Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Reveillon

La bibliothèque libre.
◄  Retouché
Réunion  ►

REVEILLON (subst. masc.) Être réveillé indique un mouvement suggéré, qui fait sortir du sommeil ou du repos.

Ceux qui regardent des ouvrages de peinture ne sont, au moins la plupart, que trop enclins à une sorte d’indifférence qui ressemble assez á l’assoupissement. La pratique de la peinture fournit quelques moyens, pour ainsi dire méchaniques, de réveiller les assoupis ; mais ces moyens ne doivent étre employés qu’à l’appui de ceux qui appartiennent plus à la partie de l’esprit. Les. moyens que donne la patrie du métier, sont ce qu’on appelle reveillons de lumière, reveillons de couleur, réveillons de touche.

Le réveillons de lumière sont autorisés par certains offers ou accidens, sur lesquels je me fuis étendu à l’article accident. Il y faut joindre cependant un effet plus ordinaire que produit l’éclat qui rejaillit des corps qui ont une certaine dureté & qui sont polis, comme les métaux. Ces éclats ou brillans n’ont lieu que dans un seul point d’un plan, parce qu’en chaque plan, il n’y a qu’un seul point en effet qui reçoive la lumière la plus vive. Le peintre est souvent assez embarrassé pour représenter cet éclat, parce que le blanc pur qui est la dernière ressourcc de l’artiste, est bien loin d’approcher de l’éclat réfléchi de la lumière. À cet égard, l’impossibilité est excusée, & l’intention artistement exprimée rappelle au moins l’idée de ce que l’art ne sauroit imiter.

Les reveillons de couleur sont des effets de couleurs brillantes, piquantes, qu’autorisent des dispositions bien ménagées dans le clairobscur. Ces dispositions s’opèrent principalement par les accidens dont les nuages sont susceptibles, par des corps interpoles ou dont l’interposition supposée laure échapper la lumière, qui semble alors éclairer plus vivement la couleur des objets sur lesquels elle tombe & se répand. On sent aisément que le choix de la couleur des objets qui est le plus souvent à la disposition de l’article, surtout relativement aux draperies & à certains accessoires, entre dans les moyens de placer les réveillons de couleur.

Enfin les réveillons de touche sont de légères exagérations qu’on excuse par l’effet qu’elles produisent, en attachant ou excitant l’attention sur des objets intéressans. C’est ainsi que, dans le récit d’un fait, une expression hardie qui passe les limites de la plus extrême justesse, non-seulement trouve grace, mais plaît en réveillant l’attention de ceux qui écoutent. Les réveillons, de quelque nature qu’ils soient, servent donc à appeller le regard & à le ramener s’il s’égare dans l’endroit du tableau où l’intérêt de l’article demande qu’il se fixe davantage,

La peinture, physiquement muette & immobile, employe les moyens qu’elle a, pour suppléer à ceux qui lui manquent, comme le muet qui, ne pouvant appeller, fait des mouvemens & des espèces de cris pour qu’on vienne à lui.

Il faut cependant observer que les moyens de réveiller doivent être ménagés par le peintre avec art & employés avec discrétion. Un homme assoupi ne sait pas mauvais gré à celui qui l’éveille, mais il ne veut pas qu’on le tourmente. D’ailleurs les réveillons en peinture montrent une sorte d’artifice, ou tout au moins un art médité, & l’art le plus parfait est celui de cacher l’art. (Article de M. Watelet.)

Les Réveillons sont souvent formés par des traits de lumière artistement jettés sur des masses qui en sont privées ; ils leur rendent le piquant eue risquoit de leur ôter cette privation. On peut les comparer aux dissonances dans la musique qui doivent toujours : être. sauvées : il faut de même que les réveillons semblent près de rompre l’accord du tableau, & que cependant ils ne le rampent jamais. Ils détruisent la monotonie, & doivent toujours respecter l’harmonie.