dei, l. XIV, c. ii, P. L., t. xli, col. 419 ; et les grands théologiens de l’Ecole l’ont en général suivi. S. Thomas, IIa-IIæ, q. clxiii, a. 3-4 ; Cajetan, Comment, in h. loc. ; Suarez, l. IV, c. iv ; Salmant., Z)e incarnat., dist. XXVIII, n. 101. Du reste on pourrait admettre chez Adam une certaine séduction, sans que le péché d’infidélité s’ensuivit, comme l’explique saint Thomas dans son commentaire sur la première Épitre à Timothée, c. il, lect. m. Ce qui est certain, c’est qu’aussitôt après la chute, Dieu s’adresse à la foi et à l’espérance du premier Adam, en faisant luire à ses yeux, dans le lointain de l’avenir, l’image obscure sans doute, mais déjà reconnaissable, du second Adam, Celui qui écrasera la tête du serpent. Gen., iii, 15. Aussi, remarque Tertullien, Dieu qui destinait nos premiers parents à la réhabilitation, qui les voyait déjà se relever par l’aveu de leur faute, Dieu ne prononça pas contre eux de sentence de malédiction : Ideoque nec maledixit ipsum Adam, nec Evam, ut restitulionis candidatos, ut confessione relevatos. Adv. Marcion., l. II, c. xxv, P. L., t. ii, col. 315.

IV. Repentir et salut d’Adam.

Vie d’Adam après sa chute.

La sainte Écriture nous donne fort peu de détails sur la vie du premier homme après sa déchéance. Il eut pour fils Caïn, puis Abel. Gen., iv, 1-2. Quand celui-ci tomba, victime innocente d’une haine fratricide, le père du genre humain dut comprendre toute la portée de l’arrêt de mort qui pesait désormais sur sa race. Seth remplace Abel, iv, 25 ; mais à côté de ces trois fils, nommément désignés, à cause du rapport spécial qu’ils ont eu avec l’histoire de la révélation, l’auteur de la Genèse signale d’une façon indéterminée d’autres fils et des filles, v, 4 : gentilque filios et fdias. Saint Épiphane donne, d’après le livre apocryphe des Jubilés ou Petite Genèse, le chiffre total de douze fils et de deux filles, Hicrcs., 39, P. G., t. xli, col. 672 ; Cedrenus, celui de trente-trois fils et vingt-sept filles, Compend. histor., P. G., t. cxxi, col. 41 ; Honorius d’Autun, celui de trente-trois fils et trente-trois filles, De imagine mundi, l. III, P. L., t. clxxii, col. 165. Aucun de ces renseignements n’offre de garantie suffisante, pour ne rien dire de plus.

Chassé de l’Éden, Adam dut travailler la terre, et lui demander, à la sueur de son front, ses moyens de subsistance, Gen., iii, 17 ; ce qui en fit le premier agriculteur, sans parler des autres métiers que la nécessité le força sans doute à exercer. Cf. Ugolino, Thésaurus antiquitatum sacrarum, t. xxix, Comment, de re rustica veterum Hebrseorum, c. v, p. 255-257 ; Gœtzius, Dissert, de molis et pistrinis veterum, c. il, n. 7-10, ibid., p. 125129 ; Byna3us, Z)e calceis Hebrseorum, c. i, n. 2-3, ibid., p. 675. On ne saurait non plus douter de son influence sur le développement naissant des métiers et des arts qui se manifeste au chapitre iv de la Genèse. Par contre, il n’y a pas lieu de s’arrêter à toutes ces légendes orientales, juives ou musulmanes, où l’on détaille les ouvrages qu’Adam aurait composés et les livres mystérieusement tombés du ciel qu’il aurait reçus pour sa direction morale et la connaissance de l’avenir.

Ce qui est plus digne d’attention, c’est la part incontestable qu’occupe au foyer d’Adam la pensée de Dieu et l’esprit de foi. Eve devenant mère pour la première fois attribue à Dieu le fruit de ses entrailles : Possedi hoviinem per Deum. Gen., iv, 1. Plus tard, quand Setb vient la consoler de la mort d’Abel, c’est encore vers Dieu que, dans un élan de reconnaissance, son cœur de mère se reporte : Posuit mihi Drus semen aliud pro Abel, quem occidit Caïn, IV, 25. Les sacrifices, offerts à la divinité, sont chose courante dans cette première génération des fils d’Adam, iv, 3-5.

Repentir d’Adam.

Il suffirait de ces indices pour conclure qu’après son expulsion du paradis terrestre, le premier homme ne fut ni un rebelle ni un désespéré, mais un croyant et un pénitent. Au reste, le livre inspiré de la Sagesse nous fournit, sur le repentir d’Adam et sa justification, un renseignement direct et formel. Nous lisons aux chapitres ix, 19, et x, 1-2 : « C’est par la sagesse, Seigneur, qu’ont été guéris tous ceux qui vous ont plu dès le commencement. C’est elle qui garda celui que Dieu créa seul, qu’il avait formé le premier pour être le père du monde ; c’est elle aussi qui le tira de son pèche’. »

Salut d’Adam.

