Dictionnaire de théologie catholique/BARNABE (Épitre dite de saint)

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 2.1 : BAADER - CAJETANp. 211-214).

BARNABE (Épître dite de saint). — I. Histoire du document. II. Contenu. III. Authenticité. IV. Intégrité. V. Enseignements.

I. Histoire du document.

L’épître, dite de saint Barnabé, adressée à des inconnus par un auteur anonyme pour combattre, au moins indirectement, certaines prétentions juives et enseigner la voie du salut, a été connue de bonne heure et citée surtout dans le milieu alexandrin. On suit sa trace dans la littérature patristique du IIe siècle au IX e. Certaines comparaisons de textes permettent de croire qu’Hermas, Vis., 111, 4 ; Mand., n, 4, et Ram., xix, 5, 11 ; saint Justin, Dial. cum Tryph., XL, et Ram., vii, 6, 8, saint Irénée, Cont. hær., iv, 17, 6 ; v, 28, 3, et Ram., ii, 10 ; xv, 4, l’ont eue sous les yeux. Tertullien s’en sert dans deux passages, sans citer sa source, Adv. Marc, iii, 7 ; Adv. Jud., xiv, /’. L., t. ii, col. 331, 640, et Ram., vii, 4, 6, 8. Clément d’Alexandrie, qui n’approuve ni ce qu’elle renferme d’invraisemblable sur l’hyène, Pœd., ii, 10, P. G., t. vin, col. 500, ni son interprétation du Ps. I. Strom., ii, 15, P. G., t. viii, col. 1005, en cite de longs extraits. Strom., ii, 6, 7, 18, 20, P. G., t. viii, col. 965, 969, 1021, 1060 ; Strom., v, 8, 10, P. G., t. ix, col. 81, 96. Et Origène conjecture avec raison qu’elle a fourni à Celse son argument contre les apôtres. Cont. Cels., i, 63. P. G., t. xi, col. 777. Clément d’Alexandrie, au dire d’Eusèbe, H. E., vi. H, P. G., t. xx, col. 549, et même Origène, In Rom., I, 24, P. G., t. xiv, col. 860, la tinrent en si haute estime qu’ils la citaient comme Écriture. I A partir du IXe siècle, le silence se fait sur cette épître ; on n’en parle plus ; on ignore son existence. Mais, au XVIIe siècle, elle est retrouvée dans un texte grec fort mutilé, auquel manquent les cinq premiers chapitres, et dans une version latine, très ancienne, à laquelle manquent les quatre derniers chapitres. Texte et traduction se complétaient et permirent de reconnaître l’épître que l’antiquité chrétienne attribuait à saint Barnabe. La première édition, préparée par l’Anglais Usher, fut détruite dans un incendie, en 1644 ; celle de dom Ménard fut publiée par dom d’Achéry, en 1645. Grâce à la collation de nouveaux manuscrits, Isaac Voss en donna une nouvelle, moins imparfaite, en 1646. Dans la suite, Cotelier en 1672, Lemoyne en 1685, Leclerc en 1698, Russel en 1746, Gallanden 1765 et Hefele en 1839, entre autres, s’appliquèrent à améliorer le texte. Dressel put utiliser des manuscrits nouveaux et publia, en 1857, l’édition la moins incorrecte. Mais jusque-là on n’avait pu retrouver le commencement du texte grec, qu’on était obligé de remplacer provisoirement par la vieille traduction latine. Heureusement qu’en 1859 Tischendorf découvrit au couvent de Sainte-Catherine, sur le mont Sinaï, un codex du ive siècle, où le texte grec de l’épître était intégralement transcrit à la suite des livres du Nouveau Testament. Il publia le tout, en 1862, à Saint-Pétersbourg, et, en 1863, à Leipzig. Aussitôt parurent les nouvelles éditions critiques de Dressel, en 1863 ; de Volkmar, en 1864 ; d’Uilgenfeld, en 1866 ; de Muller, en 1869 ; de Gebhardt en 1875. En 1875, nouvelle découverte : l’archimandrite Philothée Bryennios trouva à Constantinople un codex du xie siècle renfermant dans leur intégrité les épîtres de Clément de Rome et de Barnabe ainsi que la Didaché. Se contentant de publier d’abord l’épître de saint Clément, il transmit une copie fidèle de celle de saint Barnabe à Hilgenfeld, qui l’utilisa dans son Der Brief des Barnabas, 1877, Leipzig ; il la publia à son tour avec la Didaché, en 1883, à Constantinople. Entre temps, Gebhardt et Harnack donnèrent la seconde édition de leurs Patrum ajiostolicorum opéra, Leipzig, 1878. Enfin, Funk, tenant compte des récentes découvertes, inséra l’épître de saint Barnabe en tête de ses Palrum apostolicorum opéra, Tubingue, 1881, avec une traduction latine et des notes critiques. C’est cette dernière édition qui sera citée dans le courant de l’article. Une troisième édition a paru en 1901.

