Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Tome 2/Pratique E

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EAU-FORTE, (fubfl :. comp. fera. ) Acîde lécefTaire au graveur pour donner de la profonleiir aux travaux dont il a chargé le vernis qui ■ ouvre ion cuivre. Il y a deux fortes àeauxàrfw’q "’ iervent à cet ufage. Quelquefois l’arifte préféra abfolument l’une à l’autre ; quelque ois il employé fuccefTivement toutes les deux lour faire mordie le même ouvrage. L’une fe lomme eau-forte de départ^ parce que les orféres s’en fervent pour faire le départ des métaux , ’eft-à-dire pour les féparer l’un de i’autre. L’auircfe nomme eau-forte à couler, parce qu’elle ji’a d’effet qu’autant qu’on l’a fait couler , ou hue du moins on la balance fur la planche. ’■^L-yc-^ l’article Gravure à Veau-forte. ÉBARBER. (v. aa. ) Enlever, à l’aide de l’inf-’. rument nommé éharboir, lesrudefTes qui reffent îu bord des tailles faites au. burin oa à la pointe fkhe.

ÊBA.RBOIR. Inflrument d’un très-bon acier • : l’ulage des graveurs fur cuivre. Il leur fert à [terlei re(^iî ;-^£.f , c’eft- à-dire la forte de barbe lu de morfil qui refte au bord des tailles après iu’ellesont é :é ouvertes par le burin ou la pointe îéche. Là lame de Vébarboir eft quarrée , elle îoit être aiguifée bien tranchante & fans qu’il . frefle aucun morfil. On appelle plus ordinaire- [lent grattoir Yébarboir dont la lame eft trian- ■ulaire : mais cette différence dans la forme n’en ’hange pas l’ufage & dépend du choix de l’arifte.

Cet inftrument fous fa forme quarrée ou trianulaire , devient quelque fois grattoir : c’efl-à-

ire qu’il fert à gratter & enlever les travaux
'ue l’artifle fe repeni d’avoir faits & qji’il veut

nlever : le tranchant eft tenu parallèlement à j planche quand on veut ébarber , & diagonaement quand on veut gratter.

ÉBAUCHE, (fubfl. fem.) C’efl : alnfi qu’on ppelle le premier travail dont on couvre le fond jr lequel on veut peindre. Onfa :tauffi des ébau-Am des ouvrages de fculpture & de gravure, oyez à cet égard les a.tt. fadpture , gravure. Chaque artifte peut avo ;r une manière partiulière à^ébaucher. II ne fera donc patlé ici de ette opération qa’en feveur des eommsncans , u des perfonnes qui , fans profeffer l’art , veuent fe faire une idée de fes procédés. Gomme la peinture à l’huile fe fait ordinairement fur des toiles imprimées , ou fur des mûrs dont le fond eff brun, on commence aéiaucherefi traçant le contour des figures & des draperies avec un crayon fait de quelque pierre blanche & tendre, qui puiffe s’effacer aifement avec un linge , ou avec une éponge un peu humeflee d’eau. On recherche enfuite les mêmes contours avec une teinte qui tienne des couleurs propres àchaquechofe : par exemple , p’iir les carnations on fe fert de laque , où l’on a mis un peu di^ terre d’ombre , ou de qaelqu’airtre couleur qù ferve à l’union, qui féche promptement & qui ne foie pas malfaifante. On recherche particulièrement les contours des draperies avec une de leurs teintes ; enfuite on en remplit le vuide avec les autres couleurs pour faire les jours Ik les ombres , & enfin on fait le fond du tableau : c’efV ce qu’on appelle proprement ébaucher. Il faut laiffer fécher cette ébauche , après quoi on peut finir avec les mêmes teintes ou plus claires ou plus fortes. On commence par le haut du tableau , de ia gauche à la droite , comme lorfqu’on écrit. Si la toile eft fort grande , on la tient roulée -, ou bien i’oii s’échafaude fi elle efl montée fur chaffis. On peut ici faire une obfervacion qui regarde l’emploi de certaines couleurs à l’huile : c’eft qu’on ébauche avec des couieurs communes , pour ménager celles qui font d’un trop grand prix. Par exemple , quand on veut finir ure draperie avec de la laque fine , on en fait V ébauche avec de la laque commune. De même une draperie qu’on veut finir avec le plus bel outremer , débauche avec du plus commun. Enfin , au lieu d’outre-mer dans la première leinte d’ombres , & même dans les demi-teintes , on peut fefervir, pour ébaucher , de charbon de fâule, qui efl : un peu bleuâtre -, ou de noir d’os , & l’on termine avec l’outre-mer : mais cette pratique rend les teintes moins fraîches.

Cette ébauche du tatleau ne fert que pour couvrir la toile avec les couleurs , & pour en faire voir l’effet ; mais il faut qu’eile foit faite proprement , & tâcher que toutes les couleurs foienc auflî bien placées qu’il eft poffible. Pour cet effet , il faut que le deflin foit bien arrêté avant que de commencer le tableau : car fi , en finiflant , on met du brun fur du clair , ou du rouge fur du bleu, ou des couleurs fort différentes Pune fur l’autre, les dernières couleurs perdront toujours de leur éclat en fe féchant. Lcrfqu’on veut faire de ces changemens , il faut repeindre à plu-S 4 «ï u

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fleurs fois , pour donner pbs de corps à la couleur qui doit refter.

On a coutume çHéhauchcr légèrement , fans donner beaucoup d’épaiffeur aux couleurs, ni de valeur aux teintes, & biffant fur toute l’ei-aatAe un ton foible & gris. V ébauche ^ ainû eonçue, n’eft guère qu’un lavis de couleurs , fur lequel le peindre peut aifement revenir. (, Eltfmens de p’.lr.’jtre pratuiiie par de PlUi , refondus par Jamtert.

EBAUCHOÎR, (fubft. m3fc. ) Inftrument < !es fculpceurs , dont ils fe fervent pour travailler la rené ou la cire. Ce font des motceaux de bois ou d’ivoire de fept à huit pouces de long , s’arr nd’ffant à l’un des bouts , & s’applatiffint de l’autre.

On nomme auiïi ébauchoir une efpéce de cifeau à manche , donr fe fervt nt les fculpreuri en ftuc ou en plâ.re, pour ébaucher leurs ouvrages. ECACHER, (v. aa.) Froîffer par un mouvement de preflîon. Lorfque le graveur fur cuivre veut affaiblir quelques tailles en paffant deffus le brun’ffoir, il ne doit pas appuyer trop fort, parce qu’il les écacheroit. Il faut reprendre & rentrer au burin les tailles écac Jes pour leur rendre la Tie.

ËCHAFAUD , ( fubft. mafc. ) Les peintres travaillent quelque fois fur des ichafauds , furtout quand ils exécutent des ouvrages à frefque. Il feroit ici fort déplacé d’entrer dans aucun dé- i ta 1 fur la manière dont ils doivent être conftruiiSj puifque cette conflruclion doit être fubordonnée aux circonftances. Ce qu’on peut feulement confeiller aux artif^es , c’eft de veiller eux-mêmes à la folidité de l’échaffaudage qu’ils commandent. Ils ne doivent pas partager la témtrité des maçons , qui aiment quelquefois mieux rifquer leur vie que de fe donner tous les foin-- qui feroient capables de l’affurer. Les peintres qui travaillent à de grands tableaux , ont dani leur attelier un échafaud permanent , mais mobile , & porté fur des rruleties. Quelque fois’Ij lîippléent à ?éch :faud ^■^t une échtlle, à laquelle s’adapte f/lidemcnt un banc qu’on peut appliquer également aux différens échellons, fuivant la hauteur à laquelle on a befoin de travailler.

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retirs à l’eau for e. Ils le îor^x eu>f-mémes en caiiant le bout d une pointe & la pafTant obliquement, en ia tenant ternie & fans ia tourr.cr furia pierre à l’huiie , ce qui forme un bil’eau d’une torme ovale. Les écliopes fervent à graver de gros traits.

Les échopfs des graveurs en creux, en relief Se en cachets, font des efpcces de burins dont le ventre efl : appiati au lieu d’être tranchant. ÊCHENO ou EcHENAD . ( fubft. mafc. ) C’eft dans la fonderie en grand, un balTin pratiqué au-dcffus de l’enterrage. Les principaux jets de la figure à couler v abouriffenr. On y laitpaffer le me a ! liqu de aa br.ir du fourneau, afin qu’il ie comm’S^ quj aux j -rs , t,Ui tUx-mênies le di !tribuent dans ton e la figure.

ECHGPE j (Ittbft. fem. ) Infiniment des gra-EGOUT , ( fubft. mafc. ) Les égouts , dans ’a fonderie , font des tuyaux de cire qu’on a :ache à la figure , Se qui , étant renfermes dan-, le moule dépotée , & fondus en même temps que les cires delà figure, laiffent dans le moule, des canaux par iel’queis s’ccoulent ces cires. EMAIL. ( £leu d’émail. ) On l’appelle quelquefo s fmalte. bleue. C’eif une couleur dm g-and Uiàgepourie. emailieurs. Voi ;i Ja façon de la préparer , iuivant Neri, dans for ; an de la verrtfrU. Q.l prend quatre livres &$ la friire ou ma-Jère dont on fait l’email, quatre onces de raf-e réduit en poudre, qu^ n’eft autre chofe qu’uiep-eparji.on decobâ-t, & : quarante-huit grains é’./Es ujlcun , ou de cuivre calciné par trois fois : on mêle exactement ces trois matières , on les met a. ; fourneau de verrerie dans un pot verniffe en bianc. Lorfque le mêiaro-e eft bien entré en fonte, iJ faut le verftr dans de i’eau claire pour le bien purifier. On ie remet enfuire tondre de nouveau ; on réitère l’extinction dan- i’eau , & : la fonte, deux ou trois fois on obient de cette façon un très -beau Heu à’tmail.

Kunckel, dans Ces remarques fur Néri , obferve qu’il n’eft guère pollîblede prefcrire êxaclement Ja do’e de fktre qu’on doit employer pour faire ie lieu à^emall. l eft bon de commencer par en l’aire des cpreuve* en périt, fuivant les différentes niances que l’on cherche. Sli’on trouve le bleu top cia r , il faut augmenter petit à petit la dofe du !àfre ; fi a C !intraire il eft trop foncé, ii fau : reme-tre de la fritte de l’émail. C’eft en Itiivanc ainfi certaines proportions, qu’on peu ; produire dan Vtmail , les différentes n :- an ces du bleu. Si, par exemple, on vouIoW un bleu dV/n^ii céladon , ou de couleur d’aigiie-marine, il faudroit renverfcr iea dolés^données ci-deffus, <& l’on prer.diou aiors quatre livres de la fritte d’emai : , deux onces à^œsujîum. , & : feulement qua-ante huit grains de fatre : on mêieroit bien cei troi^ ma leres ; du relie on luivroi- e>aâf ment la méthode précédente pour letr fûn'e i>: leur purificaricn. Il faut bien oblerver qie tou’es ce’ ; opéra : ions font fo’-'t dclica’es, & demandent une a"en "on toute partici/liece t car pour peu qu on ne faffe point attention aux circonftances . il ’e ;-rcduit des effets tous différent de ceux q^u’ou eut cheit E M A

^lier : c’cft ce que Kunckel avoue lui être ariîvé dans l’opération du bleu d’émail céladon que nous venons de donner. Il avjit éprouvé cotte niéihode , qui eli : celle de Néri ; mais comme îclle ne put pas d’abord lui réuffir , il crut que cet auteur s’étoit trompé. Ayant enfuite réitéré

l’opération , & regardé la choie de plus près , il
! découvrit qu’il n’avoit manque la première fûi> , 

(que parce qu’il n’avoit pas bien pris fon temps pour- retirer du fourneau la matière qu’il a^oit laifTée trop long-temps. ( I.e Baron d’HoLBAc , dans Vanchniie- Encyclopédie.

.L’Email efl : d’autant plus pâle qu’il eft : plus fin. lUertà la détrempe tic à freique ; mais on

ne i’en (ert guère à l’huile , parce qu’il noircii , 

à moins qu’il ne Ibic mêlé avec beaucoup de blanc.

ÉMAIL, (fiibfV. mafc. ) Peinture en émail., première partie. L’art d’éraailler iur terre efl ancien. 11 y avoit au temps de Porfenna , roi des Tofcans , des i aies émaillés de diff- :renies figuifes. Cet arc, après avoir été longccraps brut , fit tout-à-coup des progrès fuiprenans à Faenxa & à Caftel-Durante , dans le J>iiche d’LIrbin. Michel-Ai-ge & Raphaël florifToient alors : aiffi lei^Égurcs qu’on remarque fur les vafes qu’on émailluic, l’ont elles infiniment plus frappante,-, par le deflin que par le colnris. Cette elpcce de peinture éroit encore loin de ce tju’elle devoir devenir un jour ; on n’y emptoyo’t que le blanc & le noir, avec quelques tein e.’ ; légère : de carnation au vifiige & à d’autres paities : tels foni le.< émaux qu’on appelle de Limoges. Les pièces qu’on faifoit fous François I. font très-peu de choie , fi on ne les eftime que par la manière donr elles font coloriées. Tous le. ? émaux dont on le {’crvoit , tant fur l’or qi.e fur lecuii’re, étoient clairs & traniparens. On couchoit feulement quelquefois des émaux épais, (’parement &à plat-, comme on ie teroit cncoi’e avijourd’hui , fi l’on fe propofoir de former un relief. Quant à cette peinture dont nous, nous propofons de traiter, qui confifle à exécuter avec des couleurs métalliques , auxquelles on a donné leurs fondans , toutes fottès de fujrts , fur une plaq.ne â’or ou de cuivre qu’on a éniaiike, & qi.el-’ quetois contr’èmailiée , elle étoit entièrement ignorée.

