Dictionnaire de théologie catholique/VENTE ET ACHAT

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 547-553).

VENTE ET ACHAT. — Cette question, qui relève spécifiquement de l’économie sociale, touche cependant de trop près à la morale pour être passée sous silence. On envisagera ici :
I. Les notions générales.
II. Le juste prix.
III. Les devoirs de l’acheteur et du vendeur.
IV. Quelques espèces particulières de ventes.

I. Notions générales.

Vente et achat.

L’impossibilité où se trouve l’individu laissé à lui-même de produire tout ce qui est nécessaire à sa subsistance personnelle et à celle de sa famille a introduit dans la société la « division du travail ». L’un produit ce qui est nécessaire à l’autre et celui-ci se procure auprès de celui-là ce qui lui manque. Le troc primitif, ou échange d’un objet donné pour un objet reçu de valeur estimée égale, a presque complètement disparu dans les sociétés modernes et contemporaines. Les choses et les denrées échangeables sont évaluées pécuniairement, en fonction d’une monnaie ayant cours et de valeur déterminée. On fixe ainsi leur prix d’achat ou de vente. Le procédé est ingénieux et simple et favorise le commerce.

L’achat ou la vente peuvent donc se définir : « Un contrat onéreux par lequel est transféré la propriété d’un objet moyennant un prix déterminé. » Trois éléments essentiels entrent dans ce contrat :
1. Le mutuel consentement de celui qui achète et de celui qui vend ;
2. L’objet, mobilier ou immobilier, constituant la marchandise ;
3. La somme d’argent, prix de la marchandise. Le deuxième élément différencie la vente du change de monnaie ; le troisième la différencie du simple troc.

D’après le droit naturel, le transfert de propriété existe dès que les deux parties contractantes sont d’accord sur la marchandise et sur le prix. Mais, d’après le droit civil, certaines conditions peuvent encore être requises pour que le contrat devienne effectif : conditions de poids, de nombre, de mesure, de goût, d’essai préalable, prévues dans la convention. Ces conditions doivent être d’abord remplies pour que la vente et l’achat aient leur plein effet. Code civil français, art. 1582-1593.

Acheteur et vendeur.

L’achat ou la vente étant un contrat, le droit naturel ne peut admettre comme acheteurs ou vendeurs que des individus jouissant suffisamment de leur raison, pour comprendre les obligations qu’ils contractent. Sont donc exclus les enfants n’ayant pas l’usage de la raison, les déments perpétuels, les individus ivres ou furieux pendant le temps de leurs crises. Sans les exclure absolument, le droit naturel considère comme moins habilités à l’achat ou à la vente les demi-fous ou les personnes ne jouissant de leur raison que par intermittence. Les impubères ayant l’usage de la raison pourraient valablement acheter ou vendre.

Mais le droit civil apporte ici d’heureuses restrictions en ce qui concerne les mineurs, les interdits, les femmes mariées, les époux entre eux, les tuteurs par rapport aux biens dont ils gèrent la tutelle, les mandataires par rapport aux biens qu’ils sont chargés de vendre, les administrateurs relativement aux biens confiés à leur administration, les officiers publics, les juges, les magistrats civils, etc. Voir Code civil français, art. 388-487, 489-512, 1401-1496, 1595, 1596, 1597.

Marchandise.

Le principe général, admis par tous, est que le vendeur ne peut céder que des choses dont il est le légitime propriétaire. Cf. Code civil, art. 1598-1601. Si le vendeur cède, même de bonne foi, un bien ne lui appartenant pas, , l’acquéreur, même de bonne foi, ne devient pas légitime propriétaire. C’est alors que se posent les cas de conscience relativement aux possesseurs de bonne foi, de foi douteuse, de mauvaise foi. Voir Tanqueray, Synopsis theol. moralis, t. iii, n. 461 sq.

De plus, le droit naturel exige que la chose vendue ne soit pas substantiellement viciée ou modifiée. Un défaut qui rendrait l’objet acheté nuisible ou inutile, alors que l’acheteur entendait acquérir quelque chose de profitable et d’utile, empêche très certainement la vente ou l’achat d’être valable. Toutefois, pour couper court aux discussions possibles, le droit civil français déclare de tels contrats valables, mais rescisibles. Cf. Planiol, Traité élém. de droit civil, Paris, 1905, t. ii, n. 1053, 1055, 1056, 1058.’La qualité de la marchandise livrée à l’acheteur doit donc être exactement celle dont, on est convenu. Voir plus loin. Aussi la morale naturelle, soutenue ici par la loi civile, interdit-elle les fraudes de toutes sortes. Au sujet de ces fraudes, qui vicient plus ou moins la qualité de la marchandise, se posent une quantité de cas de conscience concernant l’obligation de restituer ou de compenser. Si la fraude vicie substantiellement la denrée vendue, le contrat est, comme on l’a dit, ou nul ou rescisible. Si elle ne la vicie que d’une manière accidentelle, le contrat est rescisible au gré de l’acheteur, si toutefois elle est intervenue pour décider la vente. Cf. Tanquerey, op. cit., n. 611. II. Le juste prix.

Évaluation du juste prix.