11. Contenu. — L’épître de Barnabe, qu’on regarde comme un traité apologétique contre les Juifs ou comme une homélie prèchée à un auditoire chrétien, se divise en deux parties très distinctes et d’inégale longueur : première, i-xvi ; seconde, xvii-xxi. — Première partie. — Après avoir salué ses destinataires et loué les dons spirituels qu’ils ont reçus de Dieu, l’auteur regarde comme une joie et un devoir de leur écrire pour rendre leur foi et leur science parfaites, non pas à titre de docteur, mais comme l’un d’entre eux (i). Les jours sont mauvais : il s’agit de rechercher les justifications du Seigneur. Or Dieu a prévenu par ses prophètes qu’il n’a besoin ni de sacrifice, ni d’holocauste, ni d’ohlation : tout cela est abrogé. C’est maintenant la loi nouvelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il importe de la bien comprendre, d’accomplir avec soin son salut et de déjouer les séductions du Mauvais (n). Dieu ne veut pas le jeûne corporel, mais celui qui consiste dans l’abstention de toute injustice et la pratique de la charité. Il nous en a prévenus d’avance pour que nous ne soyons pas affligés par la loi comme de simples prosélytes (m). Ce qui sauve actuellement c’est de fuir les œuvres d’ini quité, d’éviter tout contact avec le péché et les méchants ; car l’heure a sonné du scandale prédit par les prophètes : donc se garder d’accumuler faute sur faute, sous prétexte d’être couvert parle testament nouveau. Caries Juits, en se tournant vers les idoles, ont perdu pour toujours le testament qu’ils avaient reçu par Moïse. Attention donc aux derniers jours. Pour interdire au Noir l’entrée de nos âmes, il faut fuir la vanité, haïr les œuvres de la voie d’iniquité, devenir le temple spirituel et parfait de Dieu ; car si, malgré les miracles et les prodiges, les Juits ont été écartés, prenons garde d’être rejetés comme eux (iv). Le Fils de Dieu est venu ; il s’est incarné ; il a répandu son sang sur le bois pour racheter nos péchés (v). Tout cela, incarnation, passion, a été préfiguré (vi). Le bouc émissaire (vu), la vache rousse, double image du Christ, inintelligible à quiconque n’a pas entendu la parole de Dieu (vin). Dieu a circoncis nos oreilles et notre cœur. Quant à la circoncision, dans laquelle les Juifs mettaient leur confiance, elle a été abrogée. Dieu n’a pas prescrit la circoncision de la chair ; en la pratiquant, les Juifs, trompés par le mauvais ange, ont outrepassé ses ordres. Sans doute la circoncision charnelle a été donnée par Abraham à ses 318 serviteurs ; mais c’est là un mystère relatif à Jésus ; car 18 s’écrit t ?), commencement du nom de’Irjffoûç, et 300 s’écrit t, qui est le signe de la croix (ix). En interdisant certains mets, Moïse n’a eu en vue qu’un sens spirituel (x). — Dieu nous a également annoncé d’avance le mystère de l’eau et de la croix : l’eau c’est le baptême qui efface les péchés (xi) ; Moïse, priant, les bras étendus, et le serpent d’airain représentent Notre-Seigneur sur la croix (xii). Reste à savoir quel est le peuple héritier, celui auquel appartient le testament. Jacob, cadet d’Ésaù, et Éphraïm, cadet de Manassé, sont les préférés de Dieu et présagent ainsi notre élection (xm). Dieu a donné un testament aux Juifs, mais les Juifs, par leurs péchés, s’en sont rendus indignes, et c’est nous qui, par Jésus, avons été choisis à leur place (xiv). Le sabbat du décalogue figure le jour du repos éternel (xv). Le temple n’est pas celui de pierre, orgueil des Juifs et déjà détruit ; c’est notre cœur devenu, par la rémission des péchés, l’espérance et la foi, le tabernacle de Dieu (xvi).

