Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Martellius
MARTELLIUS, ou plutôt MARTELLUS (Hugolin), évêque de Glandèves, était de Florence, et fut un de ces Italiens qui firent fortune au deçà des monts par le moyen de Catherine de Médicis. On n’a guère de particularités touchant sa vie [a], et je n’ai pu consulter le Gallia Christiana de M. de Sainte-Marthe. Il publia quelques livres de littérature (A), et quelques traités concernant la réformation du calendrier (B). Le sieur Naudé, qui connaissait tant les auteurs, ignorait la prélature de celui-ci, et le tenait pour un fort pauvre écrivain [b].
(A) Il publia quelques livres de littérature. ] Je vois dans la Bibliothéque de M. Konig un Hugolinus Martellinus, qui publia un Commentaire sur la IIe. ode du IVe. livre d’Horace ; et je suis persuadé qu’il fallait dire Martellus ou Martellius, et non Martellinus. Le catalogue de la bibliothéque de M. de Thou marque à la page 324 de la IIe partie : Hugolini Martellii Episcopi Gland. Epistola in qui Calpurnii et Nemesiani loci aliquot illustrantur. Cet ouvrage fut imprimé à Florence chez les Juntes, l’an 1590. Naudé observe qu’un certain Hugolin Martellius a fait un traité entier sur une épigramme d’Ansone, et l’a tellement embrouillée par ses explications, qu’il est impossible d’y rien comprendre. S’il avait su qu’il parlait d’un évêque de Glandèves, il l’eût qualifié un peu plus honorablement, et ne l’eût pas censuré avec un mépris si visible. Rapportons un peu au long ses paroles ; car elles expliquent un passage obscur, et donnent d’autre côté un peu de prise à la censure. [1] Ausonii.... Musa.... Demosthenis eâ de re judicium, perbrevi sanè hoc epigrammate [2] sed multis tamen obstructo difficultatibus comprehensum, nobis offert :
Discere si cupias, doctis quàm multa licebit
Quæ nôsti, meditando velis inolescere menti,
Quæ didicisti, haud dum, discendo absumere tendas.
Sic enim illud exhibent typographi
recentiores, cùm tamen antè septuaginta
annos Aldinus codex, et Gryphius
posteà liquido haberent in primo
versiculo Doctus, que vox malè intellecta
fucum procul dubio fecit disertissimo
Eliæ Vineto, cujus operâ
atque industriâ, Ausonii monumenta
emendatiora explicatioraque habemus.
Hic enim (uti probum virum,
atque ingenuum decebat) sincerè fatetur,
se mentem hujus epigrammatis
assequi non valuisse ; quam paullò
post Hugolinus quidam Martellius,
opera pretium esse duxit integro volumine
declarare : sed satiùs illi profectò
fuisset micare digitis, aut cucurbitas
pingere, cùm huic potiùs tam
spissum (velut sepia) atramentum
infuderit, ut illud vix eluere possit
quidquid est aquarum in Hippocrene,
et Pegaso ; adeò singula quæque verba
malè torquendo, quo sex in illis
gradus ad expeditè discendum inveniret,
omnem fermè epigrammatis
sensum corrupit, qui sic (meo quidem
judicio) restituendus est, ut nihil
aliud sibi velit Ausonius, nisi modum
edocere, quo docti homines multa
loqui, et dicere possint ex tempore,
qui quidem modus in hoc tantùm consistere
videtur, ut, quæ jam optimè
nôrunt, velint ea inolescere menti,
il est, firmiter inserere, ac imaginationi
et ingenio commendare ; quemadmodùm
eodem sensu dixit Agellius :
natura induit nobis inolevitque :
quæ verò nondùm benè didicerent,
frequenter dicendo et repetendo
adsumere, et altiùs memoriæ infigere
conentur ; sicque totum epigramma
lego, et interpungo :
Discere si cupias doctus quàm multa, licebit.
Quæ nôsti, meditando velis inolescere menti :
Quæ didicisti haud dum, dicendo adsumere tendas [3].
La méprise de Naudé consiste en ceci.
Il dit qu’il y avait soixante et dix ans
que l’édition d’Aldus avait mis doctus
au premier vers : or il écrivait environ l’an 1633. Il prétendait donc que
l’édition d’Aldus était de l’an 1563,
plus ou moins. C’était s’abuser ; car
cette édition est de l’an 1517. Si l’on
veut donner un autre sens à ses expressions,
on prétendra qu’il veut
dire que les éditions modernes, qui
ont mis doctis, sont postérieures de
soixante et dix ans à celle d’Aldus ;
mais outre qu’il se serait mal exprimé,
il faudrait encore qu’il voulût
parler de certaines éditions faites l’an
1587. Or personne ne marque aucune
édition d’Ausone de cette année-là,
et il est sûr que celles de l’an 1588 ne
méritent point d’être plutôt mises en
ligne de compte que les précédentes,
(B) ... Et quelques traités concernant la réformation du calendrier. ] M. Thomassin Mazaugues, conseiller au parlement d’Aix, a bien voulu se donner la peine de m’instruire des particularités suivantes [4] : « Hugolin Martelli était Florentin : il vint en France avec Catherine de Médicis il fut fait évêque de Glandèves le 10 janvier 1572. Voici les livres imprimés que j’ai de lui : De anni integrâ in integrum restitutione, dédié au cardinal Sirlet, et imprimé in-4°., à Florence en 1578, divisé en trente-quatre petits articles, et ne contenant en tout que quarante-trois pages. Il fit réimprimer cet ouvrage à Lyon en 1582, in-8°., augmenté, et y ajouta le traité suivant : Sacrorum temporum assertio, qu’il dédia à Louis Martelli son frère, chanoine de Florence. En 1583 il fit aussi imprimer à Lyon, in-8°., le livre suivant : La chiave del Calendario Gregoriano, qu’il dédia à Ottavio Bandini, référendaire, abbé de Casanuova, qui est un ouvrage de 362 pages et le plus considérable. Voilà, monsieur, ce que je sais de Martelli. Il n’y a pas de monumens considérables de lui dans son église : il a fait quelques fondations pieuses, et voilà tout. Sa famille n’a eu aucune suite dans cette province. Nous avons eu un médecin fameux de ce nom, qui a écrit, et qui est mort depuis quinze ans ; mais il n’était pas de la même famille : ce médecin était très-savant, parlant toujours de Fabus de la médecine, et il écrivait là-dessus. »
- ↑ Naudæus, Syntagm. de Studio liberali, pag. m. 84.
- ↑ C’est l’épigramme CXLI d’Ausone.
- ↑ Selon la correction de M. Grævius, in editione Tollii, il faut au premier, cupis à doctis, et au dernier discendo adsumere.
- ↑ Extrait d’une lettre écrite à Aix en Provence, le 2 d’août 1700.