Dictionnaire de théologie catholique/ESPRIT-SAINT. I. SA DIVINITÉ II. D'après les Pères

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 5.1 : ENCHANTEMENT - EUCHARISTIEp. 358-392).

II. D’après les Pères de l’Église.

Pères apostoliques.

Les Pères apostoliques ne sont pas des théologiens dans le sens strict du mot. Ils sont de simples témoins de la foi chrétienne en Dieu. Tixeront, Histoire des dogmes, Paris, 1905, t. i, p. 115-116. Le but qu’ils se proposent, lorsqu’ils traitent des vérités chrétiennes, est avant tout moral. Sans doute, ils exposent fidèlement la doctrine prêchée au monde par Jésus-Christ et ses apôtres ; mais, spécialement lorsqu’il est question du dogme de la sainte Trinité, ils n’ont pas la précision des termes scolastiques, ils n’expriment pas le dogme avec la même clarté et la même exactitude que ceux qui les ont suivis. Scheeben, La dogmatique, t. ii, n. 832, p. 561-562.

Tout en ayant des affirmations nettes et décisives sur la divinité et la personnalité du Saint-Esprit, les Pères apostoliques emploient des expressions obscures, des termes ambigus qui laissent planer le doute sur le véritable sens de leur enseignement. En général, avant le concile de Nicée, les Pères et les écriG93

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, ains ecclésiastiques ne donnent pas au Saint-Esprit le nom de Dieu ; mais ils professent sa divinité d’une manière claire et évidente, puisqu’ils lui attribuent i inspiration prophétique, la sanctification des âmes, Ja création ; puisqu’ils l’adorent et le glorifient comme Dieu au même titre que le Père et le Fils. Cf. Heurîier. Le dogme de In Trinité dans l’Épitre de saint Clément de Rome et le Pasteur d’Hermas, Lyon, 1900, p. 64. Il n’est donc pas étonnant que, pour ce qui concerne la divinité du Saint-Esprit, les Pères du ive siècle, par exemple, saint Basile, en appellent à la tradition de l’ancienne Église. Liber de Spiritu Sancto, c. x, n. 24 ; c. xxix, n. 72-73, P. G., t. xxxit, col. 111, 201. On ne saurait, en effet, concevoir qu’un dogme, qui est le fondement de toute la théologie du christianisme, n’ait pas été connu par les témoins les plus anciens de la tradition chrétienne, ou même qu’il ait été connu d’une manière imparfaite. Llcinrich. Théologie, t. ii, p. 266-268. La formule du baptême est une preuve évidente que, dans l’ancienne Église, les docteurs aussi bien que les fidèles croyaient explicitement au Saint-Esprit, comme personne divine. Harnack, Dogmengeschichte, t. ii, p. 273. Les termes ambigus qu’on rencontre donc chez les Pères i » postoliques dans l’exposé de la doctrine du Saint-Esprit, ne sont pas un signe qu’ils ignoraient une vérité essentielle de la révélation chrétienne, mais c’est la suite de l’absence d’une terminologie précise et de l’imperfection des formules exprimant un des <logmes les plus élevés du christianisme.

Notre but n’est donc pas d’analyser et de commenter les textes des Pères apostoliques, qui se rap--portent à la personnalité et à la divinité du Saint-Esprit. Il nous suffira de montrer que, même dans la littérature chrétienne primitive, malgré l’imperlection des formules et des termes théologiques, le Saint-Esprit est exalté comme Dieu, et proposé à l’adoration des fidèles comme personne distincte du Père et du Fils.

Dans la première Épitre de saint Clément de Rome, « lont l’authenticité ne soulève aucun doute, on trouve « xprimée clairement la doctrine du Saint-Esprit, telle qu’elle est consignée dans les Évangiles. Le Saint-Esprit est, d’après saint Clément, la source de l’inspiration prophétique ; le véritable auteur des Écritures saintes : ’Ev/.exvçïte eî ; -x ; Uç/a ; Ppayà ; … xà ; 51à ToJ IIvcvu.ïTo ; Tcio àyi’j-j. / » Cor., xlv, 2, Funk, Patres apostolici, Tubingue, 1901, t. i, p. 156. Grâce à l’inspiration du Saint-Esprit, les prophètes ont pu annoncer d’avance les épisodes les plus saillants de la vie du Christ : il est donc l’auteur des prophéties messianiques. Jbid., xvi, 2, p. 118. C’est lui qui parle dans les saintes Écritures : ’/i- ; ii vip to llv£0 ; /.a -h "Xy.o-i, XIII, 1, p. 116 ; c’est par lui que les prophètes sont inspirés, lorstju’ils prêchent la pénitence. Ibid., VIII, 1, p. 108.

Mais son rôle ne se borne pas aux justes de l’ancienne loi. Il répand aussi la plénitude de sa grâce sur les disciples du Christ : 7 : >r, pr, llveJu.oitoç x-{io-j i/.yy} :  ; Èît’i ràvta ; iyht-’i. Jbid., il, 2, p. 100. Il a donné aux apôtres l’énergie et la confiance pour prêcher la bonne nouvelle dans le monde entier. Ibid., XLii, 3, p. 152. C’est par lui que Jésus-Christ nous appelle à jouir des fruits de la rédemption : îijt toC IIveOij-ito ; ’Ayii-j -prjT/.-x’it’.-a. : r, tj : â ;. Ibid., xxil, 1, p. 130. C’est à lui <|uc revient la mission de sanctifier lésâmes. Ibid., xiii, 3v p. 116. Saint Clément met Je Saint-Esprit sur le même rang que le Père et le Fils ; c’est dire « piil professe ouvertement sa divinité. Pourquoi donc, écrit il, y a-t-il entre vous discordes, colères, divisions, schismes et guerres ?… N’avons nous pas un seul Dieu, et un seul Christ, et un seul Eipril de grâce, répandu sur nous, et une

seule vocation dans le Christ ? » 76/d., xLVi, 5, 6, p. 158. Et plus loin : « J’en prends à témoin le Dieu qui vit, le Seigneur Jésus, et l’Esprit-Saint, qui vivent eux aussi, tous trois foi et espérance des élus. » Ibid., Lviii, 2, p. 174. Rien de plus explicite que ces deux derniers textes pour montrer que saint Clément affirme la divinité du Saint-Esprit. Celui-ci y est représenté comme l’auteur et le distributeur de la grâce. Saint Clément déclare que les trois personnes divines sont des réalités vivantes et distinctes ; qu’elles sont le fondement de la foi et de l’espérance des élus ; que le Fils et le Saint-Esprit partagent avec le Père la gloire d’être l’objet et le principe de notre foi. Heurtier, op. cit., p. 26-27.

Les lettres de saint Ignace ne passent pas sous silence la personne du Saint-Esprit, bien que le saint évêque vise surtout à défendre et ù exposer la doctrine catholique du Verbe contre les aberrations gnostiques. Heinrich, op. cit., t. ii, p. 257-258. Le Saint-Esprit est présenté par lui comme Dieu. Il participe à l’omniscience divine. Une se trompe pas parce qu’il est de Dieu ; il sait d’où il vient et où il va, et il connaît les choses cachées. Ad Phil., 1, Funk, op. cit., t. I, p. 270. Cf. Joa., III, 8 ; I Cor., ii, 10. D’autres textes distinguent le Saint-Esprit du Père et du Fils, tout en affirmant qu’il est égal au Père et au Fils par la participation de la même nature divine, et qu’il est associé à l’un et à l’autre dans les opérations divines. Ad Magn., xiii, 1, Funk, t. i, p. 240. Un texte qui ne laisse aucun doute sur la personnalité divine du Saint-Esprit est contenu dans la lettre aux Éphésiens, IX, 1 : ’lI-oi[j.a.T(ji.évot eîç oiy.o5c/tJ.r|V ©eo"^ Ilarpô :, iva2ôp’Ju.svoi s !  ; Ta uçy) oià t ?|Ç [j.ri/avT, ; ’Ir, r>oO XpCCTToO, S ; â(7T ; v Tiavipô ;, (T/otvûo /çûtj.fio Tfîj nvEU(j.aTi To)’A-|- : <, ). Funk, t. I, p. 220. Les chrétiens y sont considérés comme les pierres du temple du Père, des pierres préparées pour élever l’édifice de Dieu le Père, soulevées en haut par la croix, qui est l’outil de Jésusi^ Christ, au moyen d’une corde, qui est le Saint-Esprit. Le Saint-Esprit est ici sans conteste l’auteur de la grâce et de la régénération. Il vient du ciel avec les liens de l’amour de Dieu et de la grâce, et relie les âmes à Dieu, tandis qu’il est lié au Christ. Sans cette corde, qui est le Saint-Esprit, personne n’est à même de sortir de l’abîme du péché et de renaître à une vie nouvelle. Nirschl, Die Théologie des ht. Ignatius, des Apo.sielschiilers, .Mayence, 1880, p. 12. Les fidèles, selon saint Ignace, doivent être soumis aux inspirations du Père, du F"ils et du Saint-Esprit. Ad Magn., XIII, 2, Funk, t. I, p. 240. Ils doivent adhérer à la hiérarchie, évêques, prêtres et diacres, que le Saint Esprit confirme dans la stabilité. Ad Philad., til., Funk, t. I, p. 264. Le Saint-Esprit est donc le principe de la vie surnaturelle que le Verbe de Dieu ré pand dans l’Église et la source de la sanctification. Il s’ensuit qu’il a la nature divine, et que sa divinité ressort clairement des lettres de saint Ignace. Dreher, .Sancti Ignatii cpiscopi Antiochensis de Cliristo Dca doclrina, Sigmaringen, 1877, p. 16.

La lettre de saint Polycarpe aux Philipiiiens ne contient aucune allusion au Saint-Esprit. Mais dans sa confession de foi, qui nous a été conservée dans les -Xctes de son martyre, le saint exalte le Saint-Esprit à l’égal du Père et du Fils : « Je vous glorifie, ô Seigneur Dieu tout-puissant, par Jésus-Christ, votre I’"ils bien-aimé, pontife éternel et céleste, par lequel avec lui et avec le Saint-Esprit nous chantons la gloire. Marti/rium S. Polycarpi, xiv, 3 ; xxii, 1, Funk, t. I, p. 332, 340.

La doctrine d’Mermas sur le Saint-I^sprit est fort obscure, et les érudits, qui ont essayé de l’éclaircir, ont abouti à des conclusions absolument divergentes. Ilerinas semble affirmer que le I-ils est le Saint-Esprit : 09’ESPRIT-SAINT

696’O 6ê uib ; To TIv=’j|j.a TÔ (xYiôv âariv, Sim., V, v, 2, Funk, t. I, p. 538. Quel est le sens qu’il faut attribuer à ce passage ? Sclilieiuann, Dorner, liellweg, Hageiiiann, Zahn tiennent que, d’après Hermas, le Fils de Dieu, paru dans le Christ, est distinct du Saint-Esprit. Par contre, Baur, Schwegler, Kayser, Lipsius, Nitzsch, Harnack, etc., sont d’avis qu’Hermas ne connaît pas un Fils de Dieu distinct du Saint-Esprit. Le Fils de Dieu s’identifie avec le Saint-Esprit, et le Christ est tout simplement un homme inspiré par Dieu. Link, Christi Person und Yerk im Ilirlen des Hermas untersuchl, Warbourg, 1886, p. 1-3. Malgré les interprétations contradictoires de sa doctrine, on ne saurait révoquer en doute qu’Hermas approprie au Saint-Esprit les attributs divins, c’est-à-dire qu’il professe sa divinité. Le Saint-Esprit est, pour lui, le sanctificateur des âmes. <i Dans les âmes douces et pénitentes, il exulte comme s’il habitait une maison spacieuse et il se réjouit avec celui qui lui sert de temple. » Mand., V, 1 ; X, 2, 4, Funk, t. I, p. 482, 500. Il est l’auteur des prophéties. Doux et tranquille est celui que le Saint-Esprit inspire : il ne parle pas à tout venant, mais seulement quand Dieu veut. Mand., XI, 8, Funk, t. i, p. 506. Il est éternel, parce qu’il existe avant le temps : Tb IlvcOixa TÔ âyiov t’o Ttpoov. Sim., V, vi, 5, Funk, t. i, p. 540. Il est créateur : Tb xTidav Tiâ(rav tT|V xtÎctcv. Le Saint-Espi-it participe donc à la nature divine.

Hermas le reconnaît aussi comme personne distincte du Père. En effet, le Père a fait habiter l’Esprit dans une chair, choisie par lui-même. Sim., V, vi, 5, Funk, t. I, p. 540. Et cette chair, dans laquelle habitait le Saint-Esprit, a bien servi l’Esprit en toute pureté et sainteté, sans le souiller à jamais. Si le Saint-Esprit habite dans le Christ, il s’ensuit, évidemment, qu’il est aussi distinct du Christ. Link, op. cit., p. 12. Il n’est pas une force impersonnelle, parce qu’il est le principe d’actions qui supposent nécessairement une personnalité. Avant l’incarnation du Fils, il a été la source de toute sainteté et l’inspirateur des prophètes. Lorsque le Fils s’est fait chair, il a habité en lui, il a communiqué une vie nouvelle à ceux qui reconnaissent en lui le Fils de Dieu. Heurtier, op. cit., p. 46-61. Hermas déclare à plusieurs reprises que c’est le Père qui a établi le Saint-Esprit dans la sainte humanité de Jésus : Tb IlvsOjj.a, ô ; ô Oîb ; /.aT(o/.’.17£v év t/j aap/.’i Ta’Jt"^, Mand., III, 1, Funk, 1. 1, p. 473 ; zo IlvejiJia toû OsoO tô So6kv s’iç tt, -/ ai.y/-x taÛT/iv. Mand., X, 2, 6, Funk, p. 502. D’ailleurs, Hermas lui-même mentionne clairement l’Esprit de Dieu, comme distinct du Fils de Dieu. Sim., IX, XXIV, 4, Funk t. i, p. 620.

Les passages cités jusqu’ici n’aplanissent pas les difficultés que soulèvent d’autres textes, où Hermas semble identifier le Saint-Esprit avec le Fils et l’archange Michel. Mais il nous suffît d’avoir montré qu’il ne manque pas, dans le Pasteur d’Hermas, de témoignages explicites sur la divinité et la personnalité du Saint-Esprit.

L’Épitre de Barnabe, i, 3, Funk, t. i, p. 38, et la Doctrine des douze apôtres, Wohlemberg, Die Lchre dcr zw’àlf Apostel in ihrem Verlialtniss zum neulestamentlichen Schrifttum, Erlangen, 1888, p. 8-10, mentionnent aussi le Saint-Esprit comme source de la grâce et de l’inspiration prophétique. ]Iais cette simple mention n’a pas assez de valeur doctrinale pour occuper l’attention des théologiens.

En résumé, la divinité et la personnalité du Saint-Esprit sont attestées parles monuments primitifs de la littérature chrétienne. Le Saint-Esprit s’y révèle avec les attributs de Dieu, c’est-à-dire comme Dieu : on lui approprie des actes divins et on établit une distinction réelle entre lui et les autres personnes de la

très sainte Trinité ; il est l’égal du Père et du Fils, et il participe à la même gloire que le Père et le Fils. Les Pères apostoliques professent donc les points les plus essentiels de la doctrine catholique touchant le Saint-Esprit.

2° Les Pères apologistes et controversisles du ii" et du m" siécte. — 1. Remarques préliminaires. — Aux prises avec le polythéisme païen ou les hérésies antitrinitaires, les Pères et les écrivains ecclésiastiques du n* et du iiie siècle s’efforçaient d’écarter de leur enseignement les conceptions extrêmes du dogme de la très sainte Trinité, d’éviter le double écueil du monarchianisme et du trithéisme ou dithéisme. Contre le premier, qui insistait sur l’unité de Dieu, jusqu’à sacrifier la personnalité distincte du Fils et du Saint-Esprit, la théologie anténicéenne affirmait la distinction réelle des trois personnes divines ; contre les théories trithéistes ou dithéistes, elle revendiquait l’unité de l’essence divine, indivisible en elle-même, bien que possédée en commun par les trois hypostases divines. Mais la tâche de ces Pères et de ces écrivains n’était pas facile, parce que, au point de vue théologique, ils n’étaient pas assez outillés pour repousser les attaques des adversaires de la vérité chrétienne. Leur foi était, sans doute, comme nous l’avons déjà remarqué pour les Pères apostoliques, l’écho fidèle de la tradition, une foi à l’abri du moindre soupçon et exempte de la plus petite tache. Mais les expressions et les images qu’ils employaient pour élucider le mystère de la très sainte Trinité n’exprimaient pas, d’une façon absolument claire, un dogme connu et professé de la manière la plus explicite par les fidèles, et plus encore par les docteurs de l’Église. Nous ne devons donc pas nous attendre à trouver, dans les monuments littéraires de la théologie anténicéenne, un traité en bonne et due forme sur la personne du Saint-Esprit et son action dans l’ordre surnaturel. Bien plus, il n’y aurait pas d’exagération de notre part à affirmer que, dans les ouvrages antérieurs au concile de Nicée, le savant catholique, tout en y puisant la véritable doctrine de l’Église sur le Saint-Esprit, rencontre des passages où la divinité et la personnahté distincte de la troisième personne ne sont pas énoncées avec la sûreté et la plénitude qu’il eût fallu. Il n’est donc pas étonnant qu’une critique mal avisée ou audacieuse et l’exégèse rationaliste du protestantisme se soient parfois évertuées à ranger les Pères du ii « et du IIIe siècle au nombre des pneumatomaques et à tirer de leurs écrits la preuve de la négation du Saint-Esprit dans l’Église primitive.

Le P. Petau ne se faisait pas scrupule de reprocher à ces Pères l’usage de termes dangereux, qui révéleraient chez eux, surtout à l’égard du Saint-Esprit, une certaine ignorance du mystère de la sainte Trinité : Ut erant tempora, nondum myslerio illo salisliquida cogniio, nonnutla periculose dicta jecerunt. De Trinitate, 1. L c. iii, n. 1, t. ii, p. 291-292. Ces attaques contre l’orthodoxie des Pères anténicéens ont été repoussées par le théologien anglican, Georges Bull, dans son ouvrage : Defensio fidei Nicenæ, Oxford, 1685. Dans sa préface aux livres De Trinitate, le P. Petau lui-même s’est vu obligé de mitiger la rigueur excessive de ses jugements et de rétracter en partie ses critiques injustes sur la doctrine trinitaire de la théologie anténicéenne. Præfalio, c. iii, t. : i, p. 260-271.

La critique rationaliste, au contraire, n’a point cessé d’attaquer la continuité de la tradition des^ Pères touchant le Saint-Esprit. D’après Harnack, lesapologistes chrétiens du ii’e siècle et les Pères du iiie siècle ignorent la personne du Saint-Esprit, ne font aucune distinction entre le Verbe et le Saint-Esprit, ne reconnaissent en Dieu que deux hjpostases. Lehrbuch dtr Dogmengeschichte, 3e édit., t. ï„

p. 449. Avec une grande érudition patristique, NôS^en s’est essayé à démontrer que la thèse de Harnaclv est bien fondée ; que des textes nombreux, puisés dans les écrits de saint Justin, d’Athénagore, de Théophile d’Antioche, de Clément d’Alexandrie, d’Irénée, ne laissent pas le moindre doute sur l’identification du Verbe avec le Saint-Esprit par la théologie anténicéenne. Geschichie der Lehre vom heiligen Geisle, Gutersloh. 1899, p. 8-26. Les théologiens du modernisme reprochent aux Pères anténicéens des tendances prononcées vers le sabellianisme ou le dithéisme ; eurs écrits identifient le Saint-Esprit avec le Fils, ou le représentent comme un attribut divin, une force impersonnelle de la divinité. Dupin, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, t. xi (1906), p..355. La théologie anténicécnne, déclare cet écrivain, ne connaît que le Verbe, fils de Dieu en réduction. Elle aurait donc dû renoncer à la formule trinitaire et à la personne du Saint-Esprit, mais parce que la liturgie^ le symbole, la foi du peuple témoignaient contre les conclusions lo^nques de leur spéculation doctrinale, les théologiens de l’époque laissèrent subsister l’appellation de Saint-Espri*. Ibid., p..356. La personne du Saint I "iiirit, dans la lliéologie chrc !.( nne, est le produit logique des infiltrations platoniciennes et philonienncs dans la doctrine des Pères anténicéens concernant le mystère de la sainte Trinité. Morin, Vérités d’hier, Paris, 1906, p. 221.

A ces attaques contre la continuité de la tradition patrislique touchant la divinité et la personnalité distincte du Saint-Esprit, nous répondons en affirmant que, malgré ses lacunes, ses obscurités, l’imprécision de ses termes et de ses formules, la théologie anténicécnne, par la bouche des apologistes chrétiens du iie siècle et des Pères et écrivains du tiie siècle, reconnaît le Saint-Esprit comme une personne divine, égale en dignité au Père et au Fils, mais réellement distincte du Père et du Fils par l’hypostase. Toutefois, avant d’aborder la démonstration directe de cette thèse, il est utile de faire les remarques suivantes :

n) Il faut distinguer avec soin ce qui fait le fond, la substance du dogme, des images, des expressions sous lesquelles ce dogme est énoncé ou expliqué. La théologie anténicécnne, dans ses représentants les plus illustres, ne s’est point trompée au sujet de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit, mais manquant d’expressions précises et de formules rigoureuses, dans l’exposé de la doctrine trinitaire. elle s’est servie de ternies équivoques, que les hérétiques ont exploités pour la dilTusion de leurs erreurs.

&) La doctrine commune des théologiens catholiques est que les l’ères et écrivains du ii’^ et du iii<e siècle, aissi bien qvic les Pères et écrivains des siècles postérieurs, ont eu la conviction nette et arrêtée de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit. On nesaurait, en effet, admettre que ces Pères, dans leur ensemble, aient eu une idée vague et confuse de la troisième personne divine, et par suite une idée vague et confuse (le la sainte Trinité, d’un dogme fondamental de la foi chrétienne. Une telle supposition, remarque Scheeben. t. II, n. 8.32. p. 561, est inacceptable a priori, puisquc la personne du Saint-Esprit est exprcssément mentionnée dans ri’^criture, dans la formule du baptême, dans les symboles de foi, dans les doxologies de l’I^glise, dans les prières et les confessions des martyrs. Il s’ensuit donc que les passages et termes obscurs des Pères anténicéens touchant le Saint-t-2sprit ont besoin d’être compris et interprétés dans le sens que leur attachent les Pères qui, au concile de Nicéc ou après ce concile, en ont a|)pelé à leur témoignage pour combattre les pneumatomaques. l-’ran/.elin, op. cit., p. 1 16-147.

r) Il y a lieu d’admettre r|ue dans les monuments de la théologie anténiccennc on rencontre çà et là des

inexactitudes dogmatiques touchant le Saint-Esprit. Dans ce cas, les affirmations erronées d’un Père, considéré comme docteur particulier, n’infirment pas la tradition commune des autres Pères. Mais il faut, remarque Franzelin, que ces afiirmations erronées soient clairement énoncées, de telle sorte que le doute sur leur authenticité ou leur véritable portée ne soit pas admissible. Op. cit., p. 148-149.

d) Il ne faut pas oublier que, pour ce qui concerne le Saint-Esprit, à côté de termes vagues et obscurs, et d’expressions inexactes, la théologie anténicéenne contient des affirmations nettes et précises de la vraie doctrine catholique. Les données des Pères, puisées dans la tradition, sont justes et exactes ; les théories et les raisonnements qu’ils bâtissent sur la philosophie platonicienne et philoniennc ne sont pas toujours heureuses. Tixeront, La théologie anténicéenne, Paris, 1905, p. 233. En pareil cas, les passages obscurs d’un Père touchant le Saint-Esprit doivent être expliqués à la lumière des passages clairs et explicites du même Père. Ce que prescrit une saine critique, dit Mgr Freppel, c’est de constater le fond de la croyance des passages d’une clarté irrécusable, puis d’expliquer par eux ce qui est moins formel ou plus enveloppé. Saint Justin, Paris, 1869, p. 366.

e) Les ombres qui enveloppent la personne du Saint-Esprit dans la théologie anténicéenne se dissipent aisément, si l’on étudie soigneusement la terminologie trinitaire des trois premiers siècles, si l’on fixe surtout les divers sens du mot esprit chez le même Père, qui le prend tantôt pour désigner l’essence divine, tantôt une hypostase divine. Voir Franzelin, p. 151-186 ; Schell, t. ii, p. 298-300.

/) Enfin, il est utile de rappeler que quelques écrits des Pères ont subi les interpolations des hérétiques et les altérations involontaires de copistes ignorants. C’est aux hérétiques et aux copistes, ou même ; la simplicité de leurs auteurs que saint.Jérôme attribue les expressions dangereuses qu’on rencontre çù et là dans les écrits des Pères anténicéens et qui ont servi de prélude on de jirétexte à l’arianisine : Fieri poiest, li.’simpliciler erraverint, vel a librariis imperitis corum paulalim scripta cnrrupta sinl ; vel ccrte anlequam in Alexandria quasi dœmnnium meridianum Arius nasccretur, innocenter quædam et minus caute loculi sunt, et quæ non possunt perversorum hominuni calumnias declinare. Apol. adversus libros Ruflni, 1. II, c. xvii, P. L., t. xxiii. col. 440.

2. Les apologistes grecs du iie siècle. — a) La théologie du Saint-b-sjjrit est à peine ébauchée dans les œuvres du plus célèbre des apologistes grecs du ne siècle, saint.lustin martyr. Cependant, on y rencontre à plusjnurs reprises des textes qui affirment expressément li (llinité et la personnalité du.Saintl’s |>i-il. On formulait contre les chrétiens le reproche d’alliéisme. Saint.Justin rciioussc cette calomnie. <i Nous ne sommes pas des athées, dcclare-t-il. nous qui reconnaissons eu, Jésus-( ; hrist le Fils de Dieu et l’honorons en seconde ligne, et honorons aussi en troisième ligne l’esprit prophétique, Jl/£j[j.dt xs 71po ?T, Tixôv èv rpiTïi Tïhi…’iiJMijti. » Apol., I, 13, P. G., t. VI, col. 318. Ce passage est d’une clarté frappante en ce qui concerne la divinité et la personnalité du Saint1 -esprit, adoré comme troisième personne div.ne à l’égal du Père et du I-’ils. Ceiiendanl, la critique ration.iliste y a vu une jirofession explicite de subordinatianisme entre les trois prr ?onnes divines et a reproché à saint .Justin de considérer le Saint-F’sprit comme inférieur un Père et au Fils. Le reproche est injuste. La pensée do saint.lustin est très claire, et ses expressions ne sont pas inexactes. Le Saint-Iîsprit est le troisième dans l’ordre d’origine. dans l’ordre des relations divines, mais le rang qu’il occupe n’emporte pas une infériorité do C99

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nature. Saint Justin reconnaît formellement la communauté d’essence entre les trois personnes divines, a Comme le Fils est engendré par le Père, et que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, il est toutnaliTcl de nommer les trois personnes dans l’ordre indi(jiié par saint Justin. Préférerait-on que l’apologiste efit placé le Fils ou Je Saint-Esprit en premier lieu, cl le Père en dernier ? Une pareille terminologie renverserait le langage reçu, et blesserait même le dogme. Les deux processions divines exigent nécessairement qu’on fasse précéder la personne qui procède de celle dont elle procède. » Freppel, Saint Justin, p. 36, ’S. Cf. Kuhn, Kalholische Dogmalik, Tub’mgie, 1857, t. ii, p. 123.

Dans un autre passage, saint Justin revient sur le culte d’adoration et de vénération que ^es chrétiens rendent au Saint-Esprit à l’égal du Père et du Fils : llvî’jiJ.à TS t"o TrpoçviTiy.ôv iT£So|j.îOa zat iTpoiTzuvoO ; j.ev. Apui., I, 6, col. 336, 337. Il rappelle les bienfaits du Saint-Esprit. L’âme est régénérée par les eaux du baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Apol., I, 61, col. 420. Dans la cène eucharistique, on rend gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Ibid., 67, col. 422. Il serait donc absurde de soupçonner saint Justin d’attaches au dithéisme.

Cependant, nous le reconnaissons, pour ce qui concerne le Saint-Esprit, quelques textes de saint Justin n’ont pas toute la netteté désirable. Saint Justin admet que Dieu, par son esprit prophétique, a révélé les choses futures, la conception virginale du Christ : oià ToO upoç/|Tixov llv£J[j.aToç. Ibid., 33, col. 381. Mais il afiirme aussi que cet esprit qui a parlé par la bouche des prophètes est le Verbe de Dieu : 6 Àôyo ; Si* Twv TtpoçïlTtôv TzpoziTxùi-i zoL |ji).), ûvra. ibid., 10, col. 461 ; et ce qui est plus fort encore que l’esprit, la force qui émane de Dieu n’est autre que le Verbe de Dieu : Tô TtvEÛjxa oOv xai tT|V &jva[j.r/ To’j ôso’j o-J5èv a), AO vor, (Tai 6é[xti ;, r] tôv Xoyov. Ibid., 33, col. 381. 11 semblerait donc, d’après ces textes, que le Fils et le Saint-Esprit ne seraient en réalité qu’une seule et même personne divine et que, partant, les théories trinitaires de saint Justin ne pourraient échapper au reproche de dithéisme. Schmidt, De quxsiionc nuni antiquissimi scriptores inler iryj xa’i 7rveû|j.a ay.ov aliqiiid fecerunt discriminis, Strasbourg, 1836, p. 10 ; Georgii, Untersuclmng iiber die Lehre von heiligen Geisl bci Jusiin dem Marlyrer, Wurtemberg, 1838 ; Dupin, loc. cit., p. 354-355. Mais nous ne devons pas oublier les textes explicites, où Justin établit formellement la personnalité distincte du Saint-Esprit. Il s’ensuit donc que le passage où il paraît contredire sa profession ouverte de la personnalité du Saint-Esprit est susceptible d’une interprétation catholique. Justin attribue l’inspiration prophétique tantôt au Père, tantôt au Fils et au Saint-Esprit, parce que cette inspiration n’est pas une action hypostatique du Saint-Esprit (les théologiens enseignent qu’elle lui est simplement appropriée), mais une action commune aux trois personnes divines. Kuhn, op. cit., p. 295 ; Otto, De Justini marlyris scriptis et doclrina, léna, 1841, p. 137, 138 ; Feder, Justins des Màrlyrers Lelire von Jésus Christus, Fribourg-en-Brisgau, 1906, p. 121. Saint Justin déclare aussi que l’esprit de Dieu est le Verbe. L’expression n’est pas nouvelle. Saint Paul a dit que l’Esprit est le Seigneur. II Cor., iii, 17. Voir J. Lebreton, Les origines du dogme de la Trinité, p. 490-494. Saint Ignace d’Antioche, saint Clément de Rome, Tertullien emploient la même expression. Feder, p. 120. Le sens du mot esprit, nous l’avons remai-qué, est vague, flottant. Il désigne souTent, dans l’ancienne littérature chrétienne, la nature divine, les dons de Dieu, le Christ en tant que personne divine. Otto, p. 137. On

ne saurait donc, pour un manque de précision dai.s les termes, mettre Justin au nombre des pneumatomaques.

Il est bien vrai que les écrits de saint Justin ne nous fournissent pas assez de détails sur la nature et l’œuvre du Saint-Esprit. Mais il était loin de la pensée du saint d’éclaircir la doctrine trinitaire. Son but était avant tout pratique. Il voulait seulement résoudre les objections des pa’i’ens contre le christianisme et amener ses adversaires à une connaissance plus exacte de la doctrine du Christ. C’est ce qui le fait insister de préférence sur les vérités de la religion naturelle, tandis qu’à l’égard des vérités de la religion chrétienne, il s’en tient à la tradition de l’Église et mentionne, sans les approfondir, les mystères chrétiens. Sa méthode a été généralement suivie par les autres apologistes. Feder, j). 123 : Heinrich, t. IV, p. 268-272 ; Thomassin, De S. Trinitate, c. XLit, Dogmata theologica, Paris, 1868, t. v, p. 581-585 ; Bardenhewer, Geschichle der allkircldiclien Lilteraïur, t. I, p. 235.

b) La Legatio pro christianis d’Athénagorc renferme aussi les alTirmations les plus explicites de la foi de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit. De même que saint Justin, Athénagore repousse l’accusation d’athéisme portée contre les chrétiens par lespaïens et s’écrie : ’. Qui ne sera pas étonné qu’on nous fasse passer pour athées, nous qui reconnaissons Dieu le Père, Dieu le Fils et le Saint-Esprit, nous qui voj’ons leur puissance dans l’union, et leur distinction dans l’ordre. >. 10, P. G., t. vi, col. 909. « On ne saurait rien désirer de plus explicite, remarcjue Mgr Freppel, que cette profession de foi, dont il serait difhcile de dépasser la rigueur. > Les apologistes chrétiens au ir siècle, Paris, 1870, p. 153..thénagore y enseigne expressément la communauté de l’être divin entre le Père, le Fils et le Saint-Esprit et la distinction réelle de celui-ci des deux autres personnesdivines. Dans un autre passage, non moins explicite, il affirme que la vie future consiste à connaître Dieu et son Verbe, à savoir ce que c’est que l’Esprit, et quelle est la nature de l’union du Saint-Esprit avec le Père et le Fils, et en quoi difïèrent les trois personnes divines. 12, col. 913. Athénagore admet donc que le Saint-Esprit est uni au Père et avi Fils, ce qui ne peut s’entendre que de la participation à l’unique et indivisible être divin ; il admet aussi qu’il est distinct du Père et du Fils, ce qui ne peut se rapporter qu’à la distinction hypostatique.