Le juste prix peut être défini : « l’expression exacte en monnaie de la valeur d’échange d’un objet. » Deux questions délicates se posent à ce sujet :
1. Sur quels éléments peut-on se fonder pour établir la valeur d’échange d’un objet ?
2. Qui en fixera l’expression exacte en monnaie ?

1. La valeur d’échange d’un objet.

De nombreux éléments peuvent ou doivent entrer dans l’estimation d’un objet, d’une denrée, d’un produit : Son utilité : plus une chose présente d’utilité pour celui qui l’achète et plus elle a de valeur pour lui. Sa rareté ou son abondance : plus une chose est rare et plus elle est estimée ; plus elle est abondante et commune, et plus sa valeur diminue. Ainsi l’eau, malgré son utilité, ne constitue pas, en temps normal, en raison de son abondance, une valeur marchande. Le désir de l’acheteur donne à ses yeux plus de prix à l’objet convoité. Le travail de l’ouvrier qui a concouru à la production de la marchandise est, aux yeux de Karl Marx, le seul élément d’estimation à retenir. Bastiat y ajoute l’effort accompli pour rendre l’objet négociable. D’autres calculent la valeur d’une chose d’après le coût nécessité par sa production. Enfin l’école libérale n’invoque ici que la loi de l’offre et de la demande, avec la convention qui en résulte. « Tous ces systèmes, écrit P. Six, ont le tort d’oublier que la valeur d’échange suppose une société d’hommes, qu’elle a donc un cachet éminemment social, dès lors que d’innombrables éléments s’y assemblent, s’y heurtent, s’y ajustent et finissent, tous ensemble, par la constituer autour d’un but unique qui est le bien commun temporel. Par conséquent, travail de l’homme, abondance ou rareté, offre et demande, contrat libre, désirs plus ou moins grands des hommes soit d’acquérir soit de céder : tout cela entre dans la valeur d’échange, à des doses qui peuvent varier évidemment. Le difficile est de donner à chacun de ces éléments leur rang d’importance. » Art. Valeur, dans le Dict. pratique des connaissances religieuses, t. vi, col. 791. Parmi tous ces éléments, la loi de l’offre et de la demande et le travail tiennent, à coup sûr, la première place. Au premier abord, la loi de l’offre et de la demande semble être le régulateur normal de la valeur de la marchandise et du travail lui-même. S’il y a trop de produits, s’il y a moins de besoins, les prix s’abaisseront automatiquement. Si la demande s’accroît, la production demeurant stationnaire, les prix s’élèveront. D’autres éléments peuvent sans doute intervenir, mais l’otïre et la demande s’affirment souvent, sinon toujours, comme le grand régulateur des prix. D’ailleurs cette loi présente de grands avantages : elle incite les vendeurs à satisfaire, aux meilleurs prix et de la meilleure façon, les besoins des acheteurs ; entre les acheteurs elle fait régner une inégalité raisonnable ; en relevant le prix des marchandises les plus désirées, elle prévient le gaspillage et oriente l’activité des producteurs vers des emplois rémunérateurs. Enfin, si elle ne justifie pas les prix, elle est d’ordinaire le moyen le plus efficace pour les faire apparaître. — Si bienfaisant que puisse sembler, au point de vue économique, le jeu normal de l’offre et de la demande, cependant on ne saurait, au point de vue social, s’en contenter. Dans les temps de crise, cette loi risquerait de plonger dans une misère imméritée des foules de travailleurs, obligés de louer à vil prix leur labeur, soit à cause d’une pléthore de main d’œuvre, soit a cause d’une trop grande abondance des matières premières en tace <ie demandes raréfiées. » Loi d’airain a-t-Otl dit d’elle, précisément parce qu’elle ne tient pas compte de l’élément moral et social qui doit intervenir dans l’estimation du produit du travail. Le travail, en effet, est un devoir pour tout homme et, pour tout homme, le travail doit être le moyen de se procurer les choses nécessaires à sa subsistance et à celle de sa famille : « Conserver l’existence est un devoir imposé à tout homme… De ce devoir découle nécessairement le droit de se procurer les choses nécessaires à la subsistance que le pauvre ne se procure que moyennant le salaire de son travail. Que le patron et l’ouvrier fassent donc tant et de telles conventions qu’il leur plaira… au-dessus de leur libre volonté, il est une loi de justice naturelle plus élevée et plus ancienne, à savoir que le salaire ne doit pas être insuffisant à faire subsister l’ouvrier sobre et honnête. » Léon XIII, encycl. Rerum novarum ; « Salaire vital », disait Léon XIII ; « Salaire familial », précisera Pie XI. Voir Salaire, t. xiv, col. 1006, 1010. Ce que Pie XII, à l’occasion du cinquantenaire de Rerum novarum (1 er juin 1941) précise en ces termes : « Au devoir personnel du travail imposé par la nature correspond et s’en suit le droit naturel de chaque individu à faire du travail le moyen de pourvoir- à sa vie propre et à celle de ses fils. » Mais « il faut que celui qui a la force de travailler… trouve à travailler équitablement. » Encycl. Sertum lœtitia. La valeur, produit du travail, devra donc, par de la le jeu de l’offre et de la demande, être estimée humainement et socialement.