De cette repentance et de cette rentrée en grâce auprès de Dieu peut-on conclure au salut éternel d’Adam ? Si le texte sacré n’est pas précis sur ce dernier point, c’est du moins le sens qui vient le plus naturellement à la pensée, comme le remarque saint Augustin dans une lettre à Évode. Epist., clxiv, n. 6, P. L., t. xxxiii, col. 711. La sagesse rend Adam l’objet de la complaisance divine, en le faisant sortir de son péché ; effet manqué, assurément, si Adam était ensuite retombé, puis mort dans l’impénitence. En tout cas, ajoutons avec l’évêque d’Hippone que la tradition complète la preuve : « A l’égard du premier homme, père du genre humain, presque toute l’Église s’accorde à reconnaître que Jésus-Christ le tira des limbes, et l’on ne doit pas présumer que cette croyance soit sans fondement. » Quod eam non inaniler credidisse credendurn sit, undecunitjue hoc traditum sit, eliamsi canonicarum Scripturarum hinc eœpressa non proferatur auctoritas. Aussi, quand vers la fin du IIe siècle, Tatien et les encratites ses sectateurs soutinrent qu’Adam était damné, ce sentiment fut vivement réprouvé et rangé dès lors dans le catalogue de leurs erreurs dogmatiques. S. Irénée, Cont. hær., l. I, c. xxviii, P. < ; ., t. vii, col. 690 ; S. Epiphane, Hser., xlvi, P. G., t. xli, col. 839 ; Tertullien, De præscript., c. LU, P. L., t. ii, col. 72 ; De pienit., c. xii, P. L., t. i, col. 1248 ; S. Philastre, De hæres., c. xi.viii, P. L., t. xii, col. 1164 ; S. Augustin, De hæres., n. 25, P. L., t. XLH, col. 30. A ces réprobations de l’erreur se joignent les autres témoignages qui montrent d’une façon positive la croyance des l’ères ou de leur époque au salut d’Adam. Origène, Comment, in Matt/t., n. 120, P. G., t. xiii, col. 1777 ; S. Grégoire de Nazianze, Orat., xxxvii, n. 7, P. G., t. xxxvi, col. 289, où il dit de nos premiers parents : Vlrumque Chris tus passione sua sainte donavit ; Pseudo-Jérôme, Breviar. in Ps. xcvni, P. L., t. xxvi, col. 1123 ; S. Augustin, De peccat. mer., 1. 11, c. xxxiv, P. L., t. xi.iv, col. 185, où il dit d’Adam et d’Eve : Postca juste vivendo…, merilo creduntur per Domini sanguinem ab exlremo supplicio liberati.

Après cet ensemble de témoignages, on s’étonne qu’au xiie siècle, Hupert († 1135), abbé du monastère de Saint-Héribert de Tuy, prés de Cologne, ait pu considérer le salut du premier homme comme douteux, In Gènes., I. III, c. xxxi, P. L., t. clxvii, cul. 318 : Salvatio ejus et a multis libère negatur, et a nullo satis firmiter défend dur. Apparemment il n’avait qu’une connaissance imparfaite de la tradition patristique ; de plus, il était influencé par une idée fausse, qui maintenant serait une hérésie formelle, il ne regardait pas le livre de la Sagesse comme Écriture canonique. Cinquante ans plus tard, Philippe de Harveng († 1183), abbé de Bonne-Espérance, dans le Hainaut, publia une Responsio de salute primi hominis, P. L., t. cciii, col. 593-622, où il montre des indices du salut d’Adam dans divers passages de la Genèse, mais s’appuie surtout sur le livre de la Sagesse, et finalement sur la tradition, c. xxv-xxvii. Les théologiens postérieurs se sont contentés de signaler l’opinion, particulière de Rupert en la réfutant brièvement ; l’antique croyance, restée commune, est considérée depuis longtemps comme une vérité acquise. Il est facile de comprendre les raisons de haute convenance qui la recommandent ; saint Irénée les a développées, l. III, c. xxiii, P. G., t. vii, col. 960, celle-ci entre autres : Jésus-Christ, le nouvel Adam, est venu pour réparer la défaite du vieil Adam et briser la tête du serpent infernal ; assurément la victoire du second Adam serait bien pâle, si le premier Adam, chef physique et moral de l’humanité, restait à tout jamais au pouvoir de l’ennemi.

Culte d’Adam.

Mais quelle a été l’attitude officielle de l’Église en cette question ? Il faut distinguer l’Orient de l’Occident. Les Églises orientales honorent Adam et Eve d’un culte public. Chez les Grecs, leur fête se célèbre le dimanche qui précède la Nativité de Notre-Seigneur ; de plus, le 25 mars, Feria v ; » in Parasceve, il y a mémoire d’Adam créé, déchu, mort et enseveli. Dans les codices syriaques manuscrits du Vatican, on trouve marquée au 6e jour du mois de nisan, la mort de notre Père Adam, puis à la 3e férié dans l’octave de Pâques, la commémoration d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, d’Adam, d’Eve, de Seth et d’L’nos. L’Église arménienne célèbre la fête des saints patriarches Adam, Abel, Seth, etc., le samedi qui suit le premier dimanche après la Transfiguration, ou 7e dimanche après la Pentecôte. Dans l’année ecclésiastique des coptes, la commémoration d’Adam et d’Eve est placée au 6e jour du mois pharemuthi ou avril. Voir pour tous ces points Nilles, Kalendarium manuale idriusque Ecclesise Orieidalis et Occidentalis… auctius ali/ue emendatius, Inspruck, 1897, t. il, p. 253-251, 384, 541, 591, 717. Ajoutons enfin qu’Adam a sa chapelle sur le mont du Calvaire.