La clarté de ces aflirmations dissipe les doutes que pourraient çoulever quelques passages du même apologiste, où il déclare que le Saint-Esprit, qui agit dans les hommes inspirés, est une émanation de Dieu, , qu’il découle de lui et retourne à lui par réflexion, comme le rayon du soleil, 10, col. 909 ; que le Fils est dans le Père, et le Père dans le Fils, par l’unité et la vertu de l’esprit. Ibid. Les difiicultes qu’on pourrait tirer de ces textes ne sauraient prévaloir contre les autres textes formels, où, à côté du Père et du Fils, Athénagore nomme le Saint-Esprit comme troisième personne divine. Tixeront, op. cit., p. 239. Dans la théologie d’Athénagorc, le Saint-Esprit n’est pas présenté comme une force qui émane de Dieu et retourne à Dieu. Athénagore dit expressément que le christianisme croit en Dieu le Père, dans le Fils de Dieu, le Verbe divin, et dans le Saint-Esprit, et que ces trois personnes divines sont unies selon la puissance, c’est-à-dire selon l’être divin auquel on attribue aussi l’épithète d’esprit. 10, col. 909. La pensée, verbe ou sagesse, dérive du Père, aussi bien que le Saint-Esprit, qui procède du Père connue la lumière jaillit de la flamme. 24, col. 915. On pourrait, à la rigueur, ergoter sur les expressions et les images dont

Athénagore se sert pour élucider les rapports du Père et du Saint-Esprit ; mais il est bien difiicile de nier qu’il ait reconnu le Saint-Esprit comme personne divine réellement distincte du Père et du Fils. Hcinricli, t. IV, p. 272-271 ; Thomassin, t. v, p. 585-586 ; Franzelin, p*. 137-138.

c) Saint Théophile, évêque d’Antiochc, voit dans les trois premiers jours de la création le symbole, l’image des trois personnes divines, TJTtoi doi-/ z% ; Tpii-So ; TOO 0£ov, y.a’. ToO.Voyo-J aOroO, y.at Tr, ç (joçi’a ; aCiTOÛ. Advulolijcum, 1. II, 15, P. G., t. vi, col. 1077. Dans la Trinité (Théophile a été le premier à employer le terme de Tpcir), Dieu a été le créateur de l’univers par son verbe et sa sagesse. L. 1, 7, col. 1036. C’est à son verbe et à sa sagesse qu’il a adressé les paroles : Créons l’homme. L. II, 18, col. 1081. Lors de la création du monde, il n’y avait en Dieu que sa sagesse et son saint Verbe, qui a toujours été avec lui, L. II, 10, col. 1065. Avec sa sagesse Dieu a engendré le Verbe caché en lui, 1. II, 10, col. 1064, en le produisant hors de son sein avant la création de l’univers.

Théophile affirme donc avec assurance la divinité du Saint-Esprit, créateur avec le Père et le Fils, et en même temps sa personnalité distincte du Père et du Fils. Il faut avouer, cependant, que sa terminologie n’est pas précise. Il affirme que le Verbe, étant l’Esprit de Dieu, et principe et sagesse, descendit sur les prophètes. L. II, 10, col. 1064. Il semblerait donc confondre le Verbe avec le Saint-Esprit. Mais les passages que nous avons cités plus haut nous autorisent, contre les assertions de Dupin, lac. cil., p. 357, à donner h ses expressions inexactes un sens catholique. L’évêque d’Antioche envisage la sagesse comme un attribut essentiel de la divinité ; en ce sens, le Verbe de Dieu aussi bien que l’Esprit-Saint, est la sagesse divine. Freppel, Les apologistes cliréliens, p. 289-290 ; Heinrich, p. 276. Même le P. Petau penclie à croire que le saint évêque confond le Saint-Espr t avec le Verbe. L. I c. iii, n. 6, p. 299. Mais puisque Théophile mentionne les trois termes 0e6 ;, )ô-(-o ;, Tosia, 1. I, 7 ; I. II, 18, col. 1030, 1081. comme constituant une Irinité ; 1. II, 15, col. 1077, la supposition du docte théologien n’est pas fondée.

d) Les théories trinitaires de Tatien sont très embrouillées et confuses, ce qui leur a valu les critiques les plus sévères du P. Petau. Cependant, dans son Oratio advcrsus grsecos, il parle plusieurs fois de la personne du Saint-Esprit, comme auteur de la sanctification des âmes. Il affirme que le Verbe envoie le .Saint-Esprit habiter dans les âmes des justes. C’est l’Esprit-Saint qui soulève ces âmes vers Dieu, xiii, P. G., t. VI, col. 833, qui remplit de sa grâce les hommes fidèles à l’accomplissement de leurs devoirs refigicux. Il ne repose pas dans toutes les âmes, mais uniquement dans celles qui ont été jugées dignes de ses charismes. L’homme est un temple et Dieu y haliite par le moyen du Saint-Esjjrit. xvi. col. 841-842. Toutes les âmes doivent s’efforcer de s’unir au Saint-Esprit, et celles qui le méprisent se rangent panni les ennemis de Dieu, xv, col. 840. Steuer, Die Colles und Logos Jehredes Tatian, Lei|)zig, 1893, p. 67, 68. Chez Tatien, nous avons donc l’affirmation de la divinité du Saint-Esprit, considéré comme auteur de la grâce, et, en même temps, l’affirmation de sa personnalité, puisqu’il est envoyé par le N’erbc, et c’est par lui que le Père habite dans les âmes.

En résumé, bien que dans leurs polémiques avec les païens les apologistes chrétiens du iie siècle n’aient pas donné un exposé complet de la doctrine trinitaire, ils ont affirmé, néanmoins, à iihisicurs re|irises, et avec une grande clarté, la divinité et la personnalité du Saint-I-sprit, et ils ont continué, sur ce point la tradition de l’âge apostolique.

3. Les Pères el écrivains ecclésiasliques du ii^ el du iiie siècle. — « L’enseignement d’Irénée sur le Saint-Esprit, dit Beuzart, est indécis et flottant, comparé à la doctrine des âges suivants. » Essai sur la Ihéologic d’Irénée, Paris, 1908, p. 54. Cependant, saint Basile range Irénée parmi les témoins autorisés de la tradition catholique, touchant le Saint-Esprit, Liber de Spiritu Sanclo, xxix, 82, P. G., t. xxxii, col. 201, et Théodoret aussi invoque son autorité. Dialogus, i, P. G., t. Lxxxiii, col. 84, 85. Nôsgen lui-même est forcé d’admettre que le grand évêque de Lyon a marqué avec une suffisante clarté la consubstantialité divine du Saint-Esprit avec le Père et le Fils. Op. cit., p. 16. Saint Irénée pose en principe que l’Église, gardienne infaillible de la révélation chrétienne, a reçu des apôtres et de leurs disciples une foi intègre. En vertu de cette foi, elle croit « au Saint-Esprit, lequel a prédit par lei prophètes l’économie divine et l’avènement de Jésus-Christ notre Seigneur. » Conl. hær., I, x, 1, P. G., t. vii, col. 549. Le Saint-Esprit est la sagesse de Dieu, la figuralio Patris (d’après dom Massuet, le terme figuralio se rapporte au Fils). Les chœurs angéliques lui sont soumis. Ibid.. IV, vii, 4, col. 993. Il est à côté du Père et du Fils dans l’œuvre de la création : Spiritu nulricnle et augente. Ibid., V, xxxviii, 3, col. 1108. Il est auprès du Père avant tout être créé, avant que l’univers fût tiré du néant, anle omnem conslilulionem. Ibid., IV, xx, 3. col. 1033. C’est lui qui fait connaître les décisions du Père et du Fils et qui ouvre les inteHigences à la lumière de la vérité. Ibid., IV, xxxiii, 7. col. 1077. L’ordre et l’harmonie qui régnent dans l’univers sont l’œuvre de Dieu, qui est uni avec son Verbe et sa Sagesse : unus Deus qui Verbo et Sapienlia fecil et aptavil omnia. Ibid., IV, xx, 4, col. 1034. Cependant, soit le Verbe, soit la Sagesse, ne sont pas distincts du Père quant à la nature divine. Dieu, en effet, a créé le ciel et la terre par lui-même, c’est-à-dire par son Verbe et sa Sagesse. Ibid., II, xxx, 9, col. 822. Il n’y a donc qu’un seul Dieu, qu’un seul Fils, qu’un seul Esprit, qu’un seul salut ])Our ceux qui croient en lui. Ibid., IV, vi, 6, col. 990. Le Verbe et la Sagesse, le Fils et l’Esprit sont toujours avec Dieu ; c’est par eux et en eux qu’il a créé toutes choses en pleine liberté. Ibid., IV, xx, 1, col. 1032. Le Fils et le Saint-Esprit sont appelés les mains par lesquelles Dieu a créé et formé l’homme : per mamis enim Patris, id est, per Filium et Spirilum Sanclum, . fil homo. Ibid., IV.prœf., 4, col. 975 : IV, xx, 1 ; V, vi, 1, col. 1032, 1137.

De ces textes il ressort clairement qu’Irénée marque avec la plus grande netteté la consubstantialité divine du Saint-Esprit. Il est vrai, comme l’a remarqué dom Massuet, que le saint évêque ne donne pas au Saint-Esprit le nom de Dieu, el en parle rarement, Diss., III, de Ircnxi doctrina, P. G., t. vii, col. 312 : dans ses controverses avec les sectes gnostiques, saint Irénée porte de préférence son attention sur le Verbe divin. Voir Tixeront, op. cit., p. 254. Toutefois, il reconnaît d’une manière formelle que le Saint-Esprit possède entièrement la nature divine. En elTct, il le met sur le même rang que le Père et le Fils ; il déclare qu’il est dans le Père anle omnem conslilulionem ; qu’il est éternel, ivpix’i’i, â la différencc du souffle de la vie qui, dans l’homme, est temporaire, Ttvbr. ïoir, : np.’Jrrxiipoç, V, xiT, 2, col. 1152 ; il le représente comme créateur, comme source de la vie divine pour ceux qui le reçoivent, <> XaSonEvo ; tô s")07totoCv Tivi-j|j.a, eOpiÎTEi TT|V îo)/, ’I. Ibid., col. 1153. Il proclame donc, d’une manière très expressive, que le Saint-ICsiirit possède, en commun avec le Père et le Fils, l’unique essence divine et qu’il la possède comme hypostase distincte du Père et du Fils, parce qu’il est

un des trois termes de la Trinité. Ibid., I, x, 1 ;

IV, VII, 4 ; XX, 1, col..550, 993, 1032, 1033.

Mais saint Ironcc n’csl p : fs senlement un témoin de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit. Il s’attache à faire ressortir plus soigneusement que ses devanciers le rôle surnaturel du Saint-Esprit dans l’Église, à décrire son influence, son action sur les âmes dans l’œuvre de la rédemption, et, de la sorte, il met en un relief plus accentué sa divinité. Il est donc bien juste de considérer le saint évêque de Lyon comme le précurseur de ces théologiens, qui ont eu à oœur d’enrichir, par la spéculation personnelle, la théologie du Saint-Esprit, d’y apporter de nouvelles données par l’étude plus approfondie des textes scripturaires. Le Saint-Esprit, dit Irénée, a été le héraut de Dieu dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Les prophètes d’Israël ont annoncé ce que le Saint-Esprit leur suggérait, IV, xx, 8, col. 1038, puisqu’il est la source de toute inspiration prophétique. Ibid., 3, col. 1034. Ce même Esprit qui, par la bouche des anciens prophètes, a annoncé l’avènement du Christ, a révélé aussi aux apôtres que la plénitude des temps était arrivée, que le règne de Dieu était proche. III, xxi, 4, col. 950. Il a répandu sur les premiers disciples du Christ ces charismes surnaturels, dont il est la source. III, xvix, 1, col. 929.

Le Saint-Esprit n’est pas seulement, avec le Verbe, l’auteur des saintes Écritures. II, xxviii, 2, col. 805. Par rapport à l’Église il est un gage d’incorruptibilité, un maître infaillible. Grâce à son assistance, l’Église est à l’abri de l’erreur. III, xxiv, 1, col. 266 ;

V, XX, 1, col. 1177. Le Saint-Esprit est là où se trouve l’Église, et l’Église et toutes les grâces d’en-haut sont là où se trouve le Saint-Esprit… qui est la vérité. III, XXIV, 1 ; V, XX, 1, col. 966, 1177.

Dans l’œuvre de notre salut éternel, le Saint-Esprit est la scala ascensionis ad Deum. III, xxiv, 1, col. 966. Irénée pose comme principe que nous ne sommes pas à même de nous sauver sans l’aide du Saint-Esprit : à’vsu llveûixaro ; 0eoj « rwOrivai o’J 8uvâ5j.e6 « . V, IX, 3, col. 1145. C’est l’Esprit qui nous conduit vers le Fils, qui prépare l’homme à aller au Fils, de même que c’est le Fils qui nous conduit au Père, qui nous élève vers le Père. IV, xx, 5 ; V, xxxvi, 2, col. 1035, 1223. L’Esprit-Saint est le paraclet, qui nous unit à Dieu. L’eau vive, que Notre-Seigneur donna à la Samaritaine, et qu’il reçut du Père, a été donnée à tous ceux qui participent du Christ, lorsqu’il a envoyé le Saint-Esprit par toute la terre. III, xvii, 2, col. 929, 930. Le Saint-Esprit est donc le principe, la source de la vie surnaturelle, et l’œuvre rédemptrice du Christ tend précisément à donner aux âmes la possession de cet esprit divin qui est le partis immortalitalis. IV, xxxviii, 1, col. 1106.

L’Esprit-Saint est un esprit vivifiant, un esprit qui conduit les âmes à la connaissance de la vérité divine. IV, xxxiii, 7, col. 1077. Les âmes qui se laissent dominer par cet Esprit sont appelées à la vie de la résurrection, III, xvii, 2, col. 930, et rendent gloire au Père. IV, XX, 3, col. 1034.

Les nombreux textes que nous avons puisés dans le Contra hsereses mettent en évidence que saint Irénée attribue au Saint-Esprit une personnalité distincte de celle du Père et du Fils. Voir Beuzart, p. 5153. C’est donc à tort qu’on a voulu découvrir des traces de subordinatianisme dans les rares passages, où le saint évêque déclare que le Verbe et le Saint-Esprit servent le Père ; que le Saint-Esprit conduit les âmes au Fils et le Fils au Père. Pour saint Irénée, la nature du Saint-Esprit ne diffère point de celle du Père^ et les anges qui servent le Père servent aussi le Saint-Esprit. Dom Massuet, Diss., III, col. 308. De même saint Irénée reste dans l’orbite de la plus pure ortho doxie, lorsqu’il affirme que le Saint-Esprit conduit les âmes au Fils. N’est-ce pas, en eflet, par la grâce du Saint-Esprit que les âmes se tournent, s’orientent vers le Fils pour y recueillir les fruits de la rédemption ? Et n’est-ce pas aussi par les mérites du Christ, que les âmes remplies du Saint-Esprit se reposent dans le sein du Père ? Voir Maran, Divinitas Domini noslri Jesu Christi manifesta in Scripturis et Iraditione, Paris, 1746, iv, 9, 5, p. 420-422 ; Franzelin, op. cit., p. 136, 137. Malgré donc quelques tenues incorrects, saint Irénée déclare de la manière la plus expressive qu’il y a identité de nature et égalité de gloire et d’honneur entre le Saint-Esprit et la première et la seconde personne de la Trinité, et que la personnalité du Saint-Esprit est distincte de celle du Père et du Fils.

La doctrine de Clément d’Alexandrie sur le Saint-Esprit n’a ]ias été développée avec ampleur ; elle nous offre des textes peu nombreux et peu expressifs. Clément professe ouvertement la trinité des personnes divines dans l’unité d’essence : il la nomme expressément TV kyîa-/ Tfiiâîa. Strom., V, 14, P. G., t. ix, col. 156. Le Saint-Esprit est le troisième terme de cette Trinité. Il n’y a qu’un seul Dieu de l’univers, et un seul Verbe, et un seul Esprit, qui est partout : TO Ttve-j[ia TO âyiov â’v -xot’. -h a’jtb Tiavra/o-j. Pœd., I, P. G., t. viii, col. 300. Il affirme donc l’ubiquité du Saint-Esprit. Il rend aussi au Saint-Esprit la même gloire, le même honneur qui est dû au Père et au Fils. Ibid., I, 6 ; III, 12, col. 300, 680, 681. Le véritable gnostique, le sage par excellence, est le disciple du Saint-Esprit. Strom., V, 4, P. G., t. ix, col. 44. Le Saint-Esprit joue un rôle important dans l’œuvre de la sanctification des âmes : il établit sa demeure dans les justes qui ont la vertu de la foi : t ô zItutts-j/oti 7 : pO(TS7rc7tve ; <j6ai tô âyiov IlvsOfj.a tpa[j.£v. Strom., V, 13, t. IX, col. 129. Il s’y établit par la foi : zh âyiov ITve-j(Aa TaÛTY) (la foi) ttû ; jj.îia^’jTcûsTai, VI, 15, col. 344 ; il les sanctifie par sa présence en leur donnant son onction. Ibid., viii, 11, col. 489 ; Pœd., II, 8, t. VIII, col. 472. Voir Cléiient d’Alexandrie, t. iii, col. 159, 160. Clément d’Alexandrie témoigne donc de sa croyance en la divinité du Saint-Esprit. Voir Maran, op. cit., IV, 10, 5, p. 428.

La doctrine d’Origène sur le Saint-Esprit, et en général sur la Trinité, a été, de son vivant même, l’objet de longues controverses. Elle a eu ses adversaires irréconciliables et ses défenseurs passionnés. Saint Épiphane lui est décidément hostile. Il appelle Origène le père d’Arius, Epist. ad Joannem Hieros., P. G., t. XLiii, col. 383, et lui reproche d’avoir placé le Saint-Esprit dans un rang inférieur à celui du Fils, d’avoir enseigné que le Saint-Esprit ne voit pas le Fils, de même que le Fils ne voit pas le Père, oj’ts t’o Ilv£Û(j : a Tciv uibv Sûvaxat ôîâaaiôat. Ibid., iv, col. 384 ; Hær., Lxiv, 4, P. G., t. xli, col. 1 76. Les origénistes, au dire de saint Épiphane, tirèrent les dernières conséquence ^ du principe erroné de leur maitre et rabaissèrent le Saint-Esprit au niveau des créatures : xr17(j.a -/.ai xb "Aytov IIveO|j.a e’.ir/iyo’jjj.Evoi. Anacephalseosis, P. G., t. xlii, col. 868. Saint Jérôme renchérit sur ces accusations. A l’en croire, Origène aurait enseigné formellement que le Saint-Esprit est inférieur au Fils et que sa sphère d’activité est plus restreinte que celle du Père et du Fils, jiarce qu’elle se borne seulement aux âmes justes. La puissance du Père serait plus grande et plus étendue que celle du Fils, et la puissance du Fils, à son tour, serait plus grande et plus étendue que celle du Saint-Esprit. Epist., cxxiv, ad Avitum, 2, P. L., t. xxii, col. 1061. Nous ne saurions soupçonner saint Jérôme, qu’on a justement appelé un ardent chercheur d’hérésies, d’avoir à bon escient falsifié et corrompu le texte d’Origène pour avoir gain ce cause dans ses violentes querelles avec Rufin. D’ailleurs, le texte auquel il fait allusion nous a été conservé dans l’original grec par Justinien, qui, lui aussi, attribue à Origène les mêmes erreurs. Liber adversus Origenem, P. G., t. lxxxvi, col. 981.

Quelle est la valeur de ces accusations si graves et devons-nous y prêter foi ? La réponse n’est pas aisée, puisque le dernier mot sur l’orthodoxie d’Origène n’a pas encore été dit. Il faut noter cependant que des Pères, dont la doctrine trinitaire est au-dessus de tout soupçon, jugent avec une grande bienveillance le prétendu précurseur d’Arius. Saint Athanase s’appuie sur l’autorité d’Origène pour combattre les ariens, De decretis Nicænæ synodi, xxvi, P. G., t. xxv, col. 465, et le P. Petau, malgré ses antipathies pour Origène, est forcé d’avouer que l’autorité du saint docteur est ici d’un grand poids, I. I, c. iv, 6, p. 304. Saint Basile cite Origène parmi les théologiens qui, bien qu’ils n’exposent pas toujours la saine doctrine, toutefois, suivant les données de la tradition, ont pieusement disserté du Saint-Esprit, τὰς εὐσεθεῖς φωνάς ἀφῆκε περὶ τοῦ Πνεύματος. Liber de Spiritu Sancto, c. xxix, 73, P. G., t. xxxii, col. 264. Le témoignage de Photius, dont on est unanime à reconnaître la prodigieuse érudition, est encore plus décisif : « Origène n’a point erré sur la sainte Trinité ; mais en voulant combattre l’hérésie de Sabellius, qui alors faisait beaucoup de mal, et défendre la trinité des personnes, leur distinction manifeste et multiple, il a dépassé la juste mesure. » Bibtiotheca, cod. 117, P. G., t. ciii, col. 395.

Quoi qu’il en soit de ces avis contradictoires, pour ce qui concerne la doctrine du Saint-Esprit, nous croyons qu’Origène l’a exposée avec beaucoup de clarté, et qu’en l’exposant, il a été fidèle à la vraie tradition de l’Église, qui affirme la consubstantialité divine et la personnalité distincte du Saint-Esprit. Mais pour bien saisir sa véritable pensée, pour montrer que, même dans ses expressions les plus audacieuses et les plus dures, il n’a pas d’attaches aux hérésies antitrinitaires et qu’il a sauvegardé la nature divine du Saint-Esprit, il faut interpréter sa doctrine à la lumière des principes qu’il s’est posé à lui-même dans ses recherches théologiques.

Origène soutient la nécessité de s’en tenir à la prédication ecclésiastique, servetur ecclesiastica prædicatio, transmise par les apôtres suivant l’ordre de succession, et telle qu’elle est demeurée jusqu’à nos jours dans les Églises. Il ne faut admettre comme vrai que ce qui ne s’éloigne en rien de la tradition écclésiastique ou apostolique. De principiis, præf., 2, P. G ;., t.xi, col. 116. Il y a donc des points immuables, intangibles dans la doctrine du christianisme, des vérités que les apôtres ont énoncées clairement, parce qu’ils les ont jugées nécessaires pour tous, même pour les pigriores erga inquisitionem divinæ scientiæ. Ibid., 3, col. 116. Cependant, sur d’autres points, ils ont bien dit ce qui est, mais en passant sous silence le comment et le pourquoi, sans doute afin de fournir à ceux qui viendraient après eux l’occasion d’exercer leur esprit. Ibid., 3, col. 116, 117. Origène établit donc une distinction bien marquée entre l’objet nécessaire de la croyance, l’élément révélé et traditionnel de la foi, et les questions secondaires, l’élément spéculatif et individuel abandonné au libre travail de la pensée humaine. Cette distinction, il nous en avertit, il l’applique à la théologie du Saint-Esprit.

La prédication apostolique enseigne que le Saint-Esprit est associé au Père et au Fils dans l’égalité de nature et dans le droit à la même adoration : honore ac dignitate Patri ac Filio sociatum tradiderunt. Ibid., 4, col. 117. Nous avons ici la profession explicite de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit, et cette profession est, comme Origène la qualifie, l'élément et la base de la théologie trinitaire. La prédication apostolique affirme aussi que le Saint-Esprit est un ; qu’il se révèle, sans se dédoubler, dans l’Ancien et le Nouveau Testament ; qu’il a été la source de l’inspiration prophétique pour tous les justes, pour les prophètes de la loi mosa’ique, aussi bien que pour les apôtres. Ibid., col. 118.

Mais à côté de cet élément traditionnel, il y a, toujours d’après Origène, un ensemble de doctrines qu’on peut tirer des vérités de la prédication apostolique par voie de conséquence. Les apôtres, en effet, n’ont pas déclaré si le Saint-Esprit est engendré ou non (factus an infectus, d’après saint Jérôme), c’est-à-dire s’il procède du Père par voie de génération, comme le Verbe. En ce qui concerne ces questions, il faut approfondir par une recherche savante et perspicace les textes de l’Écriture sainte, et demander à la raison éclairée par la foi la solution des difficultés qu’elles soulèvent.

D’un côté donc, Origène, en traitant du Saint-Esprit, exprime la foi de l’Église reçue par le moyen de la tradition ; de l’autre, il fait part à ses lecteurs des fruits de ses méditations philosophiques sur le mystère de la Trinité, des théories, où l’on ne saurait voir l’enseignement officiel de l’Église, mais ses conclusions personnelles. Dans le premier cas, il est réellement un témoin de la tradition : sa doctrine est irréprochable ; ses idées, formulées avec précision, échappent aux traits de la critique. Dans le second cas, il est un docteur particulier, qui parfois se laisse aller à la dérive dans son exégèse allégorique, ou dans son dilettantisme philosophique, et, par inadvertance ou par l’emploi d’expressions obscures et dangereuses, donne prise aux accusations de ses adversaires.

Saint Athanase et saint Basile mettent en évidence ce double rôle d’Origène dans sa carrière littéraire. Le premier en appelle à son témoignage, seulement lorsqu’il affirme et définit avec confiance, c’est-à-dire lorsqu’il propose la doctrine contenue dans la prédication de l’Église. Le second déclare qu’Origène professe la saine doctrine de l’Église sur le Saint-Esprit, toutes les fois qu’il s’en tient avec respect et fidélité à la tradition : reveritus consuetidinis robur.

Ces remarques posées, il est utile tout d’abord d’analyser les textes où Origène parle suivant les données de la tradition. Il pense que la subsistance du Saint-Esprit en Dieu est une vérité que nous aurions toujours ignorée, si la révélation d’en-haut ne nous l’avait enseignée. Les philosophes, les savants n’ont pas soupçonné, dans l’être divin, un troisième terme, le Saint-Esprit, distinct du Père et du Logos. La connaissance du Saint-Esprit, soutient Origène, nous est venue par la loi, les prophètes et la révélation chrétienne. De principiis, I, iii, 1, col. 147. Origène n’ignorait pas sans doute que la philosophie grecque avait eu l’intuition lointaine de la Trinité, et, partant, de l’Esprit de Dieu. Mais cette vague connaissance n’était pas, à son avis, le produit du travail spéculatif de la pensée humaine. La théorie du logos chez Platon et ses disciples était plus un larcin qu’un emprunt fait à la révélation mosaïque, où l’école platonicienne avait puisé sa connaissance rudimentaire de la Trinité. L’école platonicienne comptait dans ses rangs les fures Hebrærorum (l’épithète est de Clément d’Alexandrie) qui, dans les Livres saints, ravissaient les données les plus élevées de leur théodicée et de leur éthique.

Le témoignage de l’Écriture sainte sur le Saint-Esprit est multiple et varié. De principiis, I, iii, 2, col. 147. L’Ancien Testament ne le passe pas sous silence ; dans le Nouveau, il est souvent question de lui, et puisque le Saint-Esprit est l’auteur des livres inspirés, ibid., præf., 8 ; I, iii, 1, col. 119, 120, 146, il y a lieu de dire qu’il révèle lui-même au monde sa 707

ESPRIT-SAINT

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divine personnalité. La révélation nous apprend ((u’il n’y a qu’un seul Esprit-Saint : Duos Spirilus Sanclos rumquam coç/novimus ab aliqiio pncdicari. Ibid., II, VII, 1, eoi. 210. C’est eet Esprit qui a ouvert l’intellienee des aneiens prophètes h la vision de l’avenir et a révélé les desseins de Dieu aux prophètes de la loi de grâce. Ibid. Toutes les fois que l’Écriture sainte mentionne l’Esprit sine adjedione, on peut être assuré qu’il y a là une allusion à l’Esprit de Dieu. Ibid., I, 3, 4, col. 148, 140. Cet Esprit de Dieu, qui est identique à l’Espiit du Christ, se nomme le Saint-Esprit ou Vesprit princip(d, parce qu’il tient le sceptre, lu suprématie dans la hiérarchie des esprits. In Epist. ad Rom., xii, 1, P. G., t. xiv, col. 1103. Mais il n’est pas une créature ; il n"est pas l’œuvre de la puissance créatrice eu Père. Le doute n’est guère possible sur ce point. Les Livres saints ne contiennent la moindre allusion à la nature créée du Saint-Esprit. De principiis, L iii, 3, P. G., t. xi, col. 148. On ne saurait dire qu’il est un corps, qui se partage en fragments pour se distribuer aux âmes justes. L’Esprit-Saint est une force sanctifiante, ibid., I, i, 3, col. 122, une Subsistance spirituelle, intellecluelie : subsislenlia est intelleelualis et proprie subsistil et exslal. Ibid., col. 123. Mais cette subsistance spirituelle possède en commun avec le Père et le Fils les attributs divins. A l’égal du Fils, il a la science de Dieu le Père, il pénètre les abîmes de la sagesse de Dieu : Spiritiis Sanctus, qui solus scrutatur etiam alla Dci, révélai Deum cui imll. Ibid., 3, 4, col. 148, 149. On ne peut pas supposer, déclare Origène, qu’il y ait eu un instant où le Saint-Esprit n’ait pas eu la science de Dieu, où la révélation du Fils lui ait donné cette science. Il s’ensuivrait, en effet, que le Saint-Esprit aurait passé de l’état d’ignorance à l’état de science, et une pareille asserlion serait impie et absurde. Ibid., 3, 4, col. 149. On ne saurait dire non plus qu’il est devenu Esprit-Saint après avoir eu la science de Dieu, autrement, il n’aurait pas toujours été le troisième terme consubstantiel de la Trinité. Ibid.

he Saint-Esprit est donc consubstantiel au Père et au Fils. Il embrasse dans toute sa plénitude la science de Dieu, et, par conséquent, il embrasse aussi toute la plénitude de l’être divin. Origène insiste plusieurs fois sur ce fait que le Fils et le Saint-Esprit seuls ont la scierce de Dieu, In Joa., tom. ii, 23, P. G., t. xiv, col. 162 ; que cette science est identique dans le Fils et dans le Saint-Esprit, In Epist. ad Rom., ix, 13, col. 2201, 2202 ; que l’un et l’autre embrassent toute la volonté eu Père. In Joa., tom. xiii, 36, col. 462. Cette compréhension parfaite de la divinité, cette possession absolue de la science et de la volonté de Dieu de la part du Saint-Esprit, ne serait nullement possible, si le Saint-Esprit lui-même n’était pas Dieu. Le raisonnement tlicologique d’Origène conclut donc à la coiisubstanlialité divine du Saint-Esprit.

Le Saint-Esprit participe aussi aux autres attributs divins. Il y a, dit Origène, une bonté essentielle dont la sidnte "l’rinité est la source unique. De principiis, I, VI, 2, col. 166. Or, cettï unique bonté substantielle est inhérente au Saint-E prit aussi bien qu’au Père et au Fils. De même, il y a une sainteté substantielle, essentielle, qui est propre à Dieu. Cette sainteté sans tache, nous la trouvons aussi dans le Saint-Esprit : Natura Spirilus Sancli quse sancta est non recipil polliilionem : naturaliler enim, vel substanlialiler sancta est. Ibid., I, viii, 3, col. 178. Le Saint-Esprit n’est pas un être sanctifié. Sa sainteté n’a pas une origine temporaire ou extrinsèque. C’est une sainteté ad inlra, une sainteté éternelle, sans coniinencement, tandis que la sainteté des créatures est une sainteté qui découle du Saint-Esprit, comme de sa source. In Num., homil. XI, 8, P. G., t. xii, col. 053. La simple pré sence du Saint-Esprit suffit pour effacer toute impureté spirituelle, pour remettre les péchés. In Lev., homil. II, 2, col. 414.

Le Saint-Esprit est donc la source de la sanctification. In Epist. ad Rom., x, 11, t. xiv, col. 1208. Il est l’auteur de la grâce, de cette grâce qui communique aux âmes la sainteté de Dieu. De princ., I, iii, 8, t. XI, col. 154. Par la participation du Saint-Esprit, dans lequel omnis est natura donorum, ibid., II, vii, 3, col. 217, l’âme devient sainte et spirituelle. Celte parliciiKdion du Saint-Esprit n’est autre que la participation simultanée du Père et du Fils, c’est-à-dire que l’œuvre de la sanctification, appropriée au Saint-Esprit, appartient à la Trinité. Ibid., IV, 32, col. 406. Le Saint-Esprit répand dans les âmes la suraliondance de la charité, par laquelle on s’élève en quelque sorte à la participation de la nature divine. In Epist. ad Rom., iv, 9, t. xiv, col. 997. Grâce au Saint-Esprit, l’âme chrétienne, éclairée de la lumière d’en-haut, éblouie par la connaissance des mystères ineffables de la foi, tressaille d’une joie toute surnaturelle et céleste. De prine., II, vii, 4, l. xi, col. 218. C’est par le Saint-Esprit, uni au Père et au Fils, que l’homme régénéré est mis au nombre des élus. Le salut est une œuvre divine, une œuvre qui appartient à la sainte Trinité prise dans son intégrité, parce qu’on ne saurait posséder le Père et le Fils sans le Saint-Esprit. De princ., I, iii, 5, 8, t. xi, col. 150, 157.