2. Estimation vénale du juste prix. —

Cette estimation est faite en une monnaie déterminée et ayant un cours stable. La somme exprimant le juste prix n’est donc pas nécessairement immuable. Si la monnaie est dépréciée, la même valeur commerciale devra s’exprimer par une somme plus élevée. Les prix paraissent monter ; en réalité, c’est la valeur de la monnaie qui diminue. Mais supposons la valeur de la monnaie constante.

Sous la réserve de la valeur constante de la monnaie, le juste prix est celui qui traduit, aussi bien pour l’acheteur que pour le vendeur, la valeur commerciale de la marchandise. Il comprend l’équitable rémunération du travail, les frais de production, le bénéfice raisonnable à attribuer au producteur et aux intermédiaires. Si ces intermédiaires ne collaborent pas à la production, ils concourent efficacement à la répartition des produits et, partant, ont droit à une honnête rétribution.

Mais qui fera l’estimation vénale de ce juste prix ?

a) Le juste prix légal. — Le socialisme déclare que c’est l’État. D’une façon normale, l’État a le droit, en effet, de fixer le juste prix dans les domaines lui appartenant en propre. Si l’État a la régie des chemins fer, de certaines mines, de certaines écoles, il intervient de plein droit dans la fixation du prix des billets ou du transport de marchandises, dans la taxation des produits manufacturés dans ses usines, dans l’indication des frais de scolarité. Mais, dans les transactions d’ordre privé — et il est souhaitable que l’État respecte et favorise le plus possible, en matière économique, les initiatives privées — il ne lui appartient plus, normalement, de fixer des prix. Lue intervention habituelle de ce genre, en période normale, aboutirait à anéantir les effets bienfaisants de la concurrence. Admettons toutefois qu’en temps de crise, exceptionnellement, l’Étal doive intervenir pour fixer et limiter les prix. Le prix légal, ainsi déterminé, oblige en conscience, à moins qu’il ne soit manifestement injuste ou soit tombé en désuétude. Il n’est pas permis de le dépasser.

C’est en marge du prix légal que sévit, en temps de crise économique, le marché noir. I.e marché ordinaire est appauvri : en VOTtU de la loi de [’offre et de la demande, le prix des rares marchandises traitées RlOnU en flèche à des hauteurs que seuls les riches

peuvent aborder. Pour protéger les gens moins fortunés et leur permettre l’accès au marché des denrées indispensables à la vie, l’État, usant en ce cas de son droit et accomplissant son devoir, essaie de mettre une limite à la hausse des prix en taxant les marchandises et en instituant le ticket de distribution. Mais le commerçant peut se laisser tenter par l’offre alléchante du riche ; l’amour du bien-être en celui-ci, l’amour du gain en celui-là se rencontrent alors en marge du marché légalement taxé. Ainsi un second marché où règne, au profit de l’égoïsme. uniquement la loi de l’offre et de la demande, fonctionne clandestinement et s’efforce d’échapper ainsi aux rigueurs de la loi. Marché « noir » parce qu’il se cache et qu’il plonge dans une noire misère les pauvres qui n’ont pas le moyen de l’aborder.

La morale réprouve un tel marché, qui viole effrontément la notion du juste prix. Ce qui n’implique pas qu’elle condamne ou qu’elle condamne au même titre tous les acteurs du marché noir. L’acheteur, contraint par les nécessités de la vie à s’approvisionner de l’indispensable pour lui et pour sa famille au marché noir, ne commet aucune faute morale. Primum vivere. Il n’en est pas de même du vendeur. Vendeur à la production ou vendeur intermédiaire, pour être en règle avec la loi morale, sont obligés, l’un et l’autre de vendre à un prix raisonnable, au « juste prix », c’est-à-dire, ainsi qu’on l’a dit plus haut, à un prix qui soit l’équitable rémunération du travail et des frais de production, auxquels il faut ajouter un bénéfice raisonnable, le bénéfice approuvé par les honnêtes gens. Or, le marché noir du producteur ou de l’intermédiaire ne se contente pas de ce bénéfice raisonnable : aussi, quand l’un ou l’autre s’en écarte dans des proportions démesurées, il y a faute contre la justice. C’est une faute contre la justice commutative — et il est tenu à restitution — à l’égard de l’acheteur contraint par la nécessité de s’adresser à lui. À l’égard d’un acheteur libre, bénévole, il n’y a pas d’injustice proprement dite ; mais vendeur et acheteur pèchent contre la justice sociale, parce que leurs agissements violent le droit que tout homme a d’accéder à l’usage des biens de la terre. L’un et l’autre compromettent l’usage commun de ces biens qui devraient profiter à tous et méconnaissent l’ordre voulu par le Créateur. Coupables également, tout au moins contre la justice sociale, les commerçants qui stockent les marchandises dans l’attente prévue de gros bénéfices résultant de la dévaluation progressive de la monnaie.

Le troc ne saurait être réprouvé par ces principes de justice sociale. Que le vendeur et l’acheteur estiment la marchandise au prix de la taxe ou au prix du marché noir, peu importe : ils font un simple échange dans lequel sont sauvegardées les lois fondamentales de la justice et du juste prix. Cf. Ami du clergé, 10 octobre 1946, p. 12-14. Certains produits contingentés, acquis au prix de la taxe et moyennant tickets, peuvent, en conscience, être revendus à prix plus élevé à un amateur qui en offre spontanément ce prix. Ni la justice commutative, ni la justice sociale ne sont ici lésées. Il ne faudrait pas cependant abuser de l’acheteur bien disposé. Cf. S. Thomas, II a -II iP, q. lxxvii, a. 1, § Alio modo.

b) Le juste prix selon l’estimation commune (prix courant).