L’Église romaine n’a pas consacré publiquement le culte de nos premiers parents. Quelques martyrologes latins font cependant mémoire d’Adam, soit le 25 mars, soit le 21 avril, soit encore le 23 août. Voir Acta sanctorum, t. viii, p. 532, 511 ; t. xi, p. 260 ; Usuardi Martyrol. Auctaria…, au 25 mars et au 23 août, P. L., t. cxxiii, col. 873, 871 ; t. cxxiv, col. 394. V. Sépulture d’Adam. — Le premier homme mourut à l’âge de 930 ans : Et factum est omne tempus quod vixit Adam, anni nongenti triginta, et mortuus est. lien., v, 5. Où fut-il enterré ? La sainte Écriture ne le dit pas, et la tradition n’a rien de fixe sur ce point. La question est, du reste, complexe et liée à plusieurs problèmes dont les données nous échappent. Ainsi, où se trouvait le paradis terrestre ? Adam, après en avoir été chassé, resta-t-il dans les environs, ou s’en alla-t-il au loin ? Ses fils Penterrèrent-ils là où il mourut, et ses ossements restèrent-ils définitivement au lieu de sa sépulture primitive ? Les réponses à tous ces problèmes sont aussi divergentes qu’incertaines.

V. SENTIMENT QUI PLACE LA SÉPULTURE D’ADAM AUX ENVIRONS DU PARADIS TERRESTRE.

Les uns se contentent de dire que vraisemblablement Adam resta dans les environs du paradis terrestre, qu’il v passa sa vie et y mourut. Voir, entre autres, Joli. Nicolai, De sepulchri Hebrœorum, l. III, c. i, dans le Thésaurus d’Ugolino, t. xxxiii, p. 203-210. On peut rapprocher de cette opinion ce qu’on lit dans plusieurs livres apocryphes, de date incertaine, mais antérieurs au VIe siècle. Ainsi, d’après Y Apocalypse de Moïse, Adam a été enseveli dans la région du paradis, à l’endroit où Dieu avait pris la poussière dont fut formé le corps du premier homme. Tischendorf, Apocalypses apocryphes, Leipzig, 1866, p. 21-23. Le Testament ou la Pénitence d’Adam précise davantage, car Seth y parle ainsi : « Après la mort de mon père Adam, nous l’ensevelîmes, moi et mon frère, à l’orient du Paradis, en face de la ville d’Hénoch, la première qui fut bâtie sur la terre… Et nous scellâmes ce testament, et nous le plaçâmes dans la caverne des Trésors, où il est resté jusqu’à ce jour, avec les trésors qu’Adam avait tirés du paradis, l’or, la myrrhe et l’encens. » Journal asiatique, Paris, 1853, Ve série, t. il, p. 457.

En dehors de cette première opinion, deux traditions particulières méritent d’être signalées.

II. opinion qui la place a hébron.

L’une, courante chez les juifs, place le tombeau d’Adam à Hébron. Créé en Judée, le premier homme y revint après sa déchéance ; il y mourut et fut enterré près d’Hébron, dans la caverne dite Macpelali ou double, comme plus tard les trois grands patriarches Abraham, Isaac et Jacob. D’où le nom primitif de Cariath-Arbe, ou ville des quatre. Lightfoot, Fragmenta Terrse Sanctse historico-chorographica, § 3, il, Opéra posthuma, Utrecht, 1699, p. 66-67. Saint Jérôme est le principal représentant de cette opinion. De situ et non-An. locorum hebraic ; Hebraic. queest. in Gènes., P. L., t. xxiii, col. 862, 972 ; Comment, in Evang. S. Matth., xxvii, 33, P. L., t. xxvi, col. 209 ; Epist., cviii, ad Eustoch., n. 11, P. L., t. xxii, col. 886. Il la fonde partout sur un passage du livre de Josué, xiv, 15, ainsi traduit dans la Vulgate : Nomen Hebron ante vocabatur Cariath-Arbe ; Adam maximus ibi inter Enacim situs est. « Hébron s’appelait auparavant Cariath-Arbe, id est oppidum quatuor virorum ; le grand Adam repose là parmi les Enakims. » Pendant longtemps, grâce à l’autorité de saint Jérôme, cette interprétation fit loi en Occident. S. Isidore de Séville, De ortu et obitu Patrum, l. I, n. 5, P. L., t. lxxxiii, col. 131 ; Bède, In Matth., xxvir, P. L., t. xcii, col. 123 ; Rupert, In Gen., l. III, c. xxxi, P. L., t. clxvii, col. 318 ; S. Thomas, Comment, in Matth., xxvii, et in Joa., xix, lect. xxxi ; Adrichomius, Theatrum Terrse Sanctse, 1590, p. 49, 202, etc. Elle est pourtant inadmissible, car voici le vrai sens du texte hébreu, qu’on peut du reste confirmer par Jos., xv, 13-14 ; xxi, 11 : « Hébron s’appelait auparavant Cariath-Arbe, c’est-à-dire la ville d’Arbé ; cet homme (Arbé) était le plus grand ou le père des Enakims. » Cf. Cornélius a Lapide, Masius et autres commentateurs, sur Jos., xiv, 15 ; Knabenbauer, Cursus Script.sacrx… ir. Matth., t. il, p. 517. Il faut du reste remarquer que saint Jérôme lui-même a fait par deux fois ses réserves. Ainsi dans la lettre à Eustochius, parlant d’Adam comme du quatrième personnage enterré dans la grotte d’Hébron, il ajoute : Licet plerique, Caleb putent, cujus ex latere memoria monstratur. Et dans le livre De situ et nominibus, il dit du premier homme : Licet eum quidam positum in loco Calvarise suspiœnttir. Pourquoi, malgré tout, tenait-il pour Hébron ? Peut-être trouvait-il chez les Juifs une tradition indépendante du livre de Josué et qui lui semblait justifier son interprétation préférée.