Origène reconnaît formellement l’éternité du Saint-Esjjiit. Le Saint-Esprit renouvelle les âmes, mais lui-même n’est pas en Dieu un être nouveau, un être créé dans le temps : ipse enim Spirilus est in lege, ipse in Evangelio, ipse semper cum Paire et Filio est, et semper est, et eral, et erit, sicut Pater et Filius. Non ergo ipse novus est, sed credenles innovai. In Epist. ad Rom., vi, 7 ; vii, 13, t. xiv, col. 1076, 1141. Mais, bien qu’éternel, il se révèle par degrés aux hommes : prœcipuus Spirilus Sancli advenlus ad liomincs post cscensionem Ctiristi in eselos magis quam anle adventum ejus declaratur. De princ, II, vii, 2, t. xi, col. 216. Il s’est révélé par ses œuvres, par l’effusion de ses charismes, qui, très abondante durant la prédication du Christ, s’est augmentée après l’ascension et s’évanouit presque à l’âge d’Origène. Contra Celsum, 1, 46 ; VII, 8, P. G., t. XI, col. 745, 1432. Mais cette intermittence de son action dans le monde n’enlève rien à la splendeur et à la gloire de sa divinité. Il n’y a qu’un seul Dieu qui mérite toute adoration, et ce Dieu est en trois personnes divines. Père, Fils et Saint-Esprit. In Epist. ad Rom., i, 16, t. xiv, col. 864.

Ces textes nombreux sont le plus éloquent plaidoyer en faveur de l’orthodoxie de la doctrine d’Origène sur la divinité du Saint-Esprit. On pourrait objecter qu’ils ont été tirés en grande partie du De principiis, dont nous n’avons plus, malheureusement, le texte original grec ni la version latine littérale de saint Jérôme. La version de Rufln, que nous possédons encore, fait naître à bon droit le soupçon d’infidélité. Dans la préface de cette version, Rufin déclare franchement avoir omis les passages contraires aux idées exprimées par Origène en d’autres endroits ; d’avoir, en un mot, remanié le texte pour le rendre plus conforme à la saine doctrine de l’Église. P. G., t. XI, col. 112, 113. Mais il n’a pas faussé toute la pensée d’Origène dans les deux chapitres du De principiis, l, 3 ; II, 7, t. XI, col. 145-157, 215-218, où il a traité e.v professa de la personne du Saint-Esprit. Il ne l’a pas faussée non plus dans l ?s autres écrits d’Origène, qui nous ont fourni de nombreux passages, d’où il résulte que le célèbre Alexandrin a toujours allirmè avec la plus grande énergie et netteté la consubstanlialité divine du Saint-Esprit. Et en présence de ces textes qui témoignent si ouvertement en faveur de  ! 0

l’orthofloxie d’Origèiie, il serait injuste de prendre prétexte de quekiues expressions dures et incorrectes pour lui ini]niter la négation de la divinité du Saint-Esprit.’( Sans doute, remarque avec raison Mur Preppel, il est facile de bâtir tout un système d’accusations sur rcmploi plus ou moins discret d’un terme, dont la signification n’était pas bien arrêtée ; mais l’équité demande que l’on rechcrclie avant tout l’idée exprimée parle mot. > Orifiène, Paris. 1875, t. i, p. 261.

La théologie trinitaire d’(Jrigène reconnaît formellement la consubstantialité divine du Saint-Esprit, comme nous l’avons vii, et en même temps aflirme d’une manière si explicite sa personnalité distincte, qu’il est impossible de biaiser à ce sujet. Duchesne, Histoire ancienne de t’Érjlise, Paris, 1908, t. i, p. 351. Le célèbre écrivain revient maintes fois sur le Saint-Esprit comme troisième terme de la Trinité, comme hj-postase divine distincte des liypostases du Père et du Fils. Il associe son nom à celui du Père et du Fils. De princ., , iii, 2, P. G., t. xi, col. 147. Il marque bien la distinction réelle entre les hypostases, tout en faisant ressortir vivement leur divine consubstantialité. In Gen., ir, 5, P. G., t. xii, col. 171 ; In Lev., v, 2, col. 450 ; In Exod., v, 3, t. xiii, col. 328 ; In Mailh., XII, 42, col. lOSl. Tpia K-Jaio ; > Osô ; r, xCù-i ïcxi-r o {ctçi Tps ;  ; -0 é’v iln : -I. ( Le Seigneur notre Dieu est trois personnes : les trois personnes sont un seul Dieu. » Selecla in Ps., ps. cxxii, 2, P. G., t. xii, col. 1633. Origéne se plaît à multiplier ses actes d’adhésion à cette formule. « Je crois, dit-il, au Père, au Fils et au Saint-Esprit, et cette foi est commune à tous les membres de l’Église de Dieu. » In Lcu., v, 3, P. G., t. XII, col. 452 ; In Num., i, 3 ; XII, 1, col. 389, 659. On ne saurait avoir la connaissance de la sainte Trinité, si l’on n’y voyait le Saint-Esprit. II()mil., i-, in ps. xxxvi, ibid., col. 1350. Les Juifs assoilTcs allaient s’abreuver h l’unique source de Dieu ; mais parce qu’ils n’avaient point soif du Christ et du Saint-Esprit, leur soif du Père ne put être étanchcc. In Jcr., homil. xviii, /’. G., t. xiii, col. 481. La clarté de ces passages nous dispense de tout commentaire. En ce qui concerne le dogme de la consubstantialité divine et de la personnalité distincte du Saint-Esprit, Origéne mérite l’éloge que lui décerne dom Maran : Ad dogmata quod atlinel, a jidei régula in Ecclesia fixa et slabilita, vel latiim ungiicm recedere ipsi relifiio fuit. Op. rit., p. 129.

Mais si la doctrine d’Origène sur le Saint-Esprit est irréprochable, que deviennent les accusations d’hérésie portées contre lui par saint Épiphane et saint Jérôme’.’(^s deux docteurs auraient-ils sciemment calomnié le granil exégèle d’.Mcxandrie et noirci sa mémoire’? Il faut écarter de pareils soupçons. Il y a, Iiersonne ne le conteste, dans les écrits d’Origène des hardiesses de pensées et des incorrections de langage, « (ui semblent, de prime abord, justifier la réprobation de docteurs à I humeur âpre et agressive, tels qu’Épiphane et Jérôme. Origéne cherchait à se frayer des voies nouvelles dans le champ de la spéculalion théologique, à donner une nouvelle ampleur à la théologie trinitaire, et quelque grande que fut la rccti-Uule de ses intentions, il n’élait pas à même de combler toutes les lacunes d’une Icnninologie imprécise et flottante, ou de fixer la doctrine du Saint-Esprit avec la rigueur des formules sanctionnées dans les conciles des âges suivants..Mais ces hardiesses de pensée et de langage, surtout si on ne les détache pas du contexte, loin de porter atteinte à l’enseignement traditionnel de rÉglisc, révèlent chez leur auteur un esprit vaste, qui ne recule pas devant les problèmes les plus ardus de la spéculation théologique.

On reproche à Origéne d’avoir subordonné le Saint-Esprit au Père et au Fils. - Le Père, dil-il, contenant

tout, embrasse tous les’êlres, en tirant de lui-même l’être qu’il communique à cliacun. Inférieur au Père, le Fils étend son action seulement aux substances rationnelles, car il est le second après le Père. Moindre encore, le Saint-Esprit n’étend son action quc sur les saints. Ainsi la puissance du Père est plus grande que celle du Fils et du Saint-Esprit : celle du Fils est supérieure à celle du Saint-Esprit, et celle du Saint-Esprit, supérieure à celle des autres saints. » De princ., I, iii, 5, P. G., t. xii, col. 151. Le texte grec de ce passage dangereux nous a été conservé par.Justinien. Saint Jérôme l’exploite pour attaquer violemment Origéne, en l’accusant d’avoir supposé en Dieu trois puissances inégales et élevé le Fils en dignité au-dessus du Saint-Esprit. La meilleure réponse à cette accusation nous a été donnée par Origéne lui-même ; il s’explique clairement sur le sens qu’il convient de donner à ce passage ; il semble avoir prévu les objections de ses adversaires et il les a résolues d’avance. Voici avec quelle abondance il développe et éclaircit sa pensée : De ce que nous avons dit que le Saint-Esprit est accordé seulement aux justes, et que les bienfaits et les opérations du Père et du Fils atteignent les bons et les méchants, les justes et les injustes, qu’on ne pense point que par Ift nous mettions le Saint-Esprit au-dessus du Père et du Fils, ou que nous lui assignions une plus grande dignitc.’JJ.cite conséquence est absurde : car nous n’avons voulu parler que du caractère propre de la grâce et de l’opération du Saint-Esprit. Dans la Trinité, rien n’est plus ou moins grand, puisque la source de la divinité tient toutes choses dans son verbe et sa raison, st qu’il sanctifie par le souffle de sa bouche tout ce qui est digne de sanctification. Ibid., I, iii, 7, col. 153. Et peu après, Orjgène revient sur celle explication si précise et déclare expressément qu’il n’y a pas de division dans la Trinité, que ce qui est appelé le don de l’Esprit est manifesté par le Fils et opéré par Dieu le Père. Ibid., 7, col. 154. Origéne marque donc bien la signification des termes qu’il emploie et en fixe avec une grande clarté le sens et la portée théologique. L’action appropriéc au Saint-Esprit est moins étendue que les actions a])propriées au Père et au Fils, mais cette appropriation n’implique pas une diversité de nature entre les trois hypostases divines, parce que dans la Trinité rien n’est plus ou moins grand. Origéne, du reste, parle le vrai langage de la théologie chrétienne, lorstiu’il indique des sphères d’activité plus ou moins restreintes ù ces acUona. ai)proprifCS. n lùivisagé comme le princiiic de la justification ou comme la vertu sanctifiante, le Saint-Esprit n’habite certainement que dans les âmes des justes. De même, les créatures raisonnables sont les seules qui participent au I-’ils en tant quc Verbe ou raison éternelle..u contraire, le Père, en vertu de celle fonction particulière de créateur ou de principe universel des choses, étend son action à tous les êtres tant irraisonnables que doués de raison. » FrepiJcl, Or/ (/c/ie, t. i, p. 286, 287. Nous pouvons donc conclure, avec le P. de Régnon, que ce magiiifiquc passage proteste contre les fausses inleriirétalions de la doctrine d’Origène. Op. cit., t. iii, p. 379-381.

Un texte plus difficile à interpréter dans le sens catholique est contenu dans le Commentaire de l’Évangile de saint Jean, xiii, P. G., t. xiv, col. 411. Origène semble y admettre que le Père est de beaucoup supérieur en dignité et en excellence au Saint-Esprit : J-spsT/oij.Évou -’lUf’j-’i-j f, x » ’i -iiiÀrt-t aTtb TO’J llaipôç, ôiîn) Ù7 ; îp5/_tt aJtô ; v.aX to âyiov IIv£-jna -urt’/.oi-tiy/, ov T’ov Tj/ovTf.iv. Pour bien entendre ce passage, il faut avoir présent à l’esprit qu’Origène considère toujours le Père comme la source de la divinité, comme la racine d’où germent le Fils et le Saint-Esprit. Eu égard à cette relation divine de la paternité, qui suppose,

cliins le Père, une priorité d’origine, Origène conclut que le Fils et le Saint-Esprit demeurent subordonnés au Père quant à l’origine, que le Père est plus grand que le Fils et le Saint-Esprit, parce qu’il leur communique l’être divin. Freppel, op. cz7., t. i, p. 273. Est-ce que cette conclusion s’écarte de l’enseignement traditionnel de l’Église ? Non, assurément. Même après le concile de Nicée, les Pères qui ont traité du Saint-Esprit d’une manière irréprochable au point de vue de l’orthodoxie de la doctrine (il suffit de citer saint Basile et saint Grégoire de Nysse), enseignent que le Père est plus grand que le Fils et le Saint-Esprit, en ce qu’il en est l’àp/r, , l’aÎTÎa. Bardj% Didijme l’Aveugle, Paris, 1910, p. 104. Origène se commente lui-même dans cet autre passage : « Il convient de placer la bonté principielle (àp/_r/.r, ) en Dieu le Père, de qui le Fils est né et de qui l’Esprit-Saint procède. Sans nul doute, l’un et l’autre reproduisent en eux la substance de la bonté contenue dans la source, d’où est né le Fils et d’oii dérive le Saint-Esprit. « De princ, I, il, 13, P. G., t. XI, col. 144.

Rien donc n’est plus loin de la pensée d’Origène qu’une subordination essentielle du Saint-Esprit au Père et au Fils. Pour écarter celle-ci, il multiplie à dessein ses affirmations explicites de la consubstantialité divine des trois hypostases en Dieu. Il serait puéril aussi de voir du subordinatianisme dans l’appellation de vicaire de Jcsus-ChrisI, qu’Origène donne au Saint-Esprit. In Luc, homil. xxii, P. G., t. xiii, col. 1857. Origène n’a pas été le seul à l’employer. Nous la trouvons aussi chez Tertullien. De præscr., xxviii, P. L., t. ii, col. 40. Prise dans son véritable sens, elle n’a rien de contraire à la foi catholique. Après la mort de Jésus, le Saint-Esprit continue son œuvre auprès des apôtres. L’appellation de vicarius Clùisti, appliquée au Saint-Esprit, trouve ainsi sa justification dans les textes nombreux du Nouveau Testament, où il est dit que le Saint-Esprit parlera aux apôtres, les guidera dans toute la vérité, leur rappellera les enseignements de Jésus. Joa., xiv, 16, 26 ; XVI, 13. Voir Elconsky, La doctrine d’Origène sur la divinité du Fils de Dieu et du Saint-Esprit et sur leurs relations avec le Père (en russe), Saint-Pétersbourg, 1879, p. 153-158 ; Laforge, Origène : controverses auxquelles sa llicologie a donné lieu, Sens, 1905, p. 80-83.

La conclusion qu’on peut tirer de l’examen de la théologie trinitaire d’Origène est qu’il faut considérer celui-ci comme un témoin remarquable de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit, bien avant que les conciles œcuméniques eussent formulé avec précision l’enseignement traditionnel de l’Église sur la sainte Trinité.

Saint Hippolyte est rangé par Harnack au nombre des anciens Pères qui n’ont pas reconnu la personnalité divine du Saint-Espril. Dogmengeschichte, t. i, p. 537. Cette accusation nous semble injuste. Bien que la personne du Saint-Esprit reste très effacée dans l’œuvre d’HippoU-te, nous y trouvons cependant les éléments nécessaires pour en déduire qu’il croit au Saint-Esprit et qu’il l’associe au Père et au Logos. Voir Dupin, loc. cit., p. 359. « Nous croyons au Père, dit-il dans son traité contre Noët ; nous glorifions le Fils ; nous recevons en nous le Saint-Esprit. » Contra hæresim Noeti, ix, P. G., t. x, col. 317. Le Saint-Esprit, aussi bien que le Verbe, participe à cette puissance (être divin) qui est tout entière dans le Père : âùvafj. tç i-àp (j.ta T) Èy. To-j Tiav-rô ; ’io os Ttâv IlaT/^p, ii o-j S’jvaiJ.iç XÔTo ;. Ibid., xi, col. 817. Nous sommes obligés de croire en Dieu, le Père tout-puissant, en Jésus-Christ, le Fils de Dieu… et au Saint-Esprit, c’est-à-dire aux trois termes de la sainte Trinité : xa’i tojtojç Eivat o’jTtoç Tp-a. Ibid., viii, col. 815. Ils sont trois termes, mais si on considère leur puissance (être di vin), ils constituent un seul Dieu : xat ôtov jj.kv v.axoc ôjva| ;. ! v, £’; ètti Qe’jç. Quant à leur économie (ce mot, qu’on pourrait traduire avec Tertullien par numerus et dispositio Trinitatis, Adversus Praxeam, iii, P. L., t. ii, col. 180, n’a pas ici le sens d’incarnation, que lui donne Dupin), ce Dieu unique se révèle comme trois : xaià TV’or/.ovo|xJav, Tpi/r, ; v) ntiZzil’. :. Ibid., V’ill, col. 815. Le concours hannonieux de l’économie {œconomia consensionis) consiste en ceci, qu’il y a un seul Dieu, une seule nature divine ; et que, dans cette unique nature divine, le Père commande, le Fils accomplit les ordres du Père, le Saint-Esprit illumine, instruit les fidèles. Ibid., xiv, col. 821. Nous ne pouvons pas concevoir Dieu sans croire en même temps au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Ibid., xiv, col. 821. Le Père est super omnia, le Fils per omnia, le Saint-Esprit in omnibus. Ibid., xix, col. 821 ; Ad Eph., iv, 6. Le Père est l’expression de la volonté divine, le Fils de la puissance créatrice, le Saint-Esprit de la manifestation de Dieu dans le monde. Ibid. L’Église du Christ, qui reconnaît donc trois personnes en Dieu, rend gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Ibid., xviii, col. 829.

Il n’est point besoin d’insister sur la valeur démonstrative de ces textes. Chez Hippolyte, le parallélisme des trois personnes divines revient plusieurs fois et avec la plus grande netteté. Les textes qui précèdent mettent en évidence qu’il affirme la consubstantialité du Saint-Esprit, participant à l’être et aux attributs divins. Le Saint-Esprit est aussi l’auteur de la régénération surnaturelle des âmes : r^ii.t’.q i^jy/j-im rr, -/ ôià TOJ àyc’oj ll-ivj>.y.-’j : àvjtrévvricr’.v. De Clvisto et Antichristo, III, P. G., t. i, col. 732. Il est la source de l’inspiration prophétique. Il a été donné à l’Église et, par les apôtres, ù ceux qui professent la véritable foi. Philosophoumena, 1, P. G., t. xvi, col. 3020. Il est associé au Christ dont il est la force. De Christo et Antichristo, iv, P. G., t. x, col. 732 ; Lumper, De vita et scriplis S. Hippolijti, P. G., t. x, col. 362. 363.

Un sermon sur l’Epiphanie, àoyo ; sî ; xà ôcyia 6co ?âv£ia, inséré sous le nom d’Hippolyte dans la P. G., renferme un magnifique passage où, à l’aide des textes de l’Écriture sainte, on décrit le rôle et l’action du Saint-Esprit dans l’œuvre de la création et de la rédemption. Comme on a de bonnes raisons pour contester l’authenticité de cette pièce, nous nous abstenons d’en tirer parti, d’autant plus que l’orthodoxie de la doctrine d’Hippolyte sur le Saint-Esprit ressort clairement des textes cités plus haut. Voir d’Alès, La théologie de saint Hippolyte, Paris, 1906, p. 30, 31.

Il y a cependant un passage qui, par l’ctrangeté de ses expressions, est de nature à éveiller des soupçons sur la croyance de saint Hippolyte à la personnalité du Saint-Esprit. Voici, en effet, ce que nous lisons dans son traité contre Noët : « Je ne dis pas qu’il y a deux dieux, mais un seul, et deux personnes, et une seule économie, la grâce du Saint-Esprit. Un seul Père, deux personnes, puisqu’il y a le Fils et une troisième chose, le Saint-Esprit, » xiv, P. G., t. x, col. 821. La manière dont Hippolyte s’exprime dut choquer même ses contemporains, car il nous raconte que le pape Callixte (217-222) l’accusait de dithtisme. Philosophoumena, IX, P. G., t. XVI, col. 3383. Le P. de Régnon a essayé de donner à ce texte compromettant une interprétation conforme à la doctrine catholique. Du temps de saint Hippolyte, le mot T.poawr.o^/ signifiait un personnage de théâtre, ou une personne humaine, tandis que le mot TivsCîxa indiquait une chose plutôt qu’un individu humain. Le passage en question doit donc s’entendre comme s’il avait dit dans notre langage actuel : « Des trois personnes divines, deux nous sont représentées par la révélation comme des personnes

humaines, et la troisième comme une cliose. » Op. cit., t. III, p. 164, 165. Cette explication, fort ingénieuse sans doute, nous paraît trop forcée pour être acceptée. A notre avis, Hippolyte est incorrect dans ses expressions ; mais l’imprécision de ses concepts n’implique pas la négation d’une vérité de foi qu’il a clairement formulée dans ses écrits. Les controverses trinitaires du n « et du ine siècle touchaient surtout aux relations mutuelles du Père et du Fils. Hippolyte concentrait donc son attention sur ce point et ne faisait qu’effleurer les questions relatives au Saint-Esprit. La théologie trinitaire n’étant pas précisée à l’époque où il vivait, il a pu employer des termes obscurs, dont on a abusé pour lui reprocher de n’avoir pas évité recueil du subordinatianisme. Tixeront, op. cit., p. 325 ; Maran, op. cit., I. IV.c.xiii, p. 456-458 ; Kuhn, op. cit., p. 261-262 ; Dupin, loc. cit., p. 359.

Saint Grégoire le Thaumaturge est l’auteur d’une exposition de la foi, "EzŒt ;  ; Tila-tio ;, dont l’authenticité n’est aujourd’hui contestée par personne. Hamack ; Dogmengeschichle, t. i, p. 751 ; Ryssel, Gregorius Tliaumaturgus, sein Leben und seine Schriflen, Leipzig, 1880, p. 31-33. Nous y trouvons formulée avec netteté la doctrine de la consubstantialité et de la personnalité divine du Saint-Esprit. Le Saint-Esprit y est présenté comme recevant de Dieu son être divin. Il s’est révélé au monde par le Fils ; il est l’image parfaite du Fils parfait ; il est la vie et la cause des êtres vivants ; une source sainte, la sainteté même, le dispensateur de la sanctification. C’est en lui que Dieu le Père se manifeste. La Trinité divine est parfaite. Il n’y a rien de créé ni de subordonné en elle, ni de surajouté, comme si, n’existant pas d’abord, il lui était survenu dans la suite. Le Fils n’a jamais manqué au Père, ni l’Esprit au Fils. La sainte Trinité est toujours immuable et inaltérable. Ilahn, Bibliothek der Symbole und Glaubensregeln der alten Kirche, Brestau, 1897, p. 253-254. Ce texte est assez clair pour n’avoir pa. besoin de commentaire. Bull, op. cit., 1. II, c. xii, p. 151-157.

Saint Basile reproche à saint Denys d’Alexandrie d’avoir enseigné sur le Saint-Esprit une doctrine blâmable et défectueuse : itepi toO IIve-jr^aTo ; àçv.E ^wvà ; f|XtTTa -pîTToJTa ; Trii nvc-J !  ;.aT’., Epist., I. I, epist. IX, P. G., t. xxxii, col. 269, c’est-à-dire d’avoir aflirmé que le Saint-Esprit n’est qu’une créature. Il l’excuse cependant. Le saint évêque d’Alexandrie combattait les sabelliens qui infestaient son diocèse, et sa droiture d’intention n’est pas en jeu. Liber de Spiritu Sancto, xxix, 72, P. G., t. xxxii, col. 201. Saint Athanase a défendu l’orthodoxie de son maître, que les ariens se plaisaient à présenter comme un précurseur de leur hérésie. De sententia Dionysii, I, P. G., t. XXV, col. 480. Saint F3asile lui-même ne paraît pas très convaincu du faux enseignement de Denys, car il le cite trois fois comme témoin de la divinité du Saint-Iisprit. lùi effet, Denys d’Alexandrie condamne ceux qui divisent en Dieu les trois pcrsonnesdivines : il associe le Saint-Esprit : la gloire et à la puissance du Père et du Fils. Le Saint-Esprit n’est donc pas une créature, mais une personne divine. P. G., t. xxxii, col. 201. Cf..Maran, op. cit., I. IV, c. xxiii, 1, 2, p. 544, 345 ; Bull, op. cit., 1. II, c. xi, l, p. 141, 142 ; Tixeront, op. cit., p. 143.

Saint Denys romain était (irec d’origine et écrivait en grec. Nous avons de lui un fragment d’une lettre où il réfutait les sabelliens. A jjropos du Saint-Esprit, nous y trouvons correctement exprimée la doctrine traditionnelle de l’Église. Le saint y déclare que l’Écriture révèle la Trinité, mai » que cette Trinité ne doit pas s’rntendre connue s’il y avait trois dieux différcnts. /’. L., t. IV, col. 112. Il ne faut pas diviser en trois dieux l’admirable et divine monade. La Trinité doit

être ramenée à l’unité. Ibid., Il faut croire en Dieu, le Père tout-puissant, et en Jésus-Christ, son fils, et au Saint-Esprit. Ibid., col. 114. Le Saint-Esprit tient donc, dans la théologie de Denys de Rome, le même rang que le Père et le Fils. Il participe à la monarchie divine, sans cesser pour cela d’être le troisième terme de la Trinité. Tixeront, op. cit., p. 410.

4. Pères et écrivains latins.

a) Tertullien est « le grand artisan qui, le premier, a donné son aspect et son cachet propres à la théologie latine. » Tixeront, op. cit., p. 329. Il est le créateur de la terminologie latine pour l’exposition scientifique du dogme de la Trinité, ou, du moins, un de ceux qui ont le plus contribué à la fixer. Freppel, Tertullien, Paris, 1871, t. ii, p. 300. La doctrine de Tertullien sur la consubstantialité et la personnalité divine du Saint-Esprit a été développée dans son traité contre Praxéas, un hérétique qui réduisait les trois personnes divines à la triple manifestation d’une seule et unique personne.

Toute la théologie trinitaire de Tertullien appuie avec force sur deux concepts, le concept de la monarchie, qui établit en Dieu l’unité indivisible de la nature, et le concept de l’économie, qui organise, pour ainsi dire, en Dieu des degrés distincts, qui distribue l’être divin à des personnes distinctes, qui, d’après la définition de Tertullien lui-même, unitaiem in trinitate disponit, Aduersus Praxeam, ii, P. L., t. ii, col. 180, pose en Dieu le nombre et la disposition. Ibid., iii, col. 180. Sur la valeur et la signification du terme économie chez Tertullien, voir Thomassin, op. cit., c. xxxvii, 9, t. v, p. 158 ; Kuhn, op. cit., t. ii, p. 179, 180 ; Popov, Tertullien, sa théorie de la science chrétienne et les principes fondamentaux de sa théologie, Kiev, 1880, p. 158.

Le Saint-Esprit fait partie de la monarchie divine. Tertullien le répète sans se lasser, toutes les fois qu’il est question, dans ses écrits, du dogme de la Trinité. Il donne à l’Esprit-Saint le nom de Dieu : Ubi Deus, ibidem et alumna ejus, patientia scilicet ; cum ergo Spiritus Dei descendit, individua patientia comitatur eum. De patientia, xv, P. L., t. i, col. 1384. Dieu donc et l’Esprit de Dieu sont identiques. « Il y a deux dieux… ; jamais une telle parole ne sortira de notre bouche : non pas que le Père ne soit Dieu, que le Fils ne soit Dieu, que le Saint-Esprit ne soit Dieu, que chacun d’eux ne soit Dieu ; mais en distinguant les personnes, nous ne divisons pas une substance identique dans les trois. » Advcrsus Praxeam, xiii, col. 193. La doctrine qui reconnaît en Dieu trois personnes distinctes remonte aux origines mêmes de la tradition chrétienne, aux sources de l’Évangile : elle est plus ancienne que les plus anciens hérétiques. Ibid., ii, col. 180. Il y a en Dieu unité de substance, mais le. dogme de l’économie considère comme troisième terme en Dieu le Saint-Esprit. Ibid., ii, col. 180. Tertullien marque bien la nature de cette distinction, qui n’implique pas une diversité ou une division de la substance divine : « Les termes de la Trinité sonttrois, non pas en nature, mais en ordre ; non pas en substance, mais en fonne ; non pas en puissance, mais en propriété. Tous trois ont une seule substance, une seule nature, une seule puissance, parce qu’il n’y a qu’un seul Dieu à qui l’on doit rapporter ces degrés, ces fonnes et ces propriétés sous les noms de Père, de l’ils et de Saint-Esprit. » Ibid., ii, col. 180. La terminologie de Tertullien frappe ici par sa nouveauté et sa précision. Le latin étranger à la pensée chrétienne est plié aux idées les plus élevées du dogme trinitaire. Tertullien a])pcllcle Saint-I-3spril consorssubslanlim Patris, ibid., ni, col. 181 ; il proteste qu’il ne s’est jamais avisé de le séparer du Père et du Fils, ix, col. 187 ; il déclare que le nom de Dieu lui appartient au même titre qu’au Père et au Fils, xiii, col. 193. Le /lo

ESPRIT-SAINT

7ÎG

Père et le Fils font deux ; ils font même trois avec le Snint-Esprit, eu égard à Véconomie qui introduit le nonibrc, xiii, col. 193. Le Saint-Esprit, en tant qu’il participe à la nature divine, prend jiarl avec le Père et le Fils à l’œuvre de la création, qui appartient à l’unité de la Trinité, xii, col. 191. Toute la vérité réside dans le Père, dans le Fils et dans le Saint-Esprit, selon l’économie de la foi chrétienne. « Croire en un seul Dieu sans admettre dans l’unité divine le Fils et, après lui, le Saint-Esprit, c’est n’avoir que la foi des Juifs… Quelles seraient l’œuvre de l’Évangile et la substance du Nouveau Testament, si depuis lors il n’y avait pas d’obligation de croire que Dieu est un en trois personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit ? » xxx, col. 220.

Nous pourrions multiplier les textes de V Adversus Praxcam, où la divinité du Saint-Esprit, la sainteté essentielle. Liber de monogamia, iii, t. ii, col. 983 ; la vis vicaria Christi, De »rœscr., xiii, t. ii, col. 31, est affirmée de la nuiuière la plus explicite. Mais ceux qu’on vient de lire démontrent jusqu’à l’évidence l’orthodoxie de la doctrine de Tertullien.

Cet écrivain ne se borne pas à reconnaître formellement la nature divine du Saint-Esprit. Il afnrme aussi contre le modalisme de Praxéas sa personnalité distincte. Pour désigner celle-ci, il emprunte au droit romain le terme juridique de personne : il fait usage d’autres mots, tels que modidus, species, forma, qradus. Ce dernier mot, d’après Bull, indique l’ordre des relations, quo Pater a se existai, FiUus a Pâtre immédiate prodeal, Sunctus vero Spiritus a Pâtre per Filinm procédât. Op. cit., 1. II, c. vii, n. 6, p. 96. Le Saint-Esprit est la personne qui occupe en Dieu le troisième rang (personnel). Aduersiis Praxeam, ui, t. ii, col. 181. Il est le troisième après Dieu et le Fils, comme le troisième par rapport à la source est le ruisseau qui sort du fleuve et le troisième par rapport au soleil est la lumière qu’envoie le rayon. Jbid.. viii, col. 187. L’Esprit-Saint est le troisième degré en Dieu, ix, col. 188 ; le troisième nom de la divinité, le troisième degré de la majesté divine, xxx, col. 219, 220. Il y a un Saint-Esprit qui parle, un Père auquel il parle, un Fils duquel il parle. Le Saint-Esprit se distingue donc réellement de la personne à laquelle il parle et de la personne dont il parle. De même, le Saint-Esprit qui est envoyé se distingue de celui qui l’envoie. Chaque personne a une projiricté relative qui la constitue dans son individualité personnelle, xi, col. 191.

Il est donc juste de dire, avec Tixeront, que l’enseignement de Tertullien sur le Saint-Esprit est de tout point remarquable. Op. cit., p. 338. Petau cependant penche à croire que Tertullien s’est trompé sur la Trinité. 1. I. c. xiv, n. 3-C, p. 370-372. Harnack découvre che ? lui les vestiges du subordinatianisme le plus marqué. Dogmengeschicide, t. i, p. 532. On pourrait, en elYet, trouver une saveur subordinatiennc dans quelques expressions impropres ou très dures (le Tertullien. A. d’Alès, La ilièologic de Tertullien, Paris, 190.5, p. 101. Teriullien appelle le Saint-Esprit et le Verbe portioncs Dei, moduli. Ibid., xxvi, t. II, col. 213. Ces termes ne diffèrent point, quant à la significatio’.i, des mots persoiia, xi, col. 190 ; xii, col. 191 ; xviir, col. 200 ; xxi, col. 204 ;.species, viii, col. 186 ; XIII, col. 194 ; gradiis, ii, col. 180. Ils ne suppriment pas en Dieu la distinctio personalis, xv, col. 196. Vax moduli et porlionis, observe Themassin, potest ofjendicula esse, scd ca vel condonandu est homini tam mulla alla constantissime edenti consubstantialilatis argumenta, vel ad hoc trahenda ut non sonent nisi derivationem a Pcdre, c. xxxvii, n. 4, p. 554 ; xxxviii, 9, p. 557, 558 ; Scheeben, La dogmatique, n. 839, t. ii, p. 568. Mais nous ne devons pas oublier que Tertullien a forgé la terminologie latine de la sainte Trinité,

cju’il a légué à la postérité une quantité de mots, dont se sont servis les théologiens des âges suivants pour développer la théologie trinitaire. Tunnel, Tertullien, Paris, 1905, p. xxv. Toutefois, il a si souvent et si clairement allirmé la divinité et la personnalité du Saint-Esprit, que des faiblesses de détail ou des expressions très dures ne sauraient servir de prétexte à l’accuser de subordinatianismc. A. d’Alès, op. cit., p. 103 ; Freppcl, op. cit., t. ii. p. 312 ; Chternov, Tertullien, prêtre de Carthaye : essai sur son œuvre scientifique et littéraire, Koursk, 1889, p. 258-276.

b) Saint Cyprien a été plus homme d’action que théologien. A ce dernier titre, i ! a concentré toute son attention sur la doctrine de l’Égiise et l’invalidité du baptême conféré par les hérétiques. Ses données trinitaires, très rares d’ailleurs, n’aiiportent rien de nouveau à la théologie du Saint-Esprit. Il se borne à des allusions au rôle du Saint-Esprit dans la régénération des âmes par le baptême. Le Saint-Esprit est inséparable de la vraie Église. L’Église est une, de même que le Saint-Esprit est un ; par conséquent, le baptême, dont la validité se rattache à l’unité de l’Église et du Saint-Esprit, n’est pas valide si les hérétiques le conféraient, parce qu’on ne peut pas le séparer de l’Église et du Saint-Esprit. Epist. ad Pompeium, n. 4, P. L., t. iii, col. 1177. Par le baptême, le Saint-Esprit descend sur tous les fidèles, Epist. ad Jubaiamim, xx, P. L., t. III, col. 1160, et par le baptême ceux-ci sont à même de le recevoir. Epist., lxiii, n. 8, P. L., t. iv, col. 391. Ces textes, nous l’avons remarqué plus haut, n’ajoutent rien à la théologie trinitaire du iii<e siècle ; ils insinuent cependant que saint Cyprien reconnaît la personnalité divine du Saint-Esprit. Maran, 1. IV, c. xviii, n. 4, p. 513.

c) La doctrine de Lactance sur la Trinité n’est pas sûre. Rhetor crat ilte, non theologus, dit de lui Bull, et son jugement n’est pas erroné. Lactance songe trop à la tournure classique de ses phrases, mais il ne possède pas une connaissance approfondie des mystères chrétiens. Saint Jérôme le prend vivement à partie. A l’entendre, il aurait surtout montré son ignorance de la théologie dans son exposé de la doctrine du Saint-Esprit. Au mépris de la tradition, il aurait nié la eonsubstantialité divine du Saint-Esprit ; il aurait identifié le Saint-Esprit avec le Père et le Fils et attribué à ces deux personnes divines l’œuNTe de la sanctification. Le Saint-Esprit n’aurait eu qu’une subsistance nominale. Epist., lxxxiii, ad Pammachium, n. 7, P. L., t. xxii, co !. 748. En d’autres termes, d’après saint Jérôme, Lactance aurait enseigné le modaJisme trinitaire. In Epist. ad Gal., 1. II, eiv, P. L., t. XXVI, col. 399. La pièce incriminée par saint Jérôme comme renfermant cette fausse doctrine serait la lettre de Lactance à Démétrien. Cette pièce, malheureusement, nous ne la possédons plus, ce qui nous empêche de contrôler la justesse des accusations portées contre Lactance. Celui-ci Ijarie à plusieurs reprises du Saint-Esprit dans les Dii’inæ institutiones. C’est l’Esprit-Saint qui manifeste aux hommes les secrets desseins du Père sur le Fils, IV, 14, P. L., t. VI, col. 489, et qui parle aux prophètes. Ibid., xviii, col. 509. Il a été l’auteur de la conception virginale du Christ, 12, col. 478 : il est descendu sur le Christ en forme de co’.ombe, 15, col. 491.