On en attribue rJnven ;ion aux François. L’o-I piriion générale eiY qu’ils ont les p’ entiers exécuté fur l’or . des portraits aufll beaux , aufTi finis ’& audi vivans que s’ils avo :ent é é peints ou à l’huile oii en miniature, ll.s ont même ten’é des fujetï d’hifloire , qui o.nra ; iitoinî cet avantage que l’éclat en eu inaltcrabîe.

^ , L’iilage en fur d’abcrH confacré ai’X bijoux. 5Les bijoutiers en firent des fle’irs & de la mofaïcjue ) où 1 on voyoic des couleurs brillantes , E

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employées contre toute.î les règles de i’grr , capîi-er les yeux par le feu 1 charme de leur èclar. La connoiffance de la manœuvre prod.iifit une forte d’émulation qui, pour être afTez ordinaire ji’cn eft pas moins pré.sieijfe : ce fiit de tirer un meilleur parti des difncultés qu’on avoit fiji-niontc’es, en produifani : des ouvrages plus laifonnablés & plus parfai’s. Quand ii n’y eut plus de mérite à émaiiler purement & fimplemênt on font^ea à peindre en émail ; les jouailliers le firent peintres, d’abord copiftes des ouvrages des autres, enfuite imitateurs de la nature. Ce tut en 1632, qu’un orfèvre de Chàreaudun , qui entendoit très bien l’art d’e.mployjr les emauj : clairs & traniparens , fe mit à chercher l’autre peinture qu’on appellera pli ;s Cî^aèicineric peinture fur lV/7zai7, qu’en émiil ; ^z[ parvinc à trouver dïs cuuieurs qui s’appliquoient fur un fond émaiilé d’unî feule couie ;/r & fe narfon~ doient au feu. Il eut pour difcipie un nommé GrilaLn. Ces deux peintres communifjuererit leur lècret à d’autres artiftev qui le perfedionnercnt , & qui poiifTerent la peinture en émail juiqri’au point où noos !a poff.’dons aujc.’rd nui. L’orTevrede Châteaud.i- ie nommoit y. Toucir. Le premier qui II diflingua entre cesarrifles fut l’orfèvre Du, ie’. qui logeoic aux gserie.-. du ! Louvre. Peu de temp’ : après Dabié, parur iVr^riiere : il étoit d’Orié-ins. Il travaill’iir à iilo’s. Il botna fon talent à cmailier des bit ; le <r des boè’tes de montres. Ce fut lui qui torm.r Ro e t l’ouquer . defiJoi- ;, qui l’emporta fur ips :ir. Jecelfeurs par la beauté des coule.irs qu’il ckiployoit & par la connoiffance qu’l a oi- du deflîn. Vouquer mnuruten l.fy . VieireCuirtl- r, deBlois, lui f.,c céda & peignit deb fl ;;L.rs avec quelque l’uccès.

La durée de la peinture en émail , fon lufire perman. ?nt,îa vivacité de Tes coi !li’i ;rs,la mirent alors en grand crédit. On lui donna fur la pe.nture en miniature une préfcrence qu’elle cûc fans doute confervèe fans le.s connoiffances qu’elle fuppofe, la patience qu’elle exige, les accidens du feu qu’on ne peut prévoir, & la longueur du travail auquel il faut s’a.fujettiri Ces raifons font fi fortes , qu’on peut aflurer fans craindre defe tromper , qu’il y a’.ira toujours un très-petit nombre de peint es en émrùL), que les beaux ouvrages qui fe feront en ce génie, feront toujours très-rares & très-précieux , & que cette peinture fera longtemps encore liir le point de fe perdre ; prirce que la recherche des couleur ^ prenant ■■ n tcmp> infini à ceux qui s’en occupent, & les fuccès ne s’obrenant que par des expériences iouteules & réitérées , on contint’era d’en faiie un fecret. C’efî pour cette raifoa que nous invitons ceux qui aiment les- ans , t^ que ’eur état /i- leur ror ;une ont élevés ai -d-it’.s de toute confidéraion d’ niérêr , de publier ue la eomporir.ion des couleurj propres à la ptin" 494

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ture de l’émtiil & de la porcelaine , ce qu’ils peuvent en connoîcre -, ils fe feront beaucoup d’honneur , & ils rendront un fervice important à la peinture. Les peintres fur Vcmcill ont une peine incroyable à compietter leur palette , & , quand elîe elt à peu près completce , ils craignent toujours qu’un accident ne la dérange, ou que quelques couleurs dont ils ignorent la compofleion , & qu’ils employent avec beaucoup de ■ fuccès , ne viennent à leur manquer. Il m’a paru, par exemple, que des rouges de Mars, qui euflent de l’éclat & : de la fixité , étoient très-rares. Comment un art fe periecuonnera ■ t’il , lorfque les expériences d’un artiiLe ne s’ajouteront point aux expériences d’un autre artifle , & que ^ejui qui entrera dans la carrière , fera obligé de toutin’/enter , & de perd.e à chercher les couleurs , un temps précieux qu’il eût employé à peindre’

On vit immédiatement après Pierre Chartier , plufieurs artiftes fe livrer àla feinrure en émail : on fit des médailles, on exécuta un grand nombre de petits ouvrages , on peignit des portraits. Jean Petiioi & Jacqws EorJifr en apportèrent d’Angleterre de fi parfaits, & de fi parfaitement coloriés, que deux bons peintres en miniature , Louis Hance & Louis de Gucnilrr, tournèrent leurs talens de ce côté. Ce dernier fe livra à la peinture er. émailo.-QQ, tant d’ardeur & d’opiniâtreté , qu’il l’eu : fans doute portée au point de perfeâion qu’elle pouvoir atteindre , s’il eût vécu davantage. Il découvrit cependant plufieurs teintes qui rendi,ent fes carnations plus belles que fes prcdicefleurs ne les avoisnt eues. Que font devenues ces découvertes .’

Mais s’il efl : vrai, dans tous les arts, que la diftance du médiocre au bon efb grande, & que celle du bon à l’excellent efl prefqu’infinie, ce font des vérités firguliérement frappantes dans la peinture en émail. Le degré de perfeélion le plus léger dans le iravail , quelques lignes de plus oa de moins fur le diamètre d’une pièce, conftituent, au-delà d’une certaine gtandeur, des différences prod gieufes.

Pour peu qu’une ’pièce foit grande , il eft prefqu’impoffible de lui conferver cette égalité de fuperficie qui permet feule de jouir égale-KLent de la peinture , de quelque côté que vous 5a regardiez. Les dangers du feu augmentent en raifon des furfaces. M. Rouquet , dont je ne pcnfe pas que qui qi ;e ce foit récufe lejugement dans cette siatiere, prétend même, dans fon ouvrage de l’Etat des arts en Argliterrs , que le projet d’exécuter de grands morceaux enéma//, eft une preuve dicifire de l’ignorance de l’artjfte ; que ce genre de peinture perd de fon mérité , à proportion qu’on s’éloigne de certaines limites : que l’artifte n’a plus , au-delà de ces limites la même liberté d’exécution , &’ que le fpedateur feroit plutôt fatigué qu’araufé par Jes E M A

détails , quand même il arriveroît à l’artifte de réuflir.

JsanPetitot , né à Ccnê. e en 1607, -mourut à Vevay en 16^1, l ! ie donna des peines incroyables peur perfeftionner fonialent. On dit qu’il dut l’es belles couleurs à un habile chymifire avee leqtisl il travailla ; mais on ne nomme pointée chyruifte. Petitot, dit M. Rouquet , n’eût jamais mis dans l( ;s ouvrages une manœuvre fi fine & riféduiianie , s’il avoit opéré avec les fubftances ordinaires. Quelques heureufes découvertes lui fournirent les movens d’exécuter fans peine des cliofe» furprenantes, que, fans le fecours de ces découvertes, les o’ganes les plus parfaits n’auroient jamais pu produire. Telsfcnr les cheveux que Petitot peignoit avec une légèreté dont les inftrumens & les préparations ordinaires nt font nullement capables. S’il eft vrai que Petitot ait eu des moyens mécaniques qui fe foient perdus , quel regret potir ceux qui font nés avec un goût vif pour les arts, & qui fentent tout le prix de la pcrfetlion !

PetiiOt copia plufieurs portraits d’après les plus grands maîtres : on les conferve précieufement. Vandick fe plut h le voir travailler, & ne dédaigna pas quelquefois de retoucher fes ouvrages.

Louis XIV .& fa cour employèrent longtetnps fon pinceau. Il obtint une penficn confidérable-, & un logement aux Galeries qu’il occupa jnfqu’àia révocation de l’édit de Nantes. Ce fut alors qu’il fe retira dans fa patrie. Bordier, l’on beau-frere , auquel il s’étoit aP focié, peig.-oit ks cheveux, le- draperies & les fonds ; Petiiotfe chargeoit toujours des têtes & des mains.

Ils traitèrent non-feulement le portrait, mais encore l’hifto’re Ils vécurent fans jaloufie , & amaîTerent près d’un million qu’ils partagèrent fans procès.

On dit qu’il y a un très-beau morceau d’hiffoire de ces deux artiftes dans la bibliothèque de Genève.

M. Rouquet fait l’éloge d’un peintre Suédois appelle Zinck. Ce peintre a travaillé en Angleterre. Il a fait un grand nombre à ; portraits oii l’on voit Vémail manié avec la plu’ grande facilité , l’indocilité des matières fubJLguée3,& les entraves que l’art de Vémail met au génie-, entièrement brifces. Le peintre de Génère dit de Zinck ce qu’il a dit dePetitor, eu il ipoffcdé des manœuvres & des matières qui lui éioient particulières, & fans lefqueiles fes ouvrages n’auroient jamais eu la liberté de pinceau , la fraîcheur , la vérité , l’em-pârement qi ;i leur donnent l’effet de la nature. Les mots par lefquelsM. Rouqiiet finit l’éloge de Zinck, font remarquables : rt-Il eft bien humiliant, dit-il, P pour la naturç huiualae, que les génies ayent E M A

! ii la jaloufie d’être feuls,«. Zinck n’a point fait j 

d’élèves.

’ Nous avons aujourd’hui quelques hommes ) i habiles dans ia peinture en émail. Tout le monde eonnoît les portraits de ce même M. Rouquec , iqiie nous venons de citer, ceux de M. Liotard, î & les compofuions de M. Durand. Je me fais i honneur d’érre l’ami de ce dernier, qui n’efl ipas moins eftimable par l’honnêteté de fes mœurs

&. la modeftie de fon czraâere , que par l’excel-’lence 

de Ion talent. La poftérité qui fera cas de ’ les ouvrages en émail , recherchera avec le plus i grand empreffemenc les morceaux qu’iJ a execu-’ tés fur la nacre , & qui auront échappé à la barîbarie de nos petits maîtres. Mais je crains bien

que la plupart de ces bas-relief :^ admirables, 

frottés brutalement fur des tables dG marbre qui égratignent & : défigurent les plus beues têtes, les plus beaux contours , ne l’oient effacés & idétruits, lorique les amateurs en connoîtront la jvaleur , qui n’efl : pas ignorée aujourd’hui , lur-Itout des premiers artifte ?. C’eft en lui voyant travailler un crès-beau’ morceau de peinture en ’émail., foit qu’on le confidcre par le lujet , ou Iparle deflin , ou par la compofition , ou par Texjpreflion , ou même par le coloris , que j’ccrivois Ice que je détaillerai de la peinture en émail .^ «près que j’aurai fait connoître en peu de mots le morceau de peinture dont il s agit. C’efl une plaque deflinée à former le fond d’une tabaière d’homme , d’une forme ronde, &r d’une grandeur qui parte un peu l’ordinaire. lOo voir fur le devant un grand Amour de dix-huit ans, droir, Tair triomphant ik farisfait, iappuyéfur fon arc , & montrant du doigt Her-IcUle fjui apprend à filer d’( mrhale. Cet Amour iCemble dire à celui qui le regarde , ces deux Ktrs :

Qui que tu fo’s , tu vois ton maître ; 11 l’eft , le fm , ou le doit être. Oïl

Quand tu fcrois Jupiter même ,

Je te feiois filer auii ?.

Hercule efl : ■ renverfé nonchalamment aux pied d’Omphale , fur !ar]ue)le il attache les re- ■gards les plus tendres & les plus pallionnés. [Omphale eft occupée à lui apprtndre à faire [tourner un fufeau dont elle tient i’extrênijté entre .’es do’grs. La dignité de ion ’iiage , la finefTe de Ton fouris , je ne fais quels ve-iges ’.d’une palTion ma’-ûélce, qui s’échappe impercept ^hlemeni- de tous les traits, font auriinc de lihofcs qu’il fatit voir & qui ne peuvent s’i-crire. lElle eff affue l’ur ia peau du lion de Ném’ s -, un ât le-, p’eds délicats eft pofé fur la tête de l’ani- ,ina’ terrible ; cependant trois péri s Amoi.rs fe [iioiierit de ia mafl’.ie du h^ros qu’il-, ont mile en ’balançoirf ^ ils ont chacun leur caiaélere. Un Ë M Â

i’^t.

payfage forme le fond du tableau. Ce morceau ^ vu à l’œil nnd , fait un grand plaifir : mais regardé à la loupe , c’efl tout autre chofe encore ; cr en eft enchanté.