III. OPINION QUI LA PLACE AU CALVAIRE.

L’autre tradition place la sépulture d’Adam au Calvaire.

En Orient.

Elle apparaît, pour la première fois, au iiie siècle, dans Origène, Comment, séries in Matth., n. 126, P. G., t. xiii, col. 1777 : Venit ad me traditio quxdam talis, quod corpus Adse primi hominis, ibi sepultum est ubi crucifixus est Christws. Au siècle suivant, les témoignages se multiplient en Orient. C’est ainsi que, dans un beau mouvement d’éloquence, saint Éphrem nous montre Jésus-Christ, au jour de la résurrection des corps, plantant la croix son étendard au Calvaire, sur le tombeau d’Adam : Crucis vexillum super Adse tumulum de fixurus. Opéra syriace et latine, Rome, 1743, t. iii, p. 499. Dans sa lxxxv 6 homélie, In Joann., P. G., t. ux, col. 459, saint Jean Chrysostome signale la même tradition : Quidam dicunt Adamum ibi mortuum esse et jacere. Elle se trouve avec plus de détails dans saint Épiphane, Hæres., xlvi, n. 5, P. G., t. xli, col. 844-845 ; le premier homme, après son expulsion du paradis terrestre, aurait d’abord habité dans les environs, puis il serait venu en Judée, et aurait été enseveli au Golgotha. Même récit dans le commentaire In Isaiam prophetam, qu’on attribue souvent à saint Basile et qui, tout au moins, paraît être de la même époque. P. G., t. xxx, col. 348. Mais il y a différence de sources ; cet auteur fonde son récit sur une tradition orale : Ejusmodi auteni fama oblinuit, quæ per traditionem non scriptam in Ecclesia servatur ; saint Épiphane le rattache à des docixiients écrits : Idquod e librorum monumentis didicimus. D’après une homélie De passione et cruce Domini, qui se trouve dans les plus anciennes collections des œuvres de saint Athanase, mais qui ne semble pas être de lui, les sources seraient juives, P. G., t. xxviii, col. 208 : Non alibi patitur, non alio loco cruci af/igitur, quam in Calvarise loco, quem Hebrœorum magistri aiunt fuisse Adami sepulcrum. Au Ve siècle, on retrouve la tradition dans le poète Nonnus de Panapolis, Paraphr. in Joa., xix, P. G., t. xliii, col. 901, et dans Basile de Séleucie, Orat., xxxviii, n. 3, P. G., t. lxxxv, col. 410. Celui-ci ajoute un détail assez singulier : Ex Judseorum Cabala Adse cranium aiunt ibi repertum, idque Salomonem pro supereminenti sua sapientia dignavisse. Cujus rei gratia eum locum Calvarise nomen retulisse ferunt.

