Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Lampe merveilleuse

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Henri Plon (p. 398).

Lampe merveilleuse. Il y avait à Paris du temps de saint Louis un rabbin fameux, nommé Jéchiel, grand faiseur de prodiges, et si habile à fasciner les yeux par les illusions de la magie ou de la physique que les juifs le regardaient comme un de leurs saints, et les Parisiens comme un sorcier. La nuit, quand tout le monde était couché, il travaillait à la clarté d’une lampe merveilleuse, qui répandait dans sa chambre une lumière aussi pure que celle du jour. Il n’y mettait point d’huile ; elle éclairait continuellement, sans jamais s’éteindre et sans avoir besoin d’aucun aliment. On disait que le diable entretenait cette lampe et venait passer la nuit avec Jéchiel. Aussi tous les passants heurtaient à sa porte pour l’interrompre. Quand des seigneurs ou d’honnêtes gens frappaient, la lampe jetait une lueur éclatante, et le rabbin allait ouvrir ; mais toutes les fois que des importuns faisaient du bruit pour le troubler dans son travail, la lampe pâlissait ; le rabbin, averti, donnait un coup de marteau sur un grand clou fiché au milieu de la chambre ; aussitôt la terre s’entr’ouvrait et engloutissait les mauvais plaisants[1].

Les miracles de la lampe inextinguible étonnaient tout Paris. Saint Louis, en ayant entendu parler, fit venir Jéchiel afin de le voir ; il fut content, disent les juifs, de la science étonnante de ce rabbin, qui peut-être avait découvert quelque gaz.

  1. Sauvai, Antiquités de Paris, etc.