Le mot est de saint Thomas, dans la question précitée, ad l um : « Le juste prix des choses n’est pas immuablement fixé ; il consiste plutôt dans une certaine estimation, de sorte qu’une petite élévation ou une petite diminution ne paraît pas détruire l’équilibre de la justice. » L’estimation commune doit tenir compte des éléments qui entrent dans la valeur de la marchandise, travail, coût de la production, bénéfice légitime. Mais l’élément social qui tient une si grande place dans cette estimation doit « enlever aux volontés individuelles non pas toute participation au prix par les tractations diverses et les contrats, mais l’absolue autonomie et indépendance vis-à-vis des intérêts, respectables eux aussi, des autres membres du corps social. » P. Six, art. Prix, Juste prix, dans Dict. prat. des conn. relig., t. v, col. 805. L’estimation commune sera donc le grand régulateur des prix au point de vue social. « Sous cette expression devenue banale, la philosophie morale de nos grands docteurs du Moyen Age et du xviie siècle a exprimé une pensée riche, solide, éminemment moderne aussi. C’est l’évaluation commune qui fixe le juste prix ; ce n’est donc pas l’évaluation personnelle du plus fort des contractants, ni l’évaluation ramenée au niveau des intérêts individuels… ; elle concentre et résume la pensée du producteur et du consommateur, la pensée de l’intermédiaire, le commerçant, la pensée du riche comme de l’indigent ; elle s’affranchit des intérêts de classe, elle associe les voix de tous les intéressés ; elle parle au nom de tous et pour le bien de tous. » P. Desbuquois, Semaine sociale de Saint-Etienne, 1911.

Mais il faut que cette pensée commune prenne corps dans une autorité sociale concrète, chargée de veiller à ce qu’on n’abuse pas des désirs ou des nécessités de l’acheteur. Cette autorité sociale, en temps de crise, peut être, on l’a vii, l’autorité même de l’État. Mais, en temps normal, il semble que l’autorité sociale la plus qualifiée soit celle d’une organisation corporative, au besoin secondée par la loi. Pie XII l’a rappelé naguère dans sa lettre à M. Flory, à l’occasion de la Semaine sociale de Strasbourg (10 juillet 1946). Cf. Documentation catholique, 18 août 1946, p. 867-870.

Le corporatisme, en effet, est pleinement conforme aux principes chrétiens. C’est le système économique selon lequel les membres d’une même profession se groupent en vue de la défense des intérêts professionnels dans un seul organisme, la corporation. Cette entente corporative fixe le plan général de la production, réglemente d’un commun accord tout ce qui a trait au travail, à la rétribution du travail et du capital. La corporation unit, dans l’intérêt commun, patrons et ouvriers, employeurs et salariés, producteurs et intermédiaires, de la même profession. Les décisions sont prises en commun, dans l’intérêt commun, en vue de la prospérité commune : « Le corps social, dit Pie XI, ne sera vraiment ordonné que si une véritable unité relie solidement entre eux tous les membres qui le constituent. Or, ce principe d’union se trouve ; — et pour chaque profession, dans la production des biens ou la prestation des services que vise l’activité combinée des patrons et des ouvriers qui la constituent ; — et pour l’ensemble des professions, dans le bien commun auquel elles doivent, toutes et chacune pour sa part, tendre par la coordination de leurs efforts… » Encycl. Quadragesimo anno.

De tels groupements sont bien qualifiés pour imposer aux transactions commerciales 1’ « estimation commune » du prix normal des denrées. Toutefois, dans la fixation de ce prix, l’autorité de la corporation devra s’efforcer de tenir compte du bien général de la société tout autant que des intérêts de la corporation elle-même. Il pourrait y avoir, en effet, un égoïsme collectif plus dangereux que l’égoïsme individuel, précisément parce qu’il est plus puissant. Aussi Pie XI demande que « l’activité collective s’oriente toujours vers.le bien commun de la société. » L’élément moral doit ici intervenir, avec toute la force que peuvent lui donner, au point de vue naturel, la notion de la solidarité humaine, au point de vue surnaturel, les liens de charité qui doivent unir tous les membres du corps mystique de Jésus-Christ. 630

