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Ellénore/1/45

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Ellénore (1844)
Michel Lévy frères, libraires éditeurs (p. 301-310).


XLV


Ellénore ne s’était pas trompée sur le projet de M. de Savernon. Le prince de P… eut beaucoup de peine à l’en détourner. Il alléguait la nécessité de chercher à sauver sa fortune et celle de toute sa famille des mains des républicains ; mais le prince lui montra une liste des émigrés, nouvellement publiée à Paris. Il lui fit voir que ses noms et prénoms y étaient tracés en toutes lettres, qu’il y avait peine de mort pour tout émigré qui tenterait de rentrer en France, et qu’il fallait autant prendre un pistolet et se brûler la cervelle, que d’aller se livrer ainsi au couperet de la guillotine. Albert, convaincu de cette vérité, avait renoncé à son projet insensé.

Cependant, il devenait chaque jour plus difficile d’expliquer le retard que mettait madame Mansley à répondre à la proposition de M. Ham…, et on commençait à parler de M. de Savernon à propos des raisons qui empêchaient Ellénore de faire un aussi bon mariage.

Elle avait bien fait promettre à Albert d’aller se fixer à Edimbourg, à cette seule condition, elle s’était Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/311 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/312 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/313 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/314 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/315 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/316 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/317 Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/318

Madame Talma voulut connaître cet homme pour lequel elle avait, disait-elle en riant, tant intrigué auprès des puissances républicaines. Ellenore le lui présenta ; madame Talma le trouva beau, aimable, fort amoureux, et pourtant elle se dit que ces dons précieux ne suffisaient pas pour captiver l’âme forte et poétique de madame Mansley.

— Elle se laisse aimer, pensait-elle, entraînée par un sentiment généreux, elle a cru devoir s’immoler à ce qu’elle inspire. Elle s’imagine être récompensée par le bonheur qu’elle donne ; pourvu que cette illusion dure autant que sa vie, pourvu qu’elle ne rencontre jamais celui qui la lui ferait perdre !

En ce moment, la porte du salon s’ouvrit, et l’on vit entrer le célèbre Adolphe de Rheinfeld.


FIN DU PREMIER VOLUME.


Clichy. — Impr de Maurice Loignon et Cie, rue du Bac-d’Asnieres, 12.