Seconde partie. — Passons à un autre enseignement : il y a deux voies, celle de la lumière et celle des ténèbres, bien différentes l’une de l’autre. A la première président les anges de Dieu ; à la seconde, les anges de Satan. Il faut suivre l’une et éviter l’autre pour parvenir heureusement à la résurrection et à la récompense future (xvii-xx). Le jour du Seigneur est proche : je vous en conjure, soyez à vous-mêmes de bons législateurs, de bons conseillers ; écartez toute hypocrisie ; et que Dieu, le maître du monde, vous donne la sagesse, l’intelligence, la science, la connaissance du commandement, la persévérance (xxi).

L’auteur ne parle pas de la parousie comme la Didaché, mais il semble croire à l’imminence de la fin du monde. En conséquence il désire que « ses fils » soient prêts et n’imitent pas la fausse sécurité des Juifs. Il n’est pas dit que ces Juifs, à l’exemple des judaïsants, aient cherché, à imposer le joug de la Loi comme condition nécessaire avant de devenir chrétien ; mais à coup sûr ils s’abusent sur la valeur de leur alliance et méconnaissent le rôle du testament nouveau. C’est pourquoi l’auteur de l’épître, dépassant ici la pensée de saint Paul, ne se borne pas à prouver que la Loi a perdu sa valeur et que le rituel mosaïque est abrogé, il va jusqu’à prétendre que l’ancienne alliance a été brisée le jour même où furent brisées par Moïse les tables de la loi, que les diverses pratiques juives n’ont pas eu Dieu pour auteur, que les Juifs se sont trompés en prenant les prescriptions au pied de la lettre. Car ce que Dieu demandait, c’étail non pas les sacrifices sanglants, mais un Cœur contrit, non pas un jeune corporel, mais la pratiqua

des bonnes œuvres, non pas la circoncision de la chair, mais celle de l’oreille et du cœur, non pas l’abstinence de certaines viandes, mais la tuite des vices désignés par les animaux interdits. De telle sorte que, contrairement à la doctrine de saint Paul, il méconnaît complètement le côté historique de l’Ancien Testament pour n’y voir qu’une signification exclusivement spirituelle. Sans doute, il estime que l’Ancien Testament annonce le Nouveau ; il y signale même quelques figures annonçant, par exemple, le mystère de la croix ou l’appel des gentils à la place des Juifs ; mais son interprétation numérique des 318 serviteurs d’Abraham est plutôt digne de l’exégèse fantaisiste de la Cabale ; et, à propos du salut, il passe sous silence la grande pensée de saint Paul sur la justification gratuite et le rùle de la grâce, bien qu’il n’ignore pas l’importance capitale et l’absolue nécessité du salut, puisqu’il indique le moyen le plus sûr pour se sauver. Quant à ses explications scientifiques sur le lièvre, la belette et l’hyène, elles sont plus que rudimentaires et prêtent à sourire, mais on ne saurait lui en faire un reproche.

