Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Loup

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Henri Plon (p. 414).

Loup. Chez les anciens Germains et chez les Scandinaves, le diable ou le mauvais principe était représenté par un loup énorme et béant.


C’est Lock. À Quimper, en Bretagne, les habitants mettent dans leurs champs un trépied ou un couteau fourchu, pour garantir le bétail des loups et autres bêtes féroces[1]. Pline dit que si un loup aperçoit un homme avant qu’il en soit vu, cet homme deviendra enroué et perdra la voix ; fable qui est restée en vigueur dans toute l’Italie. En Espagne, on parle souvent des sorciers qui vont faire des courses à cheval sur des loups, le dos tourné vers la tête de la bête, parce qu’ils ne sauraient aller autrement, à cause de la rapidité. Ils font cent lieues par heure ; car ces loups sont des démons. La queue de ces loups est roide comme un bâton, et il y a au bout une chandelle qui éclaire la route.

Il n’y a pas un homme à la campagne qui ne vous assure que les moutons devinent à l’odorat la présence du loup ; qu’un troupeau ne franchira jamais le lieu où l’on aura enterré quelque portion des entrailles d’un loup ; qu’un violon monté avec des cordes tirées des intestins d’un loup mettrait en fuite tout le bercail. Des hommes instruits et sans préjugés ont vérifié toutes ces croyances et en ont reconnu l’absurdité. Kirker a répété à ce sujet des expériences démonstratives ; il a même poussé l’épreuve jusqu’à suspendre un cœur de loup au cou d’un mouton, et le pacifique animal n’en a pas moins brouté l’herbe[2]. Voy. Oraison du loup.

Un journal anglais de l’Inde dit qu’il a été publié un étrange document constatant qu’en un très-court espace de temps il a été dévoré 600 enfants par les loups dans le Penjaub (royaume de Lahore). Il y a vingt ans, près de 1, 000 enfants ont été dévorés de la même manière dans le voisinage d’Agra. On retrouve les vêtements de ces pauvres petites victimes dans les antres où se tiennent ces animaux. Les misérables qui font le métier de recueillir les habillements ou parures des victimes ont eu l’habileté d’accréditer parmi le peuple le bruit que tout village où l’on tue un loup doit être infailliblement ruiné ; de là cette superstitieuse vénération pour ces animaux féroces. Quand on en prend, on s’empresse de les relâcher en se contentant de leur attacher une sonnette au cou.

  1. Voyage au Finistère, t. III, p. 35.
  2. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t. I, p. 9.