Ces passages, à vrai dire, ne contiennent pas l’affirmation de la divinité du Saint-Esprit, mais ils laissent voir que Lactance établit une distinction personnelle entre le Père et les deux autres termes de la Trinité et qu’il considère le Saint-Esprit comme le héraut de Dieu auprès des hommes. II peut se faire donc que saint.Jérôme ait exagéré, ce dont il est coutumier, la portée de quelques expressions obscures de Lactance sur le Saint-Esprit. C.’est le sentiment de Maran :

Videliir sanctiis Ilieronijmas oh sludium fidei, quo (oins p<igraba(, nimis scocrum se Lnclanlio animaducrsorem prœbuisse. Op. cil., 1. IV. c. xxii, p. 543.

Un rapide coup d’oeil sur la théologie trinitaire anténicécnne atteste donc que la tradition chrétienne touchant la divinité et la personnalité du Saint-Esprit était déjà fixée dans la littérature patristique des n’^et iirsiècles. qu’elle s’est maintenue intègre au milieu des controverses trinitaires qui aboutissaient à l’arianisme ou au macédonianisnic. L’indigence du langage theologique, les tâtonnements de la pensée chrétienne qui travaillait à élarL’ir ses horizons, à puiser quelquefois dans la spéculation les armes pour abattre ses adversaires, ne réussirent ni à l’effacer ni à l’altérer. Les Pères et écrivains anténicéens ont pu faillir dans l’exposé de leurs théories trinitaires ; mais leur langage a toujours été ferme et constant, toutes les fois qu’il s’est agi d’affirmer la consubstantialité des trois personnes divines, de revendiquer pour le Saint-Esprit la possession pleine et absolue de l’être divin, le droit aux mêmes honneurs et à la même adoration que le Père et le Fils.

3° Les Pères grec ? du iv’e siècle. — Au ive siècle, la théologie trinitaire, suivant les lignes marquées par la tradition, atteint son complet et parfait développement. La doctrine du Saint-Esprit, de même que celle du Verbe, se condense en des formules qui la précisent et lui permettent de repousser victorieusement toutes les attaques. C’est le siècle, comme on l’a dit, des grandes hérésies, mais en même temps le siècle des grands docteurs. On connaît les belles paroles de saint Augustin sur le développement du dogme : Mulla f/uippe ad fidem calliolicam perlincnlia dum liarclicorum callida inquieludine exagilanliir, ul adversus eos defendi possinl, el considerantur diligenliiis, et intelligunliir clarius, el inslanlius prædicanlnr. De civilale Dei, 1. XVI, c. II, 1, r. L., t. xli, co !. 477. Ces paroles s’appliquent très bien au développement de la doctrine du Saint-Esprit. Les hérésies lui donnèrent l’essor et poussèrent la pensée chrétienne à le poursuivre avec succès. L’arianisme s’attaquait surtout i la divinité du Verbe, mais, par un enchaînement logique, il aboutissait aussi à la négation de la consubstantialité divine du Saint-Esprit. l’n fragment de la Thalic, conservé par saint Athanase, nous apprend que, d’après l’hérésiarque alexandrin, la personne du Saint-Esprit ne possédait pas la même nature que le Père. De synodis Arimini et Seleuciæ, xv, P. G., t. xxvi, col. 708. Arius, qui donnait au Verbe une nature créée, mettait aussi le Saint-Iisjjrit au nombre des créatures. Voir Tixeront, Hisloirc des dogmes, Paris, 1909, t. II, p. 28. L’hérésie macédonienne, et en général les hérésies 7 : /£-.^ij.aTou.iyo0vT£ ;, pour adopter l’expression de saint.thanase, dérivent en droite ligne de l’arianisino.

En présence de la double négation de la divinité du Verbe et du Saint-Esprit, les Pères du ive siècle, sans méconnaître l’incompréhensibilité du dogme de la Trinité, jugèrent néanmoins qu’il fallait demander, soit à l’Écriture sainte, soit h la raison éclairée par la foi. les armes nécessaires : la défense de la tradition dogmatique. Ils recueillirent donc et soumirent à une élude approfondie les textes scripturaires qui se rapl >ortent au Saint-Esprit ; ils donnèrent à leur terminologie une forme plus nette et plus arrêtée : ils discutèrent en théologiens sur la nature du Saint-Esprit. Ils livrèrent ainsi à la postérité tous les matériaiix pour asseoir sur des bases solides la théologie du Saint-ICsprit.

Les Pères du iv siècle continuent assurément la tradition primitive de l’Église touchant la divinité et la personnalité <lu Saint-I^sprit. Mais il y a, chez eux, un élément nouveau, l’élément de la spéculalion théolo gique qui bégayait avec Irénée, Origènc et Tertullien. Ils ont traduit en formules précises les données de la tradition sur le Saint-Esprit, en en retranchant les termes ambigus et flottants. Ils ont apporté aux problèmes les plus ardus de la théologie du Saint-Esprit des solutions qui ont permis à l’Église de mieux défendre le dogme trinitaire.

1. Saint Athanase ouvre la série des théologiens du Saint-Esprit au iv siècle. Sa doctrine sur le Saint-Esprit est développée avec ampleur dans les lettres i, m, IV, à Sérapion, évêque de Thmuis. Sérapion lui avait écrit précédemment en lui donnant des détails sur l’apparition d’une nouvelle secte issue de l’arianisme, secte qui rabaissait le Saint-Esprit au niveau des créatures. Epist., i, ad Serapionem, 1, P. G., t. xxvi, col. 532. La doctrine de saint Athanase sur l’Esprit-Saint est résumée dans le Liber de Trinilale et Spiritu Sanrlo, dont on ne possède qu’une version latine. Mais nous ne tiendrons pas compte de ce petit ouvrage, qui est classé parmi les écrits douteux du saint docteur.

Pour confirmer la divinité du Verbe, définie par le concile de Nicéc, saint Athanase démontre aussi la vérité de la croyance chrétienne sur la divinité du Saint-Esprit. Il la démontre contre les attaques d’une secte nouvelle, qu’il désigne sous le nom de secte des tropiques, Tjo-r/.o !, Episl., i. ad Serapionem, 17, col. 572. L’hérésie des tropicjues n’est autre, dit saint Athanase, que le fruit d’une ignorance grossière. Ces hérétiques altéraient le véritable sens de l’Écriture sainte et regardaient comme des rpono : ou métaphores les passages scripturaires où le Saint-Esprit est mentionné. Ibid., 21, col. 580. Voir Cavallera, Saint Athanase, 1908, ]). 23. Ils répandaient sur le Saint-Esprit des théories absurdes, qui étaient cependant en parfait rapport avec l’inipiélé arienne. Ibid., 32, col. 605. On a identifié ces sectaires avec les semi-ariens ; mais ce n’est là qu’une simple présomption. Rien ne s’opiiose à ce qu’on considère les tropiques comme une secte à part. Cyrille (Lopaline), La doctrine de saint Allianusc le Grand sur la sainte Trinité (en russe). Kazan. 1894, ]). 197.

Pour combattre la nouvelle hérésie, saint Athanase puise ses arguments à deux sources différentes : à l’ICcriturc sainte expliquée au sens catholique et à la tradition des apôtres, telle qu’elle est transmise par l’enseignement des Pères. Ces sources ne répandent pas leurs eaux hors de l’enceinte de l’Église. Ibid., .33, col. 605. A plusieurs reprises, le saint docteur proteste qu’il s’en tiendra à ces deux sources, qu’il est téméraire de sonder les mystères de la vie intime de Dieu, que la science de la Trinité ne repose pas sur des syllogismes humains, mais sur l’autorité de la foi d’une intelligence pieuse et circonspecte. Ibid., 20, col. 577. La philosophie n’est pas appelée par lui à projeter sa lumière sur le dogme.

Les premières preuves de la divinité du Saint-Esprit, dans la première lettre à Sérapion, sont des preuves scripturaires. Athanase y réunit un grand nombre de textes de l’.Vncicn et du Nouveau Testament. 5. 7, 8, col. 511-548, 548-552. Il donne une règle facile pour discerner dans l’Écriture sainte les passages qui se rapportent au Saint-I]spril. « Si quelque part on trouve l’Esprit-Saint appelé simplement esprit, sans additions comme de Dieu. Gen., I, 2 : Jud., xv, 14 ; Mallh., xii, 28 ; du Père, Malth., X, 20 ; de moi, Gen.. vi. 3 ; du Christ, Hom.. viii, 9 ; du /"//.s, Gal., iv, 6, ou même sans article, il n’est pas question de l’Espril-Saint. « Epist., i, ad Serapionem, 4, col..53, 5.36. Mais le langage de la sainte Écriture n’est pas toujours clairet le sens du mot esprit est multiiile : les hérétiques peuvent donc facilement abuser de ces textes pour sii)primer en

Dieu la troisième personne. Dans ce verset d’Amos : Me voici a/Jermissant le tonnerre, et créant l’esprit, et annonçant aux hommes son Clirisl, iv, 13, les tropiques voyaient une preuve de la nature créée du Saint-Esprit. Ce texte, déclare saint Athanase, ne doit pas s’entendre du Saint-Esprit. Il se rapporte à l’esprit de l’homme renouvelé, purifié par les grâces de la rédemption. Epist., i, ad Serapionem, 9, col. 552. Un texte de saint Paul : Je te conjure devant Dieu, devant le Christ Jésus et devant les anges élus, I Tim., V, 21, fournissait aux tropiques un prétexte pour mettre le Saint-Esprit au nombre des anges. Les anges, en effet, y sont nommés après le Christ. « Si cette interprétation est exacte, dit ironiquement saint Athanase, nous pourrions aussi déclarer que le Fils est un homme. Ne lisons-nous pas, en effet, dans l’Évangile de saint Luc, qu’il y avait dans une ville im juge qui ne craignait point Dieu et ne se souciait pas de l’homme ? xviii, 2. L’homme y est nommé après Dieu, donc, il est le Fils, suivant l’exégèse des tropiques. » Ibid., 14, col. 565.

Mais saint Athanase ne s’en tient pas au seul témoignage de la révélation. Les textes de l’Écriture sainte ouvrent un vaste champ à ses spéculations théologiques. La divinité du Saint-Esprit, il la démontre par une triple série d’arguments qui se rapportent à la nature divine, à la nature angélique et à l’action que le Saint-Esprit exerce sur les âmes chrétiennes. Mais, il ne peut pas l’oublier, c’est toujours à la révélation qu’il demande les preuves de ce qu’il avance.

Tout d’abord, il démontre la divinité du Saint-Esprit en invoquant l’autorité des textes scripturaires qui supposent nécessairement dans la troisième personne la nature divine. Les tropiques, remarque-t-il, repoussent toute accointance avec l’arianisme : ils admettent la divinité du Verbe et se bornent à nier la divinité du Saint-Esprit. C’est un défaut de logique, déclare le saint docteur : par rapport au Fils, le Saint-Esprit est dans la même relation d’ordre et de nature que le Fils par rapport au Père. Donc, si l’Esprit du Fils est une créature, il faut, pour être conséquent, affirmer que le Verbe du Père est. lui aussi, une créature. Epist., I, ad Serapionem, 21, col. 580. Le Saint-Esprit vient de Dieu. Or, ce qui est de Dieu ne peut dériver du néant, ni être créé ; autrement, Dieu lui-même, qui est la source du Saint-Esprit, serait aussi une créature. Donc, le Saint-Esprit possède la nature divine. Ibid., 22, col. 582. Le Saint-Esprit participe aux attributs qui ne conviennent pas aux créatures. Il est ùnmuable, incorruptible, tandis que les anges eux-mêmes déchurent de leur gloire, ce qui atteste leur corruptibilité. Donc le Saint-Esprit est Dieu. Jbid., 26, col. 589-593. Le Saint-Esprit est immense, éternel ; il remplit l’univers entier, il est dans tous les êtres. Sap., xii, 1. Or, ni l’immensité ni l’éternité n’appartiennent aux créatures, pas même aux anges. Le Saint-Esprit participe donc à la nature divine. Ibid., col. 592. Le Saint-Esprit est créateur au même titre que le Père et le Fils. Ps. xxxiii, 6. Mais l’acte de la création suppose en celui qui en est l’auteur la nature divine. Le Saint-Esprit possède donc la nature divine du Père et du Fils. Epist., iii, ad Serapionem, 4, col. 632. Le Saint-Esprit est associé à la gloire du Père et du Fils, qui, de l’aveu des tropiques, participent à la nature divine. Or, il serait absurde, si le Saint-Esprit était une créature, d’attribuer la même gloire à ceux qui diffèrent de nature et ne se ressemblent en rien. Le Saint-Esprit doit donc être assimilé au Père et au Fils, quant à la possession de la nature divine. Epist., I, ad Serapionem, 9, col. 552. Rien d’étranger ne se mêle à la nature divine de la Trinité. Donc, si ce Saint-Esprit est le troisième terme de cette Trinité, il ne doit

pas être étranger à la nature divine, il ne doit pas être mis au nombre des créatures. Ibid., 17, col. 569. L’union la plus parfaite et l’unité absolue existent dans la sainte Trinité. Un grand nombre de textes, réunis, Epist., 1, ad Serapionem, 19, montrent que les actes appropriés à une personne divine s’approprient aussi aux autres personnes. Le Père accomplit les œuvres appropriées au Fils, et le Fils les œuvres appropriées au Saint-Esprit. Le Saint-Esprit participe donc à la nature divine du Père et du Fils, puisqu’on ne saurait approprier aux créatures les actes qui dérivent d’une puissance divine. Ibid., 20, col. 576-580. L’Esprit est l’image du Fils. Or, les tropiques confessent que le Fils n’est pas une créature. Donc le Saint-Esprit n’est pas une créature. Ibid., col. 577. Celui qui possède le Saint-Esprit possède le Fils, et, le possédant, il est le temple de Dieu : or, le Fils n’est pas une créature par cela même qu’il est dans la forme du Père. Epist., III, ad Serapionem, 3, col. 629. Donc le Saint-Esprit n’est pas une créature, car le Fils est en lui, et lui-même est dans le Fils.

Une autre série d’arguments se rapporte à la nature angélique ; le saint docteur y a recours pour démontrer contre les tropiques que le Saint-Esprit ne doit pas être mis au nombre des anges. L’argumentation de saint Athanase, toute nourrie de textes scripturaires, est très vigoureuse. Il demande à ses adversaires s’ils sont à même de produire des passages de l’Écriture sainte, où il soit dit que le Saint-Esprit est un ange. L’Écriture sainte ne renferme pas de textes pareils. Le Saint-Esprit n’y a jamais été assimilé aux anges. La sainte Trinité est indivisible et unie en elle-même ; si l’on mentionne le Père, la pensée se rapporte immédiatement au Verbe et à l’Esprit qui est dans le Fils. Si l’on nomme le Fils, le Père est aussi dans le Fils, et l’Esprit n’est pas hors du Verbe. Les anges, au contraire, sont hors du Père et du Verbe. Il serait donc absurde d’attribuer au Saint-Esprit la nature angélique. Epist., i, ad Serapionem, 14, col. 565.

Une troisième série d’arguments touche aux rapports du Saint-Esprit avec les âmes chrétiennes. Au témoignage des auteurs inspirés, le Saint-Esprit répand sa grâce sur ces âmes. Il n’a donc pas une nature créée. Nous nous renouvelons dans le Saint-Esprit. Or, si le Saint-Esprit nous renouvelle, si ce renouvellement répond, en quelque sorte, à une nouvelle création, le Saint-Esprit, qui en est l’auteur, ne saurait être ni renouvelé ni créé, c’est-à-dire ne saurait être une créature. Ibid., 9, col. 553. Le Saint-Esprit est le sanctificateur des âmes, la source de la sanctification ; les créatures, au contraire, sont sanctifiées et renouvelées. Il s’ensuit donc que le Saint-Esprit, qui n’est point sanctifié par un autre et ne reçoit pas la sainteté en participation, ne peut appartenir à la classe des êtres sanctifiés par un autre. Ibid., 23, col. 584. L’Esprit-Saint est un esprit viviflcateur ; les créatures, au contraire, sont vivifiées par lui. Il n’appartient donc pas aux êtres auxquels il communique la vie. Le Saint-Esprit est appelé le chrême, le sceau qui dans le monde oint et scelle toutes les créatures. Le sceau n’a pas la même nature cpie les choses scellées, ni le chrême la même que les choses ointes. Le Saint-Esprit n’est donc pas une créature. Il nous fait participer à la nature de Dieu. Or, s’il était une créature, il ne pourrait pas produire en nous cette participation, parce qu’une nature créée ne peut pas donner ce qui lui est infiniment supérieur et que, par conséquent, elle n’a pas. Le Saint-Esprit n’est donc pas une créature.

Soit donc que l’on considère la nature divine, soit que l’on considère la nature angélique ou l’action de la grâce du Saint-Esprit sur les âmes, on est forcé, à moins de tomber dans l’absurde ou de rejeter les té

moignages les plus éclatants de l’Écriture sainte, de reconnaître au Saint-Esprit la possession pleine et entière de la nature divine. Dans la Trinité, c’est-à-dire dans le Père, dans le Fils et aussi dans l’Esprit, il n’y a, déclare saint Athanase, qu’une seide nature divine. Epist., IV, ad Serapionem, iii, col. 641.

Enfin, une quatrième série d’arguments est puisée aux sources de la tradition. Saint Athanase déclare qu’il est utile, pour élucider la doctrine du Saint-Esprit, d’interroger l’ancienne tradition, de consulter la foi catholique, donnée par le Seigneur, prêchce par les apôtres, gardée par les Pères de l’Église. Epist., i, ad Serapionem, n. 28, P. G., t. xxvi, col. 594, 595. On perd le droit de se dire chrétien, si l’on renonce à la foi prêchée par l’Église, et cette foi enseigne que la Trinité sainte et parfaite est dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il y a un seul Dieu, qui est au-dessus de tous comme Père, par tous par le Verbe, en tous dans le Saint-Esprit : l’Esprit-Saint est réel ; il existe et subsiste réellement, jtt^p/s’. Y.oà ùyéaTr.y.ev a/.rfi<ùç. Ibid., col. 596.

Que la tradition affirme la divinité du Saint-Esprit, on peut aisément le déduire de la formule du baptême. Si le Saint-Esprit était une créature, le baptême serait conféré au nom d’une créature, et il en résulterait que la Trinité ne serait plus entièrement divine. Cette conséquence est absurde, puisque la foi présente la Trinité comme indivisible. Si l’on rabaissait le Saint-Esprit au rang des créatures, on n’aurait plus ni le Pérc, ni le Fils, ni une seule foi, ni un seul baptême. Ibid., n. 29, 30, col. 596-600. Le baptême conféré au seul nom du Père, ou au seul nom du Fils, ne donne pas la grâce du sacrement. Ibid., n. 29, col. 598.

La doctrine des Pères concorde parfaitement avec les témoignages de l’Écriture et la foi de l’Église catholique. Ibid., n. 32, col. 605. L’Esprit-Saint n’est pas seulement consubstantiel au Père et au Fils, il est aussi une personne distincte du Père et du Fils ; il existe et subsiste. Ibid., n. 28, col. 596. La Trinité existe de toute éternité, et dans la Trinité nous avons le Père, le Fils et le Saint-Esprit comme personnes distinctes. Epist., iii, ad Serapionem, n. 7, col. 636. Celui qui croit au Père, croit au Fils et au Saint-Esprit. Ibid., n. 6, col. 636.

La personnalité du Saint-Esprit est bien mise en lumière, lorsque saint.thanase réfute les tropiques qui faisaient cette objection : « Si le Saint-Esprit n’est pas une créature, nous aurions un autre Fils de Dieu, ce qui ferait deux frères en Dieu, le ^erbe et le Saint-Esprit. » Epist., IV, ad Serapionem, n. ], col. 637. En réponse, le saint docteur déclare que le Saint-Esprit est à l’égard du Fils dans la même relation d’ordre et de nature que le Fils l’est à l’égard du Père. Epist., i, ad Serapionem, n. 21, col. 580. Si le Fils est donc une personne distincte du Père, le Saint-Esprit est aussi distinct du Fils et en même temps du Père. L’Écriture sainte ne donne jamais au Saint-t-^sprit le nom de Fils : il y est désigné sous les noms d’Espril-Saint ou il’Esprit de Dieu. De même, le Fils n’y est jamais désigné sous le nom de Saint-Esprit. Epist., iv, ad Serapionem, n. 3, col. 641. L’Église professe sa croyance au Père, au Fils et au Saint-Esprit : au Père, qu’il serait absurde d’ajjpeler Fils ; au Fils, qu’il serait absurde d’appeler Père ; à l’ivsprit, qui n’a ni le nom de Père, ni celui de l’ils. (^elte foi de l’Église n’est pas j sujette à des variations. Le Père est toujours Père ; le I I-"ils est toujours Fils ; l’Esprit est toujours Esprit, et il ne saurait être appelé autrement. Ibid., n. 6, 7, col. 645, 648.

Le traité De inrarnatione et contra arianos renferme un texte très explicite sur la personnalité du Saint-Esprit- : « Il y a une seule divinité, un seul Diei eu

trois personnes, » 10, P. G., t. xxvi, col. 1000. Remarquons toutefois que l’authenticité de ce livre est contestée et qu’on lui donne pour auteur Apollinaire de Laodicée. Bardenhewer, Patrologie, Fribourg-en-Brisgau, 1901, p. 212 ; Lopatine, p. 221-223.

La pensée de saint Athanase sur la divinité et la consubstantialité du Saint-Esprit est nettement formulée dans les textes précédemment cités. Il y a, sans doute, quelques passages obscurs dans les œuvres du saint docteur. "Voir Nôsgen, p. 46, 47. Mais ces passages, tous susceptibles d’un sens catholique, ne donnent pas le droit de lui reprocher d’avoir laissé dans l’ombre la personnalité du Saint-Esprit. Harnack, Dogmengeschichte, t. ii, p. 277, 278. On pourra bien dire que la théologie trinitaire d’Athanase n’est pas de tout point achevée, Tixeront, op. cit., t. ii, p. 74, 75, mais on doit aussi reconnaître que saint Athanase a été un vaillant défenseur de la doctrine traditionnelle de l’Église sur le Saint-Esprit, et que, le premier, il l’a établie sur de solides bases théologiques.

2. Saint Cyrille de Jérusalem consacre deux catéchèses à l’étude de la théologie du Saint-Esprit, la xvi^ et la xvii^ P. G., t. xxxiii, col. 917-1012. Mais, avec lui nous sortons du domaine de la théologie dogmatique, pour entrer dans le domaine de la théologie affective et mystique. On sait le but que saint Cyrille se propose dans ses catéchèses. Il veut expliquer aux catéchumènes, d’une manière claire et concise, les vérités les plus importantes de la doctrine catholique. Pour remplir sa tâche, il remonte aux sources les plus pures de la tradition. Les deux catéchèses xvi et XVII renferment une esquisse historique de la révélation et de la manifestation du Saint-Esprit dans le monde. Le Saint-Esjirit apparaît préparant le terrain à l’incarnation du Verbe, et, l’oeuvre de la rédemption achevée, continuant son rôle de sanctificateur des âmes, de distributeur de la grâce dans l’Église chrétienne. Tout d’abord, saint Cyrille s’elïorce de prémunir les âmes chrétiennes contre les hérétiques, anciens et nouveaux, qui blasphèment le Saint-Esprit. Le premier pneumalomaque est Simon le Magicien. Cat., XVI, 6, col. 925. Les gnostiqucs et les valent iniens aiguisèrent aussi leurs traits contre le Saint-Esprit. D’autres imaginèrent deux esprits du Seigneur, l’un pour l’Ancien Testament, l’autre pour le Nouveau. Ibid., col. 925. Marcion prêchait le trithéisme et lançait contre le Saint-Esprit des blasphèmes qu’il répugne de rapporter. Ibid., 7, col. 928. Les cataphrygiens étaient aussi des i)neumatomaques. Montan se croyait le Paraclet annoncé par le Seigneur. Ibid., 8, col. 928. Manès, qui personnifiait les horreurs de toutes les hérésies, suivait l’exemple de Montan. Ibid., 9, col. 930. Sabellius reniait la trinité des personnes en Dieu et réduisait le Saint-Esprit à une simple modalité de la nature divine. Arius séparait les trois personnes en Dieu et mettait le Saint-lCsprit au nombre des créatures. Ibid., 4, col. 921. Contre toutes ces hérésies, l’Église catholique élève la voix pour déclarer qu’il y a un seul F.sprit de Dieu, un seul Paraclet ; que cet Ivsjirit possède la puissance suprême de la divinité ; qu’il est quelque chose de divin, d’impénétrable aux regards humains ; qu’il est une personne vivante, une nature intelligente, le sanctificateur des êtres créés ; qu’il inonde les âmes de sa lumière céleste ; qu’il parle par les prophètes de l’Ancien Testament et les apôtres du Nouveau. Il y a un seul Dieu et Seigneur de l’ancienne loi et de la loi de grâce ; il y a un seul l’ils, annoncé dans les prophéties de l’.Xncien Testament, apparu au monde dans le Nouveau ; il y a un seul Esprit qui a prophétisé la venue du Christ, et qui, après l’incarnation, est descendu sur le Christ et l’a révélé au genre humain. Ibid., iii, col. 920. Celle pro

fession de foi de Cyrille résume, il va sans dire, l’enseignement tradilioiinel de l’Église sur le Saint-Esprit.

En continuant l’exposé de sa doctrine, le saint docteur déclare vouloir s’en tenir uniquement aux damées de l’Écriture sainte, la seule source qui, sans danger, abreuve les âmes. Ibicl., 1, col. 917. Les hypothèses et l’éloquence des raisonneurs égarent l’esprit chrétien. Cal., iv, 17, P. G., t. xxxiii, col. 476, 477. Il faut dire, sur le Saint-Esprit, ce que le Saint-Esprit a dit de lui-même. Les questions oiseuses ont besoin d’être écartées de la théologie. Cal., xvi, 2, col. 920. Il est plus utile pour les âmes chrétiennes de boire aux vases que l’Église considère comme lui appartenant et d’étancher sa soif avec l’eau qui jaillit de ses sources. IbicL, 9, col. 932 ; xvii, 1, col. 968, 969.

Pour le salut de l’âme, il suffit de croire qu’il y a un Dieu, un Fils et un Saint-Esprit. C(tL, xvi, 24, col. 963. L’Église catholique prêche l’existence d’un seul Paraclet, qui a parlé par la bouche des prophètes. Cal., xvii, 3, col. 972. Il n’y a pas de différence entre les dons du Père, du Fils et du Saint-Esprit, car il y a un seul salut, une seule puissance, une seule foi, un seul Dieu Père, un seul Fils unique, un seul Esprit-Saint Paraclet. Cal., xvi, 24, col. 953.

Saint Cyrille prouve la divinité du Saint-Esprit par les attributs divins que lui reconnaît l’Écriture sainte. II faut croire par rapport au Saint-Esprit ce qu’on croit par rapport au Père et au Fils. Ibid., iv, 16, col. 473. Le Saint-Esprit a une nature simple, indivisible, 7ro>.uûuva|j.o ;, xvi, 30, col. 960 ; xvii, 2, 15, col. 970, 973. Il pénètre tout ; il connaît les abîmes de la science de Dieu, il participe avec le Fils à la divinité du Père, rïj ; ôcorriTo ; 1 ?, ? Ttxiptxr, ; eTTi quv tw Ilv£"j[j, a-i Tô) âyiu) xo’.vtovôç ô vtbç ô fj.ovoyevri ;. Ibid., VI, 6, col. 548. Aucune créature, quelque élevée et agréable qu’elle soit aux yeux de Dieu, ne peut rivaliser en perfection avec le Saint-Esprit. Les anges les plus élevés dans la hiérarchie céleste ne peuvent soutenir la comparaison avec lui, Cal., xvi, 2,

3, col. 952, qui est le héraut de Dieu dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Cal., iv, 16, col. 476 ; xxxviii, 17, col. 1012.

Que le Saint-Esprit participe à la nature divine, saint Cyrille le déduit de ce qu’il égale en honneur et en dignité le Père et le Fils. Cal., iv, 16, col. 476. La gloire du Père et du Fils est une et identique avec celle du Saint-Esprit. Cal., vi, 1, col. 540. Les cieux contemplent la gloire du Saint-Esprit, qui est toujours présent au Père et au Fils. ProcaL, 16, col. 357 ; Cal., xvi, 4, col. 921.

La formule du baptême donne encore à Cyrille une preuve évidente de la croyance traditionnelle de l’Église à la divinité du Saint-Esprit. Le Saint-Esprit, dit-il, est inclus dans la Trinité au moment du baptême. Cal., XVI, 4, co’.. 921. C’est pour cela qu’il devient, avec le Père et le Fils, notre espérance. Ibid., 24, col. 953.

La personnalité divine du Saint-Esprit est aussi mise en relief par Cyrille. Le Saint-Esprit subsiste, ùçs’îTtoç ; il est toujours présent au Père et au Fils ; c’est une hypostase (ivj71ô(TiaTo/), qui parle, agit, organise (ot/.ovo[j.£î), sanctifie. Cal., xvii, 5, col. 973^ 976. On le désigne sous plusieurs noms. Cal., xvii,

4, 5, col. 972-976, mais il est toujours le même Esprit malgré ces appellations diverses. Ibid., 2, co’.. 969. Il est l’unique Esprit de Dieu, Cal., xvi, 3, col. 920 ; un Esprit qui ne se dédouble pas dans les deux Testaments. Cal., xvii, 5 col. 976. Mais dans les deux Testaments, il est le principe d’une série d’actes qui révèlent en lui une personnalité distincte. Pour confirmer cette assertion, saint Cyrille passe en revue les œuvres du Saint-Esprit, depuis qu’il descendit sur

les soixante-dix anciens d’Israël, que Mo’îsc avait assemblés dans sa tente à Thabécra. Num., xi, 24, 25. Dans cette histoire biblique du Saint-Esprit, il s’attache de préférence à décrire son rôle dans la vie du Christ et des personnages martiuants de l’Évangile. Il décrit ensuite l’action du Saint-Esprit dans la sanctificatiori des âmes. L’Esprit de Dieu se répand dans les âmes, les encourage, les fortifie, les aide à acquérir les vertus chrétiennes, efface leurs péchés, communique aux martyrs la force et la constance au milieu des supplices. Cal., xvi, 16, 20-22, col. 940, 941, 948, 949. Il est le soutien et le docteur de l’Église. Ibid., 14, col. 937. Il distribue à chacun la grâce comme il le veut, et l’âme pécheresse, deveiuie par la pénitence digne du Saint-Esiirit, produit des grappes de justice. Ibid., 12, co !. 933.

De tout ce qui précède, il résulte que le Saint-Esprit, présenté par Cyrille comme le principe de toutes CCS actions dans l’ordre surnaturel, est réellement distinct du Père et du Fils.