III. Authenticité.

Auteur, Heu et date. — L'épître que nous possédons est bien certainement celle que l’antiquité chrétienne attribuait à Barnabe. Mais ce Barnabe est-il vraiment l’apôtre, le compagnon et le collaborateur de saint Paul dans sa première mission ? C’est une question qui ne se posa même pas ; Clément d’Alexandrie, Strom., ii, 6, 7, 15, P. G., t. viii, col. 065, 969, 1005, et Origène désignent le Barnabe des Actes comme l’auteur de l'épître. On ne discuta qu’un seul point, celui de savoir si l'épître faisait partie ou non de l'Écriture. Contrairement à l’opinion de Clément d’Alexandrie, Eusèbe, H. E, vi, 13, P. G., t. xx, col. 518, on la tint pour non canonique, et c’est uniquement dans ce sens qu’il faut entendre Eusèbe et saint Jérôme, quand ils la rangent, l’un èv toïç vriôot ;, II. E., ii, 25, P. G., t. xx, col. 269, l’aulre parmi les apocryphes. De vir. ill., vi, P. L., t. xxiii, col. 619. Mais ni Eusèbe, loc. cit., ni saint Jérôme, In Ezcch., xliii, 19, P. L., t. xxv, col. 425, ni, à leur suite, Anastase le Sinaïte et l’auteur de la Stichométrie n’ont douté de son authenticité. Depuis le XVIIe siècle jusqu'à nous, c'était également l’opinion de Voss, Dupin, Cave, Le Nourry, Galland, Rosenmuller, Schmidt, Gieseler, Henke, Rordam, Franke, Alzog, Môhler, Freppel, Fessier, Nirschl, etc. ; ce n’est plus celle de la critique contemporaine.

Déjà Ménard avait émis quelques doutes ; Cotelier s'était prononcé contre l’authenticité. Et depuis, Noël Alexandre, Ceillier, plus récemment Hel’ele, Funk, Bardenhewer, entre autres, ont fait de même. Toutes les raisons d’ordre intrinsèque qu’on en donne sont loin d’avoir la même valeur, mais quelques-unes semblent décisives. Un allégorisme exagéré ; des opinions peu en harmonie avec l’enseignement des apôtres, en particulier avec celui de saint Paul ; l’ancienne alliance déclarée rompue le jour même où Moïse a brisé les tables de la loi, Barn., iv, 8, Funk, t. i, p. 10 ; des appréciations erronées sur les rites juifs, Barn., vii, viii, Funk, t. i, p. 20-26, par exemple, la circoncision attribuée à l’inspiration du diable, Barn., ix, 4, Funk, t. i, p. 28, les préceptes positifs touchant les sacrifices et les observances légales pris exclusivement au sens spirituel ; les apôtres, enfin, traités comme les plus grands pécheurs : autant de traits qui ne sauraient convenir au Barnabe du livre des Actes. Quel est donc l’auteur de l'épître ? S’appelait-il comme l’apôtre et l’identité du nom a-t-elle fait conclure à l’identité du personnage ? On n’en sait rien. Ce que l’on peut affirmer c’est que l’auteurest unjudéochrétien orthodoxe, et un alexandrin, comme le prouve l’emploi de l’allégorie, si chère à l'école d’Alexandrie, d’après Philon. Il s’adresse à d’autres judéo-chrétiens d’Alexandrie ou d’Egypte, à un groupe de fidèles qu’il connaît, qu’il aime et qu’il veut mettre en garde contre

l’erreur de certains Juifs. Car c’est surtout à Alexandrie que cette épître est connue et appréciée. Il écrit après 70, puisqu’il parle de la chute de Jérusalem et de la ruine du Temple comme de faits accomplis..Bam., xvi, 4, Funk, t. i, p. 48. Son allusion à la reconstruction du Temple trancherait la question de date, s’il s’agissait du temple matériel que l’empereur Hadrien laissa relever en 180131 ; des critiques, s’appuyant sur le contexte, pensent qu’il ne s’agit que du temple spirituel qu’est le chrétien. La prophétie, empruntée à Daniel et qu’il dit réalisée, Barn., iv, 4, 5, Funk, t. i, p. 10, est plus précise. Après dix rois, s'élèvera un petit roi qui en humiliera trois en un ; après dix cornes se dressera une petite corne qui en humiliera trois en une. L’expression rpeïç et rp ; a £?' é'v, étrangère au texte prophétique et deux fois répétée, est significative. Sa réalisation historique ne peut s’appliquer qu'à Domitien, non seulement parce qu’il est Io onzième de la série des empereurs, mais encore parce que, avec lui, troisième et dernier empereur ilavien, disparait la dynastie flavienne, ou mieux, parce que, du même coup, les deux fils de son cousin, le consul Flavius Clemens, dont il avait fait deux césars, perdent tout espoir de régner. Ce serait donc sous Nerva, 96-98, ou peu après, qu’auraitété écrite l'épître, à l’extrême limite du 1 er siècle. Cette interprétation n’est pas admise par tous les critiques, et il en est qui expliquent ce passage, comme la prophétie de Daniel, non pas de rois, mais de royaumes.