Les témoins grecs des siècles suivants ne font, en général, que marcher sur les pas de leurs devanciers. Tels, à une époque indéterminée, l’auteur inconnu des Qusestiones ad Antiochum, P. G., t. xxviii, col. 627 ; au vie siècle, Anastase du mont Sinaï, Contem.pl. in Hexam., l. VII, P. G., t. lxxxix, col. 944 ; au viiie siècle, saint Germain de Constantinople, qui accorde une pleine créance à la tradition, vera ac antiqua Patrum traditio, Sermo in Dominici corporis sepult. ; Rerum ecclesiast. conte.mpl., P. G., t. xcviii, col. 256, 395 ; au Xe siècle, Siméon Métaphraste, Vitse sanctorum, Il janvier, P. G., t. cxiv, col. 478-479 ; au xie siècle, Théophylacte, Enarrat. in Matth., xxvii, et in Marc, xv, P. G., t. cxxiii, col. 468, 668, et l’historien Georges Cedrenus qui nous dit d’Adam, sans donner d’autre preuve : Sepultus est in terra Hierosolymitana, ut Josephus narrât, Histor. compend., P. G., t. cxxi, col. 42, 819, à rapprocher de Michel Glycas, Annal., part. II, P. G., t. CLViii, col. 239 ; au xiie siècle, Euthymius, Comment, in Matth., xxvii, P. G., t. cxxix, col. 720, et Théophane Cerameus, Homil., xxvii, P. G., t. cxxxii, col. 582583. Deux témoignages du xe siècle méritent cependant une attention spéciale pour la manière dont ils expliquent la sépulture d’Adam au Calvaire, ce sont ceux de l’évêque syrien Moses Bar Cepha, De parad., part. I, c. xiv, P. G., t. cxi, col. 498, et du patriarche d’Alexandrie Eutychius ou Said Ibn Batrik, Annales, P. G., t. cxi, col. 911, 914-918. Après leur déchéance, nos premiers parents auraient habité sur la frontière occidentale du paradis terrestre, dans la caverne des Trésors ; c’est là, également, qu’ils auraient été ensevelis. Mais, au moment du déluge, Noé pritdans l’arche le corps’l’Adam et les fameux trésors venus du paradis. Plus tard, Sem et Melchisédech jeune alors auraient transporté à Jérusalem et enterré au lieu du Calvaire le corps ou la tête du premier homme. Tout ce récit se retrouve dans l’apocryphe intitulé le Livre d’Adam des chrétiens de l’Orient, ou la Contradiction d’Adam et d’Eve, composé, vraisemblablement en Egypte, au Ve ou vie siècle de notre ère. Voir A. Dillmann, Das christliche Adambuch des Morgent andes, Gœttingue, 1853.

Abstraction faite des divergences de détail, il y a donc en Orient une tradition ancienne et constante en faveur de la sépulture du premier homme au Calvaire ; elle explique la présence au Saint-Sépulcre de la chapelle dite d’Adam. Quaresmius, Terrée Sanctse elucidalio, t. ii, l. V, c. iv ; Ms r Mislin, Les Saints Lieux, t. il, c. XXIV.

En Occident.

En Occident, les témoignages anciens sont beaucoup plus rares, surtout les témoignages authentiques ; car les droits de la critique exigent qu’on élimine plusieurs des l’ères souvent cités. Ainsi le Sermo de resurrectione Christi n’est pas de saint Cyprien, mais d’un auteur beaucoup plus récent ; le Sermo, lxxi, de temyore, attribué à saint Augustin, n’est pas de ce Père, principalement dans le passage relatif au tombeau d’Adam. P. L., t. xxxix, col. 1751. Le Carmen adversus Marcionem n’est pas de Tertuliien ; il est cependant fort ancien, composé sûrement avant la fin du IVe siècle. C’est un premier document où la tradition en faveur de la sépulture du premier homme au Calvaire est nettement exprimée, P. L., t. il, col. 1067 :

Golgotka locus est, capitis calvaria quondam : Lingua palerna prior sic illum nomine dixit ; Hic médium terne, est, hic est Victoria signum : Os magnum hic veteres nostri docuere repertum. Hic hominem primum suscepimus esse sepultum, Hic patitur Christus, pio sanguine terra madescit, Pulvis Adx ut possit veteris cum sanguine Christi Commixtus, stitlanlis aqux virtute lavari.

Vient ensuite saint Ambroise, qui mentionne la tradition, ut Hebrsei disputant, et s’en sert lui-même. Exposit. Evang. sec. Lucam, l. X, n. 114, et Epist., lxxi, n. 10, P. L., t. xv, col. 1832 ; t. xvi, col. 1253. On l’a vii, saint Jérôme n’était pas favorable à cette opinion ; surtout il n’aimait pas qu’on vît, au moment où Jésus-Christ aurait été crucifié au-dessus du tombeau d’Adam, l’accomplissement de ces paroles prophétiques, rapportées par l’apôtre, Eph., v, 14 : Surge qui dormis, et exsurge a mortuis, In Epist. ad Eph., v, 14, P. L., t. xxvi, col. 526 et surtout In Evangel. S. Mattlt., xxvii. 33 : Favorabilis interpretalio et mideens aurem populi, nec tamen vera, ibid., col. 209. Il faut cependant remarquer qu’il a reconnu l’existence de la tradition, De situ et nomin., loc. cit., et que dans une lettre à Marcella, qu’il n’a certainement pas ignorée, si même il ne l’a inspirée, Paula et Eustoehium, ses filles spirituelles, en ont fait usage : In liac urbe, imo in hoc tune loco, et habitasse dicitur et mortuus esse Adam, etc. Epist., xlvi, P. L., t. xxii, col. 485.

