Dictionnaire de théologie catholique/ALBERT archevêque de Mayence

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A. Beugnet
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 342).

2. ALBERT archevêque de Mayence, fils de l’électeur Jean IV de Brandebourg et frère de l’électeur Joachim Ier, naquit le 28 juin 1190, devint très jeune chanoine de Mayence et de Trêves, puis fut nommé, en 1513, archevêque de Magdebourg et administrateur d’Halberstadt, en 1514 archevêque de Mayence, primat de Germanie et électeur du Saint-Empire, enfin, en 1518, cardinal de la sainte Église romaine. En raison même de sa haute situation, il fut mêlé aux luttes doctrinales d’où naquit l’hérésie protestante. Il avait reçu du pape Léon X la mission de faire publier en Allemagne l’indulgence pour la construction de la basilique Saint-Pierre, et il choisit le dominicain Tetzel pour être le prédicateur de cette indulgence dans les villes allemandes. Les prédications de Tetzel provoquèrent, on le sait, les 95 thèses contre les indulgences que Luther fit afficher aux portes de l’église de Wittemberg, la veille de la Toussaint 1517. Le moine augustin adressa à l’archevêque de Mayence une copie de ses thèses, en l’accompagnant d’une lettre dont l’historien Audin cite des extraits et qu’il apprécie en ces termes : « Elle est humble, soumise et dévote. » Histoire de Luther, Paris, 1839, t. i, p. 162. Albert de Mayence ne répondit pas. On a tout lieu de croire que l’orgueil du moine révolté ne pardonna pas à l’archevêque ce silence dédaigneux. En 1421, Albert porta une sentence d’interdit contre un prêtre marié de la ville de Halle. Luther, alors enfermé au château de la Wartbourg, prit occasion de ce fait, pour envoyer au prélat une lettre insolente dans laquelle il le traite de « papiste » et le somme d’abolir « des pratiques idolâtres ». Il ajoute que, s’il n’est point écouté, il publiera un pamphlet qui aura pour titre : L’idole de Halle. Audin, op. cit., t. i, p. 417. L’archevêque répondit par une lettre pleine de mansuétude, mais qui ne donna pas satisfaction à l’hérésiarque. Le pamphlet annoncé contre l’idole de Halle fut publié : « C’est, dit Audin, un ramas d’ordures et de lâches outrages contre l’archevêque. » Op. cit., t. i, p. 418. Quatre ans plus tard, 1526, Luther, alors marié, écrivit une troisième lettre à l’archevêque de Mayence. Il osa proposer au prélat de prendre lui-même une femme, afin de donner au monde un exemple qui ne saurait manquer d’être efficace. Cochlæus, De actis et scriptis Martini Lutheri, Paris, 1565, p. 121-123. Albert de Mayence ne répondit encore une fois que par le dédain, et Luther dans ses lettres à des amis se laissa aller de nouveau, contre le prélat, à des injures si grossières que l’historien français ose à peine les traduire. Audin, op. cit., t. ii, p. 260. — Albert de Mayence mérita l’éloge de ses contemporains, même des protestants, pour son esprit cultivé, sa bienveillance de caractère et sa grande générosité. Il protégea les arts, les lettres et les sciences. Il s’intéressa surtout aux arts religieux qui tiennent à la construction et à la décoration des églises. Il fonda, avec son frère Joachim de Brandebourg, l’université de Francfort-sur-l’Oder, en 1506. Il entreprit de fonder aussi une université à Halle, et il obtint à cet effet, en 1531, des privilèges du pape Clément VII ; mais les luttes religieuses qui déchiraient alors l’Allemagne l’empêchèrent de mener à bonne fin ce projet. Ajoutons que c’est Albert de Mayence qui le premier accueillit en Allemagne les disciples de saint Ignace qui devaient être pour l’hérésie de si terribles adversaires. Il mourut à Mayence, le 24 septembre 1545.

Cochæus, Historia de actis et scriptis Martini Lutheri, Paris, 1565 ; Maimbourg, Histoire du luthéranisme, Paris, 1686 ; Audin, Histoire de Martin Luther, 2 vol., Paris, 1839 ; Callia christiana, Ecclesia Moguntinensis, Paris, 1731, t. v, p. 516 ; Moreri, Dictionnaire historique, Paris, 1759, t. i, p. 268 ; Michaud, Biographie universelle, 2e édit., Paris, édit. Vivés, s. d., t i, p. 332.

A. Beugnet.