C’est la raison pour laquelle Pie XI insiste (le mot est dans l’encyclique) sur ce point que « l’homme est libre, non seulement de créer de pareilles sociétés d’ordre et de droit privé (associations corporatives), mais encore (comme dit Léon XIII) de leur donner les statuts et les règlements qui paraissent les plus appropriés au but poursuivi. » Pie X, en ce sens, avait recommandé les associations corporatives catholiques. Encycl. Singulari quadam. Voir ici Hérésie, t. vi, col. 2238. La morale catholique, plus encore que le sentiment de la solidarité, rappelle avec efficacité que tous, dans la société, doivent être « pénétrés qu’il y a une suprématie du producteur et du travailleur, qui augmente les richesses d’un pays, sur le commerçant qui rend sans doute le service utile de les faire circuler, mais ne les accroît pas : qu’il y a faute morale à abuser des nécessités d’autrui ; que la seule poursuite du gain sans rapport avec le travail fourni ou le risque couru est un acte condamnable ; qu’une fortune, parfois colossale, faite en quelques années est normalement suspecte ; … qu’il y a des lois morales à observer quand on réunit des hommes et qu’on utilise leur labeur… Que. dans une société donc, tous soient pénétrés de ces idées, ou tout au moins que l’opinion publique en impose quasi le respect, sinon la parfaite observation, quel secours apporté à la faiblesse humaine et quel point d’appui solide pour les bonnes volontés ! » P. Six, art. cité, col. 806. Ajoutons que cet élément moral ne doit pas intervenir à sens unique ; l’intérêt des travailleurs et des producteurs n’est pas le seul en jeu ; en temps de crise surtout, l’intérêt des consommateurs appelle, lui aussi, le secours bienveillant d’une morale impartiale. Une répartition équitable s’impose des avantages comme des sacrifices.

c) Le prix conventionnel (prix convenu).

Le prix conventionnel ou prix convenu est celui que détermine la libre volonté du vendeur et de l’acheteur. On a vu plus haut que certains objets taxés peuvent être revendus à un prix conventionnel plus élevé, quand ni la justice commutative, ni la justice sociale ne sont lésées. Mais une marchandise, ne comportant ni prix légal, ni prix courant, peut être objet de transaction commerciale à un prix purement conventionnel, à condition qu’il n’y ait ni fraude, ni crainte, ni contrainte. Le prix convenu est ici juste, puisqu’il résulte d’une libre convention passée entre les deux parties et qu’en dehors de cette convention il n’existe aucun moyen de le déterminer. C’est le cas de l’achat et de la vente des œuvres d’art, des pierres précieuses de grosseur extraordinaire, des manuscrits anciens, des autographes, des plantes et animaux exotiques dont le commerce est rare ou inexistant. C’est encore le cas des meubles ou des livres achetés d’occasion, ou bien des objets dont la valeur est contestable (p. ex., les tableaux d’authenticité douteuse), auquel cas chaque partie consent à courir un risque.

Une question morale se pose pour certaines choses dont le prix courant existe normalement : peut-on, en conscience, les vendre à un prix convenu supérieur ? — Deux opinions se trouvent ici en présence. Saint Thomas enseigne, semble-t-il, qu’il n’est pas permis de s'écarter du prix courant normal. S'écarter de ce prix, c’est ouvrir la porte aux injustices que les mercantis retors ou plus habiles ne manqueront pat d’infliger aux acheteurs et vendeurs moins avisés. La sécurité et l’honnêteté des transactions commerciales en pâtiraient. Mais d’autres moralistes estiment qu’un prix résultant d’une convention librement passée est légitime : acheteur et vendeur sont d’accord et, quoi qu’il en soit du prix courant normal, ils estiment l’un et l’autre qu'à leur point de vue, dans le cas concret de leur transaction, il y a équivalence entre la valeur de l’objet et le prix convenu. N’est-ce pas là d’ailleurs la façon d’agir de très honnêtes gens et les lois civiles semblent l’approuver, puisqu’elles sanctionnent les ventes conclues à n’importe quel prix, tant que l’une ou l’autre partie n’a pas subi une perte énorme. Ainsi le code civil français, art. 1674, ne prévoit la rescision d’une vente d’immeuble que dans le cas où le vendeur a été lésé de plus des sept douzièmes. Voir plus loin. L’opposition des deux opinions est d’ailleurs dans les mots plus que dans la doctrine elle-même, car saint Thomas estime qu’un prix de vente surfait de 50 % est encore légalement valable. Sum. theot., IIa-IIæ, q. lxxvii, a. 1, ad l um.

Des raisons valables ne manquent pas pour justifier, en certains cas, la vente d’un objet à un prix supérieur à son prix courant. Les auteurs énumèrent : 1. Une perte probable ou un manque à gagner : le vendeur veut bien céder une marchandise dont il escomptait plus tard tirer un prix supérieur ; ou bien il accorde à l’acheteur un délai plus long pour s’acquitter de sa dette : il est donc juste que le vendeur, ayant dûment averti l’acheteur, s’indemnise à ce double chef ; 2. fin attachement particulier du vendeur à l’objet dont il se sépare : ce sacrifice appelle une compensation ; 3° Enfin, selon une opinion très probable, l’utilité ou la convenance particulière que présente l’objet vendu pour l’acheteur : un jardin attenant à ma maison a plus de prix pour moi qu’un jardin situé plus loin. Mais, à l’inverse, les mêmes principes valent pour justifier l’achat d’un objet en dessous de son prix courant : 1. S’il s’agit de rendre service au vendeur qui a besoin d’argent (il est entendu qu’on n’abuse pas de ce besoin) ; 2. Si le vendeur, ayant trop de marchandise, cherche des acquéreurs bénévoles : pour en trouver, il devra baisser ses prix ; 3. Enfin, si l’acheteur acquitte sa dette avant le temps normal requis ; (c’est l’escompte accordé aux paiements comptant). De toutes ces opérations, la fraude et le mensonge doivent être exclus.

Applications pratiques.