3. Saint Basile marque un progrès considérable dans la théologie trinitaire. Il se tient toujours dans les limites de la tradition, mais il comprend que le débordement de l’arianisme et des sectes pneumatomaques exige une plus rigoureuse explication du dogme trinitaire, une termino’iOgie theologique plus précise, une définition plus exacte des termes qui servent à désigner les relations réciproques entre les trois personnes divines. Athanase et les Pères du concile de Nicée confondent les termes d’oJai’a et d’-J7rô(7Ta(Ti ;. Saint Basile fixe la valeur respective de ces deux mots et réfute ainsi plus aisément les raisonnements captieux de ses adversaires. Les Pères de Nicée, déclaret-il, n’ont pas touché à la question du Saint-Esprit, parce qu’il n’y avait pas encore de controverses sur la troisième personne divine et que l’on n’avait pas encore à ce sujet tendu des embûches à la piété des fidèles. Mais le mauvais grain semé par Arius ne tarda pas à produire ses fruits de perdition et les impies se prirent à blasphémer contre le Saint-Esprit. Il est donc nécessaire de frapper d’anathème ceux qui abaissent le Saint-Esprit au rang des créatures, en l’arrachant à la divinité ; ceux qui refusent à sa nature la sainteté du Père et du Fils. Contre l’hérésie, l’Église professe que le Saint-Esprit dérive de Dieu à/.TtTTcoç (sans création) et qu’il n’appartient pas aux armées des esprits qui servent Dieu. Episl., cxxv, 3. P. G., t. xxxii, col. 549 ; ii, 159, 258, col. 620, 949.

Les sources principales de la doctrine de saint Basile sur le Saint-Esprit sont le 1. III Contra Eiinomium, P. G., t. xxix, co !. 653-670 ; V Homélie contre les sabelliens, Arius et les anoméens, P. G., t. xxxi, col. 609-617, et le Liber de Spirilii Sancto, P. G., t. xxxii, col. 67-218. Les 1. IV et V Contra Eiinomium traitent aussi du Saint-Esprit. Mais on est d’accord à rejeter leur authenticité. On les attribue à Apollinaire de Laodicée, ou avec plus de probabilité à Didyme l’Aveugle. Bardy, Didyme, p. 23-28.

Dans ces écrits, Basile réfute vigoureusement Eunomius, qui, de ce que l’Esprit-Saint est troisième en ordre et en dignité, concluait qu’il est aussi troisième par nature. Conlra Eiinomium, 1. III, 1, col. 653. Saint Basile répond que le Saint-Esprit participe t l’unité de la même nature divine que le Père et le Fils, et il le prouve par l’Écriture, les anciens Pères de l’Église, ibid.. 1, col. 653, et la tradition écrite et orale du christianisme. Liber de Spirilu Sancto, xxix, 71, P. G., t. xxxii, col. 200. Saint Basile déclare qu’il n’est pas un novateur. Loin de lui la pensée de forger de nouvelles doctrines ou des termes marqués au coin de la nouveauté. Il établit ses affirmations sur la croyance universelle du monde chrétien, sur ces saints qu’on vénère comme les colonnes de l’Église 72r

ESPRIT-SAINT

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et que l’Esprit-Saint a remplis de science et de vertu. Jbi(t., 75, col. 208.

Saint Basile prouve d’abord la consubstantialitc divine du Saint-Esprit. Le nom même d’Esprit-Saint révèle sa nature, divine ; une nature immense, immuable, éternelle, toute-puissante ; une nature qui est l’origine de la sanctification et la lumière de l’intelligence. Liber de Spiridi Sancto, ix, 22, col. 107. Saint Basile aborde immédiatement la première objection d’Eunomius. Je concède, déc ! are-t-il, que le Saint-Esprit est troisième en rang et en dignité. S’ensuit-il qu’il est aussi inférieur en nature ? Non, assurément. Le Fils est second en ordre et en dignité, par rapport au Père, et cependant, la même nature divine subsiste dans le Père et dans le Fils : f, Ôiorr, ; âv Éy.aTspt.) |x ; a. Conira Eunoinilim, 1. III, 1, ce !. 656. Le même raisonnement s’applique au Saint-Esprit. Il n’est pas étranger à la nature divine. Les anges appartiennent à des hiérarchies diverses^ mais ils ne diffèrent pas quant à la nature. De même le Saint-Esprit, inférieur, dil-on, au Père et au Fils en rang et en dignité, n’est que troisième par rapport à la nature. Nulle part l’Écriture ne confirme sur ce point l’impiété eunoniéenne. Ibid., 2, col. 657, 660. Elle donne au Père et au Fils le nom d’Esprit, Joa., IV, 24, et au Saint-Esprit le nom de Seigneur. Celte communauté de noms suppose nécessairement l’identité, la communauté de nature dans les trois personnes divines, Tr, v oîxsi’ojt’.v r ?, ; ç-ja£w ?. Contra Eiinomiiim, . III, 3, col. 661 ; Liber de Spirila Sniiclo, XXI, 52, col. 164. L’iîcriture ne se borne pas à affirmer la communauté de noms : elle affirme aussi la communauté de nature. L’Esprit-Saint vient de Dieu, èI. ToO 060v elvat /.ÉvsTat, Liber de Spiritu Sanclo, XVIII, 46, col. 152 ; tt, v C ; rap|iv èI. 0îov j/.ov. Epist., II, 105, t. XXXII, col. 513. S’il en est ainsi, il participe à la nature divine. Liber de Spiritu Sancto, XVIII, 46, col. 152.

Les Livres saints donnent au Saint-Esprit les attributs de Dieu. Donc le Saint-Esprit est Dieu. Le Saint-Esprit est la bonté essentielle. Co/i/raiîunomium, l.III, 3, col. 661. Il est bon comme le Père et le Fils, c’est-à-dire son essence est la bonté même, o’j'îiav k’yov Tf, v àvaOoTr, Ta, Liber de Spiritu Sancto, xix. 48. col. 156 ; j-joii èT-’iv « YaOôv. Conira Eunomiiim. I. III, 2, col. 660. Sa nature est simple, et à cause de sa simplicité elle est consubstantielle au Père et au Fils. Epist., I, 8, n. 10, col. 264. Le Saint-Esprit est immense. Contra Eiinomiitm, 1. III, 4, col. 661 ; éternel ; il a toujours été présent au Père et au Fils, r, v j.vi -/âp, xal iïporiV, /.al r7-ji.7zar, r, -/ tm Ilarpi /.a’i toi uiiô irpô -(î>v «  « ôvojv. Liber de Spiritu Sanclo. xix, 49, col. 156. S’il n’était pas éternel, il faudrait en même temps admettre et nier rétcrnité de la sainte Trinité ; deux personnes y seraient éternelles, et la troisième aurait été créée dans le temps, il s’ensuivrait que le ba]itênie serait imparfait et imparfaite la confession de foi. Contra sabellianos, 5, ] G., t. xxxi. col. 600. Le Saint-Esprit est omniscient. Il possède les trésors de la science divine, trésors c|u’il distribue généreusement à tous. Contra Eunomium. 1. III. 4, col. 661 : Liber de Spiritu Sancto, xxiv, 56, col. 172. Il est l’esprit de vérité et connaît les mystères de Dieu. In Is., v, 176. / » . a., t. XXX, col. 416. Mais connaissant tout, il est incompréhensible comme le Père et le Fils. Liber de Spiritu Sanclo, xxii, .")3, col. 16.5. Il est’Incréé et incompréhensible comme le Père et le Fils. Epist., I, 38, 3, col. 328. La jouissance de ces attributs divins nionlre clairement que la nature du Saint-E. sprit n’est pas étrangère à la nature divine. Contra Eunomium, I. III, 4, col. 664. i

Il y a des opérati() ; is divines qui sont attribuées au Saint-Esprit au même titre qu’au Père et au Fils.,

Le Saint-Esprit est donc Dieu. Saint Basile pose ce principe : l’identité d’opérations chez le Père, le Fils et le Saint-Esprit révèle clairement l’invariabilité, l’identité de leur nature. Epist., ii, 139, 7, col. 693. Le Saint-Esprit apparaît dans la révélation comme le coopérateur du Père et du Fils, Conira Eunomium, 1. III, 4, col. 664 ; son action est liée à l’action du Père et du Fils : elle est inséparable, àytîtpi’jxo’f, de l’action du Père et du Fils. Nous savons, en effet, que le Saint-Esprit est créateur comme le Père et le Fils. Contra Eunomium, 1. III, 4, col. 661. Dans l’acte de la création, le Père commande, le Fils crée, le Saint-Esprit perfectionne et confirme. L’action de confirmer indique dans le Saint-Esprit l’immortalité, la perpétuité dans le bien. Liber de Spiritu Sanclo, xvi, 38. col. 136. L’identité des opérations divines prouve donc la divinité du Saint-Esprit. Epist., ii, 139, 6, col. 693.

Mais c’est surtout par son action dans l’ordre surnaturel que le Saint-Esprit révèle sa nature divine. Tout d’abord, s’il est le sanctificateur, il se distingue de la créature qui est un être sanctifié. Le Saint-Esprit est la sanctification, ày’.a’7|j.&ç. Contra Eunomium, I. III, 2, 6, col. 660, 668. Sa nature est la sainteté ; il est la source de la sainteté ; il est saint par nature. Jbid., col. 660 ; Epist.. ii, 105, col. 513. Il est donc égal, en nature, au Père et au Fils.’, Contra Eunomium, 1. iii, 3, 6, co !. 661, 668 ; Liber de Spiritu Sancto, XVI, 38, col. 138. Tandis que la sainteté de la créature vient du dehors, la sainteté du Saint-Esprit est le complément nécessaire de la nature divine. Liber de Spiritu Scuicto, xix, 48, col. 156.

En vertu de sa sainteté essentielle, l’Esprit-Saint habite en nous. Il nous transforme en temples de Dieu, et si nous sommes tels, le Saint-Esprit est Dieu. Epist., I, 8, 11, col. 214. Mais le Saint-Esprit ne se borne pas à habiter en nous. Il renouvelle l’âme tout entière, et ce renouvellement est une seconde création. Il ressuscite le pécheur à la vie de l’esprit. Liber de Spiritu Sancto, xix, 49, col. 157. Il répand ses charismes, il est le doigt de Dieu par les miracles qu’il opère, Episl., i, 8, 11, col.’265 ; il élève les cœurs, soutient les infirmes, conduit les âmes dans les voies de la iHM’fectîon. Liber de Spiritu Sancto, ix, 23, col. 100. Toutes ces opérations divines attribuées au Saint-I’-sprit manifestent qu’il est Dieu. Si la créature, dit saint Basile, est dans un état servile par rapport au créateur ; si la sainteté de la créature est adventice, il s’ensuit que la créature peut tomber dans le péché. Or, le Saint-Esprit est saint par son essence. Donc il n’est pas une créature. S’il n’est pas une créature, il est consubstanliel â Dieu. Epist.. i, 8, 10, col. 261. Les relations mutuelles entre le Père et le Fils donnent à saint Basile des arguments en faveur de la divinité du Saint-F.sprit, qui est une exigence nécessaire de la Trinité divine. Saint Basile, comme saint."Vthanase, pose ce princiiie : ce ((u’est le I-’ils par rai)port au Père, le Saint-t-.siu-il l’est par rajïporl au Fils. Liber de Spiritu S(nKto. xvii, 43, eo !. 148. On ne saurait concevoir le Père sans le Fils et le l-’ils sans le Saint-t- : spril. Epist.. i, 38. 4, col. 332. Le l’"ils ne manque jamais au Père, ! ii le.Saint-Esprit au I’"i ! s. Contra sabeltinnos, 4, P. (L. t. xxxi, col. 609. Celui qui sépare le Fils du Saint-i ; sprit foule aux pieds la tradition, l’enseignement du (Christ, la doctrine révélée. Ibi<t.. 6, col, 612 : Liber de Spiritu Sancto, XII, 27. col. 116. Si donc le Saint-Esi>ril est uni au l’ils et le l’ils au Père, le Saint-Esprit lui-même est uni au Père, et cette union ne peut être qu’une union (le nature. Liber de Spiritu Sancto. xvii. 43, col. 148, Si on enlevait la divinité au Saint-I^sprit, il faudrait rompre tout lien entre les trois personnes divines. Epist., Il, 189, , ’i, col. 689. Dans la Trinité, en elTct,

on conserve la raison de l’unilé, Conira Eunomium, i. III, C, col. 668 ; la Trinité n’admet pas de division de nature, elle est l’essence commune de trois incorporels parfaits. Conira sabeltianos, 4, 5, col. 609. Il faut donc croire que le Père est Dieu, que le Fils est Dieu et que le Saint-Esprit est Dieu. Epist., i, 8, 2, 3, col. 248, 252.

La tradition corrobore aussi la croyance révélée de la divinité du Saint-Esprit. Saint Basile parle de la tradition du baptême. Contra Eunomium, 1. III, 5, col. 669. Le baptême est conféré au nom des trois personnes divines. Ibid., 5, col. 666. Mais le baptême conféré dans l’Esprit-Saint est valide aussi. Act.,

I, 5. Si donc le baptême dans le Saint-Esprit a la même efficacité que le baptême conféré au nom des trois personnes divines, il faut en conclure que le Saint-Esprit possède la nature divine du Père et du Fils.

Il doit y avoir une l’aison en vertu de laquelle le nom du Saint-Esprit a été adjoint au nom du Père et du Fils dans la formule du baptême. Si cette raison n’est pas la communauté de nature entre les trois personnes divines, la formule serait inexplicable. Liber de Spiritu Sanclo, x, 24, col. 112. Et la mention du Saint-Esprit est tellement nécessaire que, si on séparait le Saint-Esprit du Père et du Fils, le baptême serait par cela même inutile, invalide, et on ferait naufrage dans la foi. Il y a, en effet, un lien indissoluble entre la foi et le baptême. Le baptême suppose la foi et la foi trouve son achèvement dans le baptême, parce que, de même que nous croyons au Père, au Fils et au Saint-Esprit, de même nous sommes baptisés au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Liber de Spiriiu Sancto, xii, 28, col. 117.

Le témoignage de la tradition se traduit encore dans la gloire que la chrétienté rend au Saint-Esprit. " Il a paru bon à nos pères, dit saint Basile, de ne pas recevoir en silence le bienfait de la lumière du soir, mais de l’endre grâces aussitôt qu’elle brille. Quel est l’auteur de la prière qu’on récite en action de grâces lorsqu’on allume les lampes, nous ne le savons pas. Mais le peuple prononce cette antique formule, que personne n’a jamais taxée d’impiété : Louange au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Qui connaît l’hymne d’Athénogène, légué par ce martyr à ses disciples lorsqu’il montait sur le bûcher, sait ce que les martyrs ont pensé du Saint-Esprit. » Liber de Spiriiu Sancto, XXIX, 73, col. 205. Nous rendons gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit, dit Basile, parce que nous sommes convaincus que le Saint-Esprit n’est pas étranger au Père et au Fils par sa nature. Epist.,

II, 159, 2, col. 621. Cf. Scholl, Die Lehre des heiligen Basilius von der Gnade, Fribourg, 1881, p. 160-169 ; Schermann, Die Goltheit des heiligen Geistes, p. 91105.

La personnalité du Saint-Esprit est affirmée par saint Basile avec toute la rigueur des termes théologiques. Nous distinguons, dit-il, entre l’essence et l’hypostase. L’essence est un nom commun, un nom qui s’attribue à la fois à plusieurs êtres. Liber de Spiriiu Sanclo, XVII, 41, col. 144. Mais l’essence a des notes caractéristiques, des formes spécifiques, des propriétés individuelles, des marques particulières, IôtÔTr|Tcç, yapaxTÎipEç, ixopçaî, YV(i)pi’cr[j.aTa. Ibid., xiv, 45, col. 149 ; Epist., i, 38, 3, col. 328 ; Tixeront, op. cit., t. II, p. 77. Les liirjvri-zei ; distinguent, sans la diviser, l’essence qui est commune : oiaipo-jai [j.èv TO -/loivbv Toïç îStâÇoutTi)japaxTqpcrt… zo Se â[ji.ocpuèç tïii ; o-jCTiaç où 61axùuToua-iv. Contra Eunomium, 1. II, 28, col. 637. Entre l’essence et l’hypostase il y a la même différence qu’entre ce qui est commun et ce qui est singulier. Epist., ii, 236, 6, col. 884. Saint Basile donne

une définition exacte de l’hypostase, « qui n’est pas la notion indéfinie de la substance ne trouvant aucun siège fixe, à cause de la généralité de la chose signifiée, mais bien ce qui restreint et circonscrit dans un certain être, par des particularités apparentes, le commun et l’indéterminé. » Epist., i, 38, 3, col. 328.

La distinction entre l’essence et l’hypostase, saint Basile l’applique au Saint-Esprit. Il y a, dans la Trinité, une distinction qui empêche au moins la confusion des propriétés personnelles. Ibid., col. 329. Le Saint-Esprit est uni au Père et au Fils y.arà tV/ ç-jo-iv, mais il est distinct du Père et du Fils v.aTi tV’xâii-/, ibid.. A, col. 332, car la communauté d’essence n’elïace pas les propriétés personnelles. Le Saint-Esprit est unique, [xo/aôi/ôv. Il est uni au Père et au Fils xaxà TÔ xoivôv tt, ^ çJiTEtoç, mais, en tant que personne, il est distinct et singulier. Liber de Spiriiu Sanclo, XVIII, 45, col. 152. Il y a, entre les personnes divines, une communauté ineffable et incompréhensible, y.oivcovi’a, et une distinction, Siâ/.pKTiç. Epist., i, 38, 4, col. 332. Et de même que le Fils est distinct du Père, ainsi le Saint-Esprit l’est du Fils. Ibid., XVII, 43, col. 148. Le Saint-Esprit est donc parfait ; il a la plénitude et l’intégrité de l’être ; il n’est pas la portion d’un autre. Contra sabeliianos, 4, P. G., t. XXXI, col. 609 ; Schermann, op. cit., p. 93-95.

On a reproché à saint Basile de n’avoir pas déclaré nettement la divinité du Saint-Esprit, surtout lorsqu’il fallait, pour fermer la bouche aux macédonines, exprimer sa pensée sans équivoque. De son vivant même, saint Basile a essuyé les attaques ue ses adversaires, qui l’accusaient de pusillanimité, de ruse, à l’égard des pneumatomaques. S. Grégoire de Nazianze, Epist., Lviii, P. G., t. XXXVII, col. 116. Mais il a exposé lui-même les raisons qui l’engagèrent à ne pas donner ouvertement au Saint-Esprit le nom de Dieu. Ses réticences écartaient le danger de scandale pour les fidèles, plus attachés aux mots qu’à la doctrine, et enlevaient aux hérétiques l’occasion de susciter des troubles religieux en Cappadoce. Dans sa lettre aux prêtres de Tarse, il leur recommande de tenir compte des exigences des fidèles chaque fois qu’il n’en résulterait pour eux aucun détriment spirituel. Pour réduire le nombre des hérétiques, il conseille de recevoir dans la communion de l’Église ceux qui reconnaissent que le Saint-Esprit n’est pas une créature. Il suffît qu’on proclame son adhésion à la foi du concile de Nicée, pour être considéré comme catholique. Le temps viendra, dit-il, où la grâce de Dieu poussera les âmes à professer explicitement la divinité du Saint-Esprit et à accueillir avec reconnaissance les explications des théologiens. Epist., ii, 113, col. 525, 528. Le silence de saint Basile a donc pour cause la prudence et la charité vis-à-vis des adversaires. Saint Grégoire de Nazianze justifie la conduite de celui qu’il appelle une lumière de la vérité, et il atteste que les hérétiques attendaient avec impatience que saint Basile donnât au Saint-Esprit le nom de Dieu. Ils en auraient profité pour exciter des troubles, le chasser de son siège épiscopal et y établir un des leurs. Pour déjouer leurs intrigues, le saint docteur s’avisa de les combattre par des arguments, qui les enserraient comme dans un cercle de fer et les obligeaient à admettre la divinité du Saint-Esprit. Il tenait plus à les convaincre par de bonnes raisons de la vérité de la doctrine catholique, qu’à les éloigner par l’usage d’un mot qu’ils détestaient. S. Grégoire de Nazianze, Oral., xliii, 68, P. G., t. xxxvi, col. 588 ; Epist. _ Lviii, t. xxxvii, col. 116. Il valait mieux, à son avis, attendre le temps opportun pour dire la vérité que de compromettre cette vérité par des affirmations très explicites. Epist., lviii, col. 116. Mais la prudence, qui lui suggérait cette ligne de conduite.

ne l’empêchait pas de saisir les bonnes occasions d’exprimer sa foi en la divinité du Saint-Esprit. Il ne cessait d’affirmer et de prêcher qu’il fallait adorer le Saint-Esprit, parce qu’il était consubstantiel au Père et au Fils. Ses hésitations et ses réticences ne donnent donc pas le droit de conclure que sa foi en la divinité du Saint-Esprit fût chancelante. Des textes nombreux ne laissent pas le moindre doute sur sa parfaite orthodoxie. S. Grégoire de Nazianze, Oral., xliii, 69, P. G., t. xxxvi. col. 589 ; P. G., t. xxxii, col. 23-31. Voir plus haut, t. ii, col. 454.

4. Saint Grégoire de Nazianze renonce à la prudence et à la réserve qui s’imposaient à saint Basile, et prêche ouvertement la divinité du Saint-Esprit. Il laisse même supposer, en des termes couverts, que son zèle à proclamer la nature divine du Saint-Esprit l’avait forcé à quitter sa ville épiscopale et à se séparer des Pères du 1° concile de Constantinople (381).

De nouveaux troubles menaçaient l’Église, et beaucoup des Pères du concile étaient d’avis qu’il fallait ajourner la définition dogmatique de la divinité de la troisième personne. Saint Grégoire, au contraire, croyait que le dogme trinilaire avait atteint son plein épanouissement et qu’il était temps, par des formules précises, de réduire au silence les macédoniens et les eunomiens. Palmieri, Theologia dogmalica orthodoxa, Florence, 1911, t. i, p. 356-357.

Il distingue plusieurs étapes dans la révélation de la Trinité : « L’Ancien Testament annonce clairement le Père et obscurément le Fils. Le Nouveau Testament a manifesté le Fils, mais n’a fait qu’indiquer la divinité du Saint-Esprit. A présent, l’Esprit est parmi nous et se montre dans toute sa splendeur. Il n’eût pas été prudent, avant qu’on reconnût la divinité du Père, de prêcher ouvertement In divinité (hi Fils, et tant que celle du Fils n’eût pas été acceptée, d’imposer le Saint-Esprit, si j’ose m’exprimcr ainsi. » Oral., XXXI, 26, P. G., t. xxxvi, col. 101 ; Carm., i, 3, V. 25-35, P. G., t. XXXVII, col. 410. On a voulu à toute force voir dans ce texte ime ju-euve à rai)pui du développement substantiel du dogme trinitaire. Mais il sudit de remarquer qu’à plusieurs reprises saint Grégoire de Nazianze demande à la tradition de confirmer par son témoignage la divinité du Saint-Esprit. Il ne parle donc pas d’un progrès substantiel, mais de la profession plus explicite d’une vérité de foi qui était connue et anirmée par la tradition apostolique et anténicéenne. Les controverses christolo-Kiqucs, en développant admirablement la théologie du Verbe, avaient fourni aux pasteurs de l’Église les armes pour blesser à mort l’arianisme ; de même, à l’époque de saint Grégoire de Nazianze, les luttes lliéologiques, soulevées par les pneumalomaqucs, avaient donné un magnificiue essor à la théologie du Saint-Esprit, et il ne fallait |)Ius avoir de ménagements vis-à-vis des héréticiues. P. de Hégnon, op. cit., t. III, ]). 117-120 ; Ilergenrother, Die Lchrc von der gôlllichen Dreieinitjhcil narh dern lil. Gregor von.V « zianr, Hatisbonne, 1850, p. 204.

La théologie du Saint-Esprit est Ir.utéc avec ampleur par saint (irégoirc dans le v^ de ses discours théologiques, consacrés à l’exposé et à la défense du dogme trinilaire. Le saint docteur rappelle les origines anciennes de l’hérésie des pncumatomaqucs, qui remonte bien avant le iv » siècle, puisque les sadducécns niaient l’existence du Saint-Esprit. Oml., XXXI, 5, col. 137. Au ive siècle, faute de définitions précises, on ne savait pas encore, dans certains milieux, à quoi s’en tenir sur la nature de la troisième personne. Les uns considéraient celle-ci comme une force impersonnelle de Dieu, i’iéç)- ; tix-r, d’autres la rangeaient au nombre des créatures ; d’autres croyaient à sa divinité ; d’autres encore préféraient

ne rien hasarder, parce que, disaient-ils, l’Écriture sainte garde le silence sur le Saint-Esprit. Ces derniers s’abstenaient de tout acte de vénération à l’égard du Saint-Esprit : les autres, qui croyaient à sa divinité, n’étaient pas d’acccrd sur le culte à lui rendre. Les uns l’adoraient, comme le prescrit l’Église, à l’égal du Père et du Fils : d’autres ne craignaient pas de l’appeler Dieu ; d’autres enfin s’égaraient dans les fausses théories du trithéisme, imaginaient en Dieu un premier terme, infini par essence et puissance, un second terme, infini seulement par puissance, et un troisième terme, circonscrit par le premier et le second. Dieu, à leur avis, se composait d’un démiurge, d’un collaborateur, (r-jvspyoç, et d’un ministre, XsiTo-jpyixô ;, ou exécuteur des ordres divins. Ibid., 5, col. 137. On comptait même, parmi les auditeurs de saint Grégoire de Nazianze, des personnes qui n’avaient jamais entendu parler du Saint-Esprit, qui le traitaient de Dieu étranger et non scriptural, |évov T ; và Osôv y.a’i TrapfyypaTiTov. Ibid., 3, col. 136. Et ceux-ci poussaient l’audace jusqu’à lancer l’épithète de trithéiste aux défenseurs de la divinité du Saint-Esprit. Ibid., 13, col. 148 ; Hergenrolher, p. 206-208.

Contre ces blasphémateurs et méchants serviteurs de l’Esprit de Dieu, Oral., xli, 6, P. G., t. xxxvi, col. 437, saint Grégoire de Nazianze déclare que la théologie chrétienne reconnaît formellement la divinité du Saint-Esprit et que la négation de cette divinité est un horrible blasphème. Orid., xxxiv, 11, col. 252. La sainte Écriture confirme de la manière la plus explicite la divinité du Saint-Esprit comme associé au Christ dans l’œuvre de la rédemption. Les noms et les qualités que lui donnent les auteurs inspirés offrent d’éclatants témoignages de sa divinité. L’Esprit-Saint est l’esprit de Dieu, l’esprit du Christ, la pensée du Christ, l’esprit du Seigneur, le Seigneur lui-même ; l’esprit d’adoption, de vérité, de liberté ; l’esprit de sagesse, de prudence, de conseil, de force, de science, de piété, de crainte de Dieu, l’esprit qui remplit tout par son essence, qui renferme tout, mais que l’univers ne saurait ni remplir, ni renfermer, im esprit bon, droit, principiol, le sanctificateur par nature, celui qui mesure tout sans se laisser mesurer, qui donne aux créatures sans en rien recevoir, un esprit qui nous est donné en héritage, le doigt de Dieu, celui qui a créé l’univers et opère une nouvelle création par la résurrection et le baptême, l’esprit qui connaît tout, qui enseigne, qui conduit dans la voie droite, qui parle, qui envoie, qui sépare, l’esprit qui apporte la lumière et la vie, qui est vie et lumière lui-même, qui élève des temples, déifie, perfectionne, l’esprit qui n’est pas circonscrit par le lieu et le temps. Oral., XXXI, 29, col. 165, 168. Href, l’Écriture sainte allribuc au Saint-Esprit toutes les perfcctions divines qu’elle reconnaît au Père et au Fils. Ibid., col. 165. Elle reconnaît donc la divinité du Saint-Esprit. Ibid., 30, col. 168.

I.a spéculation théologiqne, fondée sur les témoignages de l’Écriture sainte, confirme aussi la divinité du Saint-Espril. Nous ne saurions concevoir le Saint-Esprit que comme substance ou comme accident. Si nous le concevions comme accident, il ne serait pas capable d’agir, de parler, d’entendre, de s’attrister. Le.Saint-Esprit est donc une substance. Mais une substance a la nature divine ou la nature créée. Si la substance du Saint-Esprit était ime créature, comment croirions-nous en lui ?… Ce n’est pas la même chose, en effet, de croire eu quelque chose que de croire à quelque chose. On)>eut croire une chose créée ; on ne croit qu’à la divinité. Le.Saint-Esprit est donc Dieu. Oral., xxxi, 6, col. 140. Il est Dieu, parce qu’il est placé entre deux personnes divines, ibid..

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8, col. 141 ; parce qu’il est consubstaiitiel au Père, et 1 au Fils, ibid., 10, eol. 144 ; Oral., xxxiv, 10, col. 252 ; parce qu’il a les attributs de Dieu. Il est incréé, éternel, Oral., XLi, 7, col. 4.37 ; immense, tout-puissant. ! Carm., i, 30, v. 22, 23, P. G., t. xxxvii, col. 509. Il est divin, Osîov 7r/ô-jjj.a, il est l’égal de Dieu, ôaoieii :, ibid., I, 3, V. 3, col. 408 ; il est Dieu, ez6 ;. lbid., , 4. Il est saint, ou, pour mieux dire, la sainteté même, une saintelé qui n’a point de degrés, et qui exclut tout commencement. Oral., xxv, 16, P. G., t. xxxv, roi. 1221. Il est bon, puisqu’il découle d’une bonté essentielle, é’/ llvî0(jia è ? àyaSoio ŒoC Osô :, Carm., i, 1, V. 35, P. G., t. xxxvii, col. 401. I.c Saint-Esprit participe donc à la nature divine. Oral., xxv, 15, P. G., ’t. xxxv, col. 1220 ; xli, 9, t. xxxvî, co !. 441. Toutes les fois qu’il parle de la Trinité, saint Grégoire de Nazianze ne se lasse pas de proclamer l’unité numéricjue de la substance divine et la distinction réelle des trois hypostases divines. Un seul Dieu en trois splendeurs gouverne l’univers. Carm., i, 3, 43, col. 411. Une seule nature est constituée en trois personnes. Ibid., 71, col. 413. La Trinité dérive de l’unité et l’unité résulte de la Trinité. Ibid., 60, col. 413. Chacune des trois personnes divines est Dieu. Ibid., 75, col. 413. Les trois personnes ne sont qu’une seule force, une seule pensée, une seule gloire, une seule royauté. Ibid., 87, 88, col. 415 ; Carm., ii, 29, col. 524. En trois lumières il n’y a qu’une seule lumière, un seul Dieu. Oral., xxxi, 3, col. 136. Les trois personnes en Dieu sont distinctes par le nombre, mais unies par la divinité. Orat., xxxiv, 16, col. 236.

Le culte qu’on rend au Saint-Esprit dans l’Église est aussi pour saint Grégoire de Nazianze un témoignage en faveur de sa divinité. Le Saint-Esprit nous déifie dans le baptême. Nous devons donc l’adorer ; et si nous l’adorons, comment n’est-il pas Dieu ? Ibid., 28, col. 165. Si le Saint-Esprit n’était pas Dieu, le baptême serait inutile, invalide. Oral., xxxvii, 18, col. 304. Nous devons donc adorer le Saint-Esprit avec le Père et le Fils comme une seule divinité, une seule puissance. Oral., V, 22, P. G., t. xxxv, col. 22 ; xx, col. 1072 ; xxxi, 32, t. xxxvi, col. 172. Ceux qui ne veulent pas reconnaître le Saint-Esprit comme Dieu sont des apostats, Carm., i, 1, 36, col. 401 ; l’Église les a rejetés de son sein. EpisL, ii, P. G., t. xxxvii, col. 196. La personnalité du Saint-Esprit est nettement formulée dans le passage suivant, qui expose admirablement la doctrine catholique de la Trinité : « Une seule divinité et puissance qu’on trouve unie en trois choses, non d’essence et dénature différentes, non augmentées par quelque addition, non amoindries par que’que soustraction, égales sous tous les rapports, les mêmes dans tous les sens…, l’union infinie de trois infinis ; Dieu, si on le considère chacun en soi, en tant que Père, Fils et Saint-Esprit, de sorte que chacun conserve son caractère personnel. Dieu tous trois, quand on les considère ensemble. » Oral., xi., 41, ccl. 417. Le Saint-Esprit a toujours été en Dieu, dès le commencement, et il a été comme le troisième terme de la Trinité. Oral., xxxi, 4, col. 137. De même que le Fils n’est pas » le Père » , bien qu’il soit ce qui est le Père, ainsi le Saint-Esprit n’est pas le Fils, bien qu’il soit ce qui est le Fils. Ces trois termes ne font qu’un seul être, si on considère leur divinité, et cet être unique est en trois, si on tient compte des propriétés personnelles. Ibid., 9, col. 144. La foi catholique se tient à égale distance de l’hérésie sabellienne, qui confond les personnes en Dieu, et de l’hérésie arienne, qui sépare l’indivisible nature divine. Ibid., 30, co !. 162. Les vrais chrétiens distinguent les propriétés personnelles sans détruire l’unité divine. Oral., xx, 5, col. 1072, Ils adorent un seul Dieu en trois personnes distinctes. Ibid., 6, 7, col. 1072, 1073.

