Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Antinoé

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ANTINOÉ, ou ANTINOPOLIS (A), ville d’Égypte, sur le Nil (B), bâtie ou réparée par l’empereur Hadrien en l’honneur d’Antinoüs. Elle était la capitale de la Thébaïde, si nous en croyons un auteur du IVe. siècle [a]. Cet auteur ajoute qu’elle était si peuplée, que l’on y voyait de son temps jusqu’à douze monastères de femmes [b]. Ammien Marcellin la donne pour l’une des trois plus célèbres villes de la Thébaïde [c]. Il n’est pas vrai que Léon d’Afrique ait dit qu’elle s’appelle Anthios (C). Voyez la remarque (D) de l’article Antinous : vous y trouverez d’autres choses touchant cette ville.

  1. Palladius, Histor. Lausiac, cap. XLVII, apud Tristan, Comment. Hist., tome I, pag. 541.
  2. Palladius, Histor. Lausiac., cap. CXXXVII, apud eundem, ibid.
  3. Amm. Marcellin., lib. XXII, cap. XVI.

(A) ANTINOPOLIS. ] M. Baudrand dit deux fois dans la même page qu’Étienne de Byzance la nomme ainsi. Je n’ai point trouvé cela, ni dans l’édition de Pinedo, ni dans celle de Berkelius : j’ai trouvé seulement dans l’une et dans l’autre que la ville Ἀντινόεια, Antinoia, s’appelait aussi Adrianopolis. M. Moréri n’a pas pris garde que ce dernier nom, et Adrianople, ne sont pas deux noms différens : il les donne comme tels.

(B) Ville d’Égypte, sur le Nil. ] Dion Cassius marque positivement qu’Hadrien la fit bâtir au même lieu où Antinoüs était mort : Ὡς καὶ πόλιν ἐν τῷ χωρίῳ ἐν ᾧ τοῦτ᾽ ἔπαθε, συνοικίσαι καὶ ὀνομάσαι ἀπ᾽ αὐτοῦ. Ut urbem in eo loco in quo ille obiisset, restitutam ex eo nominari voluerit [1]. Il venait de dire que, selon la relation d’Hadrien, ce malheureux était tombé dans le Nil : puis donc qu’Hadrien voulait que le monde crût qu’Antinoüs s’était noyé dans cette rivière, il faut que la ville qu’il consacra à ce favori ait été sur le bord du Nil, et proche du lieu où il disait que ce jeune homme avait péri. Pausanias marque expressément que cette ville était sur le Nil : Ἐπὶ τῷ Νείλῳ Αἰγυπτίων ἐςὶν ἐπώνυμος Ἀντινόου [2]. In Ægypto apud Nilum urbs de Antinoi nomine est appellata. Concluez de là que les ruines qui se voient à dix lieues du Nil, selon Moréri, ne sont point celles d’Antinopolis. Concluez la même chose encore plus hardiment contre ces ruines de ville que M. Baudrand a placées à quarante-neuf lieues du Nil.

(C) Léon d’Afrique n’a point dit qu’elle s’appelle Anthios. ] C’est encore une méprise de M. Baudrand. Je ne crois pas me tromper, si j’en attribue la cause à la liberté qu’on se donne de paraphraser les auteurs dont on se sert. Considérez bien ces paroles d’Ortelius, Anthios hodiè dici ex Joannis Leonis Africæ Descriptione deprehenditur : comparez-les avec celles-ci de M. Baudrand : Nunc in ruinis jacet Anthios dicta, teste Leone Africano ; vous verrez que si ce dernier écrivain s’était scrupuleusement renfermé dans les bornes du précédent, il aurait donné beaucoup moins de prise. Ortelius pourrait chicaner le terrain, en appliquant le mieux qu’il pourrait ce qu’a dit Léon d’Afrique ; mais M. Baudrand ne peut pas recourir aux applications, ni aux conjectures : il faut qu’il montre que ce Léon a dit positivement, que l’ancienne ville Antinoé se nomme aujourd’hui Anthios. Or c’est ce qu’on ne montrera jamais ; car Léon d’Afrique ne dit autre chose, sinon qu’Anthius a été bâtie par les Romains, sur le Nil, du côté d’Asie, et qu’on y voit encore plusieurs inscriptions latines sur des marbres [3]. Il en parle comme d’une très-belle ville, que l’industrie et la bonne humeur des habitans rendent très-considérable ; tant s’en faut qu’on puisse le citer comme un témoin qui dépose qu’elle est tout-à-fait ruinée. M. Baudrand ajoute qu’elle est à quarante-neuf lieues du Nil, vers l’orient. Elle n’est donc point l’Anthios de Léon d’Afrique. M. Moréri ôte trente-neuf lieues à cette distance : On voit ses ruines, dit-il, à dix lieues du Nil. Nous avons prouvé dans la remarque précédente, qu’Antinopolis était sur ce fleuve.

  1. Xiphil., in Adriano.
  2. Pausan., lib. VIII, pag. 244.
  3. Leon. African. Descript. Africæ, lib. VIII, folio. 360.

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