De ces principes sur le juste prix, nous pouvons déduire un certain nombre de règles pratiques :

1. En ce qui concerne les objets dont l’usage est courant et surtout les denrées de consommation nécessaires à la vie, la justice exige que le vendeur s’en tienne au prix légal ou au prix convenu. Si les trusts ou les monopoles imposent des prix excessifs, voir plus loin, l’injustice retombe, non sur les revendeurs qui subissent la volonté du plus fort, mais sur les dirigeants de ces trusts et monopoles.

2. Pour les objets dont la vente n’est pas courante, et dont il est difficile à l’opinion commune d’estimer le prix, on peut s’en tenir au prix convenu, à condition que la convention passée ne soit pas le résultat de la fraude, de la violence ou de la crainte.

3. Le vendeur ne commet en soi aucune injustice. s’il vend au-dessous du prix courant pour attirer la clientèle. Voir COMMERCE, t. iii, col. 405. Sans doute, il lèse indirectement les autres marchands en détournant d’eux les acheteurs. Mais il ne fait, en somme, qu’user de son droit. Il serait coupable d’injustice si le prix inférieur n'était en réalité qu’un trompe-1'œU pour masquer on défaut de qualité ou une insuffisance de poids dans la marchandise. Injustice à l'égard des autres marchands ; niais pas nécessairement à l'égard du client, si la diminution de prix correspond exactement à la diminution de qualité ou de poids.

4. Les commerçants qui soupçonnent ou même savent positivement, de science privée et personnelle. qu’une hausse ou une baisse doit se produire prochai

nt’ment sur le prix des denrées, peuvent, en conscience, acheter ou vendre au prix courant afin de profiter de la hausse ou d’éviter les pertes consécutives à la naisse. C’est l’art du vrai commerçant d’avoir « le flair » nécessaire pour acheter ou vendre au bon moment.

5. Il en va tout autrement des personnages officiels qui, par leur fonction même, sont en mesure de connaître avec certitude des éventualités de ce genre. Il est difficile de dire s’ils peuvent licitement profiter, pour leur avantage personnel, d’une science qui leur permet de réaliser de beaux bénéfices. Mais ils pécheraient certainement contre la justice commutative et sociale s’ils ne découvraient pas, quand il le faudrait, la vérité qu’ils connaissent, dans l’espoir de tirer, par ce silence indu, pour eux et pour leurs amis des profits considérables, dont les citoyens ignorants et la nation elle-même sont les victimes. C’est « le coup de bourse » classique. Il y aurait là, dans l’exercice d’une fonction officielle, un abus que la morale ne peut tolérer.

6. La vente d’un objet rare et précieux, dont vendeur et acheteur ignorent la valeur réelle, doit être tenue pour juste dès lors qu’elle est effectuée au prix convenu par les deux parties. Si l’acheteur seul connaît la valeur de l’objet, ce n’est peut-être pas de sa part une injustice stricte d’acheter cet objet au prix inférieur qu’en demande le vendeur, mais il serait plus honnête d’offrir une transaction équitable.

Sur le juste prix, voir V. Fallon, Principes d’économie sociale, Bruges, 1924, p. 80-205 ; P. Goulet, L’Église et le problème économique, Paris, 1920, p. 129-155 ; A. Valensin, Traité de Droit naturel, t. ii, p. 115-154 ; A. Muller, Notes d’économie politique, t. i, Paris, 1928, p. 15-20 ; Tanquerey, Synopsis theol. moralis, t. iii, n. 727 sq.

III. Devoirs de l’acheteur et du vendeur.

L’acheteur.

L’acheteur a deux devoirs principaux : payer le prix dû, enlever l’objet acheté.

1. Payer le prix dû.

L’acheteur doit s’acquitter de sa dette, dans le lieu et dans le temps déterminés par la convention passée avec le vendeur. Si rien n’est déterminé, il doit payer au moment de la livraison de la marchandise. Cf. Code civil français, art. 1650-1651.

Art. 1652 : L’acheteur doit l’intérêt du prix de la vente jusqu’au paiement du capital dans les trois cas suivants : — S’il a été ainsi convenu lors de la vente ; — Si la chose vendue et livrée produit des fruits ou autres revenus ; — Si l’acheteur a été sommé de payer. — Dans ce dernier cas, l’intérêt ne court que depuis la sommation.

Art. 1653 : Si l’acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d’être troublé par une action, soit hypothécaire, soit en revendication, il peut suspendre le paiement du prix jusqu’à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble, si mieux n’aime celui-ci donner caution, ou à moins qu’il n’ait été stipulé que, nonobstant le trouble, l’acheteur paiera.

Art. 1654 : Si l’acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander résolution de la vente.

2. Prendre livraison de l’objet acheté.

C’est un devoir pour l’acheteur d’enlever l’objet acheté au temps fixé par la convention et, si rien n’a été prévu, aussitôt que possible, afin d’éviter tout ennui ou dommage au vendeur. En cas de négligence de l’acheteur, le vendeur n’est plus obligé de lui conserver l’objet acheté ; s’il le fait, il est en droit de se faire rembourser les dépenses occasionnées par ce retard.