Seconde partie. C’eft l’orfèvre qui prépare la plaque fur laquelle on le propofe de peindre. Sa grandeur & fon épaifl’eur varient, fuivant l’ufage auquel on la deftine. Si elle doit formet ? un des côtés d’une boëte, il faut que l’or foit à vingt-deux karats au plus : plus fin , il n’auroit ; pas affez de foutien-, moins fin, il feroit fujet à fondre. Il faut que l’alliage en foit moitié blanc & moitié rouge , c’ett-à-dire , moitié argent & moitié cuivre. Vtmail dont on la couvrira erî fera moins expofé à verdir que fi l’alliage étoit tout rouge.

faudra recommander à l’orfévrs de rendra 

fon ur bien pur & bien net , & de le dégagée exactement de paille & de venr. Sans ce,3 précautions , il le fera infailliblement des foufflure^ àl’/«rtiZ, & ces défauts feront fans rcniede. On réfervera autour de la plaque un filet,’ qu’on appelle aulii hordemcnt. Ce filet, ou bordemeiit , reienàr& V émail, Ik rempêchera de tomber, lorfqu’écant appliqué, on le prclTer» avec la fpatule. On lu’ do :-’.nera autant de hauteur qu’on veut donner d’epaiffisur à l’émail^ ainli l’épaifleur de ï’émail variant félon la nature de l’ouvrage , il en eft de même du filet ou bordement. On obfervera feulement que quand la plaque n’eft pas contre - émaillée , il faudra qu’elle foit moins chargée d’émail, parce que l’émail mis au feu , tirant l’or à foi , la p^éce deviendroit convexe.

Lorfque l’email ne doit point couvrir toute à plaque , alors il faut lui pratiquer un logcmenr* Pour cet effet, on trïce fur la plaque le conioui ? du dellin ; on fe fert de la mine de pl.iaia , enfuite du burin. On chaniplece tout l’c'.’iace ren* fe-m.j dans les contouns du deflin , d’ime prof.ndeLir égale à la haateur qo’on eût donnée aii filet , ii la plaque avoir dû être enticr. :menE -émaiilée.

On charïtpléve à l’f'choppe, & cela le plus cgalem »-u qu’on -eut : c’eil une attention nu’u na tau’ pas négliger. S’il y avoir nue éminence* i l’émail fç trouvanr plts foible en ceteodn.it,

l’j verd pourroi ; y peulTer. Lesi :n.'> praii-nif ntaii 

lorid du champïe- er des hachures légères & ferrées , qui fe croifent en ïcus feni ; les autres y fon’ des traits ou éraflures , avec un bout de lirue caffé quarrément.

L’ufagc de ces éraflLire’î ou hachures, e^l de donner prife à Vémail qui , fan^ cette précaution , pourroir fe leparer de la p’a.ire. Si l’un ob ;erroitde iremper la pièce chaniplevée danf de l’eau ï regale , les inégalités que fon aélion formeroiE I fur le charap e-zer , pourroient remplir la vue de I l’artile dans les hachures qu’il y pratique : c’efî

  • une experieuss à faire, Au refte , il eft éyidsfliî 49^

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qu’il ne faudroit pas imnquer de laver la pièce darii plufieurs eaux au forcir de l’eau régale. Quoiqu’il en foir de cette conjeS.ure, lorfque la pièce e !l chainplevée , il faut la dégraifler. Pour la degraiffer, on prendra une poignée de c ?ndreî gravelées , qu’on fera bouillir dans L.ne pin :e d’eau ,ou environ , avec la pièce à dégraifîer Au d :faii : de cendres gravelées , on pourroit fe (ervirde celles du foyer , fi elles étoient de bois neuf : mais les cendres gravelées leur l’ont p éfcrabies.

Au ibrtir de cette îeffive , on lave^•a la pièce dans de l’eau ckire , où l’on aura mis un peu de vinaigre , & au fortir de ce mêlan’^^e d’ca i & de v’"iaigre, on la relavera dans de l’eau, claire. Voilà les précautions qu’il importe de prendre fur l’or ; mais oa le détermine quelque fois , par économie, à émaillcr fur le cuivre rouge : alors on eiT : obligé d’amboutir toutes les pièces . quelle que foie la figure qu’elles ayent, ronde, ovale ou quarrée. Les amboutir dans certe cccafion , c’eft les rendre convexes du cô é à peindre, & : concaves du côté à contre -émailler. Pour cet efFet , il faut avoir un poinçon d’acier , de la même forme qu’elles , avec un bloc de plumb : on pcfe la pièce fi,ir le bloc ; on appuyé delTos le poinçon, & l’on frappe fi ;r la tête du poinçon a. ec un marteau. Il faut frapper a.Tez fort pour que l’emfreinte du loinçon fe falTe d’un fe^l coup. On prend du cuivre en feuilles , de l’épaiffeur d’iin parchemin. Il faut que le morceau qu’on employé , Toit bien égal & bien nettoyé : on pAffe lurla furface le grattoir, devant & après q l’il a reçu l’empr. inte. Ce qu’on fe propofe en l’ambouMiiant , c’eft de lui donner de la force & de l’empêcher de s’envoiler.

Cela tait, il faut fe procurer un émail qui ne (bir m tendre ni dvir ; ti^p tendre , il cil fujCt à fe fendre ; trop dur, on rifque de fondée la plaque. Ouan ; à ia couleur, il faut que la pâte en foit d’un beau bianc de lait. Il eit parfait, s’il réuniï à ces qualités la fineiTe du grain. Le grain de Vémail fera fin , fi l’endroit de fa furface , d’où il fera détaché un éclat , paroi : égal, liffe lc poli.

On prend a le pain à^émail ; on le frappera à petits coups de marteau, en le foutenant de l’extrémité du doigt. On recueillera tous les peti ;s éclats dans une ferviettc qu’on étendra fur Ici : on les mettra dans un mortier d’agate , en quantité proportionnée au befoin qu’on en a. On verferaun peu d’eau dans le mortier : il faut que cette eau foit froide &pure ; lesarcifies préfèrent celle defbntaine à celle de rivière. On aura une molette d’agate j on broyera les morceaux i’e'mail qu’on arrofera à mefLre qu’ils ie pul veilleront : il pe faut jamais les bro^ver à fec. On fe gardera bien de continuer le broycment trop longterapi. S’il eft à propos de ne pas fentir Véma’d grave-Jeux , foit au toucher , Itjii fous lamolette , il ne E M A

faut pas non plus qu’il foit en boue. On le réduî-* ra en moléciiles égales ,- car l’inégalité fuppofant des grains plus petits les uns que lesauireî, les petits ne pnurroi-ent s’a'ranger autour des gros fans y lailfer des vuides inégaux , & fans occafionnerdss vents. On peut , en un bon quart d’heure , broyer autant à’tmail qu’il en fiut pour charger une boë :e.

Il y adesartiiles qui prétendent qu’après avoir mis l’émailen petits éclats, il laur le bien broyer & p’.irger de’fes ordures avci de l’eau fotte^ is laver dins de l’eau claire , & le broyer enfuire dans le mortier. Mais cette précaution e ;l fuperfl. ie quand on fe fert d’un mortier d’agate ; la propreté iuffir.

Lorfque l’éniall efi : broyé., on verfe de l’eau deifus ; on le laiffe dépofer , puis on décante par inclinatfonl’t-au, qui empor[e avec (jlle h teinture que le mortier a pu donner à Vémail 3c.z i’eau. On continue ces lotions, jufqu a ce que l’eau paroiffo pure , ob’ervant à chaque lotion de laiffer dtp ,ier Vémail.

On ramafîera dans une Ibucoupe les différentes eaux des lotions, & on les y laiiTera dépofer. Ce dépôt pourra fervir à contre-émaiiler la pièce, s’il on eft befoin.

Tandij q j’en prépare l’emdi/, ia plaque champlevée trempe dans de l’eau pure & Iroide ; il faut l’y laiiTer au moins du loir au Icndîinain : plus elle y reliera do temps , mieux cela fera. Il faut toujours conferver VéTnzil broyé couvert d’eau , jufqu’à ce qu’on l’employé ; & s’il y en a plus de broyé qu’o.i n’en emoloyera , il tant le tenir couveit d’eau féconde. Pour l’employer , il faut avoir un chevalet de cuivre rouge ou jaune. Ce phevalet n’eft autre chofe qu’une plaque repliée par fss deux bouts, ces replis lui fervent de pieds , & comme ils font de hauteur inégale, la furface du chevalet fera un pian incline. On a une fpatule avec laquelle on prend de Vémail broyé, & on le met fur le chevalet, cù cette portion qu’on en veiit empioye. r s’égoutte d’une partie de fon eau qui s’étend le long des bords du chevalet. L y a des artifles qui fe paiVent de chev.ilet. On reprend peuà-peu avec la fpatuie , Vémail de deflus le chevalet , & on le porte dans le charaplever de la pièce à émailler, en coramençanc par un bout& finiffant par l’autre. On fupplëe à la fpatule avec un cure-dent. Cch s’appelle chargir. Il faut que cette première charge rempliffe tout le champlever , &r foit au niveau de l’or -, car il s’agit ici d’une plaque d’or. iNTous parlerans plus bas de la manière dont il faut charger les plaque- ; de cuivre. Il n’eft pas n^ceffaire que Vémail, pour cette première ciiarge, foit broyé ni .lUlTi fin, ni aufli ibigneufement que pour une féconde. Ceux qui n’ont point de chevaiet , ont un petit godet de fayenca dans lequel ils tranl’vaien : ïémc.il du mortier. Le fond en eit plat ; mais

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maïs ikll tiennent un peu incliné, afin de déterminer l’eau à tomber d’un côté. Lsrfque la pièce eft chargée, on la place Tur l’extrémité des doigts, & on la frappe légèrement par les côtés avec la Ipatule , aiin de don-Iner-lieu , par ces petites fecouffes , aux molécules de Vénail broyé, de ie compoCer entre elles, [de fe ferrer & de s’arranger.

Cela fait, pour retirer l’eau que l’e'/Ti.-ri/ chargé peut encore contenir, on place fur les bords un linge fin, blanc &.fec , & ; on l’ylaifle tant qu’il afpire de l’eau. Il faut avoir l’attention de le changer de côté. Lorfqu’il n’afpire plus rien des bords, on y fait un pli large & plat, qu’on pôle fur le milieu de l’émail à pluûeiirs reprifes : après quoi on prend la Ipatule, & on |l’appjie légèrement fur toute la furi’ace de ^l’émail, fans toutefois le déranger : car s’illarrivoit qu’il fe dérangeât, il taudroit l’humeéler de rechef, alîn qu’il le dUposât convenablement , fans le tirer du champlever. Quand la pièce efl sèche , il faut Texpofer fur des cendres chaudes, afin qu’il n’y rell’e plus aucune humidité. Pour cet effet on a un morceau de taule, percé de plufieurs petits trous , fur lequel on la place. La pièce ell fur ta taule , la taule eft fur la cendre : elle refte en cet état jufqu’à ce qu’elle ne fume plus. On obfervera feulement de la tenir chaude , jufqu’au moment de la paffer au feu ; car fi on l’avoit laiflé refroidir , il faudroit la réchauffer jpeu-à peu à l’entrée du fourneau , fans quoi l’on Expolètoit Vémail à pétiller.

Une précaution a prendre par rapport à la taule percée de trous , c’eft de la faire rougir [& de la battre, avant que de s’en fervir , aria d’en féparer les écailles. Il faut qu’elle ait les (bords relevés , enforte que la pièce que l’on jplace deffus , n’y touchant que par fes extrémités, le contre - émail né s’y attache point. I On a des pinces longues & plattes , qu’on [appelle nléve-moujlaches , dont on fe fert pour [enlever la plaque Se la porter au feu. f On paffe la pièce aii feu dans un fourneau dont ion trouvera la figure & dos coupes d.ins nos planches de l’émailleur , avec celles d’un pain id’émail , du mortier, de la molette , du chevalet^ de ïzfpatule , des taules , du reléve-moujîaches , des mouffles , da la pierre a u/ir , des inven-Itaires , ot des autres outils du peintre fur jrémaii.

I II faudra fe pourvoir de charbon de bois de hêtre, ou, à fon défaut, de charbon de bois de chêne. On commencera par charger le fond de fon fourneau de trois lits de branches. Ces branches auront un bon doigt de groffeur ; on les coupera chacune de la longueur de l’intérieur du fourneau, jufqu’à fon ouverture. On les rangera les unes à côté des autres , de manière j<ju’elles fe touchent. On placera celles du ’

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fesSnd lit dans les endroits oil celles du premier lit fe touchent, &. celles du troificme lit où fe touchent celles du fécond ; enforte que chaque branche du troiflème lit foit portée fur deux branches du’ fécond, & chaque branche du fécond fur deux branches du premier. On choifira des branches fart droites , afia q l’elles ne laifl’ent point de vuide ; un de leurs bouis touchera le fond du fourneau , & l’autre correfpondra à l’ouverture. On a chaifi cette difpofition , afin que s’il arrivoit à une branche de fe confumer trop promptement, on pût lui en fubllicuer facilement une autre.

Cela fait, on a une mouffle de terre ; on la ’ place fur ces lits de charbon , l’ouverture tournée du côté de la bouche du fourneau , & le plus à. ras de cette branche qu’il eft poffibie. La mouiïls placée , il s’agit de garnir fes côtés & fa partie poftérieure, de charbons débranches» Les branches des côtés Ibnt rangées comniacelles des lits ; les ppftérieures Ibnt miles tranlVerfalemenc. Les unes &les autres s’élèvens, jjlcju’à la hauteur de la moufïls. Au de-là de cette hauteur, les branches (on : rangées iongitudinalement èk parallèlement à celles des lits. Il n’y a qu’un lit fur la mouffle. Lorfque ce dernier lit eft fait, on prend du petit charbon de la même efpèce , & l’on en. répand deffus, à la hauteur de quatre pouces. C’eft alors qu’on couvre le fourneau de fon chapiteau , qu’on étend fur le fond de la mouffle trois ou cinq .branches qui remplifTent fon intérieur en partie, & qu’on jette, par la bouche du fourneau, du charbon qu’on a eu le foin de faire allumer tandis qu’on chargeoit le fourneau.