5. Dans l’exposé de la théologie du Saint-Esprit, saint Grégoire de Nysse marche sur les traces de son frère saint Basile, dont il a été le disciple. Mais il donne à cette théologie l’empreinte de son génie philosophique : il établit la théorie rationnelle des mystères, il y ajoute une spéculation théologique originale, à laquelle on reproche un platonisme exagéré. P. de Régnon, op. cit., t. iii, p. 3’7 ; Tixeront, op. cit., p. 86. Son originalité consiste à chercher, dans la nature même de Dieu, la raison d’être du Saint-Esprit. Si l’Écriture sainte atteste la divinité du Saint-Esprit, la vie intime de la divinité nous apprend que Dieu ne saurait exister sans son Esprit. La théologie donc de saint Grégoire de Nysse marque un réel progrés sur celle de ses devanciers, en tant qu’elle déduit l’existence du Saint-Esprit de la vie intérieure de l’être divin, qui n’aurait sa plénitude absolue, s’il n’y avait en lui que le Père et le Fils. Voir Nesmiélov, Le syslème doymalique de saint Grégoire de Kijsse (en russe), Kazan, 1887, p. 282.

Dans son livre De Spirihi Sanclo aduersus pneumalomachos macedonianos, P. G., t. xlv, col. 1301-1334, Grégoire de Nysse réfute les macédoniens, qui gaspillaient leur temps à chercher dans le plus profond de la mer la perle précieuse cachée sur leur sein. De eo quod s il ad imagincm Dei, P. G., t. xliv, col. 1340. Dans les douze livres Conlra Eunomium, P. G., t. xlv, col. 243-1122, il aborde plusieurs fois les questions dogmatiques relatives au Saint-Esprit, mais toute son attention se concentre sur le Verbe. La lutte entre les orthodoxes et les pneumatomaques, déclare-t-il, consiste à savoir si le Saint-Esprit est une créature ou s’il est Dieu, s’il est incréé, comme l’Église l’a toujours cru et enseigné. Conlra Eunomium, 1. I, col. 305. L’Église professe donc ouvertement la foi à la divinité du Saint-Esprit ; elle affirme que le Saint-Esprit n’est pas créé, parce qu’il est la bonté par essence, parce qu’il gouverne les créatures, exerce son autorité sur elles, ouvre à la science de Dieu les intelligences créées. De fide ad Simplicium, P. G., t. xlv, col. 141-144. Le dogme, proposé par l’Église aux fidèles, nous oblige à croire que, hors la distinction des hypostases, tout est possédé en commun par les trois personnes divines, essence, puissance, bonté, gloire. Conlra Eunomium, 1. 11, co !. 559. Les eunomiens donc, qui repoussent l’enseignement de l’Église sur le Saint-Esprit, sont des adeptes de la synagogue. Ibid., I. I, col. 305.

Mais où l’Église a-t-elle puisé sa croyance à la divinité du Saint-Esprit" ? Dans la sainte Écriture, répond avec assurance Grégoire de Nysse. La sainte Écriture reconnaît formellement, contre les Juifs, que le Verbe et le Saint-Esprit participent à la toute-puissance essentielle de Dieu, à son action créatrice, à son immensité. Oral, cal., 4, P. G., t. xlv, col. 20. Toute l’Écriture inspirée par Dieu atteste que le Saint-Esprit est Dieu. Conlra Eunomium, I. II, col. 553. Elle attribue au Saint-Esprit l’incorruptibilité, la bonté essentielle, la sagesse infinie. Ibid., 1. II, col. 559. Saint Grégoire rappelle les attributs divins que la sainte Écriture reconnaît au Saint-Esprit. L’Esprit de Dieu est saint par nature, xara y-jij : ’/, comme le Père et le Fils. Il vivifie, il est incorruptible, immuable, éternel, juste, sage, droit, bon, puissant ; il gouverne, il distribue les dons de la grâce ; il existe partout, il se trouve en tout ; il remplit l’univers, il règne dans le ciel, il est répandu dans les puissances d’en haut ; il remplit les êtres, chacun selon sa capacité, et néanmoins il est toujours pleinement en lui-même ; il demeure avec les saints, sans se séparer de la sainte Trinité. Il pénètre les secrets de Dieu, il reçoit toujours du Fils, il est envoyé par le Fils, auquel il est joint de toute éternité. Il glorifie, mais sa gloire est en

lui-même, parce que celui qui donne la gloire aux autres possède une gloire bien plus grande. Si donc la majesté du Saint-lisprit est si sublime, pourquoi s’insurger contre son culte et son adoration ? Pourquoi lui refuser le nom de Dieu ? Adversus macedonianos, 22, 23, P. G., t. XLV, col. 1328, 1329. L’Écriture déclare que le Saint-Esprit est Dieu. Ibid., 3, col. 1304. Et nous qui croyons à l’autorité de l’Écriture, nous devons soutenir que, par rapport à la divinité, le Saint-Esprit ne diflere point du Père et du Fils. Ibid., 2, co !. 1304.

Deux textes scripturaires donnent matière à une démonstration originale de la divinité du Saint-Esprit. Le premier est tiré du Pater : « Que votre règne arrive. » Matlh., VI, 10. Le second est une ancienne variante du même texte, d’après l’Évangile de saint Luc : sXOiTti) -h "Ayiov llvî0 ; j.a toC £9’-r, [i.i ;, zal -/.aSapiTiKo ï.jj.îç. En commentant ce passage, le saint docteur déclare que le Saint-Esprit est le royaume de Dieu. De oralione dominica, 3, P. G., t. xi.iv, col. 1157. S’il est le royaume de Dieu, il est séparé des créatures, mais en même temps il est inséparable de celui à qui est le royaume. Le roi de ce royaume est le Père ; le Saint-Esprit est donc inséparable du Père, à la grandeur et à la majesté duquel il participe. Mais Dieu n’est jias inactif ad inlra. Il engendre de toute éternité son Fils unique. Le Saint-Esprit donne au F’ils la couronne de sa gloire royale. Par ra])port au Père, il est Je royaume ; par rapport au l’ils, il est le chrême de l’onction. Il est cette huile d’allégresse, Ps. xlv, 8, dont Dieu se sert pour oindre son divin Fils. Aduersus Apotlinarcm, 52, P. G., t. xlv, col. 1249. Il s’ensuit que le Fils de Dieu, en tant qu’il est consubstantiel au Père, participe à la majesté royale du Père ; en tant qu’il participe ; cette majesté, il est oint avec le chrême du Saint-Esprit. La gloire de la royauté divine qu’il reçoit en partage s’appelle symboliquement onction. Ibid., 53, col. 1252.

On ne saurait donc séparer la gloire du Saint-Esprit de la gloire du Père et du Mis. Le Père a toujours sa gloire qui a précédé les siècles ; la gloire du Père est le Fils éternel et la gloire du F’ils est le Saint-Esprit, qu’on ne saurait séparer du Père et du Fils. Contra Eunomium, I. I, col. 372. Le Fils est glorifié par l’Esprit ; le Père est glorifié par le Fils, et ce Fils unique de Dieu est aussi la gloire de l’Esprit.

On serait tenté de croire que saint Grégoire de Nyssc donne aux mois royaume et onction une valeur symbolique. Mais il proteste lui-même avec énergie contre cette fausse interprétaticn de sa théorie. Le chrême, dit-il, n’est pas étranger à la nature de celui qui est roi. Le règne de Dieu, cpii est le Saint-Esprit, est un règne vivant, substantiel, personnel. Adversus macedonianos, IG, col. 1320-1321. Il ne faut concevoir aucun intervalle entre le roi et la royauté, ni entre la Sagesse et l’Esprit de sagesse, ni entre la Vérité et riisprit de vérité, ni entre la Puissance et l’Esprit de puissance. Contra Eunomium, 1. II, col. 469. Les dénominations de règne et de chrême, données au Saint-I- ; sprit, n’autorisent donc pas à conclure que le Salnt-Esprit entre dans la Trinité comme un élément étranger et extérieur. Aduersus macedonianos, l(i, col. 1320, 1321. Elles le révèlent, au contraire, comme Dieu. De même que l’esprit humain qui est dans l’homme et l’homme lui-même ne font qu’un seul homme, ainsi l’Esprit de Dieu qui est en Dieu et Dieu lui-même sont un seul Dieu. Contra Eunomium, I. II, col. 561-505. Et de même que le I-’ils est uni au Père, ainsi le Saint-Esprit est uni au Fils. Ibid., I. I, col. 464.

La théorie de saint (irégoirc de Nyssc est donc un essai d’explication Ihéologique de la divinité du Saint-Esprit. Le saint docteur admet l’incompréhensibilité du dogme trinitairc ; mais, à la lumière de la

révélation, il s’elïorce d’indiquer les raisons qui la rendent nécessaire. La négation du Saint-Esprit rendrait imparfaite la vie de Dieu, c’est-à-dire éciuivaudrait à la négation de Dieu lui-même.

La communauté d’attributs et d’opérations entre les trois personnes divines est une autre preuve de la divinité du Saint-Esprit. Il sufiit de prononcer le nom d’Esprit de Dieu, pour conclure qu’il est Dieu. De eo quid sil ad imaginent Dei, P. G., t. xliv, col. 1341. Xous découvrons dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit la même puissance, la même volonté, la même intelligence. Ibid., col. 1344. L’Esprit-Saint accomplit les mêmes œuvres que le Père et le Fils. Contra Eunomium, ]. IL col. 564. Toutes les opérations ad extra dérivent du Père, passent par le Fils, s’achèvent dans le Saint-Esprit. Mais les trois personnes divines ne sont pas trois Dieux. Quod non sunt 1res dii, P. G., t. xlv, col. 125, 128. Le Saint-Es|irit est créateur comme le Père et le Fils. Adversus macedonianos, 13, col. 1317. Il est inséparable du Père et du Fils par rapport à la gloire, à la magnificence, à la toute-puissance. Ibid., 14, col. 1317. C’est pour cela que nous rendons au Saint-Esprit les mêmes louanges, la même vénération qu’au Père et au Fils. Ibid., S, col. 1309. Saint Grégoire appuie avec force sur cette inséparabiliîé des personnes divines dans leurs opérations pour conclure que le Saint-Esprit est Dieu. Le Père ne fait rien sans le I-’ils, ni le Fils sans le Saint-Esprit. De eo quid sil ad imaginem Dei, 44, P. G., l. xliv, col. 1344. S’il y a donc identité d’opérations entre les trois perfonnes divines, le Saint-Esprit n’est pas étranger ù la nature du Père et du Fils. Contra Eunomium, 1. II, col. 564.

Saint Grégoire de Nysse met en relief les conséquences absurdes et ridicules auxquelles aboutissaient les macédoniens et les eunomiens. Ils soutenaient que le Saint-Esprit est une créature et cependant ils le rattachaient à la nature incréée de Dieu. Si l’être du Saint-Esprit était créé, ne serait-il pas absurde de l’élever à la hauteur incommensurable de Dieu, Adversus macedonianos, 18, col. 1324 ; d’attribuer à une créature la sanctification des âmes, une œuvre qui appartient uniepiement îi Dieu ? De oral, dominica, P. G., t. xliv, col. 1160. Si nous voyons deux feux qui produisent le même elïet, qui brûlent tous deux, nous disons que leur nature est identique. De même, si dans l’ordre surnaturel le Saint-Esprit déploie la même activité que le Fils, nous devons en conclure quc leur nature est iden. tique. Le Saint-Esprit jjarticipe donc à la nature divine. Contra Eunomium, 1. II, col. 489.

La foi catholique à la sainte Trinité ne saurait se concevoir sans la foi au Saint-Esprit. Si le Saint-Esprit existe, il ne peut être séiiaré du Fils par rapport ; son origine éternelle et à sa nature. Ibid.. !. I, col. 369. Comme le Saint-Esprit est joint au Père et tire de lui son être, sans que son existence soit postérieure ; ainsi en est-il à son tour du Saint-I’sprit par rapport au Fils. Ibid., col. 464. La foi catIiolique défend d’établir la plus petite différence de nature entre les trois personnes divines. Ibid., 1. I, col. 320. Si nous ne pouvons pas même dire : « Jésus est le Seigneur, » sans le Saint-i : sprit. il est évident que le Saint-Esprit de toute éternité est joint à la Trinité parfaite. Adversus macedonianos, 12, co !. 1316. Et celui qui refuse au Saint-Iispril la nature divine et repousse la foi calholique, est pire quc les infidèles et il outrage le nom de chrétien ; le chrétien, en effet, croit à la divinité du Père, du Fils et du Saint-IÀpril. Ibid., 15, col. 1320. Si nous enlevons le Saint-Esprit à l’être divin, nous n’avons plus un Dieu mort, mais pour ainsi dire le cadavre d’un Dieu. De co quid sil ad imaginent Dei, 44, co !. 1340. Le Saint-Esprit est donc au-dessus de la création ; il est une nature incréée. De fide ad

Simplicium, col. 144. Le fait même qu’il est associé au Père et au l’ils dans la formule du baptême atteste que Jésus-Christ l’a présenté comme participant à la nature divine. Contra Eiinomium, 1. I, col. 349. La personnalité du Saint-Esprit est aussi nettement allirmée par saint Grégoire de Nysse. Il est bien vrai, déclare-t-il, que l’unité divine n’admet pas de division, Oral, calecli., iii, col. 17 ; que les personnes de la Trinité sont un seul Dieu. Contra Eunomium, 1. II, col. 533. Mais nous devons en Dieu distinguer entre la nature divine et les personnes divines. A cause de cette distinction. Dieu est à la fois un et multiple, un par l’essence, multiple par les propriétés personnelles, qui distinguent le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Ibid., 1. II, col. 469. Les propriétés personnelles établissent en Dieu une réelle distinction. Ibid., 1. II, col. 472. Le Saint-Esprit ne diffère point du Père et du Fils selon la nature, mais selon l’hypostase. 7&id., col.472. Il est joint au Père et au Fils par la possession commune de la même essence incréée, mais il est distinct du Père et du Fils par sa propriété constitutive. Ibid., I. I, col. 336. Le Saint-Esprit est associé en tout au Père et au Fils, il en est distinct dans l’ordre de la Trinité et dans la personnalité. Adversus macedonianos, 14, col. 1317.

Les textes nombreux que nous ont fournis les écrits de saint Basile, de saint Grégoire de Nazianze et de saint Grégoire de Nysse, montrent jusqu’à l’évidence que les trois Cappadociens ont affirmé de la manière la plus énergique l’unité de la substance divine et la réelle distinction des personnes divines, c’est-à-dire qu’ils ont affn-mé en même temps la divinité et la personnalité du Saint-Esprit. On ne saurait donc découvrir avec Nôsgen chez ces trois docteurs les traces du subordinatianisme et du sabellianisme. Op. cit., p. 56-58. La doctrine des Cappadociens est d’rne clarté qui écarte tout soupçon. Nosgen cite à l’appui de ses accusations le texte suivant de saint Grégoire de Nysse : « D’une part, la raison de principe distingue les personnes de la sainte Trinité, par la distinction qui se trouve entre « cire principe » et « être du principe » ; d’autre part, la nature divine est, suivant toute considération, indivisible et identique à elle-même. Voilà pourquoi l’on doit affn-mcr d’une manière absolue qu’il n’y a cju’une seule divinité, qu’un Dieu unicjue, et prendre au singulier tous les noms divins. » Qdod non sunt trcs dii, P. G., t. xlv, col. 136. Mais on voit bien que, dans ce passage, le saint docteur insiste sur l’unité de la nature divine sans rejeter pour cela la distinction des personnes. Il proteste, en elïet, contre ceux qui l’accusaient de confondre les notions de personnes dans l’identité de nature. Ibid., col. 133. « On prétendra peut-être, dit-il, que notre défense de l’unité de la nature divine nous conduit à admettre en Dieu un mélange et une confusion de personnes. Ce serait une calomnie : car, tout en soutenant l’identité de nature, nous ne nions pas qu’il y ait une différence entre le principe et celui qui dérive du principe. » Ibid., col. 133.

6. La théologie trinitaire de saint Jean Chrysostome est à peine ébauchée. Ne nous étonnons donc pas qu’elle n’offre rien de particulier, rien d’original. Le saint docteur s’en tient aux formules universellement reçues dans l’Église. Il est le témoin de la tradition qui reconnaît trois personnes distinctes dans l’unité numérique de la nature divine, mais il n’engage, cju’en passant, la lutte doctrinale avec les hérésies antitrinitaires. Il se préoccupe constamment de rappeler à ses auditeurs que l’œil créé est impuissant à sonder les abîmes des mystères de Dieu : pour ce qui concerne la vie intime de Dieu, nous devons nous borner aux données de la révélation.

Il traite avec plus d’ampleur de la nature du Saint Esprit dans ses discours sur la Trinité, P. G., t. xlviii, col. 1087-1096, et sur la Pentecôte, P. G., t. l, col. 45.3470. On lui attribue d’autres homélies sur la Pentecôte, P. G., t. LU, col. 803-814, et un sermon sur le Saint-Esprit, ibid., col. 813-820, mais ces pièces ne sont pas de lui.

Saint Jean Chrysostome appelle les pneumatomaques des hérétiques nuiudits par Dieu, De scinda Trinitate, P. G., t. xlviii, col. 1087, qui méritent les anathèmes de l’Église, ibid.. col. 1096, blasphèment Dieu, ne se soucient guère des bienfaits qu’ils en ont reçus et méprisent même le salut de leur âme. De sancta Pentecoste, ii, P. G., t. l, col. 463.

Contre leur impiété, la sainte Écriture atteste que le Saint-Esprit est Dieu, jjarce ciu’elle le désigne sous les dénominations d’Esprit de Dieu, du Christ, de vérité, de consolation. Ibid., col. 1094. Elle lui attribue une science parfaite, car il pénètre tout, même les profondeurs de Dieu, I Cor., ii, 10, ibid., col. 466 ; De fide et legs naturæ, ibid., col. 1096. Le Saint-Esprit est immense, d’après l’Écriture, et l’immensité ne convient qu’à Dieu. Homil., xxx, in Joa., 2, P. G., t. Lix, col. 474. L’Ancien Testament l’a révélé, bien que d’une manière imparfaite. Dan., xiii, 45 ; il y a été mentionné plusieurs fois et annoncé comme Dieu avec le Père et le Fils. De sancta Trinitede, P. G., t. XLVIII, col. 1088.

Les pneumatomaques le rangent au nombre des êtres créés, parce qu’on lit dans les Actes des apôtres : // a semblé bon au Saint-Esprit et à nous, xv, 28. Ils en ont déduit qu’il a, comme les apôtres, la nature humaine. Mais nous lisons aussi dans l’Exode que le peuple d’Israël crut à Jéhovah et à Moïse, xiv, 31-S’ensuivrait-il peut-être que Dieu et Moïse participent à la même nature ? Les cent hommes qui suivirent Gédéon contre les Madianites s’écrièrent ; Épée pour Jéhovali et pour Gédéon. Jud., vii, 20. S’ensuivrait-il peut-être que Gédéon soit par nature l’égal de Jéhovah ? Il serait absurde de le supposer. L’interprétation des pneumatomaques est donc fausse. De fide et lege ncûurie, P. G., t. xlviii, co !. 1086. Il est vrai que saint Paul déclare qu’il y a un seul Dieu, le Père, et un seul Seigneur, Jésus-Christ, et qu’il passe sous silence le Saint-Esprit. I Cor., viii, 6. Mais il ne mentionne pas le Saint-Esprit pour ne pas donner à croire aux néophytes que la religion chrétienne soit un polythéisme masqué. Les prophètes n’ont pas agi autrement. Ils n’ont pas exprimé ouvertement la divinité du Christ pour ne pas exposer les Juifs inconstants à concevoir des doutes sur l’unité de Dieu. Homil., XX, in / » "’ad Cor., 3, P. G., t. lxi, col. 164, 165.

La théologie, se fondant sur l’autorité de la sainte Écriture, enseigne la divinité du Saint-Esprit. « La théologie trinitaire, dit le saint docteur, reconnaît dans le Saint-Esprit la nature incréée de Dieu, la dignité de Dieu, sa gloire incompréhensible, un pouvoir qui est commun au Père et au Fils. » De fide et lege naturæ, P. G., t. XLVIII, col. 1088. La foi révèle le Saint-Esprit comme Dieu. De sancta Pentecoste, ii, P. G., t.L, col. 460. Le Saint-Esprit est Dieu, ibid., i, col. 456 ; il participe à l’essence de Dieu, In Ps. sliv, 3, P. G., t. Lv, col. 187 ; la nature du Fils est identique à la nature du Saint-Esprit. Homil., xxxi, in Acta apost., 2, P. G., t. LX, col. 230. La substance du Saint-Esprit est la substance royale du Seigneur : c’est pour cela qu’il nous console. Homil., xxix, in 7° ™ ad Cor., 4, P. G., t. Lxi, col. 246. La nature du Saint-Esprit est identique aussi à la nature du Père. Homil., xxx, in 77m ad Cor., 2, P. G., t. lxi, col. 607. Par cette identité de nature, le Saint-Esprit a la même volonté que le Père et le Fils. Homil., lxxviii, in Joa., 3, P. G., t. lix, col. 4°25. La puissance du Saint-Esprit est la

puissance du Seigneur, parce que la gloire du règne de la Trinité est indivisible. De fide et lege naturee, P. G., t. XLviii, col. 1086. Saint Paul donne au Saint-Esprit la même puissance qu’il attribue au Père, I Cor., XII, 6, et cela se comprend, parce que, là où il n’y a qu’une essence, il y a aussi un seul pouvoir ; la dignité est la même, l’autorité est une ft identique. De sancta Pentecosle, ii, P. G., t. l, col. 464.

Et cette puissance de l’Esprit est si grande que rien ne pourrait s’y opposer, ou empêcher qu’elle s’accomplisse, Homil., XXVI, in Joa.^ 2, P. G., t. lix, col. 155, car ce que fait le Père est fait aussi par le Saint-Esprit. Homil., xxii, in Acla aposl., 2, P. G., t. lx, col. 173 ; XI, 2, col. 96.

En vertu de cette puissance divine, le Saint-Esprit prend part avec le Père et le Fils à l’œuvre de la rédemption. De sancta Pentecosle, i, P. G., t. L, col. 456. Son action s’étend partout. Une seule goutte du Saint-Esprit, -q pav ; toO nvî-jjjiaTO ;, suffit à remplir l’univers. In Ps. XLiv, 3, P. G., t. lv, col. 186 ; Homil., XXV, in Joa., 2, P. G., t. nx, col. 151 ; et à vivifier les âmes. Adversus Judseos, v, P. G., t. xlviii, vol. 204.

Mais sa puissance se révèle surtout dans l’ordre surnaturel. C’est lui qui a parlé par les prophètes, Homil., X, in Gen., 3, P. G., t. lui, col. 85 ; xx, 1, col. 166, 167 ; qui a inspiré les prophètes de l’Ancien et du Nouveau Testament. In. Ps. cxv, 2, P. G., t. lv, col. 321 : Homil., xli, in Matth., t. Lvn, col. 449. Il est l’auteur de la grâce, Adversus Judseos, v, P. G., t. xLviii, col. 903 ; il distribue les dons de Dieu. De sancta Pentecosle, i, P. G., t. l, col. 456. C’est de lui seul que nous recevons la foi. De verbis aposloli : Hat >enles cumdem spirilum, i, 4, P. G., t. li, col. 276. Sans le Saint-Esprit, nous ne pourrions nous délivrer /le nos péchés. De sancta Pentecosle, i, col. 458, car l’est le Saint-Esprit qui efface nos impuretés, transforme la nature humaine en nature angélique et lui donne dans le bien la consistance de l’acier. Ibid., ii, col. 464, 465. Sans l’Esprit, nous ne pourrions invoquer le Christ, acquérir la science et la sagesse divine. Sans le Saint-Esprit, il n’y aurait pas de pasteurs dans l’Église, ni de cène eucharistique. Bref, sans le Saint-t->prit, l’Église elle-même ne saurait oxis-Icr, et si elle existe, c’est un signe certain que le Saintl>prit y est. Ibid., col. 458.

Le Saint-Iisprit demeure dans lésâmes justes ; par sa grâce il les rend insensibles aux attaques du démon, qui ne réussit guère à les ébranler, De verbis aposloli : Habentes eumdem spirilum, P. G., t. li, col.276 ; il les conduit dans les sentiers de la vie éternelle Jn Ps. xux, 3, P. G., t. LV, col. 186 ; il les éclaire, ’tu Ps. cxv. 2, ibid., col. 322 ; il les monde de sa lâce, Homil., lxxxii, in Mallh., 5, P. G., t. lviii, lol. 744 ; il est comme une source qui les rafraîchit par’les jets continus, Homil., li, in Joa., 1, /’. G., t. lix, col. 284, et les (Wins, les grâces qu’il répand appartiennent au même titre au Père et au l-"ils. Homil., xxix, ; /i / » ’" ad Cor., 3, /’. G., t. i.xi, col. 214.

Le Saint-Esprit nous introduit dans l’Église par le

baptême. S’il n’était pas Dieu, il n’aurait pas dû être

nommé dans la formule baptismale. Il serait absurde

d’invoquer la créature pour ressusciter à la vie de la

lâce. De sancta Trinilatc, P. G., t. XLViii, col. 1089.

<n nom dans la formule du baptême révèle qu’il est

jil au Père et au Fils en honneur, en majesté et en’J.U-, De suncla Pentecosle, ii, P.G., [. L, col. 466 ; il at 4p que le Saint-i : sprit agit comme le Père dans

luvre de la sanctification. Homil., lxxviii, in Joa.,

/’. G., t. LIX, col. 421. Nous devons donc adorer le

lint-Espril comme Dieu, De sancta Trinilale, P. G.,

t. XLVIII, col. 1090, parce qu’il est consubslantici au

l’ère et au Fils, ibid., col. 1094 ; parce que, s’il procède |

lUf.T. DE TIIKOI, . CATIIOI, .

du Père et s’il reçoit du Fils, il n’est pas étranger â la nature de Dieu. Ibid., col. 1094.

Mais, bien qu’il participe à la nature divine, le Saint-Esprit ne cesse pas d’être une personne distincte. In Ps. XLiv, 3, P. G., t. LV, col. 187, car les personnes divines ne doivent pas être confondues ; elles restent distinctes, bien qu’inséparables de la sainte Trinité. Homil., xiii, in Epist. ad Rom., 8, P. G., t. LX, col. 519. Ce qui appartient à la Trinité n’admet pas de division. Si le Fils se communique, l’Esprit aussi. La grâce qui est répandue dans les âmes vient du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Mais cette indivisibilité de nature n’aboutit pas à la confusion des personnes. Il faut sauvegarder en même temps l’unité de nature et la distinction des propriétés personnelles. Homil., xxx, in // « " ad Cor., 2, P. G., t. Lxi, col. 608.

7. Saint Épiphane fait ressortir l’importance et la valeur documentaire de la tradition que l’Église a reçue et qu’elle transmet. Il y a un lien de continuité entre l’ancienne et la nouvelle croyance, et l’autorité de l’Église établit ce qui est conforme à la véritable tradition et ce qui s’en écarte. On a besoin de tradition dans l’Église, car tout n’est pas contenu dans l’Écriture sainte. Hær., lxi, 6, P. G., t. xli, col. 1048. De tout temps, l’Église a réduit au silence les hérétiques et conservé la foi prêchée par les apôtres. Ancoratus, 82, 118, P. G., t. xLiii, col. 172, 232 ; Exposilio fidei, 2, 6, P. G., t. XLii, col. 777, 784. Ce sera donc à l’Écriture et à la tradition que saint Épiphane demandera la vraie doctrine de l’Église touchant le Saint-Esprit. Il remarque d’abord qu’il n’y a pas de confusion dans la Trinité, comme le prétend Arius. Hær., lxii, P. G., t. xi.i, col. 1053. A la suite des ariens, les semiariens, « des cérastes à une seule corne sur la tête, « //œr., Lxxiv, 14, col. 501, corrompent la croyance catholique au Saint-Esprit. Ils soutiennent que le Saint-Esprit est une créature, tandis que l’Écriture le glorifie comme Dieu. En effet, elle parle de l’Esjirit-Saint comme de l’Esprit de Dieu, de l’Esprit du Christ ; elle déclare que le Saint-Esprit est égal i la divinité. Hær., LXII, col. 1056. Le saint docteur apporte une série de textes qui mettent en relief la divinité du Saint-Esprit. On lit dans Isaïe : " J’ai mis mon lîsprit sur lui, » XLii, 1. Dieu révèle ainsi la nature réellement divine du Saint-Esprit. Hær., lxxiv, 13, col. 500. « L’esprit du Seigneur, de Jéhovah est sur moi, » dit Jésus-Christ par la bouche du même prophète, lxi, 1. Le Saint-Esprit n’est donc pas étranger à la nature divine. Les textes de saint Matthieu : « L’Esprit du Père parle en vous, » x, 20, et de saint Jean : « Recevez l’Esprit-Saint, » xx, 22, moi.trent que le Saint-Esprit participe à la vie ineffable de la divinité. Un autre texte de saint Jean : « Le Père vous donnera un autre consolateur, » xiv, 15, déclare ouvertement que le Saint-Esprit est égal et consubstanliel au Père et au Fils. Ibid., 13, col. 500. De ce que le Saint-Esprit commande aux prophètes et aux docteurs de l’Égiise d’Antioche de séparer Paul et Barnabe pour l’inivre de Dieu, Act., xiii, 2, nous pouvons conclure que le Saint-t-^sprit n’a pas une nature de serviteur, mais la nature divine. Saint Paul enseigne que le Saint-Esprit habite en nous et que sa présence dans notre âme nous transforme en temples de Dieu. I Cor., iii, 16, 17. Si donc le Saint-Esprit est le temple de Dieu, comment oserions-nous l’exclure de la vie de Dieu ? La communauté d’essence se trouve doiic dans les trois personnes divines.

On pourrait aussi tirer de l’Écriture une foule de témoignages, qui prouvent la divinité du Saint-F. sprit, Ilfrr., lxxiv, 14, col. 501, par exemple, les textes qui présentent le Père, le l’ils et le Saint-I-^spris comme le principe des mêmes actions. Le Christ cl

V. - 21

739

ESPRIT-SAINT

740

envoyé, l’Esprit aussi. Le Christ parle, f/uérit, sanctifie, baptise. Ibid., 5, col. 481. L’Esprit aussi. Saint Épipliane recueille dans l’Écriture une riche mois son (le textes, ibid., 5. 6, col. 481-487, pour démontrer que le Saiiit-h^spril est associé aux opérations du Père et du l’Jls, et de ces textes il déduit la preuve de sa divinité. Si, en elïet, les opérations du Saint-Esprit découlent de la puissance divine, qui est celle du Père et du Fils, il est évident qu’il est consubstantiel au Père et au Fils. Ibid., 11, col. 426.

Le concept catholique de l’unité et de la trinitc de Dieu oblige aussi, par des raisons théologiques, à reconnaître la divinité du Saint-Esprit. Le ccnsentement universel de l’Église proclame l’unité de Dieu. (I Nous prêchons la monarchie dans le christianisme, nous croyons à l’unité divine dans la Trinité, à la divinité unique du Père, du Fils et du Saint-Esprit. » Hier., i-xii, 2, col. 1053. Saint Épiphane ne se lasse pas de répéter que le Saint-Esprit n’est pas étranger au Père et au Fils, quant à sa nature ; qu’il est de la même nature, de la même divinité, ibid., col. 1053, lOGO ; Hier., lxxiv, 11, col. 496 ; que dans le Père et le Fils il n’y a rien qui difière du Saint-Esprit, Hser., Lxix, 45, P. G., t. xLii, col. 272 ; cjue le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont une seule divinité, Hær., lxii, 8, col. 1061 ; Lxxiv. 33, 75, col. 253, 328 ; que le Saint-Esprit est coéternel au Père et au Fils, Hær., lxxiv, 50, col. 301 ; qu’il est vraiment Dieu, Ancor., 3, P. G., t. xLiir, col. 20, 21 ; cpie la divinité lui est inhérente, ibid., 8, col. 29 ; qu’il n’est pas composé, -/.atà aJvŒcr’.v, mais qu’il est de la même nature que le Père et le l’ils, ibid., 8, col. 29 ; qu’il est toujours avec le Père et le Fils, Hier., lxii, col. 1053 ; toujours associé au Père et au Fils, Hær., lxix, col. 292 ; qu’il est de Dieu et en Dieu, Hær., lxxiv, 11, col. 496 ; qu’il est le lien de la Trinité. Hær., lxii, col. 1056 ; lxix, 52, col. 281. Avec le Père et le Fils, il a créé tous les êtres, même l’homme, Hær., lxix, 52, co !. 281, mais il n’a été ni créé, ni engendré, Hær., i.xxr%’, 12, col. 497, parce qu’il n’y a rien de créé dans la Trinité, Ancoralus, 7, col. 28 ; parce qu’il ne peut y avoir î la fois en Dieu une nature incréée et une nature créée, ibid., 8, col. 32 ; parce cpie le plus parfait accord règne dans la Trinité. Hær., lxxiv, 10, col. 493. L’Église de Dieu n’adore jamais la créature, 7/ « T., LXIX, 36, col. 257 ; elle ne peut pas surtout adorer comme créature celui cjui est la source de la sainteté et le sceau de la grâce. Hær., lxxiv, 12, col. 497.