Le code civil français prévoit la résolution de la vente des denrées et des effets mobiliers non enlevés au terme convenu :

Art. 1657 : En matière de vente de denrées et effets mobiliers, la résolution de la vente aura lieu de plein

droit et sans sommation, au profit du vendeur, après l’expiration du terme convenu pour le retirement.

Devoirs du vendeur.

Ces devoirs concernent la qualité de l’objet vendu, la manifestation de ses défauts, la livraison de la marchandise, l’assurance donnée à l’acheteur d’une paisible possession.

1. Qualité de l’objet.

L’objet doit répondre aux conditions de la vente : sa qualité doit être celle sur laquelle on s’est entendu. Si le vendeur ne peut livrer l’objet même de la transaction, il doit fournir à l’acheteur quelque chose d’équivalent, susceptible de lui apporter la même utilité. Les falsifications notables rendraient le marché illicite et nul : les exigences de la justice commutative doivent être respectées.

2. Manifestation des défauts.

Le vendeur doit faire connaître à l’acheteur les défauts substantiels qui rendraient l’objet impropre aux fins que s’en propose l’acheteur. Personne, en effet, n’entend faire un achat inutile. Quant aux défauts accidentels qui ne rendent pas absolument impropre à sa destination la marchandise achetée, le vendeur est tenu de les faire connaître, s’il est interrogé à leur sujet. Ne répondant pas et cherchant même à tromper l’acheteur, il manque positivement à la loyauté et à la justice. S’il n’est pas interrogé, il n’a pas d’obligation stricte de faire connaître les défauts de l’objet vendu, surtout si ces défauts sont apparents. Il agira honnêtement en faisant un prix inférieur. L’acheteur, en ce cas, doit se rendre compte lui-même et interroger.

Le code civil français a précisé en ces termes la doctrine générale (art. 1641-1649).

Art. 1641 : Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise on n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

Art. 1642 : Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même.

Art. 1643 : Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.

Art. 1645 : Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

Art. 1646 : Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu’à la restitution du prix et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente.

3. Livraison de la chose vendue.

Le vendeur doit remettre à l’acheteur l’objet vendu, c’est-à-dire lui en transférer la propriété et la possession. L’objet doit être livré dans l’état où il était au moment de la vente, avec tous les fruits qu’il a pu produire depuis le moment de la convention. Si la convention a déterminé le temps, le lieu et la manière de la livraison, il faut s’y conformer ; sinon, se conformer aux coutumes reçues ou aux prescriptions de la loi civile. De plus, le vendeur doit veiller à la conservation de la chose vendue jusqu’au moment où l’acheteur doit en prendre livraison : tout dommage survenu par sa faute l’oblige à réparation.

Le code civil français règle minutieusement ce devoir dans ses articles 1604-1624. Voici les principaux articles.

Art. 1609 : La délivrance doit se faire au lieu où était, au temps de la vente, la chose qui en fait l’objet, s’il n’en a été autrement convenu.

Art. 1610 : Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l’acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur.

Art. 1611 : Dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s’il résulte un pré

judice pour l’acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.

Art. 1614 : La chose doit être délivrée en l’état où elle se trouve au moment de la vente. — Depuis ce jour, tous les fruits appartiennent à l’acquéreur.

Art. 1624 : La question de savoir sur lequel, du vendeur ou de l’acquéreur, doit tomber la perte ou la détérioration de la chose vendue avant la livraison, est jugée d’après les règles prescrites au titre des Contrais ou des Obligations conventionnelles en général.

4. Assurance à l’acheteur d’une possession pacifique.

— Il faut que l’acquéreur soit garanti par le vendeur contre toute éviction possible en raison de servitudes ou d’hypothèques grevant la chose vendue. Le droit civil français prescrit cette garantie et en précise les conséquences juridiques dans les articles 1626-1640.

Art. 1626 : Quoique lors de la vente il n’ait été fait aucune spéculation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de l’objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente.

Art. 1630 : Lorsque la garantie a été promise, ou qu’il n’a rien été stipulé à ce sujet, si l’acquéreur est évincé, il a droit de demander contre le vendeur,
1° La restitution du prix ; —
2° Celle des fruits, lorsqu’il est obligé de les rendre au propriétaire qui l’évincé ; —
3° Les frais faits sur la demande en garantie de l’acheteur, et ceux faits par le demandeur originaire ; —
4° Enfin les dommages et intérêts, ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat.

Art. 1633 : Si la chose vendue se trouve avoir augmenté de prix à l’époque de l’éviction, indépendamment même du fait de l’acquéreur, le vendeur est tenu de lui payer ce qu’elle vaut au-dessus du prix de la vente.

Art. 1633 : Si le vendeur a vendu de mauvaise foi le fonds d’autrui, il sera obligé de rembourser à l’acquéreur toutes les dépenses, même voluptuaires ou d’agrément, que celui-ci aura faites au fonds.

Art. 1636 : Si l’acquéreur n’est évincé que d’une partie de la chose et qu’elle soit de telle conséquence, relativement au tout, que l’acquéreur n’eût point acheté sans la partie dont il a été évincé, il peut faire résilier la vente…

Droits du vendeur prévus par le code civil français.

Le code civil prévoit que « le contrat de vente peut être résolu par l’exercice de la faculté de rachat et par la vileté du prix.

1. Faculté de rachat (art. 165 !)- 1673). —

L’essentiel est indiqué dans les art. 1659 et 1673.