On a une pièce de terre qu’on appelle Vâtre ; on la place fur la mentonnière ; elle s’élève à la hauteur du fond de la mouffle. On a de gro«  charbons de la même efpèce que celui des lits ; on en bouche toute fouverture de la mouffle’, pui« on laiffe le fourneau s’allumer de lui-même. Le fourneau s’allume par l’air qui fe porte au» fentes pratiquées tant au fourneau qu’à fon chapiteau.

Pour s’affurer fi le fourneau eft aflez allumé, on retire l’âtre, afin de découvrir le charbon rangé en lits fous la mouffle ; &. lorfqu’on voie ces lits également ’rouges par-toai, on remet l’âtre Se les charbons qui étoienc deilus, & l’on avive le feu en ibufflant dans la mouffle avec un’foufflet.

Si en ôtant la porte du chapiteau , on s’apperoevoit que le charbon fe fût foutenu élevé, il faudroit le faire defcendre avec laf pincette , & aviver le feu dans la mouffle avec le foufflet, après avoir remis la porte du chapiteau. Quand la couleur de la mouffle paroîtra d’un rouge blanc , iîl fera temps de porter la piècs au feu i c’eft pourquoi on nettoiera ie f^^d ti,a R r r

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la moufFis du charbon qui y eft & qu’on rejettera dans le fourneau parlettoudu chapiteau. On prendra la pièce avec le reléve-moujîache , 8c on la placera Tous la mouffle le plus avant qu’on pourra. Si elle eût été froide, il eût fallu, comme nous en avons déjà averti plus haut, l’exDofer d’abord fur le devant de la mouffle pour l’échauffer , & l’avancer fuccefTivement jufqu’au fond.

Pour introduire la pièce dans la mouffle , il a fallu écarter les charbons qui couvroient fon entrée. Quand la pièce y eft introduite , on le referme avec deux charbons feulement, à travers defquels on regarde ce qui fe pafTe. Si l’on s’apperçoic que la fuCion foit plus forte vers le fond de la mouffle que fur le devant eu les côtés, on retourne la pièce jufqu’à ce tju’on ait rendu la fulion égale par-tout. Il efl : bon de favoir qu’il n’eft pas néceffaire , au premier feu , que la fuflon foit pouffée jufqu’oii elle peut aller, ni que la furface de Vémail fcit bien unie.

On s’apperçoit au premier feu que la pièce doit être retirée, lorfque fa furface, quoique înontagneufe & ondulée , préfente cependant des parties liées, Se une furface unie , quoique Eon plane.

Cela tait, on retire la pièce : on prend la taule fur laquelle elle étoitpofée, & on la bat pour en détacher les écailles : cependant la .pièce refroidit.

On rebroie de l’émail ; mais on le broie le plus fin qii’il eft pollible , fans le mettre en bouillie. L’émail avoir baiffé au premier feu ; on en met donc à la faconde charge un tant loit peu plus que la hauteur du filet ; cet excès doit être de la quantité que le feu ôtera à cette nouvelle charge. On charge la pièce cette féconde fois , comme on l’a chargée la première : on prépare le fourneau comme on l’avoir préparé ; on met au feu de la même manière : mais on y laiffe la pièce en fufion , jiifqu’à ce qu’on lui trouve la furface unie, îiffe & plane. Une attention qu’il faut avoir à tous les feux , c’efl : de balancer fa pièce, Tinclinant de droite à gauche , & de gauche à droite, & de la retourner. Ces mouvemens fervent à compofer entr’elles les parties de î’énjail, & à diflribuer également la chaleur. Si l’on trouvoit à la pièse quelque creux au fortî.r de ce fécond feu , & que le point le plus bas de ce creux defcendît au-deflbus du filet, îl faudroit la recharger légèrement , & la paffer au feu , comme nous venons de le prefcrire.

Voilà ce qu’il faut obferver aux pièces o’or. Quant à celles de cuivre, il faut les charger jufqu’à trois fois , & les paffer autant de fois au feu : on s’épargne par ce rooyen la peine E M A

de les ufer ; l’email en devient même d’an plus beau poli.

Je ne dis rien des pièces d’argent ; car on ne peut abibhiment en émailler des plaques. Cependant tous les auteurs en font mention ; mais je doute qu’aucun d’eux en ait jamais vu. L’argent fe bourlbuffle ; il fait bouribufïler Vémail ; il s’y forme des œillets & des trous. Si l’on réufut , c’eft une fois fur vingt ; encore eft - ce très - imparfaitement , quoiqu’on ait ptij la précaution de donner à la pièce d’argent plus d’une ligne d’épaiffeur , 8c qu’on ait Ibudé «ne feuille d’or par-deffus. Une pareille plaque foutient à peine un premier feu fans accident : que feroit-ce donc fi la peinture exigeoit qu’on lui en donnât deux, trois, quatre, & même cinq ? D’où il s’enfuit qu’on n’eft jamais parvenu à peindre fur des plaques d’argent émaillées, ou que c’efl un fecret abfolumenû perdu. Toutes nos peintures en émail font fur l’or ou fur le cuivre. , .

Une chofe qu’il ne faut point ignorer, c’eft que toute pièce éraaillée en plein du côré qus l’on doit peindre , doit être contre-émaillée de l’autre côté, à moitié moins à’émail, fi elle eft convexe ; fi elle efl : plane, il faut que la quantité’ du contre -email foit la même que celle de’ l’émail. On commence par le contre-émail , & l’on opère comme nous l’avons prefcric ci-deflus. Il faut feulement laiflerau contre- émail un psa d’humidité , fans quoi il en pourroit tomber une partie lorfqu’on viendroit à frapper avec la fpatule les côtés de la plaque , pour faire ranger l’émail à fa furface , comme nous l’avons prefcrit.

Lorfque les pièces ont été Tuffifamment chargées & paffées au feu, on eft obligé de les ufer, fi elles font plattes. On fe ferc pour cela delà pierre à affiler les tranchets des cordonriers ; on l’humefte, on la promène Çur l’émail avec du grais tamifé. Lorfque toutes les ondulations auront été atteintes 8c effacées, on enlèvera les tiaits du fable avec l’eau & la pierre feule. Cela fait , on lavera bien la pièce , en la brofianc à pleine eau. S’il s’y eft formé quelques petits œillets, & qu’ils foient découverts, bouchez-les avec un grain à^émail, & repaffez votre pièce au feu, pour la repolir. S’il paroît de ces œillets ; qui ne (oient pas percés , faites-y un trou avec’ un onglet ou burin ; rempliffez ce trou, de manière que l’émail forme au - deffus un peu d’éminence , Se remettez au feu ; l’éminence venant à s’afroiblir par le feu , la furface de votre plaque fera plane & égale. Troifième partie. Lorfque la pièce ou plaque eft préparée, il s’agit de la peindre. Il fa^tj d’abord fe pourvoir de couleurs. La préparatiotti de ces couleurs eft un fecret. Il faudroit tâchefl d’avoir fes couleurs broyées a.u point qu’elles ne’ E M A

Te ftntîffent pas inégales fous la molette ; de les avoir en poudre , de la couleur qu’elles fiendront après avoir été parfondues, telles cjue, ijuoiqu’ellcs aient été couchées fort épais , elles pe croûtejit point, ne piquent point l’émail, ,3a ne l’enfoncent point, après pluficars feux, lu-deffbus du niveau de la pièce. Les plus dures àfe parfondre partent pour les meilleures : mais li on pouvoir les accorder toutes d’un fondant ,quî en rendît le parfond égal , il faut convenir que l’artifte en travailleroit avec beaucoup plus de facilité : c’efl : là un des points de perfedion jueceux qui s’occupent de la préparation des îouleurs pour Vémail devroient le propolér. Il . ;aut avoir grand loin , fur- tout dans les comnenceniens, de tenir regiftre de leurs qualités, ifin de s’en fervir avec quelque fureté. Il y aura beaucoup à gagner à faire des notes de tous les ■élanges qu’on en aura efiayés. Il faut tenir fes louleurs renfermées dans de petites boë es de )uis qui foient étiquetées & : numérotées. Pour s’affurer des qualités de fes couleurs , )n aura de petites plaques d’émail , qu’on appelle inventaires : on y exécutera au pinceau les traits larges comme des lentilles ; on nunérotera ces traits, & l’on mettra l’inventaire lu feu. Si l’on a obfervé de coucher d’abord la îouleur égale , de la tenir légère, & de repaf- ,er enfuite fur cette première couche de la

ouleur qui faffe des épaiffeurs inégales ; ces

négalités détermineront, au fortir du feu, la oibleile , la force & les nuances. C’eft ainfi que le peintre en émail formera a palette : ainfi la palette d’un émailleur eft , lour ainfi dire , une fuite plus ou moins confilérable d’effais numérotés fur des inventaires , luxquels il a recours , fuivant le befoin. Il efl ivident que plus il a de ces elTais d’une même

ouleur , & de couleurs diverfes , plus il cornilette

fa palette ; & ces effais font ou de

ouleurs pures & primitives , ou de couleurs

éfultantes du mélange de pUifieurs autres. 2elles-ci fe forment pour Vémail , comme pour eut autre genre de peinture -, avec cette difféence que, dans les autres genres de peinture , es teintes relieront telles que l’artifle les aura ippliquées ; au lieu que, dans la peinture en mail , le feu les altérant plus ou moins d’une nfinité de manières différentes, il faut que ’émailleur, en peignant, ait tous ces difFérens effets préfens à la mémoire ; fans cela, il lui irrivera de faire une teinte pour une autre, k quelquefois de ne pouvoir plus recouvrer a teinte qu’il aura faite. Le peintre en émail a , lour ainfi dire , deux palettes ; l’une fous les ’eux ; l’autre dans l’efprit ; & il faut qu’il foit ittentif, à chaque coup de pinceau , aies conbrmer entre elles ; ce qui lui ferait difficile, Se peut-être impolFible , (i , quand il a commencé m ouvrage , il jnterrompoit fon travail pendant j E M A

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quelque temps confidérable. Il ne fe fouviendroit plus de la manière .dont il auroit cr.mrolë les teintes, & il feroit expofé à placera chaque inltant, ou les unes fur les autres, ou les unes à côté des autres, des couleurs qui ne font point faites pourallerenfemble. Qu’on juge par là combien il efc difficile de mettre d’acccrd urt morceau de peinture en émail , pour peu qu’il (ou confidératle. Le mérite de l’accord, dans un morceau , pent être fenti par tout le monde ; mais il n’y a que ceux qui font initiés dans art qui puiflent apprécier tout le mérite d» 1 artilte.

Quand on a fes couleurs, il faut fe procurer de i huile effentielle de lavande , & tâcher de 1 avoir non adultérée ; quand on l’a, on la fait engraiffcr ; pour cet effet, on en met dans un gobelet dont le bord foit large, à la hauteur de deux doigts ; on le couvre d’une gaze en double & on l’expofe au foleil, jufqu’à ce qu’en inclinant le gobelet, on s’apperçoive qu’elle coula avec moins de facilité, & qu’elle n’ait plus que la fluidité naturelle de l’huile d’olive. Le temps qu’il lui faut pour s’engraiffer eft plus ou moins long fuivant la faifon.

On aura un gros pinceau à l’ordinaire qui ne ferve qu’à prendre de cette huile. Pour peindre on en fera faire avec du poil de queues d’hermine ; ce font les meilleurs, en ce qu’ils fe vuident facilement de la couleur & : de l’huile dont ils font chargés quand on a peint. Il faut avoir un morceau de cryftal de roche ou d’agate ; que ce cryilal foit un peu arrondi par les bords ; c’efl là -deffus qu’on broiera & délayera fes couleurs. On les broiera & : délayera jufqu’à ce qu’elles faîTent, fous la molette la même fenfation douce que l’huile elle’ même.

Il faut avoir pour palette un verre ou crydal qu on tient pofé fur un petit papier blanc : on portera les couleurs broyées fur ce morceau de verre on de cryftal ; & le papier blanc fervira à les faire paroître à l’œil telles qu’elles font. Si l’onvouloit faire fervir des couleurs broyées du jour au lendemain, on auroit une boëte de laforme delà palette ; on colleroit un papier fur le haut de la boëre ; car la palette ne portant que fur les bords delaboëte, elle n’empêcheroit point que le couvercle ne le pût mettre ; mais il arrivera que , le lendemain , les couleurs demanderont à être humeflées avec de l’huile nouvelle, celle de la veille s’étant engrailTée par l’évaporation.

On commencera par tracer fon deflîn. Peur cela on fe fervira du rouge de Mars. On donna alors la préférence à cette couleur, parce qu’elle efl légère & qu’elle n’empêche pas les couleurs qu’on applique defîias de produire l’effet qu’on en attend. On deflinera fon morceau en entier ayes le rouge de Mars ; il faut que ce premier R r r ij

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^ trait foit de Ja plus grande cotreftion poUible, ^ parce qu’il n’y a plus à y revenir. Le tcu peut détruire indift’éremment ce que l’artifte a bien ou mal fait ; mais s’il ne détruit pas , il fixe irrévocablement & les défauts & les beautés, îl en eft de cette peinture à- peu -près comme ^e la frefcjue : il n’y en a point qui demande plus de fureté dans le deffinateur ; & en même temps, il n’y a point, en général , de peintres qui foient moins fûr^ de leur deiïïn que les peintres en émail. Il ne feroit pas difficile d’tn trouver la raifon, dans la nature même de la peinture en émail ; ies inconvéniens doivent ributer les grands talents.