Saint Épiphane afïïrme aussi explicitement que le Saint-Esprit est une personne réellement distincte du Père et du Fils. Il répétera souvent que, dans la sainte Trinité, il n’y a pas de confusion entre les personnes, Hær., lxii, 5, 7, col. 1057, 1060 ; lxix, 33, col. 253 ; que si rien ne saurait rompre l’unité de l’essence divine, rien aussi ne saurait confondre les personnes divines. Le Père est parfait, le Fils est parfait, le Saint-Esprit est parfait. Hær., lxxiv, 12, col. 497 ; Ancoralus, 7, col. 28. Le Saint-Esprit est une personne subsistante, Hær., lxii, 6, col. 1057 ; il est unique comme personne distincte, de même qu’il n’y a qu’un seul Pore et un seul Fils. Hær., lxxiv, 11, col. 496. La formule préférée de saint Épiphane est celle-ci : Tpîa -i’/.v.oi., |j, ca ŒÔTïiç. Ibid., 14. col. 501 ; Hær., lxix, 33, 45, 55, col. 253, 272, 288. Le Saint-Esprit est au milieu du Père et’du Fils, dérivant du Père et du Fils. Ancoralus, 7, col. 28. Il est donc, en tant cpie pei sonne divine, réellement distinct du Père et du Fils.

8. On a justement remarque que Didynie l’Aveugle est avant tout le théologien de la Trinité. Bardy, Didtjme l’AvciKjle. p. 58. Il serait plus juste de dire ((u’il est avant tout le théologien du Saint-Esprit. Par son étonnante érudition scrijiturairc, il pulvérise les

objections des eunomiens et des macédoniens, qui faussent le véritable sens de la parole de Dieu et rangent le Saint-Esprit au nombre des créatures. Le II’" et le IIP livre De Trinitate et le Liber de Spiri-tu Sancto, que nous possédons dans la version latine de saint Jérôme, contiennent une si riche moisson de textes scripturaires, une telle abondance de données théologiques touchant la divinité du Saint-Esprit, cpi’il ne serait pas exagéré de considérer ces ouvrages comme les sources les plus importantes de la théologie du Saint-Esprit. L’Orient et l’Occident y ont puisé à pleines mains. Le traité du Saint-Esprit par saint Ambroise, à entendre saint Jérôme, contiendrait de nombreux emprunts au Liber de Spirilu Sanclo de Didyme. Rufin, Apologia in Hieronijmiim, ii, 25, P. L., t. xxi, col. 604. Saint Jérôme parle de ce livre comme d’un ouvrage admirable par l’éclat de la pensée et la simplicité du langage. P. G., t. xxxix, col. 1034. Et c’est grâce à la version de saint Jérôme que la théologie trinitaire de Didyme a exercé une influence considérable sur la théologie occidentale. De Régnon, op. cit., t. III, p. 52.

Didyme prend la défense du Saint-Esprit contre les ariens et les macédoniens. De Trinitate, i, 17, P. G., t. xxxix, col. 341. Il leur en veut surtout de leur acharnement à fausser le sens des textes de l’Écriture. Ibid., II, 2, col. 461. Il n’épargne pas non plus les eunomiens, qui appellent à leur aide la philosophie d’Aristote et qui, par de captieux raisonnements, altèrent la vérité catholique, ibid., ii, 4, col. 479, rejettent l’enseignement de la saine théologie, ibid., ii, 5, col. 491, forgent des théories que le Saint-Esprit n’a pas révélées et que la tradition ancienne ne confirme nullement. De Spiritu Sancto, 1, P. G., t. xxxix, col. 1033.

Les efforts des ennemis du Saint-Esprit n’aboutissent à rien, parce que l’Écriture donne au Saint-Esprit des qualités et des opérations qui supposent nécessairement en lui la nature divine, qui écartent de cette nature le Dieu étranger, dont il est question dans le Deutéronome, xxxii, 12, c’est-à-dire la nature créée. Mais la preuve de la divinité du Saint-Esprit ne doit pas faire oublier que le mystère de la Trinité est incompréhensible. De Trinitate, i, 15, col. 313. Il ne faut pas s’enquérir de la manière dont les hypostases divines subsistent en Dieu de toute éternité, ibid., ii, 1, col. 448, car le dogme trinitaire surpasse toute connaissance humaine et angélique. Ibid.. II. 4, col. 481.

L’Écriture ne laisse pas le moindre doute sur la réalité et la divinité du Saint-Esprit. L’Ancien et le Nouveau Testament le représentent dans la splendeur de sa divinité. Ibid., i, 15, col. 314. Les auteurs inspirés le révèlent comme participant à la nature sublime de Dieu. Ibid., ii, 1, col. 453 ; De Spiritu Sancto, 43, col. 1071. C’est à l’Écriture qu’il faut demander les armes pour combattre les pneumatomaques. De Trinitate, i, 17, col. 341. L’apôtre saint Paul termine sa II<^ lettre aux Corinthiens par cette invocation : « Que la grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu et la communication du Saint-Esprit soient avec vous tous, » xiii, 13 : cette invocation atteste l’égalité parfaite des hypostases divines. De Trinitate,

I, 18, col. 349. Lorsque le même apôtre affirme que le Saint-Esprit répartit ses dons selon sa volonté, Heb.,

II, 4, il révèle sa toute-puissance divine. Ibid., col. 349. Le texte de la P’" Épîtrc aux Corinthiens : « Le même Esprit produit tous les dons, les distribuant à chacun en particulier, comme il lui plaît, » xii, 11, confirme la consubstantialité divine du Saint-Esprit. Ibid., 19, col. 368. Cette consubstantialité résulte aussi des textes qui montrent le Saint-Esprit parlant comme le Fils, Mattli., x, 20 ; vivant en nous comme Dieu, Gal., v, 25 ; nous donnant la loi qui nous aflranchit

en Jésus-Christ, Rom., viii, 2 ; nous communiquant la science surnaturelle de Dieu. I Cor., ii, 14.

La démonstration scripturaire de la divinité du Saint-Esprit est, chez Didyme, d’une richesse incroyable. Il suffit, pour s’en convaincre, de parcourir les c. xxi-xxvi du 1°=’livre De Trinilate, et les c. ii et III du II<^ livre, col. 364-394, 453-479. Les textes s’y amoncellent, bien souvent d’une manière désordonnée. Parfois, ils sont entassés sans explication ; parfois, ils sont suivis de commentaires très concis, qui se résument dans l’affirmation de la divinité du Saint-Esprit. La partie la plus importante de cette théologie scripturaire comprend les textes dont le sens a été faussé par les hérétiques. Ces textes sont l’objet de longues explications dans le II L" livre De Trinilate, et nous n’exagérons pas en disant que Didyme y a répondu d’avance aux objections scripturaires des sociniens du xvi’e siècle.

Le c. VI du II"^ livre De Trinilate contient une démonstration très étendue de la divinité du Saint-Esprit. L’argumentation est très simple, mais très persuasive. Les macédoniens soutiennent que le Saint-Esprit est une créature. Pour les réfuter, Didyme se livre à une étude comparative des propriétés du Saint-Esprit et des propriétés des créatures. Il lui est facile de démontrer que tout ce qui est dans le Saint-Esprit, soit comme qualité, soit comme opération, est marqué au coin de la divinité. L’Ecriture est toujours à la base de cette argumentation serrée qui force les macédoniens dans leurs derniers retranchements.

Les créatures ont commencé à exister ; le Saint-Esprit n’a pas de commencement, vi, 2, col. 508. Les créatures ne remplissent pas l’univers, ne le contiennent pas ; le Saint-Esprit, au contraire, contient tous les êtres. Les créatures sont soumises à la corruption, aux changements ; le Saint-Esprit, au contraire, est incorruptible et immuable. Or, ce qui est incorruptible et immuable n’a ni commencement ni fm ; cela est éternel. Ce qui est éternel est le créateur, non pas une créature. Ibid., col. 513. La créature n’a pas l’éternité parfaite et absolue, et si elle est immortelle, cette immortalité est un don de Dieu. Le Saint-Esprit, au contraire, possède l’éternité par sa nature. Ibid., col. 516. La créature raisonnable penche vers la vérité ou vers le vice, tandis que le Saint-Esprit est la perfection absolue. Il ne dilTère donc en rien du Père et du Fils. Ibid., col. 524. La créature est sanctifiée et justifiée par Dieu, qui est saint par sa nature. Le Saint-Esprit justifie et sanctifie, et il distribue les dons surnaturels. Il est donc consubstantiel au Père, ô ; j.oo-J(T ! ov Tw OîiT) llaToi. Ibid., col. 524. La créature ne peut pas être reçue par une âme raisonnable de manière à y habiter, tandis que le Saint-Esprit se communique substantiellement comme le Père et le Fils. La créature a une bonté relative, tandis que la bonté du Saint-Esprit n’a pas de bornes. Ibid., col. 532. La créature est dans un état servile, car elle n’est pas libre d’elle-même et ne peut donner la liberté aux autres. Ibid., col. 537. La créature ne commande paj par elle-même, tandis que le Saint-Esprit commande aux prophètes et aux apôtres. Ibid., col. 537. La créature reçoit sa force et sa puissance de Dieu, une force limitée, <|u’elle ne peut pas connnuniquer aux autres, tandis que le Saint-Esprit fortifie les créaturcs par sa force invincible. La créature est portée au mensonge, tandis que le Saint-Esprit est l’Esprit de vérité. Ibiil., col. 540. La créature n’a rien qui lui donne le droit de s’appeler la vérité divine ; le Saint-Esprit, au contraire, s’appelle la vérité comme le Père et le I-’iis, parce qu’il est de la même et unique divinité que le Père et le Fils, col. 541. La créature ne connaît pas ce qui est à Dieu et ne peut tendre à celle

connaissance, même si elle appartient au nombre des élus. Le Saint-Esprit, au contraire, tic ôii/oo-j<jtoç Ôeôç, connaît ce qui est en Dieu. Ibid., col. 54L La créature ne voit pas Dieu le Père en lui-même, cac la nature divine ne peut être comprise par la nature humaine. Le Saint-Esprit, au contraire, voit et cojinaît Dieu en lui-même, et il le voit par l’identité de la nature divine. Ibid., col. 544. La créature n’est pas associée à Dieu, parce qu’il n’y a rien de commun entre le créateur et la créature. Le Saint-Esprit, au contraire, est associé au Père et au Fils dans la formule du baptême. Ibid., col. 548. La créature ne saurait avoir les mêmes noms que Dieu, ni la même nature ; mais le Saint-Esprit est désigné sous des noms qui appartiennent à Dieu. Il a donc la même nature. Ibid., col. 552.

La nature divine du Saint-Esprit est révélée par ses opérations divines. Ibid., 11, 7, col. 560. Le Saint-Esprit vivifie : une vie substantielle, une vertu sanctifiante qui n’a ni commencement ni fin suppose la nature divine. Ibid., col. 561. Le Saint-Esprit ressuscite les âmes mortes par le péché et les- élève vers le ciel, ibid., col. 564 ; il remet les péchés, ibid, , col. 578 ; il viendra juger les hommes, ibid., col. 596 ; il ouvre les cieux ; il connaît les choses futures, ibid., col. 597 ; il distribue librement et à son gré les dons surnaturels, ibid., VIII, col. 600 ; il établit les prophètes et les pasteurs dans l’Église, ibid., col. 621 ; il promulgue des lois dans l’ordre surnaturel. Toutes ces opérations du Saint-Esprit sont attribuées au Père. Si donc, de ce que le Père est réellement Dieu, il s’ensuit que SCS opérations sont divines, de même, si les opérations du Saint-Esprit ne diffèrent pas de celles du Père, il s’ensuit que le Saint-Esprit est réellement Dieu. Ibid.. vii, col. 572.

Nous pourrions continuer cette longue énumération de preuves scripturaires et théologiques de la divinité du Saint-Esprit. Mais ce que nous avons dit suffit à montrer en Didyme un défenseur érudit et convaincu de la doctrine catholique. Il a bien raison de dire : « Par le témoignage de textes sublimes et divins, nous avons démontré que de toute élernité le Saint-Esprit a jailli d’une nature unique et divine ; qu’il est, quant à son essence et puissance, infini ot incorruptible, ccnime le Père et le Fils ; que le Père, en nous le donnant comme Saint-Esprit, alllrine sa consubstanlialilé et sa nature divine incrééc. Les Livres saints, sans exception, montrent l’unité de la nature divine et placent le Saint-Esprit à côté du Fils, décrivent ses opérations divines, l’aiipcllent l’Esprit-Saint par excellence, l’Esprit de Dieu qui vient de Dieu, l’Esprit de vérité, l’Esprit divin, le souflle du Tout-Puissant. Ces témoignages de l’Écriture suffisent pour fermer la bouche aux hérétiques. Mais l’Écriture ne s’arrête pas à ces témoignages. lîlle nous fait connaître que le Saint-Esprit nous déifie, nous délivre, nous ressuscite, efface nos péchés, nous communique la sagesse, nous sanctifie, remplit l’univers, inspire les prophètes et les apôtres, les envoie comme Seigneur, est glorifié avec le Père et le Fils. Comment donc ne serait-il pas Dieu celui qui nous déifie, ne serait-il pas Seigneur celui qui nous accorde la liberté… ? Ce qui sépare le Saint-Esprit des créaturcs n’appartient qu’à Dieu. Dieu n’est pas un être créé. Le Saint-Esprit donc est Dieu. » Ibid.. ii, 25, col. 748, 749. Quant à la personnalité divine du Saint-I- : sprit, Didyme emploie souvent la formule : p.ix oJTt’a, -pli ; j-offriiô’. :. une formule dont la paternité lui est attribuée â tort iiar Leipoldt. J)idi/mus der Blinde von Alcxundrien. Leipzig. 1005. p. 126131. Les nombreux passages qui contiennent cette formule, ou des expressions équivuJcntes, sont indiqués par Bardy, op. cit., p. 75. L’insistance avec I13

ESPRIT-SAINT

74 i

ilaqucUc Ditlynie parle de l’unité de Dieu, dans le traité J)e Trinitate, ne lui fait pas oublier la distinetion réelle des personnes. Les hyposlases divines ne se confondent pas, bien qu’elles soient dans un accord unique et parfait quant à la divinité. De Trinilalc, III. 2, col. 788 ; Hardy, op. fil., p. 93-104.

Pries sijricih’i.

Nous nous bornons à recueillir

les téinoisnafîes des deux écrivains syriens les piiis célèbres du iv siècle, Aphraate et Ephreni. Le premier t’st l’auteur de vingt-trois Démonslralions que l’on s’accorde à placer entre 337 et 345. II y est question à plusieurs reprises du Saint-Esprit. Aphraate puise ses données dans l’Écriture, qui contient la vraie doctrine. Deux., XXII, 26, dans Graflin, Patrologia syriaca-’Paris, 1894, t. i, col. 1046, doctrine révélée par le Saint-Esprit, vii, 10, col. 327, c’est-à-dire par la Jbouche du Dieu vivant, viii, 25, col. 406. Les renseignements d’Aphraate sur le Saint-Esprit se trouvent réunis dans la Démonslration, i, 12-18, col. 286-310. Aphraate professe tout d’abord l’unité de Dieu, qui a envoyé son Esprit sur les prophètes. Cette croyance à l’unité divine est celle de l’Église, i, 19, col. 43. Mais le Dieu unique est en trois personnes. Il y a un seul Dieu, un seul Christ, un seul Esprit. Il serait contraire à la foi d’augmenter le nombre des personnes, xxiii, 60, Paris, 1907, t. ii, col. 123. Il faut rendre à ces trois personnes divines la même gloire ; il faut glorifier les trois noms, qu’il serait impie de séparer au moment du baptême. Ibicl., 61, 63, col. 127, 134. Les prophètes ont reçu le Saint-Esprit. Ibid., vi, 12, 15, col. 287, 298. Il a parlé par la bouche de Jacob, de Joseph, de Moïse, de David, d’Élie et d’Elisée. Ibid., XXI, 21, col. 983-986. Cet Esprit qui est éternel et céleste, ibid., vi, 14, col. 294 ; qui, toujours devant Dieu, en contemjile le visage, ibid., 16, col. 298, nous le possédons en nous-mêmes. Ibid., xxiii, 53, col. 106. Jésus-Christ l’a introduit dans nos cœurs. Ibid., 52. col. 99. Nous le recevons dans le baptême, dans la prêtrise. Ibid., VI, 14, col. 291. Il distribue la grâce, ibid., XIV, 47, col. 715, 718, et il exerce un rôle prépondérant dans la vie surnaturelle. Sans lui, nous serions plongés dans la plus affreuse misère spirituelle. Ibid., vi, 18, col. 307. Il est dans notre âme, et pour peu qu’il s’en éloigne, Satan rôde autour d’elle, pour l’enchaîner à son trône. Ibid., vi, 17, col.’302. Quand un homme est sur le point de mourir, il retourne au Christ, le Saint-Esprit annonce au Christ si cet homme a bien r-gi durant sa vie et ne l’apas contristé./6(V/., vi, col. 295. Cf. Duval, La littéraliire syriaque, Paris, 1900, p. 228. Nous devons donc vénérer le Saint-Esprit, qui est la S’Ource de la grâce. Ibid., vi, 1, col. 242. Nous devons adorer Dieu comme Père, et le Saint-Esprit comme mère. Ibid., xviii, 10,. col. 832. Pour expliquer cette dernière expression, remarquons, en passant, que le mot syriaque qui désigne le Saint-Esprit est du genre féminin. Tixeront, op. cit., t. ii, col. 204.

Pour Aphraate, le Saint-Esprit est Dieu par nature, puisqu’il possède les attributs divins et qu’il accomplit les opérations divines ; il est aussi une hypostase réellement distincte du Père et du Fils. Parisot, Préface aux écrits d’Aphraate, c. iii, t. i, p. lu.

Saint Éphrcm est le principal docteur de l’Église syrienne. Il puise sa doctrine dans l’Écriture et dans la tradition. Son enseignement sur la personne du Saint-Esprit est de tout point orthodoxe. Il pose en principe que nous devons croire en un seul Dieu et en trois personnes divines, à l’unité de la substance divine et à la distinction réelle des personnes : nous devons croire, parce que notre connaissance du mystère incompréhensible de la Trinité dérive uniquement de Dieu. Aduersiis scrulatores, serin, xi., Opéra omnia syriace, Rome, 1743, 1. 1, p. 73. C’est la foi qui nous révèje Ja « ubsistance du Saint-Esprit en Dieu. Ibid.,

serm. xlii, p. 75. Le nombre trinc des personnes n’introduit pas en Dieu la pluralité, la multitude ; la divinité n’exclut pas la multiplicité des personnes. Ibid., serm. lxxiii, p. 137. Dans la Trinité, le Fils se réjouit de la gloire du Père et l’Esprit de celle du Fils bien-aimé. Le Père commande, le Fils exécute, le Saint-Esprit achève ; la même divinité est dans les trois personnes divines, car l’ordre parfait de la Trinité n’admet aucune confusion. Ibid.. serm. ii. p. 194, 195. La nature, les propriétés, les opérations du Saint-Esprit sont décrites en des termes poétiques dans l’hymne De dclnnclis et de Trinilate. Le Saint-Esprit participe à la gloire du Père et du Fils : il viendra avec eux ressusciter les morts. Hymni et scrmones, édit. Lamy, Matines, 1884, t. ii, col. 242. Il est saint ; il est impénétrable à l’intelligence humaine, ibid., 10, col. 242 ; il est un consolateur éternel, un principe de perfection ; il alavolontédivinedu Pèreet du Fils. Ibid., 12, col. 244. Il répand sur les âmes la rosée de la miséricorde céleste, ibid., 14, col. 244 ; il reçoit les prières des justes, ibid., 15, 17, col. 244, 246 ; il est avec le prêtre à l’autel, lorsqu’on l’invoque dans le saint sacrifice, ! 6(<i., 16, col. 244 : Il réveille ceux qui dorment du sommeil de la mort, pour leur rendre ce qui est dû à leurs œuvres, ibid., 18, col. 246, et placer les justes à la droite du Père. Ibid., 23, col. 248. Il a constitué le Fils comme le mur de l’Église, par laquelle nous sommes sauvés, ibid., 22, col. 246, et il achève le mystère de notre salut. Ibid., 19, col. 246. Il est incréé et consubstantiel au Père et au Fils. In adventum Domini, Opéra omnia græce, Rome, 1746, t. iii, p. 137. Il procède du Père et il reste sur le Christ par essence. In Isaiam, lxi, 1, édit. Lamy, Matines, 1886, t. ii, col. 180. Il est l’inspirateur des prophètes. De naliuitale Domini, Opéra (syriace), Rome, 1740, t. ii, p. 396. Il habite dans les cœurs purs et les sanctifie. De virginitate. Opéra (grœce), t. iii, p. 74. Il sanctifie l’Église. De pœnitentia, ibid., p. 166. Il est une source vivifiante. De virginitate, t. iii, p. 74. Saint Éphrem compare le Père au soleil, le Fils à la lumière, le Saint-Esprit à la chaleur. Dieu est un, mais son unité n’exclut pas la bonté. C’est un mystère que Dieu soit à la fois un et multiple, un et trois, trois personnes et un Dieu. Les trois personnes divines se distinguent entre elles, mais leur cohésion est si grande que le soleil d’où jaillit la lumière et la lumière elle-même ont le même nom de soleil. Advcrsus scrutatorcs, scTm. lxxiii, t. iii, p. 137. Ce passage prouve en même temps la divinité et la personnalité du Saint-Esprit. La distinction personnelle du Saint-Esprit se déduit aussi du prhicipe posé par le saint docteur, que les propriétés personnelles distinguent les personnes. Ibid., p. 181. Le Père est une personne, le Fils est une personne, le Saint-Esprit est une personne. De même que la distinction des personnes n’enlève pas la communauté de nature entre les trois personnes divines, ainsi la communauté de nature ne confond pas les propriétés personnelles. Ibid., Il, p. 194, 195. L’Église syriaque donc, par la bouche de ses docteurs, atteste la croyance catholique à la divinité et à la personnalité du Saint-Esprit.

Pères latins.

La doctrine trinitaire des Pères

latins ne différait pas de celle des Pères grecs. Le siège de Rome et les sièges orientaux opposaient aux mêmes hérésies les mêmes témoignages de la révélation et de la tradition. L’arianisme et le macédonianisme, combattus en Orient, subissaient aussi en Occident les plus rudes défaites, et la théologie du Saint-Esprit, créée chez les grecs par Athanase, atteignait chez les latins, grâce au génie d’Augustin, les sommets les plus élevés de la spéculation.

Notre but n’est pas de recueillir, chez tous les écrivains ecclésiastiques latins du ive siècle, les preuves ^

de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit. Nous nous bornerons à interroger seulement les grands docteurs dont les noms dominent l’histoire de la théologie trinitaire latine de ce siècle, c’est-à-dire Hilaire, Ambroise, Jérôme, Augustin. Leurs écrits nous apprendront que l’Occident ne s’est pas laissé devancer par l’Orient pour ce qui concerne le culte et la profession de la divinité du Saint-Esprit.

1. Saint Hilaire de Poitiers a été surnomme le saint Athanase de l’Occident. Comme Tertullien, il s’est heurté aux graves difficultés d’une langue qui n’était pas encore assez façonnée et élaborée pour exprimer la doctrine trinitaire. Mais quelles que soient les imperfections de son style théologique, son enseignement ne laisse pas subsister le moindre doute sur son orthodoxie. Il montre d’abord que la raison est impuissants à comprendre et à expliquer le mystère de la trinité divine. La connaissance de ce mystère est venue de la foi seule. De Trinilate, i, 12, P. L., t. x, col. 33. La foi rejette les captieux raisonnements de la philosophie et les questions oiseuses. Ibid., i, 13, col. 34. La prédication des prophètes et des apôtres est la seule source de la véritable doctrine catholique. Ibid., I, 17, col. 37. La connaissance de Dieu vient de Dieu lui-même. Ibid., i, 18 ; vi, 8, col. 38, 162. Saint Hilaire puise donc sa doctrine trinitaire aux sources de la révélation et de la tradition, et il explique lui-même les causes de l’obscurité de son style : Cum de naliiris cœlestibus sermo est, illa ipsa quæ sensu meiUium conlincntur, usa communi et naturæ et sermonis siinl cloquenda, non ulique dignitati Dei congrua, sed ingenii nostri imbecillilati necessaria. Ibid., iv, 2, col. 97. On ne peut pas énoncer aisément par la parole les mystères de Dieu, pas plus que les percevoir avec les sens, ou les comprendre avec l’intelligence. Ibid., X, 53, col. 385. Saint Hilaire avoue que la théologie du Saint-Esprit n’est pas claire : il l’aborde à regret, pour remplir son devoir de pasteur à l’égard d’âmes qui lui demandent à être instruites : De Sancto Spirilu nec lacère opnrlel, ncc loqui neccsse est : sed sileri a nobis, eorum causa qui nesciunt, non potest. Ibid., II, 29, col. 69. Ce sont les hérésies antitrinitaires qui l’obligent à rompre le silence. Ibid., ii, 3, col. 52. L’arianisme divise l’être divin en trois substances diverses et ébranle la chrétienté. Ibid., vii, 3, G, col. 159, 160. D’autres ne veulent pas admettre l’usum (communauté de nature) du Saint-Esprit avec le Père et le Fils, et ne reconnaissent pas le Fils comme la source du Saint-Esprit. Ibid., ii, 4, col. 53. Mais l’Église n’a rien à craindre pour la pureté de sa doctrine. Il y a chez elle autant de remèdes qu’il y a de maladies dans le monde chrétien, et autant de vraies doctrines qu’il y a, chez les hérétiques, de fausses théories. Ibid., I, 22, col. 64. 65.

Ces théories, saint Hilaire déclare vouloir les écarter. Elles relèguent le Saint-Esprit au rang des créatures, ibid., I, 36, col. 48, mais la foi enseigne que le Saint-t-^sprit est Dieu. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne sont pas trois dieux divers : la foi prêche l’unité (le la nature divine. De synodis, 56, /’. L., t. x, col. 512. L’Iilsprit-Saint est à la fois l’Esprit du Christ et l’Esprit de Dieu, ce qui prouve qu’il a la nature du Christ et de Dieu. De Trinilate, viii, 26, col. 255. L’Esprit est la chose de la nature (res naturie) du Fils, ot aussi la res naturæ du Père. Ibid., viii, 26, col. 255. Il est inhérent à Dieu. Ibid., viii, 27, col. 256. Le mystère (le la Trinité ne se conçoit pas sans l’unité divine du Père, du Fils et du Saint-Esprit. In Mollit., xiii, 6, P. L., t. IX, col. 994, 995. Dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit omnia unum.-iunl, ibid., col. 995, c’est-à-dire qu’il y a entre eux égalité de nature, de perfection, de dignité. Le Saint-I-^sprit est joint au Père et au Fils dans la confession de la foi chrétienne. Il ne

doit pas, donc, en être séparé dans la nature : Imperfeclum enim est nobis iolum, si aliquid desil a loto. De-Trinilate, ii, 29, col. 69. Le Père et le Fils seraient imparfaits, si le Saint-Esprit ne faisait pas partie de la Trinité.

Le Saint-Esprit n’emprunte rien aux créatures r neque enim de crcaturis sumebat Spirilus Sanclus, qui Dei Spirilus est. Ibid., ix, 73, col. 340. Car, si le Fils et le Saint-Esprit reçoivent de ce qui est au Père, , si tout ce qui est au Père appartient en même temps au Fils et au Saint-Esprit, nous devons reconnaître l’identité de la nature du Père et de la nature du Fils et du Saint-Esprit. Ibid., col. 340.

C’est surtout vers la fin du traité De Trinilate que saint Hilaire, dans une émouvante invocation, et d’un style animé, proclame ladivinité du Saint-Esprit :  ; Neque, quia te solum innascibilem.et unigenitum ex te nalum sciens, genilum tamen Spirilum Sanctum diclurus sim, dicam unquam crcatum. Xulla te, nisi res tua pénétrai ; nec profundum immensx majestatis luæ, peregrinæ atque alienie a le virtutis causa melitur. Tuum est quidquid te init : neque alienum a le est, quidquidvirtute scrutantis inest. De Trinilate, xii, 55, col. 469-Le saint docteur déclare donc qu’il ne donnera jamais au Saint-Esprit les noms des créatures, et il en indique les motifs. Le Saint-Esprit possède l’être divin ; donc il est infini. Le Saint-Esprit sonde les abîmes de la science de Dieu ; il est donc omniscient.

Saint Hilaire trouve aussi un argument en faveur de la divinité du Saint-Esprit dans la formule du baptême, ibid.. ii, 1, col. 50, d’autant plus que cette forma fidci certa est. Ibid., ii, 5, col. 53, 54. Les opérations que l’Écriture attribue au Saint-Esprit confirment aussi sa divinité. Il répand sa lumière sur les patriarches, les prophètes, les apôtres, les fidèles. Ibid., II, 32, col. 73 ; In ps. cxx, 6 ; i kxxmu, 1, P. L., t. IX, col. 656, 792. Il instruit, enseigne, sanctifie. De synodis, 11, P. L., t. x, col. 489, parce qu’il possède la science de Dieu. De Trinilate, ii, 35, col. 75. Il habite en nous, en tant qu’Esprit de Dieu, ibid., VIII, 26, col. 255, et nous l’adorons comme Dieu. Ibid., II, 31, col. 72.

L’Esprit-Saint, tout en ayant la nature divine en commun avec le Père et le Fils, est distinct du Père et du Fils, car il n’est pas innascible comme le Père. De synodis, 53, col. 519. Il n’est pas le Fils non plus. En effet, Jésus-Christ prie le Père pour qu’il envoie un autre Paraclet. Il y a donc une distinction entre cleui qui prie pour qu’on envoie, et celui qui est envoyé : Eo quod alium Paraclelum mitlenduni a Paire sit precaturus, difjerentiam missi rogantisque signijical. Ibid., 54, col. 519. Le Saint-Esprit est donc une personne réelle de la sainte Trinité.

Ces passages mettent en pleine lumière l’orthodoxie de la doctrine de saint Hilaire sur le Saint-Esprit. Son style, il est vrai, étonne parfois, mais si on pénètre plus intimement la pensée du saint docteur, on se convainc qu’elle ne diffère aucunement de l’enseignement catholique. Il donne au mot esprit plusieurs sens ; il l’applique tantôt au Père, tantôt au I-’ils et au Sainti : sprit. De Trinilate, ii, 30, 31 ; viii, 21, 23, col. 71, 72, 252, 253. Il n’appelle jamais le Saint-IZsprit Dieu, mais donum, ibid.. ii, 1, 29, 3, col. 51, 70, 73, munus, . usum in munerc. Ibid., ii, 1, col. 51. Ce silence, remarque Heck, ne doit pas nous impressionner. Die Trinitatsichre des hl. Ililarius von Poitiers, Mayence, 1903, p. 253. Dieu est avant tout un être personnel, tandis que le Saint-I-^sprit est l’être du Père, de la nature du Père, res natura’, sa propriété, quelque chose qui appartient à Dieu. Le saint docteur explique lui-même la différence entre la nature et la chose de la nature : iVon idem est natura quod natursr res, sicut non idem est homo, et quod hominis est. Ibid., viii, 22,

col. "252, 253. Le Pcrc est la naturc principielle, la source primordiale ; le Saint-Esprit est la nature conimuni <iu «  « , c’est-à-dire l’être qui appartient à Dieu l€ Pire comme à sa source. On pourra ergoter sur les dénoniitialions employées par saint Hilaire, mais ou est forcé de reconnaître qu’elles n’impliquent pas la négation de la divinité du Saint-Esprit. L’emploi du mot usus par saint Hilaire a été, en effet, justifié par saint Augustin : Est aiilrin inrflitbilis quidam complexiis Palris et imaginis qui non est sine perjruilione, sine charilate, sine yaudio. lllct ergo dileclio, delcclatio, felifiias, vel beatiludo, si lamen aliqun humuna imec digne dicitur, usus ab illo (Hilaire) appellata est breoiicr, et est in Trinitate Spiritus Sanctus non genitus, sed geniioris genitique suuviias. De Trinilate, vi, 11, P. L., t. XLii, col. 932. Un autre texte de saint Hilaire paraît de prime abord révoquer en doute la consubstantialité divine du Saint-Esprit : Connominalu Spirilu, id est, Paræleio, eonsonantiæ poiius qucim cssentise per simililndincm substantix prædicare convenu unilal<’m. De sijnodis, 53, col. 505. Mais saint Bonaventure met en relief la vraie signification du mot consonantia, tel qu’il a été entendu par saint Hilaire : Sicul per Palris et Filii nonjen innuitur unitas naiuTse, quia Filins est connaturalis Patri, ila per Spiritum Sanctum qui est amor, datur intelligi unitas eonsonantiæ. Et ideo verbum non habct ccdumniam, et propter hoc ipsum dixerunt ; et hoc vult dicere Hilarius, cum dicit, quod potius eonsonantiæ quant essentiæ ; non quia ulrumqne non sit l’crum. sed quia hoc est expressius, et ininorem habet calumniam. In IV Sent., 1. I, dist. XXXL part. H, dub. viii, Opéra omnia, Quaracchi, 1883, t. I, p. 552. C’est donc à tort qu’Érasme a accusé saint Hilaire d’avoir hésité dans l’affirmation de la divinité du Saint-Esprit. Voir Præfed. in libros de Trinitatc, 14, 18, P. L., t. x, col. 15-17.