IV. Intégrité.

Malgré l’inégalité de longueur et la différence de sujet de ses deuxparties, cette épîtren’en forme pas moins un tout, sorti de la même plume, à l’exemple des épîtres de saint Paul, où les enseignements dogmatiques sont suivis de conseils pratiques. La seconde partie manque, il estvrai, dans la traduction latine, mais se trouve dans les manusciits grecs ; de plus, elle est annoncée en quelque sorte par deux passages, Barn., iv, 10 ; v, 4, Funk, t. i, p. 12, 14 ; enfin elle est connue de Clément et d’Origène : elle ne saurait donc être une addition due à une main étrangère. Quant à la première partie, elle ne renferme pas les interpolations qu’on a essayé d’y montrer ; les arguments mis en avant par Schenkel, iSludien und Kritiken, 1837, p. 652-686, ont été solidement réfutés par Hefele dans Tub. tlteologische Quartalschrift, 1839, p. 60 sq. ; Sendschreiben des Barnabas, p. 196 sq. ; ceux de Heydecke, Disscrlalio…, 1874, l’ont été par Funk dans ses Prolegomena, Pair, apost. opéra, t. i, p. x-xi. Actuellement, parmi les critiques, la question d’intégrité de l'épître de Barnabe ne soulève plus guère de difficultés. Les vues de Vôlter, Der Barnabasbrief neu un tersuc ht, dans Jalirbucher fur protest. Théologie, 1888, t. xiv, p. 106-144, et celles de J. Weiss, Der Barnabasbrief kritisch untersuchl, Berlin, 1888, ont été rejetées.

V. Enseignements.

1° L'épître de Barnabe et l’Ecriture sainte. — Ce qu’il y a de remarquable dans cette épître, qui compte à peine un peu moins de six cents lignes, c’est le nombre considérable de rapprochements qu’elle offre avec l'Écriture sainte. Funk, qui les a soigneusement relevés, Patr. apost., t.i, p. 561-566, en compte quatre-vingt-dix-neuf pour l’Ancien Testament et soixante-huit pour le Nouveau. Or, pour l’Ancien Testament, ce sont moins de simples allusions que des citations textuelles, où la version des Septante se trouve contrôlée et parfois corrigée par le texte hébreu. L’auteur a soin d’avertir qu’il cite, tantôt d’après cette formule générale : -céypaTrtai, to ; yÉ-fpaTrrai ; tantôt d’après cette autre : ï.iyzi à Kûpco ;, â 0éoç, tj ypaçï), 6 7rpo"fï)TY5c. Parfois il nomme le prophète dont il transcrit le témoignage, Daniel, Moïse, David, Isaïe. Mais il n’en agit pas de même avec le Nouveau Testament. Sur trois textes, il n’en signale qu’un comme Écriture, celui-ci : « Beaucoup d’appelés, peu d'élus. » Matth., xx, 16 ; Barn., iv, 14, Funk, t. i, p. 12. Les deux autres : « Jésus est venu appeler, non les justes, mais les pécheurs, » Matlh., IX, 13 ; £arn., , 9, p. 14 ; « Dieu jugera sans faire acception de personnes, » 1 Pet., I, 17 ; Uarn., IV, 12, p. 12, sont insérés sans observation spéciale. En dehors de ces trois emprunts textuels, plus de soixante passages accusent une relation étroite avec les divers livres du Nouveau Testament. Seules, les Épitres de saint Paul aux Colosses et à Philémon, celle de saint Jude, la seconde et la troisième de saint Jean ne donnent lieu à aucun rapprochement de pensées ou d’expressions.