L’artifte a, à côté de lui, une poële où il entretient un feu doux & modétc fous la cendre. A mefure qu’il travaille , il met fon ouvrage fur une claque de taule percée de trous, 8c le fait fecher fur cette poële. Si on l’interrompt, il le garantit de l’impreflion de l’air, en le tenant fous un couvercle de carton. Lorfque tout fon deflln eft achevé au rouge d ? Mats, il met fa plaque fur un morceau de taule, & la taule fur un feu doux ; enfuite il colorie fon delfin comme il le juge convenable. Pour cet eftet , il commence par paffer fur l’endroit dont il s’occupe une teinte égals & iégére, puis il fait f :cher. Il pratique enfuite fur cette teinte les ombre- avec la même couleur couchée plus forte ou plus foible, & fait encore lécher. Il accorde ainfi tout fon morceau , obfervant feulement que cette première ébauche Ibit par -tout extrêmement foible de couleur ; alors fon morceau eft en état de recevoir un premier feu.

Pour le lui donner, il faudra d’abord l’expofer fur la taule percée , à un feu doux , dont on augmentera la chaleur à mefure que l’huile s’évaporera. L’huiie à torce de s’évaporer , & la pièc’j à force de s’échauffer, il arrivera à celleci de fe noicir fur toute fa furface : on la tisndia fur le feu jufqu’à ce qu’elle ceffe de fumer. Alors on poitrra l’abandonner fur les charbons ardens de la poële, & i’y laifferjufqu’à ce que le noir foit diflipé & que les couleurs foient revenues dans leur premier état : c’eft le jnoment de la ’paffer au feu.

Pour la paffer au feu , on obfervera de l’entretenir chaude. On chargera le fourneau comme nous l’avons prefcrit plus haut ; c’eft le temps îuéme qu’il mettra à s’allumer, qu’on emploiera à faire fecher la pièce fur la poële. Lorfqu’on aura lieu de préfumer, à la couleur rougeblanche de la moi^iHe , qu’il fera fuffifamment allumé, on placera la pièce & fa taule percée fur la mouiïle , en les avançant le plus qu’on pourra fur le leu. On obfervera, entre les «.harbons qui couvriront fon entrée , ce qui s’y pafleta. 11 ne faut pas manquer l’inftant où ]a,£eiQtu£je fe partond j su le eonneîtra à un E M A

poli qu’on verra prendre à la pièce fur toute fa furface •, c’eft aloro qu’il faudra la retirer. Cette manœuvre eft très -critique ’, elle tient l’artifte dans la plus grande inquiétude. Il n’ignore pas en quel état il a mis fa pièce au feu , ni le tems qu’il a employé à la peindre-, mais ii ne fait point du tout comia.ent il la retirera, & : s’il ne perdra pas en un moment le travail alïïdu de piufieurs femaines. C’eft au feu, c’eft fous la mouffle que fe manifeftent toutes les mauvaifes qualités du charbon , du métal, des couleurs, de l’émail ; les piquures , les foufflures , les fentes même. Un coup de feu efface quelquefois la moitié de la peinture ; & de tour un tableau bien travaillé, bien accordé, bien fini, il ne refte fur le fond que des piedi, des mains , des têtes , des membres épars & ifolés ; le refte du travail s’eft évanoui. AulFi ai -je oui dire à des artiftes que le temps de paffer au feu, quelque court qu’il fût, étoit prefque un temps de fièvre, qui les fatiguoit plus , & nuifoit plus à leur fanté , que des jours entiers d’une occupation continue. Outre les mauvaifes q-ialités du charbon, des couleurs , de Vémail , du métal , auxquelles j’ai fouvent oui attribuer les accidens du feu, on en accufe encore quelquefois la mauvaife température de l’air , & même l’haleine des perlbnnes qui ont approché de la plaque j pendant qu’on la peignoir.

Les artiftes vigilans éloigneront d’eux ceux qui auront mangé de l’ail, & ceux qu’ils foupçonneront être dans les remèdss m.ercuriels. Il faut obferver, dans l’opération de paffer au feu, deux chofes importantes : la première de toarner & de retourner fa pièce , afin qu’elle foit par -tout également échauffée : la féconde eft de ne pas attendre, à ce premier feu, que la peinture ait pris un poli vif , parce qu’on éteint d’autant plus facilement les couleurs, que la couche en elt plus légère , & que les couleurs une fois dégradées , le mal eft fans remède ; car, comme elles font tranfparentes, celles qu’on coucheroit deffus dans la fuite tiendroient toujours -de la foibleffe & des autres défauts de celles qui feroient deffous. Après ce premier feu , il faut difpofer la pièce à en recevoir un fécond. Pour cet effet, il faut la repeindre tout entière , colorier chaquepartie comme il eft naturel qu’elle le foit,& la mettre d’accord auffi vîgoureufement que fi le fécond feu devoit être le dernier qu’elle eût à recevoir. Il eft à propos que la couche des couleurs foit, pour le fécond feu, un peu plus forte & plus carafltérifée qu’elle ne T’ctoit pour le premier. C’eft avant le fécond feu ,. qu’il faut rompre fes couleurs dans les ombres ,. pour les accorder avec les parties environnantes ; m.ais, cela fait , la pièce eft difpofee à recevoir un fécond feu. On- la fera fécier fur la £oëla, E M A

comme- nous l’avons prefcsit pour le premier, & l’on le conduira exactement de la même manière, excepté qu’on ne la retirera que quand elle paroîtra avoir pris, fur toute (a furface, un poli un peu plus vit" que celui qu’on lui vouloit au premier feu. I Après ce fécond feu , on la metira en état U’en recevoir un troificme , en la repeignant comme on l’avoit repeinte avant de lui donner le fécond. Une attention qu’il ne raudra pas

n%ligeï , ce fera de fortifier encore les

icoiiches de couleurs, & ainfi de fuite de feu en feu.

j On pourra porter une pièce jufqu’à cinq feux : [mai^ un plus grand nombre feroit fouffrir les [couleurs ; eniore faut-il en avoir d’excellentes jpour qu’elles puiffent fupporter cinq fois le fourneau.

Le dernier feu eft le moins long. On referme ipour ce feu les couleurs tendres ; c’eft pour [cette raifon qu’il importe à l’artilte de les bien connoître. L’artilte qui connoîtra bien fa palette ménagera plus ou moins de teu à fes couleurs fuivant leurs qualités. S’il a , par exemple, un bleu tenace, il pourra l’employer dès le premier feu : fi au contraire fon rouge eft ’.tendre, il en différera l’application jufqu’aux (derniers feux, & ainfi ties autres couleurs.

Quel genre de peinture ! Combien de d.fficultés

à vaincre ! Combien d’accidens à effuyer ! Voilà icequi faifoit dire à un des premiers peintres en émail, à qui l’on msntroit un endroit toible à le.nucher ". Ce fera pour un autre morceau. On voit, par cette reponlé, combien les couleurs lui étoient connues : l’endroit qu’on reprenoit dans fon ouvrage étoit foible , à la vérité ; mais ilyavoit plus à perdre qu’à gagner à le corriger. S’il arrive aune couleur de difparoître entiére-

! ment, on en fera quitte pour repeindre , pourvu 

I que cet accident n’arrive pas dans les derniers feux. ^ ^

i Si une couleur dure a été couchée avec trop ’ d’huile , Se en trop grande quantité , elle pourra ( former une croûte Ibus laquelle il y aura infail-’ liblement des trous. Dans ee cas, il faut prendre le diamant & grater la croûte , repaffer au feu afin d’unir Se de repolir l’endroit, repeindre (toute la p-’vce, & fur -tout fe modérer dans l’ulage de la couleur fufpefte.

Lo°rfqu’un verd Ce trouvera trop brun , on j- pourra le rehauffer avec un jaune pâle & tendre ;

les autres couleurs ne lé rehaufléront qu’avec
! k blanc , &c. 

Voilà les principales manœuvres dé la^ peinture en émail, e’efl ; à -peu -près tout ce qu’on

peut en écrire ; le relie eft une affaire d’exjj

périence & de génie. Je ne fuis plus étonné que

!" Ï€S artiftes d’un certain ordre fe déterminent 

fi rarement à écrire. Comme ils s’apperçoivent «|ue dans quelques détails qu’ils piîù%nx entrer. ,E M Â

foi

ils n’en diront janiais affez pour ceux que lanature n’a point préparés, ils négligent de prefcrire des règles, générales, communes, grolFières & matérielies , qui pourroient à la vétité fervir à la conlérvation de l’art, mais dont l’obfer-^ vation la plus fcrupuleufe ne feroit pas même un artifte médiocre.

Voici des obfervations qui pourront fetvir à ceux qui auront le courage de s’occuper de la peinture fur l’émail, Se à ceux qui travailleronc fur la porcelaine. Ce font des notions élémentaires qui auroient acquis plus d’utilité , fi nous avions pu les multiplier & en former un tour. Mais il faut efpérer qne quelqu’homme ennemi du myftère, tk bien inftruit de tous les fecretsde lapeiuture en em(iz7,reaifiera dans un traité complet , ce que nous ne faifons qu’ébaucher ici. Ceux qui connoiffent l’état oil font les chofes aujourd’hui, apprécieront les peines que nouS’ nous femmes données , en profiteront ^ nous fau^ ront gré du peu que nous révélons de l’art , & trouveront nos erreurs , & même notre ignorance’ très-pardonnables.

i°. Toutes les quinteffences peuvent fervii* avec fuccès dans la peinture en dmail : on fait de grands éloges de celle d’ambre, mais elle’ efl fort chère.

°. Toutes les couleurs font tirées des métaux , ou des bols dont la teinture tient au feu. Ce font des argiles colorées par les métaux-couleurs. ". On tire du fafre un très-beau bleu. Le cobolt donne la même couleur, encore plus belle. AulTi celui-ci eft-il plus rare & plus cher ; car le fafre n’eft que le cobolt adultéré.

  • . Tous les verds viennent du cuivre, foit

par la diffolution , foit par la calcination. ". On tire les mars du fer. Ces cîjuleiirsfont volatiles ; à un certain degré de feu , elles s’éva-" poreiit ou fe nolrciffent.

°. Les mars font de différentes couleurs, félon les diiférensfondans. Ils varient aufiî félon la variété qu’il y a dans la réduftion du métal en fafran.

°. La plus belle couleur que l’on puiffe le propofer d’obtenir i[u fer, c’eft le r’ouge. Les autres couleurs qu’on en tire, ne font que des combinaifons de différensdiiTolvans de ce métal. 8®. L’or donnera les pourpres, les carmins, les violets. La teinture en eft fi forte , qu-’ua grain d’or peut colorer jufqu’à 400 fois fa pefan* teur de fondant.

  • . Les bruns qui Tiennent de l’or ne font que

des pourpres manques : ils n’en font pas moine elTentiels à l’artifte.

°. En général les couleurs qui viennent de’ l’or font permanentes ; elles foufFrent un degré de feu confidérable. Cet agent les altérera pour-tant fi l’on porte fon aftion à un degré excelîîfi" Il n’y a guère d’exception à cette régie , que ^ Tielet ^ui s’émbeUic à la vielea&e du feiu5*02

E M A"

°. On peut tîrer un violet de la manganefe , mais il efl : plus commun que celui qui vient de l’or.

1". Le jaune n’eft pour l’ordinaire qu’un émail 

opaque , qu’on acheté en pain , & que l’on broyé très -fin. On tire encore cette couleur, belle, mais foncée , du jaune de Naples.

°. Les pains de verre opaque donnent aufli des verds : ils peuvent être trop durs , mais on les attendrira par le fondant. Alors leur couleur en deviendra moins foncée.

". L’étain donnera du blanc.

°. On tirera un noir du 1er.

°, Le plomb ou le minium donnera un fondant ; mais ce fondant n’eft pas fans défaut. Cependant on s’opiniâtre à s’en lervir , parce qu’il eft plus facile à préparer.

". La glace de Venife , les ftras , la rocaille de Hollande , les pierres à fufil bien mûres , e’eft-à-dire , bien noires, le verd de Nevers, les cryftaux de Bohême , le fablon d’Etampes ; en un mot, toutes les matières vitrifiables non colorées, foiirniront des fondans , entre lefquels un des meilleurs fera la pierre à fufil calcinée. °. Enrte ces fondans , c’eftà l’artiflre à donner à chaque couleur celui qui lui convient. Tel fondant eft excellent pour le rouge , qui ne vaut rien pour une autre couleur. Et fans aller chercher loin un exemple , le violet & le carmin n’ont pas le même fondant.

°. En général , toutes les matières calcinables , & coloriées après l’aftion du feu , donneront des couleurs pour l’émail. xo°. Ces couleurs primitives produifent, par leur mélange , une variété infinie de teintes dont l’artifte doit avoir la connoiffance, ainfi que de l’affinité & de l’antipathie qu’il peut y avoir entre elles toutes.

ai°. Le verd , le jaune & le bleu , ne i’accordent pas avec les mars , quels qu’ils foicnt. Sî vous mettez desmarsfurle verd , ou le jaune, ou le bleu, avant que de paffer au feu ; quand l’otre pièce ,loit émail , ibit porcelaine , fortira de la raouffle, les mars auront difparu , comme fi vous n’en aviez point enjployé. Il n’en fera pas de même , fi le verd , le jaune & le bleu ont été cuits a /ant que d’avoir employé les mars. aa’. Que tout artifte qui voudra s’eflayer à peindre en émail, aitplufleurs inventaires,c’efta-dire , une plaque qui puifle contenir autant de petits quarrés que de couleurs primitives ; qu’il y éprouve fes couleurs dégradées de teintes , félon le plus ou le moins d’épaiffeur. Si l’on glace d’une même coiileur tous ces quarrJs de couleurs diffiirentes , on parviendra néçeffairement à des découvertes. Le feul inconvénient , c’eft d’éviter le mélange de deux couleurs oui fjouillonnent, quand elles le trouvent l’une fur l’autre avant la cuiffon.