Art. 1650 : La faculté de rachat ou de réméré est un pacte par lequel le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal, h i< remboursement dont il est parlé à l’art. 1673.

Art. 1073 : Le vendeur qui use du pacte de rachat, doit rembourser non seulement le prix principal, mais encore

les frais et loyaux coûts de la vente, les réparations nécessaires, et celles qui ont augmenté la valeur du fonds, jusqu’à concurrence de cette augmentation. Il ne peut entrer en possession qu’après avoir salislait à toutes ces obligations.

— Lorsque le vendeur rentre dans son héritage par l’effet dll pacte de rachat, il le reprend exempt de toutes les charges et hypothèques dont l’acquéreur l’aurait grevé ; il est tenu d’exécuter les baux Taits sans fraude par l’acquéreur.

2. Rescision de la venle pour vileté de prix (art. 16741685).

L’essentiel des dispositions est contenu dans les deux articles suivants :

Art. 107 1 : Si le Vendeur B été lésé de plus des sept douzièmes dans le prix d’un immeuble, il a le droit de demander la rescision de la vente, quand même il aurait expressément renoncé dans le cont rai a la faculté de demander cet te rescision, et qu’il aurait déclaré donner la plus-value t t. 1081 : Dans le cas où l’action en rescision est admise) mer. ht. i iii’.ol. CA1 nui.. l’acquéreur a le choix ou de rendre la chose en retirant le prix qu’il en a payé ou de garder le fonds en payant le supplément du juste prix, sous la déduction du dixième du prix total.

IV. Quelques espèces particulières de vente.

Ventes par les courtiers ou représentants.


Ceux-ci, comme leur nom l’indique, ne sont que des mandataires recevant un salaire proportionnel au chiffre d’affaires réalisé par eux pour le compte de leurs employeurs. Ils n’ont donc pas, en principe, le droit de prendre un bénéfice supplémentaire, quelle que soit la façon de s’adjuger ce supplément.

Ventes aux enchères.

La caractéristique de ces ventes est que le « juste prix » des objets mis à l’encan résulte des surenchères des amateurs. Le procédé est moralement admissible, à condition toutefois que la fraude en soit absente. Il y a fraude, lorsque des amateurs simulés et dispersés dans la foule font des surenchères exagérées pour entraîner et obliger les amateurs véritables à payer un prix hors de proportion avec la valeur de l’objet convoité.

Monopoles.

Les monopoles sont ou légaux ou privés. —

1. Le monopole légal est le privilège exclusif concédé par l’autorité publique de vendre certaines marchandises : monopole du tabac, des allumettes, etc. Contenu en certaines limites, un tel monopole est légitime : il permet à l’État de se procurer des ressources utiles. Même si le prix de vente est ici supérieur à la valeur réelle de la marchandise, il ne constitue pas une injustice si les taxes ainsi recouvrées sont employées pour le bien général de la nation. On suppose d’ailleurs que la taxation n’a rien d’exorbitant.

2. Le monopole privé existe quand un groupement d’hommes d’affaires s’efforce d’accaparer un genre de commerce, afin d’imposer leurs conditions de production, d’exploitation, de vente, et empêcher ainsi la concurrence. Voir Accaparement, t. i, col. 292. Les trusts, cartels, rings ou corners rentrent dans cette catégorie du monopole. À la rigueur de tels monopoles seraient légitimes si leur seul but était de s’opposer aux excès d’une concurrence effrénée et de pourvoir normalement aux besoins de la communauté en n’employant que des moyens honnêtes et respectueux des droits de tous. Mais souvent ces monopoles ne s’imposent que par l’injustice des procédés, la corruption des hommes politiques et leur but est bien plutôt de tuer toute concurrence pour imposer arbitrairement des prix excessifs. La morale ne saurait alors que les condamner. Cf. Martin Saint-Léon, Cartels et Trusts, Paris 1903, p. 134-205 passim.

Ventes soumises à une réglementation canonique.

1. Aliénation de biens ecclésiastiques.

Le mot « aliénation » est celui dont le droit canonique se sert de préférence. Voir canons 1530, 1531, 1533, 1534. L’étude sur l’aliénation canonique a été publiée dans le Dict. de droit canonique, t. i, voir surtout col. 406-414. Nous nous contentons d’y renvoyer.

2. Ventes et achats effectués par des clercs. —

Le commerce est interdit aux clercs. Voir Clercs et Commerce, t. iii, col. 232, 405-408, où il est incidemment traité de la question controversée entre canonistes touchant la licéité des achats d’actions de sociétés industrielles et commerciales. Il semble bien qu’aujourd’hui surtout la réponse doive être résolument affirmative, lorsqu’il s’agit simplement de se garantir, par des placements judicieux, contre les dangers d’une dépréciation de la monnaie. Les arbitrages ne sauraient non plus être interdits. Le Code canonique est d’ailleurs fort peu explicite sur ce dernier point (can. 138).

Can. 1.(8 : f’.leriei… aleatoriis Midis, peeunia exposita, m acent… 2 631

VENTURA (JOACHIM)

2636

Can. 142 : Prohibentur clerici per se vel per alios negotiationem aut mercatiiram exerccre sive in propriam sive in aliorum utilitateni.

A. Michel.