2° Baptême, vie chrétienne, eschatologie. — L’auteur, familier avec les écrits de saint Paul, s’adresse à « des fils de dilection et de paix » , Barn., xxi, 9, p. 58, se dit 7repi[/Y)u, a. Barn., IV, 5, p. 10, 18. Il connaît la merveilleuse efficacité du baptême, qui est de remettre les péchés, çépov atpeatv àu, apTicov. Barn., xi, 1, p. 34. Faisant allusion au baptême par immersion, il écrit : « Nous entrons dans l’eau, pleins de péchés et de souillures, et nous en sortons pleins de fruits. » Barn., xi, 11, p. 36. « Avant de croire, notre cœur est un cloaque de corruption, rempli du culte des idoles, et la demeure des démons ; mais, en recevant la rémission des péchés, nous devenons des créatures nouvelles, complètement transformées, et le vrai temple spirituel de Dieu. » Barn., XVI, 7-10, p. 50. Pour atteindre au royaume de Dieu et jouir de la gloire, le fidèle doit passer par les afllictions et les tourments. Barn., vii, 11, p. 24 ; il doit suivre la voie de la lumière et de la justice, confesser ses péchés et s’appliquer à la prière avec une conscience pure, Barn., xix, 12, p. 56 ; car le chemin des ténèbres conduit à la mort éternelle et au supplice. Barn., xx, I, p. 56. Le jour du Seigneur est proche. Barn., xxi, 3, p. 56. Dieu a créé le monde en six jours. Il s’est reposé le septième : ce qui veut dire que Dieu consommera tout en six mille ans ; le septième jour, jour de repos, est celui où le Fils de Dieu mettra un terme à l’iniquité et jugera les impies et changera le soleil, la lune et les étoiles ; c’est le jour que nous célébrerons dans un magnilique repos, quand nous aurons été justifiés, que l’iniquité sera détruite et que tout sera renouvelé. Ce sabbat, qui mettra fin à tout, sera le commencement du huitième jour, c’est-à-dire du monde futur. Barn., XV, 1-8, p. 46-48. C’est là le chiliasme. C’est pourquoi, ajoute l’auteur, nous célébrons dans la joie le huitième jour (celui que la Didaché appelle le dimanche), car c’est le jour où Notre-Seigneur est ressuscité. Barn., XV, 9, p. -48.

Anges.

H y a des anges : les uns, porteurs de

lumière, sont lions et président à la voie du salut, qui mène l’homme à Dieu et à la récompense ; les autres sont les démons, Barn., xvi, 7, p. 50, ministres du Mauvais, TrovYipb ; "Apyoïv, Barn., iv, 13, p. 12 ; du Noir, ô uiXoc ;, Barn., iv, 10, p. 12 ; de Satan, Barn., xviii, 1, p. 52 ; ils président à la voie des ténèbres, ’inspirent le mal et ont trompé les Juifs, en leur faisant transgresser les ordres de Dieu. Barn., ix, 4, p. 28.

Christologie.

ha christologie de l’épître de Barnabe

est assez développée. L’incarnation et la rédemption sont nettement enseignées. Jésus-Christ, vrai Fils de Dieu, Barn., v, 9, p. 14, est venu dans la chair, Bar » ., v, 11, p. 16, pour détruire la mort et prouver la résurrection, Barn., v, 6, p. 14, pour sauver les hommes, v, 10, p. 11, et effacer le péché, v, 11, p. 14. Il a souffert sur le bois, v, 13, p. 16, a étécrucifié, vii, 3, p. 22. C’est dans son sang qu’il a lavé- le péché, v, 1, p. 12 ; et c’est par sa passion qu’il a racheté l’homme, vii, 2, p. 22. Mais il est ressuscité, le huitième jour, et est monté’aux cieux, xv, 9, p. iS ; il viendra juger les vivants et les morts, VII, 2, p. 22, 1rs impies, xv, 5, p.’16 ; il mettra un terme à l’iniquité, renouvellera toul et se reposera magnifiquement le septième jour, c’est-à-dire à la fin du monde et avanl le commencement du monde futur, xv. 5, p. 46, En attendant, il nous a donné une loi nouvelle, vraie loi de liberté, qui a une oblation nullement faite

par les hommes, Barn., il, 6, p. 6 ; le sacrifice d’un cœur contrit, d’un cœur glorifiant Dieu en odeur de suavité, il, 10, p. 6. Mais il faut se garder de pécher, sous prétexte que nous sommes protégés par ce testament de Notre-Seigneur, IV, 6, p. 10. La passion de Jésus est un modèle de la nôtre ; car ce n’est que par les afflictions et les tourments que nous pourrons parvenir au royaume, voir Dieu et le posséder, vii, 11, p. 24. D’où la nécessité pour le baptisé d être le vrai temple de Dieu, de faire de bonnes œuvres, de suivre la voie de la justice et d’éviter celle de l’iniquité, seul moyen d’assurer son salut et de trouver grâce au jour du jugement. L’auteur demande qu’on se souvienne de ses conseils et qu’ainsi son amour et sa vigilance produisent un bon effet, xxi, 7, p. 58.