,3°. Ai> rçfte , les meilleures couleurs , mal ■ E M il

employées , pourront bouillonner. Les Inégalités feules d’épailî’eur peuvent jetter dans cet inconvénient : le liffe s’en altérera, .l'entend> par lu lijf : , l’égalité d’éclat & de fuperficie. X4*. On peut peindre, foi : à l’huile, foit à l’eau. Chacune de ces manières a fes avantages. Les avantages de l’eau font d’avoir une palette chargée de toutes les couleurs pour un très-longtemps ; de les avoir toutes à la fois fous les yeux , & de pouvoir ter.miner un morceau avec moins de viteffe, Se , par conféquent , avec moins de danger. D’ailleurs , on expédie plus promptement avec l’eau. Quant aux avantages de l’huiîe, le pointillé eft plus facile : il en eft de même pour les petits détails , & cela à caufe de la fineffe des pinceaux qu’on employé , & de la lente évaporation de l’huile , que l’on aura eu la précaution d’engraifler au foleil , ou au bain-marie,

j°, Pour peindre à l’eau , prenez de la cou> leur en poudre -, broyez-la avec de l’huile filtrée ; ajoutez-y la quantité de gomme néceffaire ; laiffez-la fécher fur votre palette , en la garantiîfant de la pouflière , jufqu’à ce qu’elle foiE parfaitement feche. Alors prenez un pinceau , avec de l’eau pure ; enlevez, par le frottement avec le pinceau chargé d’eau , toute la fuperficie de votre couleur , pour en féparer la gomme qui fe porte toujours à la luperficie. Quand vous aurez fait cette opération à toutes vos couleurs,’ peignez , mais avec le moins d’eau qu’il vous fera poflible ; car fi votre couleur eft trop fluide,’ elle fera fujette à couler inégalement ; votre furface fera jafpée : c’eft une fuite du mouve-^ ment que la couleur aura confervé après que l’artifte aura donné fa touche , & de la pente du’ fluide qui aura entraîné la couleur : la richeffe de la teinte en foiiffrira auiïi. Elle deviendra livide , plombée , louche ; ce que les peintres ap pellent ; !0)’f'e- Employez donc vos couleurs lei plus feches qu’il vous fera poffible, &z le plu : également : vous éviterez en même temps le ! épaiffejrs. Lorfque vous voudrez mettre una teinte fur une autre, opérez d’une manière qui vous ne pafliez qu’une fois le pinceau fur lemêmi endroi’. Attendez que la couleurfoit feche poui en remettreune autre par deffis,(ans quoi voui vous expoferez à délayer celle de deffous : in^ convénient dans lequel on tombe néceffairement lorfqu’appliqiiant la couleur fupérieu’e à plufleurs reprifes , le pinceau va & revient plufieurs fois fur la couleur inférieure. Si vos contours ont befoin d’être châtiés, prenez , pour les diminuer d’épaiffeur, unepointe d’ivoire ou de buis, & lesrendez corrects en retranchant la fuperficie avec ce ;te pointe. Evitez furtout le trop de gomme dans vos coule^irs. Quand nlles font trop gommies , elles fe déchirent par veines & laiffent , au fonir du feu, en fe ramad’ant fur elles - mêmes , de petites traces qui forment i

-E M A

I -comme un réfeau très-fin, & le fond par oit travers ces traces qui font comme les fils d’en réleau. N’épargnez pas les expériences , afin de conftatsr la jufte valeur de vos teintes. N’employez que celles dont vous ferez parfaitement sûr, tant pour la quantité de gomme, que pour l’aftion du feu. Vous remédierez au trop de gomme , en rebroyant les couleuri à l’eau , fk y , ajoutant une (Quantité lufElante de couleurs en ^ poudre.

,6°. Leblanc eftami ds toutes les couleurs.

Mêlé avec le carmin , il donne une teinte rofe ,

plus ou moins foncée , félon le plus ou le moins ■ de carmin.

t 27° Le blanc & le pourpre donnent le lilas ; t ajourez-y du bleu, & vous aurez un violet clair. Sa propriété fera d’éclaircir les couleurs en leur donnant de l’opacité,

j 2,8°. Le bleu & le jaune produiront le verd : j’plus de jaune que de bleu donnera un verd plus lioncé & plus bleu.

°. L’addition du violet rendra le noir plus beau & plus fondant, & l’empêchera de fe déchirer : ce qui lui arrive toujours quand il efl : employé feul,

30°. Le bleu & le pourpreformeront un violet. 31°. Le bleu ne perdra jamais fa beauté, à quelque feu que ce foit.

i 32.°, Les verds, jaunes & carmins ne s’évaporent po’nt ; mais ’eurs teintes s’affoiblifîent , & ’ leur fraîcheur fe fane.

?°. Les mars font tous volatils : le fer fe revivifi.

int par la moindre fumée, l’étincelle la ■plus légère , ils deviennent noirs & briJians. . Nous avons indiqué feulement les matières d’oij l’on tire les couleurs. La manière de les tiret efl : un fecret que fe réfervent ceux qui le pofledent. Il feroît à defirer que ce fecret fût rendu public. Parmi tant de perlbnnes qui s’intéreffent au fuccès des arts , ne s’en trou vera-t’il aucune qui leur faffe ce pré’.ent ? {Article de M. Diderot, dans l’ancienne Encyclopédie. ) Abbitioïis à l’article précédent. En faifant ^iifage de cet article , nous l’avons divifé en trois .parties ; divifion que n’avoir pas marquée l’aiiiteur , & qui lui étoit inutile , mais qui nous eft .devenue néceflairepour ren--/oyer ceux qtii liront ^nos additions à chacune des parties qu’elles con- ,eernent.

La première partie eft purement hiftorique. L’au ;eur y propofe d’appeller la peinture dont il traite, peintureyî^r l’émail plutôt que peinture tnémail Nous avons trouvé dans les papiers de M. Watelet , une cenfure de cette propofition qui nous a paru ne pas manquer de juftefTe. Pref- .que toutes les fubftances que les peintres en émail employent dans leurs ouvrages, font, y eftil dit, des verres colorés qui ont peu ou Joint de tranfparence & qu’on ap^je lie des f’.waK.», E M A

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C’efi avec ces fubftances que l’on-çeïnt ; on peut -donc , & l’on doit même dire que l’on peint en f’/7Za’i/ , comme on dit que l’on peint en huile ou en détrempe. L’exprellion peindre fur rémail feroit d’autant plus impropre , qu’elle ne donnerait pas une idée jufl :e & précife du genre de peinture qu’elle doit indiquer. En effet, il feroit poffible de peindre _/ ?; ;• /Êmû/7- comme fur d’autres fubftances, fans peindre cependant ê ;ï email. On pourroit , par exemple , peindre à l’huile fur une plaque d’émail, comme on peine à l’huile fur une pièce de veire ; alors on peindroit efFeâivement yîir l’émail, & non pas en émail. D’ailleurs , quand une expreffion eft généralement reçue , c’eft un projet téméraire de vouloir la changer. Il feroit plus philofophique de rechercher les raifons qui l’ont fait adopter , & l’on trouveroit le plus fouyent qu’elles ont été juftc ;.

Une phrale nous arrête dans cette même ^/-gmiere partie. C’eft celle où l’auteur dit » que le » projet d’exécuter de grand, morceaux en émail » efl : une preuve décifive de l’ignorance de fartifte ; qiie l’artifte , au-delà de certaines limires, n’a plus la même liberté d’exécution, » & que le fpedateur feroit plutôt fatigué qu’amufé par les détails , quand même il arriverosc » à l’artifte de réulfir. « 

Il nous femble qu’on ne peut , fans quelque témérité , prophétifer qu’un genre qu’on peut encore appeller naiflant , un genre qui a été le plus fouvent exercé par de fimples joailliers , & dans lequel on ne compte encore qu’un petit nombre d’artifte.s célèbres, reftera toujours renfermé dans les bornes qu’on lui connoît aujourd’hui. Le mauvais fuccès de quelques ariiftes anglois , qui avec des talcns communs , ont voulu fortir des limites ordinaires , ne prouve pas que des arriftes plus diftingués ne pourront pas un jour franchir ces bornes avec un fuccès plus heureux. Ce que nous difons ici n’eft pa,s une fimple conjeaure ; l’Académie Royale de peinture & fcujpture de Paris poffede en émail un morceau d’hiftoire de la main de M. Boette , & ce morceau eft dine grandeur qu’on n’avoit pas ofe franchir jufqu’à lui. Qui oferoit affurer que d’autres n’auront pas à l’avenir encore plu» de talent & de fuccès que M. Boette / M. Diderot n’a parlé, dit-ii , que d’après M. Rouquetha^ bile peintre en émail ; maison peut le faupsoi»ner de n’avoir fzs bien retenu les expreffions de l’artixie , lorfqu’il dit que , dans un grand morceau en email , le fpcSateur feroit plutôt fatigué qu’amulë des détails. On ne reconnoît point là le langage d’un homme familier avec les art» qui dépendent du deffin. La plus grande furface d’un ouvrage ne fuppofe pas toujours une plus grande quantité de détails. Il y a fouvent dans un fort petit tableau d’un peintre hollandois beaucoup plus de détails, que daos un g-raad 5*4

E M A

tableau d’un peintre de l’école romaine ou lombarde. Un tableau d’autel peur offrir une compofuion plus fimple , des détails moins compliqués, qu’un petit tableau en miniature qui çoitvre une tabatière M. Rouquet, ou fon interprète , veutîl parler des détails de la manœuvre, & non de .ceux delà compofuion ? Alors on répondra qu’un artifte, homme de goût, aggrandira la manière lorfqu’il travaillera fur un plus grand champ. Ce que je trouve dans les papiers de M. Watelet me paioît mieux l’enti. » Plus les morceaux » ont de furface, y efi-il dit , plus il y a de difficultes à iurmonter tant pour l’égalité & le po’ » liment général de la pièce, que pour la perfeftion de la fonte. L’expérience leule enhardit fur ces fortes de choies. Le travail rend à » l’artifte intelligent le mécanifme plus familier. 11 aggrandic volontiers tes fourneaux , « quand il eit flatté par la réufllte : il fe plaît à » faire lui-même les couleurs qu’il ne trouve j5 point à acheter , & il a bientôcappris qu’il eu » plus aifé de les compot’er que de les bien employer , & que le point le plus difficile, pour » faire de belles choies en émail, eu. de favoir » bien deffiner & bien peindre. »

Lz/cjonJe partie de l’article concerne la préparation de la plaque & la manière de l’émailler. Cette opération n’appartient point à l’art -, elle répondà celle d’imprimer la toile que le peintre à l’huile doit enfuite couvrir des produclions de fon talent ; à celle de faire l’enduit qui eft def- $iné à recevoir une peinture àfrclqueic’eft enfin lin travail d’orfèvre oc d’émailleur , & non de peintre en émail. Mais cette manœuvre doit être connue du peintre, comrme le peintre à l’huile doit connoître Isjnanière d’imprimer les toiles ouïes paneaux. Il ne faut pas qne l’attifte fe trouve hors d’état d’exercer fes talens , s’il n’a pas fous fa main des ouvriers capables de lui en Faire les apprêts. Il eft des occalîons oii tout artifle doit pouvoir fe fufîîreà lui-même. L’imprefTion deflinée à un tableau à l’huile feroit mauvaife , fi elle fe délayoit avec les couleurs qu’on met par-defTiis, puifqa’eUe en brouilleroit & en d ?truiroit les teintes. On doit donc soncevoir aufli que l’émail dont on couvre une plaque efi : plus dur que les couleurs qui feront appliquées par le peintre à fa furface ; fans quoi il fe parfondroir avec elles , & détruiroit les intentions de l’artifle. Il reçoit toutes les couleurs dont on le couvre , fans que fa l’uperficie en foit altérée.

Le bon émail qu’on applique fur les plaques , vient de Venile : mais l’éditeur du 7 ait£ des couleurs pour la peinture en email., par M. de Montamy , traité dont nous donnerons l’extrait , a trouvé parmi les papiers de cet’ homme laborieux , un procédé pour faire Vémail dont il s’agit ici. Il eft vrai qu’il n’étoit pas écrit de la main ^e M. de Montsiny ; mais le foin qu’il avoi : E M J . ..

pris de le conferver , fe.mble être un îftdîce d’ap» probation. Nous allons le tranfcrire. Prenez lo onces de cailiou ou de quartz calciné , pilé , tamifé , féché.

onces de minium féché fur du papier, & 

broyé a/ecune fpatule de bois , dansun vaiffeau de bois.

onces de nitre féché Se bien broyé. 

nonces de foude d’Efpagne , pulvérifée (ï elle eft fcche ; bien dirifee li elle n’eft pas feche. I once d’arfenic blanc , bien pulvérifé. I once de cinnabre naturel , bien pulvérifé.

onces de verre de Bohême pulvérifé , tamifé, 

lavé, fét :hé.