On ne cite pas en Occident d’autres documents anciens, en faveur de la sépulture d’Adam au Calvaire. Mais, plus tard, aux xvf, XVIIe et XVIIIe siècles, cette opinion jouit d’une grande vogue auprès des exégètes, des théologiens et des historiens ecclésiastiques ; il suffit de nommer Tolet, In c. xix Joa., annot. 12 ; Suarez, In 7// am part. Summse, q. xi.vi, a. 10, n. 6-10 ; liaronius, Annales Eccles., ann. Cluisli 34, n. 108-111 ; Henschenius, Acta sanctorum, t. viii, p. 541-542 ; Benoit XIV, Comment. D. N. Jesu Christi Matrisque ejus festis, part. I, c. CCLXXi. Plusieurs distinguent nettement la question traditionnelle de la question étymologique por’uuil sur l’origine du mot Calvaire : In hoc, remarque Suarez, aliud est loqui de re ipsa, an scilicet, Adamus sepultus esset in luco Calvaria ; , aliud de denominalione Calvariæ, unde sumpta sit. Quod ergo ad rem attinet, imprimis non videtur contemnenda tantorum Patrum traditio. Neque enim verisimile est non fuisse ex aliquo probabili fundamenlo ortam.

IV. CONCLUSION. —

Que conclure de tout ceci ? La tradition qui place au Calvaire la sépulture du premier homme est assurément digne de respect ; les objections que lui a faites saint Jérôme ou qu’on lui a faites depuis, sont loin d’emporter pièce. Elle ne s’impose pourtant ni à la foi ni à la critique, car elle n’a pas de caractère dogmatique, ce qu’elle affirme est peu précis ou ne s’accorde pas pleinement, ses origines sont nuageuses. On voudrait surtout connaître la valeur de ces sources primitives, documents écrits ou traditions orales de provenance juive, sur lesquelles s’appuient finalement les plus anciens témoignages patristiques. Mais c’est là le côté le plus obscur du problème. Peut-être pourrait-on signaler un point de contact entre cette opinion et ce que dit de notre premier père le Livre des jubilés ou Petite Genèse, apocryphe juif qui daterait soit de l’époque même où Notre-Seigneur est né, opinion d’Ewald, soit du siècle qui a précédé cette naissance, opinion de Dillmann. Au chapitre m de ce livre, on indique comme séjour d’Adam après son expulsion de l’Éden, la terre d’Eldad, « où il avait é^é créé ; » au chapitre iv, on place aussi son tombeau dans la terre où il avait été créé, et cette terre, d’après le chapitre VIII, comprend le mont Sion, « centre de la terre. » Voir Rônsch, Das Buch der Jubilarn oder die Kleine Genesis, Leipzig, 1874, p. 261, 312. Ainsi, d’après cet apocryphe auquel les anciens Pères, et saint Épiphane en particulier, ont fait des emprunts avérés, la Judée, et plus spécialement Jérusalem, centre du monde pour les Juifs, se trouverait être le lieu de la sépulture du premier homme. De cette donnée générale à l’opinion plus caractérisée de la sépulture au Calvaire, la distance n’est pas grande.

Quoi qu’il en soit, il y a dans la tradition qui nous montre le sang de Jésus-Christ dégouttant sur le crâne desséché du vieil ancêtre, une haute idée qu’il faut retenir, l’idée du rapport intime qu’il y eut entre l’effusion du sang du second Adam au Calvaire et la rédemption du premier Adam. En ce sens élevé, celui-ci fut moralement au Golgotha, recevant à un titre spécial l’application du sang rédempteur. C’est la pensée que développe fort heureusement, sous une forme imaginative, la seconde partie de l’Evangile de Nicodème ou ia Descente du Christ aux enfers, quand il nous représente le second Adam s’adressant tout d’abord au premier, pour lui communiquer la bonne nouvelle de sa délivrance. Tischendorf, Evangelia apocrypha, Leipzig, 1853, p. 379-382. La tête de mort et les ossements placés au pied des crucifix pourront toujours nous rappeler cette grande idée.