Éditions. — Nous avons déjà signalé en tête de l’article les meilleures éditions, parues postérieurement à la découverte récente des manuscrits grecs. Celle d’Hilgenfeld, Der Brief der Barnabas, Leipzig, 2e édit., et de Ph. Bryennios, dans sa Didaché, Constantinople, 1883, suit de préférence le codex constantinopolitanus ou hierosolymitaniis. Celle de Gebliardt et Harnack, Patrutn apostolicorum opéra, 2e édit., Leipzig, 1878, s’appuie de préférence sur le codex sinaiticus. L’édition de Funk, Patrutn apostolicorum opéra, Tubingue, 1881, tient compte des deux manuscrits et signale les variantes.

Travaux. — Nous ne signalerons que quelques-uns des plus récents : Hefele, Dus Sendschreiben des Apostels Barnabas…, Tubingue, 1840 ; Franke, Zeitschrift fur luther. Théologie, 1840 ; Hilgenfeld, Die ai>ostolisclien Vâter, Halle, 1853 ; Freppel, Les Pères apostoliques, Paris, 1860 ; Kayser, Ueber den sog. Barnabasbrief, Paderborn, 1866 ; Muller, Erklàrung der Barnabasbrief es, Leipzig, 1869 ; Wieseler, Der Brief des Barnabas, dans Jahrb. f. deutsche Théologie, 1870, t. xv ; Riggenback, Der sog. Brief des Barnabas, Bâle, 1873 ; Heydecke, Dissert, qua Barnabx epistola interpolata demonstratur, Brunswick, 1874 ; Donaldson, The apostolical Futhers, 1874 : Braunsberger, Der Apostel Barnabas, Mayence, 1876 ; GudenSin, ReligionsgescliichtlicheStudien, ’Leipzg, iS16 ; Cunningha.m, The Epistle of Barnabas, Londres, 1877 ; Funk, Der Barnabasbrief, dans Theolog. Quartalschrift, 1884, t. lxvi ; 1897, t. lxxix ; ces deux études remaniées ont été publiées par l’auteur dans Kirchengeschichtl. Abhandlungen und Untersucltungen, Paderborn. 1809, t. ii, p. 77-108 ; Arnold, Qusestionum de compositionc et fontibus Barnabx ejiistolse…, Konigsberg, 1886 ; Voiler, Der Barnabasbrief, dans Jahrb. f. protest. Théologie, 1888, t. xiv ; Weiss, Der Barnabasbrief, Berlin, 18s8 ; M"’Duchesne, Saint Barnabe, dans les Mélanges de J.-B. de Bossi. Paris, 1892 ; P. Batiffol, La littérature grecque, Paris, 1897, p. 10-11 ; P. Ladeuze, L’épître de Barnabe, Louvain, 1900, extrait de la Bévue d’histoire ecclésiastique, de Louvain, 1900, t. i ; A. Ehrhard, Die altchristliche Litteratur und ihre Erforschung von 188’i-l<J00, Fribourg-en-Brisgau, 1900, p. 81-86 ; O. Bardenhewer, Geschischte der altkirchlichen Litteratur, Fribourg-en-Brisgau, 1902, t. i, p. 86-97. Littérature plus complète dans la 3e édit.on des Patr. apostol. opéra de Harnack ; dans le Répertoire dessources historiques, de Chevalier, col. 223, 2442 ; dans Bibliog. Synojisis, de Ricliardson, p. 16-19. Voir Bardenhewer, Patrologie, Fribourg-en-Brisgau, 1894, p. 38-39 ; trad. fram ;., t. I, p. 63-65 ; Smith, Dictionary of Christian biography, 2e édit., Londres, 1900 ; Kirchenlexikon, Fribourg-en-Brisgau, 1883.

G. Bareili.e.