On verfera toutes ces fubflances dans un vaiPfeau vernifTé, & l’on mettra le tout dans un creufet bien bouché : on fera fondre dans un fourneau de fufion à vent : les première.5 cinq heures à petit feu, & en augmentant le feu pendant les dix-huit heures fui/antes. On brifera le creufet , & Vémail fera parfait. Ce même émail blanc fe fait , fuivantMerret, avec du régule limple d’antimoine $ :. de la ma- , tière du verre blanc ordinaire. On petit voir la manière de faire les émr.ux de toutes les couleurs, d.ms l’art de la Verrerie de Néry , comnienté par Merrec, auquel Kunckel a joint des notes fondées fur fes propres expériences. L2 plupart des peintres en émail compofent eux-mêmes leurs couleurs pour leur donner uns pcr.^eclion qu’ils n’ofent attendre avec allez d’affurance des émaux faits dans les verrerie ;. On fait quelques ouvrages en émail fur des plaques de cuivre rouge ; maiscc ne font que des morceaux de peu d’importance. C’eft de cette manière que l’on travaille à Limoges deï médailles &c quelques autres bijoux ; mais ’.aut ca que cette ville produit en ce genre , ne peut être comparé aux e’/nai/ .s : exécutés fur des plaques d’or. Tous les émaux ne peuvent s’employer indifférera. ment fur tous les métaux. Le cuivre, qui reçoit tous les émaux épais, ne peut admettre les émaux tranfparens. Quand on veut y en appliquer, il faut d’abord y mettre une couchs Vémail noir , fur laquelle on applique une feuille d’argent qui reçoit les émaux qu’on y couche enfuite ; mais on employé feulement ceux que l’argent ne gâte pas. Il n’y a parmi les clairs que l’aigue-marine, l’azur, le verd& le pourpre qui falfent un bon effet. On trouve dans les élerr.ens de peinture ^ édition augmentée ■çik.r Jomiert , les procédts néceffaires pour préparer le cuivre à recevoir la peinture en émail. » Le cuivre , dit l’auteur, » elî un aiétal impur, fort fale & craffeux. Il 9 eft nécelfaire de lui ôter fes impuretés. 13 » l’on veut pouvoir émailler proprement delTus » avec du blanc : autrement il le tourmente » beaucoup dans le feu , en jertant du verd & » du noir tjui ijifeâent la pureté de noire blanc, C)<

■ E M A ^

)ce quî teni les émaux ternes & fans éclat. , J Voici la manière de le préparer pour éviter

!ces inconvéniens. On eft trop heureux de 

jles favoir , loi-rqu’on fe trouve dans des

villes où l’on ne peut être fécondé par des

J ouvriers habiles.

» Prenez une feuille de cuivre^ rouge pla-’néc, à-peu-près de i’cpaiffeiir d’une ligne, & qu’elle foit bien égaie & bien unie. Vous en couperez avec des cifailles la quantité de ipièces de telle forme Se grandeur que vous

voudrez, ainfi qu’un nombre de petits morjceaux

pour émailler & faire delTus des épreu-

vesde vos couleurs. Faites une compofition
de ciment de tuileaux , avec un poids égal

ide pierre-ponce pilée & réduite en poudre ; ivous ajouterez du fel commun du tiers du ipoids des deux autres fubft-ances. Vous prenlidrezun de vos crec.ets plats, qui foit affez jjgrand pour contenir vos plaques & vos jjpetits morceaux de cuivre, lit fur Uc, avec j’ia précédente compofition , en obfervant que lie premier & le dernier lit foient de cette j’compofuion bie.i mêlée , & que le dernier ffoic affez épais. Couvrez exaflement ce ci-eujfet avec un autre qui s’emboîte dcffus comme un couvercle , & les luttez bien enfemble ; île lut étant fec , mettez le tout fous la imouffle couverte d’affez de feu pour faire «rougir vos creufets. Vous les îaifferez en tset état pendant l’el’pace d’un demi-quart ifj’heure ou à-peu-près. Il faut avoir tout prêt j’quelque pot oil il y aura de l’urine ; ik , au imoment où vous retirerez vos creufets du

  • fea , vous verferez dans cette urine ce qui

)|rera calciné. Il faut avoir auffi. de l’eau nette ïdans un autre vaiffeau , pour y laver enfuire ^vo« plaques & les petits morceaux de cuivre : yl en fortira une écailVe confidérable ; c’eft ïla crafle & l’impureté du cuivre qui , par j| :ette purgation , deviendra plus ferme , j-très-pur , & propre à émailler. Il ne gâjjtera point les couleurs , & fe tourmentera ^bien moins au feu dans le travail «. PalTons à la troifième partie, qui concerne J.’ticulièrement l’art du peintre : mais cet art

l’émail , bien plus que dans tous les autres 

jnres , tient à des manœuvres nombreufes , « barraffantes , difficiles , qui en compofent la Vtier.

’La partie de l’art proprement dite fe rapporte ^■faitement au genre de la miniature. Les (ïileurs l’ont d’une efpèce différente , mais «es s’appliquent de même en les pointillant im la pointe du pinceau. On peut faire le t it comme on l’a indiqué dans l’article prétient ; On peut aulTi le tracer avec les feees C vitriol & du falpêtre qui relient dans la ^ nue après la diftillatioti de l’eîiu forte. Ofî Sea»x-Arîs. Tome il.

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yo ?

les détrempe , comme les autres couleurs avee de l’huile de lavande.

On lit dans un traité fur l’art de la verrerie, écrit en latin par un chymifte allemand, & traduit en françois par Hatidicquer de Blancourt, qu’on peut patfondre la peinrure en émail en n’employant qu’un feu de réverbère ou de fuppreftion , c’e(l-à-dire en mettant tout le feu fous la moiiffle & point deffbus. C’eft une erreur dont il eft utile de prévenir ceux qui confulteroienr ce traité. L’expéirience démontre qu’il faut un plancher de feu, & <]ue les couches de charbon fur lefquelles on pofe la mouffle ne font pas moins néceffaires a 1«  perfedion de la fonte que le feu de delTus & des côtés. Voici ce qu’on lit dans une note trouvée dans les papiers de M. Watelet. » J’ai » vu opérer M. Rouquet de cette manière, » avec une attention fcrupuleufe fur cet article. » Il la pouffoit même jufqu’à obferver le degré » du vent qui foulïloit dans le fourneau , pour » juger du d^gré de chaleur : ce qu’il faifoic n avec des morceaux de papier qu’il jettoît » dans le fourneau. Sur le plus ou le moins » de force avec laquelle l’air pouffoit la » flamme de ces morceaux de papier allumés, rt il jugeoit de ce qu’il devoir donner d’ourverture à la porte du fourneau : il avançoit » enfuite , ou retiroit les émaux plus ou moins, » & à diverfes reprifes, fuivant la grande expérience qu’il avoir des effets du feu fur l’émail. Un artljle , me difoit-il , doit obferver » jufqu’au vent qui foujffle , & à la manière » dont fon fourneau tire l’air «. Nous terminerions ici cet article , fi nous n’avions pas des éclairciffemens néceffaires à ajouter fur les inftrumens & uftenfiles qui doivent compofer l’attelier du peintre en émail. Cet atteiier eft repréfenté dans la vignette qui forme la partie fupérieure de la planche , On y voit figure i. le peintre occupé à colorer un morceau d’émail. Le trop grand éclat du jour qui entre par la fenêtre dont il tire la lumière, eft tempêté par un chalTis garni de gaze d’Italie , ou de papier ferpente huilé ou ciré. Ondgnne à ce chaflis une inclinaifon d’à-peuprès 45 degrés. Fig. z. un autre peintre paffa une pièce au feu. Ls fourneau , donr on diftingue affez bien la forme extérieure , eit placé dans une cheminée.

On lit dans les élàmens de peinture pratique. édition de Jombert , que ce fourneau peut être de la forme la plus limple , & même n’être compofé que de trois briques , dont une derrière , & deux faifant les côtés. L’auteur ajoute que, pour plus ds propreté, on peut avoir de petits fourneaux à un étage, avec un couvercle que l’on ôte quand il eft néceffaire. Cet étage fait’ au milieu un foyer de la grandeur néceffaire pour enfermer la mouffle , & appuyer de S ff tous les côtés les charbons du feu. Ce fourneau, que l’on peut voir chez les orfèvres, peut servir à émailler les plaques de métal, & à parfondre les ouvrages. On y met le couvercle auquel il y a des trous par lesquels s’exhale la vapeur du charbon. On le place dans une cheminée, en prenant des précautions pour qu’il ne puisse pleuvoir dessus. Il doit être élevé sur un trépied à une hauteur commode pour l’artiste qui en fait usage.

Cette forte de fourneau peut être suffisante. La même planche I, offre au-dessous de la vignette la figure d’un fourneau plus composé & d’un usage plus avantageux.

Fig. 1. Porte du chapiteau du fourneau.

  1. Mouffle qui se place dans le fourneau, & sous laquelle on fait fondre les émaux, vue du côté de l’ouverture.
  2. Élévation latérale extérieure de la mouffle.
  3. Elévation de la partie extérieure de la mouffle,
  4. Élévation géométrale du devant du fourneau.
  5. Coupe verticale du fond du fourneau & du dôme qui le ferme par un plan passant par le milieu des portes.
  6. Coupe verticale du fourneau par un plan parallèle à la face que la Fig. 5 représente.
  7. Plan du rez-de-chaussée du fourneau.
  8. Coupe horizontale du fourneau, au niveau de l’âtre.
  9. Plan du chapiteau du fourneau.

Il fera facile de voir des mouffles chez les orfèvres, & de s’en former une idée encore plus précise, que par la figure à laquelle nous venons de renvoyer. On trouve, dans les élémens de peinture pratique le moyen de les faire, & nous allons le transcrire.

Prenez de la terre préparée pour les creusets, qui se vend chez les potiers de terre : mêlez-y un peu de sablon d’Étampes, & de la limaille de fer que l’on trouve chez les serruriers. Il faut manier & brouiller le tout ensemble, jusqu’à ce qu’il soit bien mêlé, & que la terre paîtrie devienne en consistance de pâte ferme. Alors on applatira cette terre avec un rouleau de bois, pareil à celui dont les pâtissiers se servent, observant de mettre toujours une feuille de papier entre le rouleau & la terre, de peur qu’elle ne s’y attache. On réduira cette pâte à l’épaisseur d’une ligne ou environ. Etant en cet état, elle se coupe aisément sur une table avec un couteau, & l’on en fait des morceaux de la grandeur que l’on veut. Ordinairement on les taille de la longueur de trois pouces sur deux de largeur ; puis pour donner à ces mouffles la courbure nécessaire, il faut avoir un cylindre de bois proportionné à la courbure qu’on veut leur donner, & les lier sur ce cylindre avec de la ficelle pour qu’elles en prennent bien la forme en séchant. N’oubliez pas de mettre une feuille de papier entre la mouffle & le bois, de peur qu’elle ne s’y attache. Vous mettrez ces mouffles sécher à l’ombre ; autrement, elles se fendroient & deviendroient inutiles.

Il en faut faire plusieurs de même grandeur, & d’autres plus grandes ou plus petites, pour en avoir à choisir, & de toutes les grandeurs, fuivant ce que l’on à faire ; car elles se cassent facilement, & il ne faut pas en manquer.

Pendant que ces mouffles sont encore molles, il faut y percer par-en-bas quelques petits trous des deux côtés, pour faciliter l’entrée de la chaleur par dessus ces mouffles, & pour que cette chaleur réverbère plus aisément sur vos ouvrages quand ils y sont placés. Lorsqu’elles seront bien seches, vous les approcherez du feu petit à petit, afin qu’elles s’échauffent, & qu’elles perdent entièrement leur humidité ; car si elles n’étoient pas parfaitement sèches, elles se casseroient aussitôt qu’elles sentiroient la chaleur. On les approche ensuite peu à peu d’un plus grand feu, & enfin on les y fait rougir même assez long-temps.

Cette même terre préparée sert aussi à faire nombre de petits creusets plats, dont vous vous servirez dans presque toutes vos opérations. Il en faut de plus ou moins grands ou épais. Ceux qui l’ont destinés à faire sécher les couleurs doivent être petits & fort minces ; ceux qui doivent servir à fondre les compositions seront plus grands & plus épais. On les fera sécher & recuire de la même manière que les mouffles.

Charbon ; il est essentiel que le charbon soit bien choisi. Il faut sur-tout éviter de se servir de charbon de châtaignier, parce qu’il a le défaut de pétiller long-temps avant que d’être consommé. On doit préférer à tous le autres le charbon de saule. Quoiqu’en général le charbon dont on se sert doive être long & menu, il faut cependant en avoir un peu de gros pour boucher la mouffle. Les artistes de Paris préfèrent le charbon qui vient par la rivière dans cette ville ; il est long, petit, ordinairement bien cuit, ne pétille point & a beaucoup de chaleur.

Les peintres en émail se servent de la même sorte de soufflets que les orfèvres ; ils ont ordinairement trois feuilles. On doit les choisir les plus légers qu’il est possible, parce qu’on est souvent obligé de les avoir souvent à la main, & qu’il seroit à craindre qu’ils ne la fatiguassent & ne l’appesantissent, ce que doivent éviter des artistes dont le travail exige la légèreté & la délicatesse de la main.

Les pinces dont on se sert pour enlever les plaques se nomment relève-moustache. Elles sont représentées planche II, fig. 25. On peut aussi se servir d’espèces de pincettes faites de •E M A

fnes âe fleurets , dont les extrémités qui i srent foient bien droites & bien plattes, in que les deux bouts correfpondans le joiant étroitement ; tiennent fermes les plaques ir lesquelles on pvélente les ouvrages au feu. l’i choiflt ces pincettes affez longues & paflaieitient fortes pour qu’elles ne fléchiffent pas ^’endroit où la main les ferre , & : ne s’éctent pas par le bout qui doit tenir l’cu- ^ige.