VI. Adam figure de Jésus-Christ.

Aux considérations qui précèdent s’en joint naturellement une autre, très importante dans l’économie du dogme chrétien et le développement de la théologie catholique, celle du rapport typique d’Adam à Jésus-Christ, unique et universel rédempteur du genre humain. La doctrine est nettement formulée par saint Paul dansl’Épitre aux Romains, v, 14, où il appelle Adam forma futuri, c’est-à-dire la figure de l’Adam à venir, et dans la première Épitre aux Corinthiens, xv, 45, où il oppose au premier homme Adam, le nouvel ou dernier Adam : Primvs homo Adam… novissimus Adam. Dans ces deux passages, nous avons, d’un côté’, le chef moral du genre humain pécheur et déchu, de l’autre, le chef moral du genre humain racheté et relevé. Rom., v, 12, 18, 19 ; I Cor., xv, 21, 22. Adam est ainsi la figure de Jésus-Christ par antithèse, comme le remarque saint Augustin à propos de ces paroles de l’apôtre : Adiv qui est forma futuri : Cujus futuri, nisi Christi :’Et qualis forma, nisi a contrario ? De nupt. et concup., l. II, c. XXVII, P. L., t. xliv, col. 462-463. Et c’est cela surtout qu’il faut, d’après les Pères et les docteurs de l’Église, placer le rapport typique d’Adam à Jésus-Christ. S. Irénée, Cont. hser., l. III, c. xxii, P. G., t. vii, col. 958 ; Origène, Comment, in Epist. ad Rom., l. V, n. 1, P. G., t. xiv, col. 1007 ; S. Jean Chrysostome, In Epist. ad Rom., homil. x, n. 1, P. G., t. lx, col. 475 ; S. Ambroise, Comment, in Epist. ad Rom., v, 14-15, P. L., t. xvii, col. 96-97 ; S. Thomas, Exposit. in Epist. ad Rom., c.v, lect. iv. L’antithèse existe entre la personne des deux chefs et le genre d’influence qui leur est propre : Adam n’est de soi, et déchu il n’est en fait, qu’un principe de vie naturelle, tandis que le Christ, uni hypostatiquement à la personne du Verbe et rédempteur du genre humain, est de soi et en fait un principe de vie surnaturelle : Factus est primus homo Adam in animant viventem ; novissimus Adam in spirilum vivificantem. I Cor., XV, 45. L’antithèse existe surtout entre les actes des deux chefs et les conséquences qui s’ensuivent ; d’un côté, désobéissance, état de péché et de déchéance, mort ; de l’autre, obéissance, justification et réhabilitation, résurrection : Sicut enim per inobedientiam unius hominis pcccatores constituti sunt multi, ita et per unius obeditionem jusli constiluentur nvulti. Rom., xv, 19. Et sicut in Adam omnes moriuntur, ita et in Christo omnes vivificabuntur. I Cor., xv, 22.

Toutefois, par le fait même qu’Adam et Jésus-Christ sont tous deux principe de vie pour les autres hommes, il y a nécessairement dans le rapport typique de l’un à l’autre plus qu’une antithèse. En tant que créé immédiatement par Dieu et constitué souche physique et chet moral de l’humanité surélevée, destiné à devenir le père et l’éducateur d’une race nombreuse et, en vue de cette mission, orné de dons insignes et tout à lait exceptionnels, Adam est, par rapport de similitude, la figure de celui qui devait être conçu dans le chaste sein de la "Vierge Marie, grâce à une action immédiate du Saint-Esprit, constitué par Dieu chef des hommes et leur maître par excellence, orné même dans sa nature humaine des dons les plus sublimes de science et de sainteté. Si la personnalité divine, qui prime tout en Jésus, fait que la réalité surpasse infiniment la figure, celle-ci n’en reste pas moins vraie, bien qu’imparfaite. Aussi Tertullien émet-il une idée aussi juste qu’élevée, quand il nous montre le divin ouvrier s’attachant avec un amour de prédilection à la formation du premier corps humain, et fixant en même temps son regard sur le second Adam, le Christ, comme sur un idéal qu’il entrevoyait déjà dans l’avenir : Quodcumque limus exprimebatur, Christus cogitabatur homo futurus. De resurr. carn., c. vi, P. L., t. ii, col. 802. Cf. Prudence, Apotheosis, vers 1028 à 1041, P. L., t. lix, col. 1002. Pour garder à cette idée toute sa beauté, il n’est pas nécessaire de recourir à cette supposition singulière, faite par les Juifs et rapportée par Eugubinus dans sa Cosmopoeia, Gen., i, Venise, 1591, fol. 40, à savoir que le Fils de Dieu aurait dès lors pris une forme hur.iaine pour façonner lui-même de ses mains et à son propre modèle le corps de son premier ancêtre.

Adam est encore figure de Jésus-Christ sous un autre aspect, tiré de son rapport non plus au genre humain, mais à Eve son épouse. Gen., ii, 21-24. Le premier homme endormi d’un sommeil extatique, pendant que Dieu forme la première femme d’une de ses côtes, c’est Jésus-Christ, endormi sur la croix du sommeil d’une courte mort, pendant que l’Église sort de son côté entr’ouvert par la lance du soldat. Tertullien, De anima, c. xl, P. L., t. ii, col. 725 ; S. Augustin, In Jua., tr. IX, n. 10, P. L., t. xxxv, col. 1163 ; S. Thomas, Sum. theol., ! % q.xcn, a. 2, 3. Adam, se trouvant pour la première fois en face d’Eve, reconnaissant en elle l’os de ses os et la chair de sa chair, et s’écriant dans la pleine conscience du grand mystère qui s’est accompli : « C’est pourquoi l’homme laissera son père et sa mère, pour s’attacher à son épouse, et ils seront deux en une seule chair, » c’est sous une figure prophétique le Christ aimant l’Église son épouse jusqu’à tout quitter et à mourir pour elle. Ephes., v, 25-32 ; S. Augustin, loc. cit. Aussi, après avoir rappelé les paroles d’Adam, saint Paul ajoute : « C’est là un grand mystère, je veux dire dans le Christ et dans l’Eglise. »

Remarquons enfin que, dans son rapport typique au Christ rédempteur, Adam n’est pas complet sans Eve. Dans l’ordre de la chute et du péché, Adam et Eve ne forment, à proprement parler, qu’un groupe, celui de nos premiers ancêtres, celui des vaincus de Satan, comme dans l’ordre de la rédemption et du salut, Jésus et Marie, sa mère, ne forment aussi qu’un groupe, celui de nos seconds ancêtres, celui des vainqueurs de Satan. Mais cette considération, riche dans la littérature patristique, est en dehors de notre sujet. Voir Eve.

