Dictionnaire des proverbes (Quitard)/sire

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sire.C’est un pauvre sire.

Le mot sire, que depuis le xvie siècle on applique, en France, au roi seul, comme un titre de souveraineté, s’appliquait, avant cette époque, aux gentilshommes et aux simples particuliers. Mais il faut observer que s’il se trouvait accompagné de la particule de et placé devant un nom propre, ainsi que dans ces exemples, sire de Coucy, sire de Beaujeu, il devenait le signe d’une très haute noblesse, tandis que s’il n’était accolé qu’à un nom de baptême, ainsi que dans ces autres exemples, sire Jean, sire Guillaume, il prenait une acception péjorative ; et c’est précisément sur cette différence qu’a été fondée l’expression c’est un pauvre sire, pour dire un homme sans considération, sans capacité.

Les étymologistes ne sont pas d’accord sur l’origine du mot sire, ceux-ci le font venir du latin herus, abrégé en her par les Allemands ; ceux-là du latin senior par l’ablatif seniore contracté en siore ; les uns le dérivent de l’hébreu sar, personnage distingué, les autres du vieux terme gaulois seir, le soleil. Ducange le tire de ser, employé dans la basse latinité comme synonyme de dominus, maître, et reproduit dans le composé italien messer, dont l’homologue français est messire. Cependant l’opinion la plus accréditée en fait un dérivé du grec ϰύριος, seigneur, qui fut affecté aux souverains du Bas-Empire. Notez qu’on écrivit primitivement cyre, et que ce fut pour éviter l’équivoque du mot ainsi orthographié avec cyre, Cyrus, qu’on changea le c en s. Estienne Pasquier et d’autres attestent ce fait signalé par M. Ch. Nodier comme un monument curieux des mutations que le caprice de l’orthographe peut faire subir à un mot.