Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Mausolée

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MAUSOLÉE. C’est ainsi qu’on nomma premièrement le magnifique tombeau qu’Artémise fit bâtir à Mausole son mari, et qui a été compté entre les sept merveilles du monde. Voyez-en la description dans Pline [a], et dans le Supplément de Moréri (A). Ensuite, on a donné le même nom à tous les tombeaux somptueux (B). C’est ainsi que l’on nomma le superbe monument qu’Auguste fit faire pendant son sixième consulat, entre le chemin de Flaminius et le Tibre, pour y être enterré avec les siens [b]. Strabon nous en a laissé la description au livre cinquième. C’est aussi le nom que Florus donne [c] au tombeau des rois d’Égypte dans lequel Cléopâtre s’enferma, et se fit mourir. Les dictionnaires latins de MM. Lloyd et Hofman fournissent plusieurs autorités qui montrent que le mot mausolée a été donné par les Romains aux sépulcres dont la structure était magnifique ; mais il y a deux vers de Martial (C), qu’on ne doit pas joindre avec ces autorités. La langue française a adopté ce mot-là au même sens que les Romains. Nous appelons mausolées les tombeaux des rois de France. On a même étendu ce mot sur ces représentations de tombeau qui font partie d’une pompe funèbre, et qui ne durent qu’autant que les funérailles. M. Furetière dit avec raison qu’on les nomme mausolées ; mais il ajoute une chose bien incertaine (D).

  1. Plin., lib. XXXVI, cap. V.
  2. Sueton., in Augusto, cap. CI.
  3. Lib. IV. cap. XI.

(A) Dans le Supplément de Moréri. ] On y a copié M. Chevreau, sans le confronter avec Pline. Si on l’avait confronté avec son original, on aurait vu que les Faces du Mausolée n’étaient pas un peu plus larges que son étendue du midi au septentrion [1], mais au contraire un peu moins larges. Patet ab austro, dit Pline, et septentrione sexagenus ternos pedes, brevius à frontibus [2]. Le père Hardouin [3] a dit que Dalechamp et Léon Allazzi n’ont vu goutte sur ce chapitre.

(B) On a donné le même nom à tous les tombeaux somptueux. ] Μέγεθος δὲ οὕτω δή τι ἔςι μέγας καὶ ἐς κατασκευὴν περίϐλεπτος τὴν πᾶσαν, ὥςε καὶ Ῥωμαῖοι μεγάλως δή τι αὐτὸν θαυμάζοντες τὰ παρά σϕισιν ἐπιϕανῆ μνήματα Μαυσωλεῖα ὀνομάζουσιν. Ea fuit operis magnitudo et ornamentorum magnificentia ut Romani valdè illud mirantes magnificentissima quæque apud se monumenta Mausolea appellârint [4].

(C) Deux vers de Martial. ] On se trompe visiblement lorsqu’on veut que ces paroles,

Aere nec vacuo pendentia Mausolea,
Laudibus immodicis Cares in astra ferant [5],


prouvent que par mausolée les auteurs latins entendaient en général un magnifique tombeau ; car il ne s’agit là que du mausolée primitif.

(D) Furetière.... ajoute une chose bien incertaine. ] Il dit qu’on a appelé aussi mausolée la châsse d’un saint [* 1]. J’en doute ; car encore que M. du Cange lui ait appris que, dans les auteurs de la basse latinité, mausoleum signifie feretrum Sancti alicujus, et que mausoleare se dit de l’enterrement, il ne s’ensuit pas que mausolée ait eu cet usage en français, et, en tout cas, il faudrait en donner des preuves.

  1. * « Ces châsses, dit Leduchat, sont de deux sortes : les unes ont la forme d’un coffre, et ce ne sont pas celles-là qu’on peut appeler Mausolées ; mais d’autres, surmontées de plus ou de moins de pyramides, et qui ont l’air d’un château. Ce sont proprement celles-ci que Furetière dit qu’on appelle Mausolées. » Joly ajoute que le Dictionnaire de Trévoux, de 1743, a conservé cette signification. J’ajouterai qu’elle ne l’a pas été dans l’édition de 1771.
  1. Chevr., Histoire du Monde, tom. IV, p. 36, édition de Hollande, 1687.
  2. Plin., lib. XXXVI, cap. V.
  3. Harduin., in Plin., ibid.
  4. Pausanias, lib. VIII, pag. 250.
  5. Mart. Spect., init.

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