1° Sur la création d’Adam et son élévation à l’état surnaturel : S. Thomas, Sum. theol., 1% q. xc-xcv ; Suarez, De opère sex dierum, 1. III ; Bellarmin, De gratta primi hominis ; Gotti, tr. X, De homine, q. m ; Mazzella, De Deo créante, disp. IV ; Palmieri, De Deo créante, part. II, c. ii, a. 1 ; Christ. Pesch, Praslect. dogmat., t. iii, De Deo créante, sect. iv, a. 1.

2° Sur le péché d’Adam : S. Augustin, De Gen. ad Int., 1. XII ; De civit. Dei, l. XIII, c. xi-xv, P. L., t. xxxiv, col. 429 sq. ; t. xli, col. 418 sq. ; S. Thomas, Sum. theol, II", II*. q. clxiii-clxiv ; Suarez, De opère, l. III, c. xxi ; 1. IV ; Bellarmin, De amissione gratix, 1. III ; Gotti, loc. cit., q. v ; Mazzella, loc. cit., disp. V, a. 1 ; Palmieri, loc. cit., c. iii, th. lxv ; Christ. Pesch, loc. cit., prop. xxv.

3° Sur le salut d’Adam : S. Irénée, Cont. hær., l. III, c. xxiii, P. G., t. vii, col. 960 ; Philippe de Harveng, Responsio de salute primi hominis, P. L., t. CCIII, col. 593-622 ; Alfonsus a Castro, Adv. hæres., l. II, au mot Adam et Eva, Opéra omnia, Paris, 1578, t. I. p. 108 sq. ; Suarez, De oper. sex dierum, l. IV, c. ix ; Bellarmin, De amissione gratix, 1. 111, c. xii ; Gotti, toc. cit., q. vi, dub. iv ; Noël Alexandre, Hist. ecclesiast., édit. Roncaglia, Paris, 1740 sq., t. I, diss. III, De Adamo et Eva, a. 3 ; t. v, diss. XVII, Adv. Tatianum, a. 1.

4° Sur la sépulture d’Adam au Calvaire : Suarez, In III" Summse, q. xlvi, a. 10, n. 6-10 ; Gretser, Tract, de S. Cruce, l. I, c. XVIII, Opéra omnia, Ratishonne, 1734, t. I ; Duguet, Traité de la croix, Paris, 1733, t. VIII, col. xvil-xviii, Molanus-Paquot, De historia SS. imaginum, Loùvain, 1771, I. IV, c. xi. — Dans le sens opposé : Jean (Niculaï, De sepulchris Hebrxorum, loc. cit. ; Jean Gerhard, Harmonise evangelistnrum, part. IV, Genève, 1645, fol. 197-198.

5° Sur Adam figure de Jésus-Christ : dans l’appendice aux œuvres de saint Ambroise, Serm., xlv, De primo Adam et secundo, P. L., t. xlii, col. 691-692 ; S. Fulgence, Serm., ii, n. 7, P. L., t. lxv, col. 728-729 ; Jacq. Salian, Annales ecclesiast. V. T., ad ann. mundi 930, n. 8-9 ; Bossuet, Élévations sur les mijstères, viii’sem., 2’et 3 1 élevât.

6° Sur la littérature apocryphe et les légendes orientales relatives à Adam : Will. Smith, A dictionary of Christian biography, art. Adam (Books of) ; M" Batiffol, dans le Dictionnaire de la Bible de M. Vigouroux, art. Apocryphes (Livres), 6* ; dom Cahnet, Dict. de la Bible, art. Adam ; d’Herbelot, Biblioth. orit, .taie, Mæstricht, 1776, au mot Adam ; David Mill, Dissertatio de mohammedismo ante Mohammeden, dans le Thésaurus d’Ugolini, t. xxiii, p.1130-1131 ; Weil, Bibl. Legenden der Muselmann r.

X. Le Bachelet.

2. ADAM Jean, né à Limoges, le 28 septembre 1605, combattit vigoureusement les jansénistes et les calvinistes, et mourut à Bordeaux, le 12 mai 1684. — Calvin détruit par soi-même et parles armes de S. Augustin, in-8o, Paris, 1650, 1689. — Le tombeau du jansénisme, in-4o, Paris, 1654. — Réponse à la lettre de M. Daillc, ministre de Charenton, in-4o, Poitiers, 1660. — Projet présenté à Messieurs de la religion prétendue réformée, in-8o, Paris, 1C63 ; Poitiers, 1663. — Le triomphe de la très sainte eucharistie, in-8o, Sedan, 1671 ; Paris, 1671 ; Bordeaux, 1672. —Lettre à M. Hesperien, ministre de Soubize, in-8o, Bordeaux, 1675.

De Backeret Sommervogel, Bibl. de la C" de Jésus, Bruxelles, 1890 et 1897 ; t. I, col. 43-47 ; t. VIII, col. 1569.

C. SOMMERVOGEI »