Dictionnaire des proverbes (Quitard)/écuelle

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écuelle. — Manger à la même écuelle.

Au temps de la chevalerie, dit Legrand d’Aussy, la galanterie avait imaginé de placer à table les convives par couple, homme et femme. La politesse et l’habileté des maîtres ou maîtresses de maison consistaient à savoir bien assortir les couples qui n’avaient qu’une assiette commune ; ce qui s’appelait manger à la même écuelle, expression qui, détournée du sens propre au figuré, s’employa pour marquer accointance, comme le prouvent ces deux vers d’un fabliau où il est parlé d’un oncle qui vivait scandaleusement avec sa nièce :

Et si sachiez que chascun jour
En une escuelle menjoient.

(Manuscr. de la Bibl. du Roi, n. 7588.)

Les dévots eux-mêmes suivaient l’usage de manger à la même écuelle par esprit d’humilité. Une vie de sainte Élisabeth en vers, célébrant la charité de cette sainte envers les pauvres, dit :

Mengier les fit en s’escuelle.

(Manuscr. de la Bibl. du Roi, n. 7218.)

Au reste, cet usage, bon ou mauvais, ajoute Legrand d’Aussy, s’est conservé longtemps en France, et même il a subsisté en partie à la cour jusque sous Louis XIV. « Le roi, dit la duchesse de Montpensier dans ses Mémoires (t. iv, p. 17), ne mettait pas la main à un plat qu’il ne demandât si on en voulait, et ordonnait de manger avec lui. Pour moi qui ai été nourrie dans un grand respect, cela m’étonnait, et j’ai été longtemps à m’accoutumer à en user ainsi. Quand j’ai vu que les autres le faisaient, et que la reine me dit un jour que le roi n’aimait pas les cérémonies et qu’il voulait qu’on mangeât à son plat, alors je le fis. »

Qui s’attend à l’écuelle d’autrui, dîne souvent par cœur.

C’est-à-dire qu’on est souvent désappointé lorsqu’on attend quelque chose des autres, comme celui qui croyant trouver à bien dîner chez quelqu’un, y dîne fort mal ou n’y dîne pas.

Il a bien plu dans son écuelle.

C’est-à-dire, il a beaucoup hérité.