2. Par la précision des termes, l’abondance des textes scripturaires, la richesse des témoignages, la docti’ine de saint Ambroise sur la divinité du Saint-Esprit écarte le moindre soupçon contre son orthodoxie. Elle est puisée directement aux sources grecques. On connaît le trait caustique de saint Jérôme dans la préface à la version latine du traité du Saint-Esprit par Didyme : Malui alieni operis interpres existere, quam informis cornicula alienis me eoloribus adornare. P. L., t. xxxix, col. 1032. La corncitle informe de saint.lérôme, au dire de Ru fin, serait saint Ambroise. Apologia in Hieronymum, ii, 25, P. L., t. XXI, col. G04 ; Bardy, Didyme V Aveugle, p. 20. Nous ne garantissons pas l’authenticité de l’insinuation de Rufin. Mais s’il est vrai qu’Ambroise a exploité les œuvres de Didyme, il n’en est pas moins vrai qu’il ne mérite pas l’épithète malveillante de saint Jérôme. Il s’est inspiré des autres Pères grecs, Basile, Athanase, Grégoire de Nysse, autant que de Didyme ; il leur a emprunté bien souvent des arguments péremptoires pour prouver la divinité du Saint-Esprit, mais il n’est pas un plagiaire. Il conviendrait plutôt de le comparer à l’abeille qui recueille le suc des fleurs les plus parfumées pour en former un miel exquis. Certainement, saint Ambroise a profité, en bon théologien, des recherches et des travaux de ses devanciers, mais son étude de la théologie trinitaire grecque n’a pas été superficielle. Il leur a pris ce qui était le plus utile à son but, et il l’a exposé et élaboré d’une manière tout à fait personnelle et dans un style clair et limpide. Son Traité du Saint-Esprit mérite bien les éloges que lui décerne saint Augustin : Sanctus Ambrosius cum agat rem magnam de Spirilu Sanclo, ut eum Patri et Filio demonstrct sequalem, submisso lamen dicendi génère utitur ; quoniam res suscepta non ornamenta verborum, aul ad jleclendos animas commotionis afjcclum, sed rcrum documenta desidcrat. De

doctrina christiana, iv, 46, P. L., t. xxxiv, col. 111.

La doctrine de saint Ambroise sur le Saint-lvsprit est résumée dans ce passage du De Spirilu Sanclo ; Habet consortium regni cum Paire et l’ilio etiam Spiritus Sanctus, qui unius naturæ, unius dominalionis, unius eti(un potestatis est, iii, 20, 158, P. L., t. xvi, col. 817. Cette consubstantialité divine du Saint-Esprit, saint Ambroise la démontre contre les ariens. Ibid., III, 170, col. 850. La Trinité, dit-il, ne peut pas se concevoir sans une triple sagesse, c’est-à-dire sans le Père, le Fils et le Saint-Esprit. 7/1 Luc., prolog., 5, P. L., t. XV, col. IGIO. L’être divin est simple. Il n’y a donc en Dieu qu’une seule substance divine, la substance de la sainte Trinité. Cette substance est exempte de toute composition et de tout mélange créé. De Abraham, ii, P. L., t. xiv, col. 58.

On lit dans les Actes des apôtres, x, 38, que Dieu a oint de l’Esprit-Saint Jésus de Nazareth. Le nom du Saint-Esprit est donc mentionné avec ceux de Dieu et du Christ. De Spirilu Sanclo, i, 3, 44, col. 743. Le Saint-Esprit rend témoignage au Christ. Joa., xv, 20. Il connaît donc tout ce qui est au Mis, et sa science est égale à la science du Père. Ibid., i, 3, 48, col. 741. Il n’y aura pas de pardon pour celui qui aura blasphémé contre l’Esprit-Saint. Luc, xii, 10. Si le blasphème contre le Saint-Esprit est si grave, quomodo inter creaturas audet quisquam Spiritum computare ? Ibid., i, 3, 53, col. 746. Dieu répand son Esprit sur toute chair. Cette effusion du Saint-Esprit, qui jette des torrents de lumière dans les cœurs, n’est-elle pas une preuve que le Saint-Esprit n’est pas une substance créée ? Ibid., i, 8, 92, col. 756. Le Saint-Esprit est de Dieu le Père. C’est pour cela qu’il possède la science de Dieu. Or, ce qui est de Dieu est Dieu lui-même. Donc le Saint-Esprit est Dieu. In Episl. ad Rom., xi, P. L., t. xvii, col. 163.

La divinité du Saint-Esprit est confirmée aussi par le fait qu’il a les mêmes noms et les mêmes opérations que le Père et le Eils. L’Esprit-Saint, que le Père envoie, vient au nom du Fils. Joa., xiv, 26. Celui donc qui vient au nom du Fils vient aussi au nom du Père, parce que le Père et le Fils n’ont qu’un seul nom. Il s’ensuit que le nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit est un seul, parce qu’il n’y a pas sous le ciel un autre nom, qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devons être sauves, Act., iv, 12. De Spirilu Sanclo, i, 13, 134, col. 766. De même, toute opération divine attribuée au Père, au Fils et au Saint-Esprit, se rapporte non seulement au Saint-Esprit, mais aussi au Père et au Fils ; non seulement au Père, mais aussi au Fils et au Saint-Esprit. Ibid., i, 3, 40, col. 742. Ideni est Deus qui opcrutur omnia in omnibus ; ut scias quia non est discrelio operalionis inter Dcum Patrem et Spiritum Sanctum, quando ea quæ operatur Spiritus, operatur et Pater Deus. Ibid., ii, 12, 139, col. 804. L’Esprit est le doigt de Dieu. Luc, xi, 20. Rien de plus explicite que cette dénomination pour signifier l’unité de la divinité et de l’opération, unité, quæ secundum divinilalem est Palris et Filii et Spiritus Sancti. Ibid., ii, 3, 12, col. 812 ; Expositio in Luc, viii, 93, P. L., t. xv, col. 1811.

La nature des opérations du Saint-Esprit est telle qu’elle surpasse toute puissance humaine et créée. Le Saint-Esprit remet les péchés : or, cette prérogative n’appartient qu’à Dieu. De Spirilu Sanclo, i, 10, 12, col. 760, 761. L ; s péchés sont remis au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit : Isti (homincs) rogant, divinitas donal. Ibid., iii, 18, 137, col. 843. Le Saint-Esprit sanctifie les anges, les hommes ; non habet igitur consortium creaturæ. Ibid., i, 7, 83, col. 753. Il sanctifie au même titre que le Père et le Fils. Ibid., iii, 25, col. 815. Le Père est saint, le Fils est saint, le Saint-Esprit est saint. Mais nous n’avons pas trois saints,

parce que nous croyons en un seul Dieu saint. Ibid.,

II, 16, 109, col. 836. Le Saint-Esprit nous parle et nous vivifie comme le Père et le Fils. Or l’acte de vivifier est un acte divin, et dans cet acte, il y a l’unité des trois personnes divines. Ibid., ii, l’2, 130 ; 4, 29, 31, col. 802, 780. Le Saint-Esprit est l’auteur de la régénération spirituelle, ibid., ii, 7, 66, col. 788, et de la grâce, et ubi gratia est, ibi spccies diuirntalis apparel. Ibid., I, 14, 148, col. 768. Le Saint-Esprit nous octroie la vie éternelle. Ibid., ii, 3, 27, col. 779. Il habite en nous comme dans un temple, c’est-à-dire qu’il y habite comme Dieu, et avec lui le Père et le Fils, pcr naturse ejusdem unitalem. Ibid., m. 12, 91. 92, col. 831, 832 ; In Episl. I ad Cor., i, 3, P. L., t. xvii, col. 211. Le Saint-Esprit donc, par rapport au Père et au Fils, est d’une seule substance, d’une seule et même clarté et’gloire. Ibid., i, 16, 160, col. 771. Il est inséparable du Père et du Fils. Saint Ambroise revient souvent sur cette pensée : Spirilus Sanctus non separatur a Paire, non separatur a Filio, ibid..i, 11, 120, col. 763 ; Impossibile est a Pâtre Dco vcl Filium vel Spirilum Sanclum separari, ibid., ii, 7, 69, col. 789 ; Manct ciim Pâtre et Filio Spiritus Sanctus, ibid., iii, 12, 92, col. 832 ; II, 8, 82, col. 792 ; Patri et Filio et Spirilui Sancto est individua inscparabilisque communia. Ibid.,

III, 3, col. 812.

Le Saint-Esprit est, comme le Père et le Fils, la source de la bonté. Ibid., i, 5. 69, col. 750. Il est bon, non parce qu’il acquiert la bonté, mais parce qu’il la donne. Ibid., 74, col. 751. La sanctification appartient à titre égal aux trois personnes divines. Ibid., II, 2, -25, col. 779.

Le Saint-Esprit est immense, infini. Ibid., i, 7, 82, col. 753. Il remplit l’univers entier, comme il convient à la majesté de Dieu, ibid., i, 7, 85, col. 654 ; il est éternel, ibid., i, 8, 98, col. 757 ; il est la sagesse incréée, ibid., 97, col. 757 ; son conseil est le conseil du Père et du Fils. Ibid, ii, 2, 20, col. 778. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit participent donc à la même nature et à la même science divine. Ihid., ii, 11, 125, col. 801. Le Saint-Esprit est créateur : Non crecdura Spirilus, sed Creator ; qui autem creator, non ulique creatura. Ibid., II, 5, 11 ; iii, 18, 140, col. 782, 843. Il nous rend participants de la nature divine, II Pet., i, 4, ce qui prouve qu’il ne faut pas le séparer du Père et du Fils. Ibid., I, 6, 80, col. 752. Il n’y a pas de différence entre le Père et le Fils quant à la volonté. Ibid., i, 7, 89, col. 755. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit ont la même volonté, ibid., ii, 10, 101 ; 12, 112, col. 796, 805 : unn Trinilalis vohinlas est. Apologia proplielac David, xiv, 71, P. L., t. xiv.col. 921. Il est adoré au même litre que le Père. DeSpirilu Sanclo, iii, 11, 72, 81, col. 826, 829. Le Saint-Esprit n’est donc pas une créature : Sabler creatura omnis, super divinilas Palris et Filii et Spirilus Sancli. Ilta serrit, lixc régnai : illa subjacel, isla dominatur ; illa npus, liwc. auclor est operis’^illa adorai omnes, liwe adoratur ab omnibus. Ibid., i, 3, 46, col. 744. Il serait impie de mancpicr do vénération au Père ou au Fils ou au Saint-Esprit, parce que la substance du Saint-t-]sprit ne dilTère pas de celle du Père et du Fils, Fnarral. in ps. i, i, 8, P. L., t. xiv, col. 1227 : parce que, sans le Saint-Esprit, nous ne serions pas même chrétiens. Lo baptême, en effet, no serait pas valide sans la mention du Saint-Esprit : Plénum est baplisma, si Palrem et Filium Spirilumque Sanclum fnlraris. Si unum ncges, lolum subrues. Ibid., i, .3, 42 ; 13, 1.32, col. 743, 705. La doctrine catholique de la Trinité évite donc à la fois la confusion sabellicnne et la division arienne. // » /(/., 11, 12, 142, col. 805.

.Mais le Saint-Esprit, tout en étant Dieu, ne cesse pas d’être une personne distincte. Il est joint, copulalus, au Père et au Fils, mais il est unique comme Esprit. Ibid., i, 4, 55, col. 747. Saint. ibroisc af firme de la manière la plus explicite que le Saint-Esprit ne doit pas se confondre avec le Père et le Fils : iVo7z confusus cum Paire et Filio Spirilus Sojiclus, verum et a Paire distinclus et a Filio. Ibid., i, 9,. 106, col. 759. Il est distinct parce que, d’après l’Écriture, il y a distinctio : i entre le Christ Paraclet et le Saint-Esprit Paraclet. Ibid., i, 13, 137, col. 766. La foi catholique croit à un seul Dieu, à un seul Seigneur et à un seul Saint-Esprit. Ibid., ii, 15, 107, col. 835.

Cette riche moisson de textes montre donc avec quelle clarté le saint docteur a joint son téiuoignage à la tradition chrétienne touchant le Saint-Esjirit. Grâce à lui, la théologie latine du Saint-Esprit a gagné une plus grande précision de termes et un caractère plus syntliétique.

3. Saint Jérôme n’a publié, sur la théologie du Saint-Esprit, aucune étude personnelle. Tunnel, Sain’Jérôme, Paris, p. 161. La meilleure preuve qu’il a laissée de l’orthodoxie df son enseignement est la version latine du Traité du Saint-Espril par Didyme l’Aveugle. « Celui qui le lira, dit-il, reconnaîtra les larcins des latins, et méprisera les ruisseaux, lorsqu’il aura commencé de puiser aux sources. » P. L., t. xxxiv. col. 1033.

On peut tout de même glaner dans ses lettres et ses écrits exégétiques plusieurs textes, qui montrent combien le saint docteur a été fidèle à suivre les traces de Didyme. Quelques passages scripturairos louchant la divinité du Saint-Esprit ont été réunis par lui dans le Commentaire sur haïe, xvi, 57, P. L., t. xxxtv, col. 579. Saint Jérôme prouve la divinité du Saint-F ^sprit par ce fait, que l’Écrituro lui attribue ce qui est attribué au Père et au Fils. In Episl. ad Eph., ii, ’.^, P. L., t. XXVI, col. 521. Si le Saint-Esprit crée et vivifie, il est Dieu. A propos du texte de la Genèse, i, 2 : « L’Esprit de Dieu se mouvait sur les eaux, » il écrit : Hoc dicitur de Spirilii Sanclo qui et ips.e vivificalor omnium a principio dicitur. Si autem vivificator, consequenlcr et condilor. Qnod si condilor, et Deus. Liber liebraicarum quæslionum in Genesim, t. xxiii, col. 987, 988. Le Saint-Esprit est de la même nature que le Père et le Fils, In Is., xvii, 63, P. L., t. xxiv, col. 640, parce qu’il contient tout, Episl., xcviii, 13, P. L., t. XXII, col. 801, 802 ; parce qu’il remet les péchés, et qu’il est associé au Père et au Fils dans le baptême. Dialogus conlra liicifcrianos, 6, /’. L., t. xxiii, col. 169. Les ariens donc et les seniiariens, qui nient la divinité du Saint-Esprit, corrompent la vraie doctrine de l’Église. Conlra.Joltanncm Ilierosoh/milanum, 17, P. L., t. xxiii, col. 385. Le Saint-Ipsprit est en Dieu comme personne divine. L’Évangile déclare explicitement qu’il est distinct du Fils. Matlh., xii, 32. In Episl. ad Gal., ii, 3, P. L., t. xxvi, col. 399. Dans la Trinité, il y a la distinction des personnes et.l’unité de substance : Quie quidem persomv, cum vocabulis personisquc dissenlianl, substantia mduraquc sociala sunl. Ibid., ii, 3, col. 400.

I. Il n’est presque pas besoin de recueillirles témoignages d’Augustin, pour mettre en pleine lumière sa croyance orthodoxe sur la divinité du Saint-Esprit. S’il y a un écrivain qui mérite par excellence la dénomination de docteur de la Trinité, c’est sans conteste Augustin, t En lui se résume et sur lui se ferme l’antiquité chrétienne latine, dont la pensée a trouvé dans son œuvre son expression la plus précise ; mais avec lui aussi coinincnce f poindre la théologie du moyen Age, qu’il a préiiarée et <lont les germes existent déjà dans ses écrits. « Tixcront, op. cit., t. ii, ji. 335.

Les textes qui montrent chez -Augustin la consubslantialité divine du Saint-Esprit ont été recueillis en grande partie par (iangauf, Des hl. Auguslinus speku-Inlivc Lrhrc von doit dem Dreicinigen, Avigsbourg, 1865, p. 390-428. Leur autorité est décisive pour le  :.

sujet qui nous occupe, parce que, malgré l’originalité et le caractère personnel de sa spéculation théologique, saint Augustin remonte toujours aux sources les plus pures de la foi et de la tradition catholique. II demeure fidèle à sa maxime ; Qui crédit, accedit ; qui ncgat, rccedit. In Joa., tr. XLVIII, 3, P. L., t. xxxv, col. 1741. La divinité du Saint-Esprit, il la défend contre les objections des sadducéens, d’Arius, d’Eunoniius, de Macédonius, qui rappellent créature ; contre les photiniens, qui attribuent seulement au Père une personnalité divine ; contre les manichéens, les cataphrygiens et les donatistes. Serm., lxxi, iii, 5, , P. L., t. xxxviii, col. 447 ; Epist., clxxxiv bis, 11, 48, t. XXXIII, col. 814 ; In Epist. ad Rom., 15, t. xxxv, col. 2099 ; De hæresibus, 26, t. xlii. col. 30.

Il attaque d’abord les ariens sur le terrain doctrinal. Il en appelle au témoignage de ses devanciers, qui ont traité avec ampleur la théologie du Saint-Esprit, et il recueille les pièces qui s’y rapportent, pièces qui établissent énergiquement la divinité du Saint-Esprit. De Trinilale, i, 7, 13, P. L., t. xlii, col. 827. Aux négations de l’hérésie, il oppose la magnifique confession de foi de l’Église catholique : Est utique in Trinitate Spiritus Sanclus, quem Patri et Filio consubstantialem et coselernum fides catholica confitetur. In Joa., tr. LXXIV, 1, P.L., t.xxxv, col. 1826. Discamus intelligere unitatem Palris et Filii et Spiritus Sancti : ut quod de uno solo Deo diclum fuerit, non continua proliibeamur de Filio, vel de Spiritu Sanr.to intelligere : quia Pater quidem non est Filius, et Filius non est Pater, et Spiritus utriusque non est Pater aut Fiius et Spiritus Sanclus, unus solus et verus est Dominus Deus. Epist., ccxxxviii, 3, 20, P. L., t. xxxiii, col. 1046.

Saint Augustin détermine et précise le sens du mot esprit dans l’Écriture et dans le langage philosophique. De diversis quæstionibus ad Simplicianum, II, 5, P. L., t. XL, col. 132-134 ; De anima et ejus origine, I, 14, 18-23, t. XLiv, col. 484-487. Il réunit quelques textes scripturaires sur la divinité du Saint-Esprit. Quæsiiones in Hcptatcuchum. Il croit inutile d’en donner un plus grand nombre, parce que toute l’Écriture clamât Spirilum Sanctum esse Deum, De Trinitate, vii, 2, 6, t. xlii, col. 938, 939, et il réfute vigoureusement les objections scripturaires des ariens. Contra sermonem arianorum, 21-23, t. xlii, col. 698-703.

L’argumentation de saint Augustin repose tout particulièrement sur l’inséparabilité des trois personnes divines dans leur vie immanente et dans leurs opérations ad extra. On ne peut nommer le Père et le Fils, sans que la pensée se reporte au Saint-Esprit. In Joa., tr. IX, 7, t. xxxv, col. 1461. L’opération de la Trinité est indivisible. Serm., lxxi, 16, 26, t. xxxviii, col. 459. Le Saint-Esprit est à la fois l’Esprit du Père et du Fils, consubstantiel et coéternel à tous deux. De civitate Dei, xi, 24, P. L., t. xli, col. 337 ; il est la sainteté substantielle et consubstantielle du Père et du Fils. Ibid., col. 338. L’unité divine est inséparable dans les trois personnes de la Trinité : m tribus inseparabilis unitas. Ibid., col. 337. Les trois personnes sont un seul Dieu, un seul tout-puissant. Collatio cum Maximino, 11, P. L., t. xlii, col. 714. Le Saint-Esprit ne peut se séparer du Père et du Fils. De Trinitate, i, 8, 18, t. XLII, col. 832. Tout ce qu’a le Père, le Fils et le Saint-Esprit le possèdent au même degré. Le Saint-Esprit ne diffère pas du Père et du Fils quant à la noblesse et à la majesté. Ibid., ii, 4, 6, col. 848. Cette inséparabilité prouve que le Saint-Esprit est absolument égal au Père et au Fils, ibid., vi, 5, 7, col. 927, 928 ; qu’il est commun au Père et au Fils, et que cette communauté est consubstantielle et éternelle. Ibid., col. 928. Le Père seul est aussi grand que le Fils seul ou le Saint-Esprit seul ; le Fils et le Saint-Esprit sont

aussi grands que le Père seul. Ibid., vi, 7, 9, 10, col. 922, 930.

La divinité du Saint-Esprit paraît aussi évidente par les attributs divins que la sainte Écriture luD donne. Le Saint-Esprit est immuable, parce que sa. nature est divine. De moribus Ecclesiæ catholicæ i, . 13, 23, P. L., t. XXXII, col. 1321. Il est un esprit créateur qui façonne l’univers selon le plan divin. De Genesi ad lilteram, iv, 15, P. L., t. xxxiv, col. 226^ Contra Maximinum, ii, 17, 2, t. xlii, col. 783. Sa puissance créatrice est attestée par l’Écriture, qui l’appelle le doigt de Dieu. De catechizandis rudibus, xx, . 35, P. L., t. XL, col. 335, 336 ; Conf., xiii, 9, t. xxxii, col. 848 ; De oclo Dulcilii quæstionibus, iv, 2, 3, t. xl, . col. 166, 167. Il est l’auteur de la sanctification. C’est pour cela qu’il s’appelle Esprit-Saint. Serm., viii, 13, P. L., t. xxxviii, col. 72. Il nous transforme en temples de Dieu, et il ne saurait réaliser cette transformation s’il n’était pas Dieu lui-même. Epist., iv, 4, 21, t. xxxiii, col. 1046 ; Collatio cum Maximino, 14, t. XLII, col. 722 ; Contra Maximinum, 11, col. 752. Il remet les péchés en vertu de cette puissance sanctificatrice qui lui est commune avec le Père et le Fils. Serm., lxxi, 15, 25, t. xxxviii, col. 458. L’Écriture et la foi traditionnelle de l’Église présentent donc le Saint-Esprit comme le complément nécessaire de la Trinité. Enchiridion, lvi, 15, t. XL, col. 258. Il s’ensuit que les trois personnes sont un seul Dieu : Hxc tria unus Deus. Sermo ad calechumenos, vi, 7, t. xl, col. 684. Trinitas unus Deus est. Conlra Maximinum, ii, 23, 2, t. XLII, col. 798 ; De Trinitate, vii, 2, 6, ibid., . col. 939.

La personnalité divine du Saint-Esprit est reconnue par Augustin comme un dogme de la foi catholique : Fides nostra et catholica Ecclesia prædicat… Trinitatem quamvis serveda singularum proprietale et subslantia personarum, tamen non esse Ires Deos, sedunum-Deum. In Sanclo Spiritu Palris Filiique communitas, in tribus œqualitas. Serm., lxxi, 12, 19, t. xxxviii, col. 454. Il déclare ne pas savoir, vu l’incompréhensibilité du mystère, la raison intime pour laquelle on ne peut appeler Père ou Fils le Saint-Esprit. De fide et symbolo, ix, 19, t. xl, col. 191. « Nous croyons, dit-il, au Saint-Esprit qui procède du Père, sans être le Fils ; qui reste sur le Fils, sans être le Père du Fils ; qui reçoit du Fils sans être le Fils du Fils. Il est l’Esprit du Père et du Fils, l’Esprit-Saint, Dieu lui-même… Un seul Père Dieu, un seul Fils Dieu, un seul Esprit Dieu. Et cependant le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne sont pas trois Dieux, mais un seul Dieu. Il ne suit pas de cette unité divine que le Père soit le même que le Fils, que le Fils soit le même que le Père, ou que le Saint-Esprit soit le même que le Père et le Fils. Le Père est le Père du Fils, le Fils est le Fils du Père, et le Saint-Esprit est l’Esprit du Père et du Fils. Chacune des trois personnes est Dieu, et la Trinité elle-même, un seul Dieu. » Serm., ccxiv, 10, t. xxxviii, col. 1071. Toute personne divine est Dieu toutpuissant ; mais les trois personnes ne sont pas trois Dieux. De civitate Dei, ^i, 21, t. xli, col. 337. Nous adorons la Trinité parce que le Père n’est pas Fils, le Fils n’est pas Père ; le Saint-Esprit n’est ni Père, ni Fils. Collatio cum Maximino, 11, t. xlii, col. 744. Crede islos Ires, et in suis singulis personis Ires esse, , et tamen simul non très Dominos Deos, sed unum Dominum Deum esse. Ibid., 26, col. 742. Voilà la formule qui résume toute la théologie trinitaire de saint Augustin. Ceux qui la rejettent n’ont pas le Saint-Esprit et, partant, restent hors de l’Église qui croitan Saint-Esprit. Epist., clxxxiv, 11, 50, t. xxxiii, col. 815. Ils se rangent du côté des hérétiques et des schismatiques. Serm., lxxi, 19, 32, t. xxxviii^ col. 462, 463.

Conclusion. — Nous avons suivi pas à pas la tradition ciirétienne des quatre premiers siècles du christianisme. A côté des affirmations nettes et précises de la divinité et de la personnalité du Saint-Esprit, nous avons constaté aussi les tâtonnements, les imprécisions de langage, les essais timides des Pères et des écrivains qui travaillaient à expliquer la vie divine et le caractère personnel du Saint-Esprit. Mais ces lacunes, qui sont inévitables dans le travail de la pensée humaine, n’enlèvent rien à renonciation simple et authentique du dogme de la consubstantialite et de la personnalité divines du Saint-Esprit, dogme qui a été transmis par le canal de la tradition. Cette tradition a été constante, ininterrompue du i^’au ive siècle. Il n’est pas nécessaire de consulter les témoins qui sont venus dans les âges suivants. Au ive siècle, la tradition chrétietme a trouvé les fonnules et les termes qui expriment sa croyance, et la théologie trinitaire a atteint son plein épanouissement. Avec Athanase en Orient et Augustin en Occident, elle est à même de résister à tous les assauts ; elle a des armes pour abattre toutes les hérésies, des lumières pour dissiper toutes les ténèbres d’erreur, des réponses pour résoudre toutes les objections. Les pneumatomaques perdent du terrain. L’éloquence, la logique, l’érudition scripturaire des Pères leur ferme la bouche, et lorsque le concile de Constantinople, en 381, les aura anathématisés, la tradition catholique n’aura plus rien à redouter. Les Pères du iv<e siècle l’avaient mise en pleine lumière. Ils avaient exprimé la théologie du Saint-Esprit en des formules précises, et ces formules, ratifiées par les conciles, commentées par les théologiens, rappelleront de tout temps aux fidèles qu’on cesse d’être chrétien si on n’adore pas le Saint-Esprit comme Dieu et comme troisième personne distincte du Père et du Fils.

La doctrine des Pères de l’Église sur le Saint-Esprit a été exposée avec beaucoup d’érudition théologique par le P. Petau, De Trinilute, préface, 1. I, III, IV, Doainala theologica, t. li, p. 2r>3-278, 501-085 ; t. iii, p. 1-168 ; le P. Thomassin, TracUilus de TriniliUc, Doqmala theologica, t. V, p. 288-628 ; le cardinal l’ranzclin. De Deo trino, p. 106186 ; le P. de Régnon, Éludes de (héologie posilive sur la sainte Trinité, Paris, t. m ; Heinrich, Doiimatisclie Théologie, Mayence, 1885, t. iv, p. 250-301> ; Schceben, I.n dogmatique, trad. franc., Paris, 1880. t. ii, p. 551-579 ; Nôsgen, Geschichte der l.ehre vom heiligeii Geisle, Cuitersloh, 1899, p. 1-95.

Des données générales sur la théologie trinitaire, et, par conséquent, sur le Saint-Ksprit, sont contenues dans les ouvrages suivants : Zlegler, Geschichlsenlioickelung des Dogma voni heiligen Geisle, (iœttingue, 1791 ; liaur. Die christliche l^hre non der Dreieiniijkeil and Menschwerdung Colles in ihrer geschirhtlichen EntwieUelung, Tubingue, 1811 ; Mcyer, Die l.ehre non der Trinilàt in ihrer hislorischen Enlwiekelung, Hambourg, 1844 ; Dornor, ICntwiekelungsgeschirhle der l.ehre von der Person Christ i, in den ersten vier Jahrhunderten, Stuttgart, 1815 ; Ililgenfcld, />ic o/)os/olischen Vdter : l’ntersuchungen iiber Inhall iind L’rsprung der unler ihren S’amen erhallenen.S"r/iri//cn, > Halle, 185.3 ; Stôckl, Die l.ehre der uornicrinisrhen Kirchenvdter von der gôtllichen Trinilal, Kichstiidt, 1861 ; ^.Snegirev, Vlchenie^o itxie li.^usa Khristovu trekh pervijkh viekakh khristianslon (La doctrine sur la personne de Jésus-Christ pendant les trois premiers siècles du christianisme), Kazan, 1871 ; IJonaldson, The apnslolical Fathcrs : a crilical account o/ their genuine wrilings and o/ their iloctrines, Londres, 1874 ; Sprinzl, Die Théologie der aposlolischen’dler. Vienne. 1880 ; Duchesne, /.es témoins anténicéens du dogme de la Trinité, Amiens, 1883 ;.Seitz, Die Apologie des Christentums hei den Griechen <les nund - Jahrhundcrls, Wiirzbourg, 1895 ; Wcincl, Wirkungen des Gristes itnd der Geister im nachapostolischen’/.eitaltcr bis au/ Irenaus, l’ribourg, 1899 ; Schermann, Die Gotlheil des hl. Geistes nach den griechischen Vutern des vierten Jahrhunderts, l’ribourg, 1901 ; Vôlfcr, Die aposlolischen Vàter neu untersuchi, I.eyde, 1904.

Des données plus spéciales se rencontrent dans les

ouvrages suivants : 1° Pères apostoliques. — Courtois, . L’Épttre de Clément de Rome, Montauban, 1894 ; Gregg, . St. Clément, bishop of Rome, Londres, 1899 ; Heurtier, . Le dogme de la Trinité dans V Èplire de saint Clément de Rome et le Pasteur d’IIermas, Lyon, 1900 ; Dorsch, Die Gotlheil Jesu Christi bei Clemens von Rom, dans Zeitschrift jûr katholische Théologie, 1902, t. xxvi, p. 701-728 ; Groot, De leer van den h. Clemens Romanus over der Alterheiligsle Drievuldigheid en de verlossing, Studien, 1905, t. lxv, p. 259-262, 329-352 ; Montagne, La doctrine de saint Clément de Rome sur la personne et l’œuvre du Christ, dans la Revue thomiste, 1906, t. xiv, p. 145-166 ; Priselkov, Obozrienie poslanii Sv. Klimenta k. korinlhianam (Aperçu sur la lettre de saint Clément aux Corinthiens), Saint-Pétersbourg, 1888 » p. 120-128 ; Zahn, Ignatius von Antiochien, Gotba, 1873 ; Dreher, Sojicti Ignatii episcopi Aniiocheni de Christo Deo doctrina, Sigmaringen, 1877 ; Nirschl, Die Théologie des hl, Ignatius aus seinen Briefen dargestclll, Mayence, 1880 ; Von der Goitz, Ignatius von Anliochien, als Christ und Theologe, Leipzig, 1894 ; Bruston, Ignace d’Antioche, ses épltres, sa vie, sa théologie, Paris, 1897 ; A. D., Podlinnost poslanii, sv. Ignatiia Bogonostza t utchenie ego o lilzie lisusa Khrista (L’authenticité des épilres de saint Ignace et sa doctrine sur la personne de Jésus-Christ), dans Lectures de la société des amateurs du progrès spirituel, 1873, t. i, p. 753-775 ; Kikuni, Glaubenslehre und Orthodo.xie des Pastor Hcrmie, Cléves, 1863 ; Lipsius, Der Hirte des Hermas und der Montanismus in Rom, dans Zeilschrijt fiir wissenschaftliche Théologie, 1865, t. viii, p. 266-308 ; 1866, t. ix, p. 27-81, 182-218 ; Rambouillet, L’orthodoxie du livre du Pasteur d’IIermas, Paris, 1880 ; Link, Chri.fti Person und Werk im Ilirten des Hermas, Marbourg, 1886 ; Ribagnac, La christologie du Pasteur d’IIermas, Paris, 1887 ; -Scherer, Ziir Christologie des Hermas, dans Der Katholik, 1905, t. xxxir, p. 321-331 ; Adam, Die Lehre von dem lil. Geisle bei Hermas und Terlullian, dans Theologische Quarlalschri/l de Tubingue, 1900, t. Lxxxviri, p. 36-61 ; Guscv, .Si » . Hermas i egv kniga Paslgr (Saint Hermas et son livre le Pasteur), Pravoslavngi Sohésiednik, 1896, t. i, p. 76-142 ; Braunsberger, Der Aposlel Barnabas, sein Leben und der ilim beigelegle Bricje, Mayence, 1870 ; L’éplire de Barnabe, Louvain, 1900 ; Taylor, An essay on Ihe theologij of the Didachc, Cambridge, 1889 ; Jacquier, La doctrine des douze apôtres et ses enseignements, Paris, 18, 91 ; Bicsentbal, Die urchristliche Kirche in Lehre und Leben nach der ^.Sx/r, : ’, , So’.Ss/ » .’.KT.r.T^./i.i^ :, Insterburg, 1893.

Apologistes.

Schmitt, Die.pologie der drei ersten

.Jahrhunderle in hislorisch-systemalischcr Darstellung, Mayence, 1890 ; Zahn, Die apologetischen Grundgedanken in der Litleratur der ersten drei Jahrhunderle siislemalisch dargestelll, Wurzbourg, 1890 ; Dunckcr, Die l.ogoslehre Justins des Marlyrers, Gœtlingue, 1848 ; Waubcrt de Puiseaii, Die Christologie van Justinus Marli/r, Leyde, 1804 ; Wcizsàcker, Die Théologie des Mdrliircrs.luslinus, dans Jahrbiicher fiir deutsche Théologie, 1807, t. xii, p. 00119 ; Paul, Ueber die l.ogoslehre bei.luslinus Martyr, dans Jahrbiicher fiir protestantische Théologie, 1880, t. xit, p. 001-090 ; 1890, t. XVI, p..5.50-578 ; 1891, t. xvir, p. 124148 ; Cramer, U’((/ leerl Justinus acmgaande hcl persoonlijk bestaan van den heiligen Geest, dans Theologische Studien, 1893, p. 17-35 ; Leblanc, /.< logos de saint Justin, dans les .

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