JLa pièce de taule fur laquelle on pafe l’ou- ,3ge pour !e paPer au feu , eft repréfentée pnche II. fig. II. Si ces plaques peuvent ê :re 6r, elles font d’un ufage bien plus fur ; jj-ce qu’elles ne jettent ni vapeur , ni écailles , Jque l’on n’a que la fujettion de les redrefî’er cand elles font cambrées. On a pour cet ufage le petite enclume armée d’acier , femblable j-elles dont fe fervent les graveurs & qu’ils rmment tas. La furface en eu parfaitement pte & bien unie. Comme les plaques d’or lîit fort chères & qu’on eft obligé d’en avoir tifieurs, de grandeurs différentes, on fe jjnit toujours de quelques feuilles de taule, il. lefquelles on coupe des plaques de toutes «•.ndeurs , fuivant lebefoin. Lorfqu’elles font TJves , il faut les faire rougir au feu, pour ij’elles y exhalent les vapeurs auquelles le fer ^ très fujet ; car fes vapeurs gâteroient les è,aux. On les frappe fur le tas pour faire tjnber les écailles brûlées dont elles font cou-Vtes , qui éclateroient dans le feu, & gâtoient la peinture. On employé encore un e ;,re moyen pour éviter le danger de ces 4ats , c’eft de frotter les plaques avec de Ijcraie blanche bien féche.

jVlême planche , _/Çg^. ii. Une des boëtes qui <uiennent les émaux en poudre. Elle eft lirquée & numérotée , pour indiquer la coul ! r qu’elle contient & la nuance. Le nui |ro rappelle à un numéro femblable que l’art ;

e a marqué fur la palette d’eftais qu’il

iTTime inventaire. On a des boëtes plus grandes p|ir mettre les couleurs qui ne font encore Cî pilées & lavées , mais non broyées. ru. 12. Deux morceaux de glace qui fervent iji de mollette, & l’autre de pierre à broyer. Ctte pierre & cette mollette peuvent auffi être 4gate. Il faut qu’elles l’oient plattes & fort H’es. Plus la pierre fera grande , & plus elle fia commode. Il cfi difficile d’en trouver qui .^ ;nt plus de cinq pouces de long. Cette pierre li doit fervir qu’à broyer les émaux avec de Ifuile. Pour la nettoyer, on fe fert de cryflal tjîl’on broyé deffus avec la mollette , ce qui r^toye en même temps la mollette & la pierre, irès cela, on frotte l’une & l’autre avec de la ijîde pain ralïïs , & enluiteavec du linge blanc linfec.

f.5. Pilon d’agate.

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. Mortier auffi d’agate.

. Fil de fer que l’on pofe horïfontalement : en travers delà poêle ou chaufferette fur laquelle on fait fécher les pièces. On met les plaques fur CG fil de fer.

iS. Poêle ou chaufferette à fécher. , , Pam d’émail.

.0. Spatule vue en plan & de profil. . Chevalet à émailler les plaques. Il a la forme d’un pupitre & pourroit en porter le nom. Il y a des peintres en émail qui, pour peindre plus commodément , (ë fervent d’une autre forte de chevalet. II eft d’ébene : fa longueur eft d’un demi-pied fur un pouce de large ; fes pieds font de la même longueur & de la même largeur, & fon épaiffeur eft de quatre lignes. Il fert à foutenir la main pour ia tenir plus affûtée, & fait pour le peintre en crnail l’office dei’appuie-main pour le peintre en huile. Quoique l’on puiffe s’en pafTef , on en trouve l’ufage fort avantageux quand on en a pris l’habitude.

,2. Pinceaux de différentes groffeurs. Ils doivent être fino & délicats. On les achette chez les mêmes marchands que les pinceaux à peindre en miniature. Il en faut avoir de diverfes groPfeurs , 8c il eft bon de les fjire faire exprès. On en a de moyens, en en a d’autres très petits & fort déliés : les premiers fervent à ébaucher , les féconds à finir. On adapte ces pinceaux à des antes d’ivoire ou de bois des Indes ; mais comme ils font fi petits que leurs tuyaux éclatent facilement , on y fait fouder de petites viroles d’argent. Cette virole les tient fermes, & l’on peut travailler hardiment fans craindre qu’ils s’échappent de leurs antes. Il n’y a guère que les orfèvres de filigranes qui puiffent faire ces fortes de viroles. On a auffi un pinceau affez gros & fort doux , pour enlever les atomes de pouffière ■ que l’air dépofe fur l’ouvrage.

. Couteau à couleur. Il eft fin & : délica’ ; il coupe des deux côtés & eft arrondi par la pointe , qui cependant eft tranchante. Il doit être fotiple & pliant. L’un de fes i :fages eft de ramaffer les couleurs broyées fur la pierre d’agate -, le fécond, défaire les teintes fur la palette. Il faut qu’il foit de bon acier ; car s’il s’ufoit facilement, illaifferoit, fur la palette ou fur la pierre, quelques unes de fes parties qui altéieroient les couleurs, ’

, Pierre à ufer l’émaîl.

Le peintre en émail doit encore être muni de I quelques uftenflles que nous allons détailler.

! Des cifeaux, ou plutôt d’^s cifaiî.les, pour couper 

les plaques. Les lames doivent en être fortes ik courtes. On en achette chez les clinquaillers qui ont coutume de fournir les artiftes. Pour les aiguilles dont-«fe fervent les peintres en émail , voyez le mot Aiguille à fon ordre alphabétique.

On appelle bruxelles des pinces , ou efpéces Sffii ^

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d’étaux à boucles. Elles ont environ quatre pouces de long. Elles font formées de deux lames plates qu’embrafle un anneau qui comprime ce que l’on veut tenir , & que les doigts , par leur groffeur, ne pourroient IVifir & piïreer commodément.

Quoique les peintres en émail faflent peu fréquemment ufage du compas , ils doivent cependant en avoir un qui ibjt petit, ferme , Se dont les pointes foient très fines.

Ils ont auffi befoin d’un éclat de diamant très-pointu. Il doit être ferti au bout d’une ante de pinceau , avec une petite virole d’argent. Ce diamant lert à percer les petits œillets qui furviennent quelquefois à la peinture , & à effacer les parties défeflueufes.

Nous pourrions ajouter ici plufisurs chofes a ce q :’on a lu fur les couleurs dans l’article de M. Diderot : mais nous reviendrons fur cet objet dans Tarticle de la peinture fur verre, au mot Verre , & : nous allons , dès-à-préfent , faire connoître le^ tiavaux & les découvertes de M. de Montamy dans fon traité des couleurs pour la peinture en émail. L’article qu’on va lire cù un extrait fort étendu de ce traité.

Emaix. Couleurs pour la peinture en émail. Ce genre de peinture dont le temps n’altère pas la beauté , mérite les plus grands encouragemens , & : il ferost à fouhaiter que de bons artiftes multipliaffent en émail, par des copies faites avec intelligence , les meilleurs tableaux des différentes écoles. Ainfi la pofléritéauroit encore fous les yeux les chefs-d’œuvre de Raphaël , du Titien, du Pouffin, de Rubens, longtemps après que les originaux de ces maîtres n’exifleront plus. Combien n’eft-il pas à regretter que les anciens n’aycnt pas cultivé ce genre , n’en ayent pas multiplié les produftiont . nous trouverions enlevelies fous la terre de la Grèce & de l’Italie les copies des plus célèbres ouvrages de Zeuxis , de Parrhafius , d’Apelles , de Polygnote , d’Aëtion : nous jugerions de la compofîtion, du coloris , du clair-obfcur de ces grands maîtres ; il ne nous manqueroit guère que de connoître leur touche , & la finefTe de leur deffin. Il feroit digne des amateurs qui joignent au goût des arts les avantages de la fortune, de faire réduire & copier en émail des tableaux célèbres. Alors ce genre de peinture , prefqu’entierement abandonné à la bijouterie , feroit confacré à un objet utile.

Comme la peinture en émail fe traite de la même manière que celle en miniature , & n’a d’autres difficultés particulières que celles qui réfultent des fubflances qu’elle employé , & du feu qu’il faut leur donner , on ne manquera pas de bons peintres en émail partout oii les arts feront en honneur. Il en naîtra, quand des rccompenfes leur feront offertes. Mais ils ne peu-E M A

vent produire des ouvrages parfaits avec des couleurs défeôueufes, & trop longtemps leur talent a été contrarié par les vices des matériaux qu’ils employoient. M. de Montamy, par fes recherches, & par la confiance de fes travaux chymiques fur les couleurs ; :roprcsà la peinture en émail y s’eft rendu le bienfaiteur des arts. Nous allons donner ici l’excellent traité quia occupé une partie confidérable de fa vie, & qui n’a paru qu’après fa mort. Quelquefois nous abrégerons l’on difcours , fouvent nous ne ferons que tranfcrire fes propres expreffions. Dans un fujet qui ne nous efV pas familier , nousrifquerions trop de changer le fens de l’auteur en nom permettant de changer fes paroles. Ilobferve que nous n’avons pas manqué d*artifles capables de defTiner & de coiorier d’une manière fatisfaifante des tableaux en émail ; mais que les matériaux leur ont manqué. Entre tous ceux qui fe font appliqués à ce genre, le célèbre Petitot paroît, dit-il, être le feul qui ait eu en fa difpolition un affez grand nombre de bonnes couleurs. Ori prétend qu’elles lui étoient fournies par un médecin chymifle , fon ami ; mais foit que ce chymifle fe contentât de lui fournir des couleurs , fans lui dévoiler le fecret de leur compofîtion, foit qu’il ai : connu lui-même ce fecret tk qu’il ait voulu fe le réfcrver , procédé trop peu digne d’un artiile qui ne doit point avoirde plus [ ;rand intérêt que celui des progrès de fon art, il eft certain que tous ceux qui ont travaillé depuis la mort de ce peintre, n’ont du fe procurer les matériaux qu’il eraplovoit , ’& que , par cette difette , ils ont trouvé dans la nature , ou dans les ouvrages des maîtres ,un grand nombre d’effets qu’il leur étoit impofFible de rendre. Si quelques uns d’entre eux ont eu le fecret de quelques couleurs particulières, ils le cachoient foigneufement à leurs émules , qui de leur côté gardoient un filence également opiniâtre fur les petites recettes qu’ils poffédo’ent. Ainfi différons matériaux étoient entre les mains dedifférens artifies : & : tous manquoient d’un grand nombre de couletirs dont la réunion eût été néceliaire au fuccès de leur art. Les jeunes peintres qui vouloient fe livrer à la peinture en émail , le trouvoient dénués de fecours , & étoien : obligés d’acheter chèrement à des étrangers inconnus , quelques couleurs fouvent détefti’eufes , dont ils ne connoilToient ni la compofîtion ni l’effet. Chacun de ces marchands de couleurs avoient fa manœuvre particulière , & l’artifbe obligé d’en acheter de plufieurs marchands , fe trouvoient fouvent très-loin de leurs efpèrances , quand ils vouîoient mêler ces couleurs faites par des procédés qui s’oppofoient à ; leur union. Souvent elles fe détruiibient les| unes les autres, fbuvent elles n’entroient point’ en même temps en fufîon , & un ouvrage qui . devoir réuffir par le talent de rarcifte , manquoit E M A

jpar le vice des fubftances dont il étoît contraint de faire ufage. Comme il ne co’nnoiffoit pas la nature & la compofidon des matériaux qui étoient I dans Tes mains, il ne pouvoic en prévoir , ni en prévenir, ni en réparer les inconvéniens. Ce n’etoit point-là le feul embarras qu’il eût à fuimonter : il trouvoit encore les plus grandes j difficultés dans l’emploi de ces fubftances. Prefl que toutes avoient été vitrifiées, & ne confif-

! toient que dans des verres colorés ; on tâchoit 

[ de les réduire en poudre impalpable, &, après les avoir broyées longtemps à l’huile cfTentielle de lavande, on les employoit au pinceau. Dans ■ le petit nombre délivres qui ont été faits pour la peinture en émail, on voit toujours que les c différentes couleurs ne font que des verres coloi rés. Il eftaifé de fentir le vice de ces matéî riaux. Quelque foin que l’on prenne pour piler du I verre , pour le broyer avec de l’huile , il ne [peut jamais fe mêler à cette huile affez parij laitement pour ne faire qu’un corps avec elle , I pour fe réduire en une pâte liquide , pour couler ■■ avec elle indiffolublement fous le pinceau. I L’huile cherchoit toujours à fe féparer de ces i atomes vitreux qu’elle ne pénétroit pas. Lesparj ] ties du verre, quelque fubtiles qu’elles fufl’ent,

conlervoient des angles par lefquellcs elles s’at-’ 

tachoient aux poils du pinceau , & qui en ren-

doientla pointe bourbeufe
inconvénient confi-
! dérable pour des ouvrages aufli petits que ceux 

t quifefont enemai7,& qui exigent la plus grande

délicateffe de travaux. Les peintres, pour remé-
dier , autant qu’il étoit pomtle à cet inconvé-
! nient , éroient réduits àfe fervir de petites poini 

tes de bois , aiguifées & rendues très-fines , dont ils fe fervoient pour ranger la couleur & diminuer l’épaiffeur des traits que le pinceau avoit faits contre leur gré.

Les pains â’émail de différentes couleurs , entre lefquels un donne la préférence à ceux qui •■ viennent de Venife , préfentent , dans la prati-

que , les mêmes difficultés que les verres colo-’ ;

rés. Ils font quelquefois plus difficiles à mettre en fufion que Vémail blanc fur lequel on les ap-

! plique iils nepeuventy pénétrer, & ilsyforment 

■ une épaiffeurqui rend la peinture louche Se défegiéable. On les attendrir , il eft vrai , en y mê-I lant du verre plus fufible ; mais ce mélange en dégrade & en affoiblit le ton , & en change la ■ nuance. Ce n’eft pas-là le feul défavantage de ce mélange : la chaux de plomb , qui entre dans la compofïtion de ce verre, fe revivifie , noircie les couleurs , & leur donne un œil plombé. Elles font d’autant plus expofees à ce défaut , que le même ouvrage doit retourner plufieurs fois au feu, & qu’il ne faut qu’une matière gralTe & fulphureufe, un charbon de mauvaife qualité pour occafionner cet accident.

Ces raifons & plufieurs autres qui feront établies quand il fera queilion des fondans , ont E M A ^05 ?

déterminé à ne point fc fervir de verres colords dans la peinture en émail , ce qui a dû faire rejetter auffi les pains à’émail colorés. On a cru que pour rendre cette façon de peindre fufceptible d’une plus grande perfeflion , il fsMoit commencer par écarter toutes les dlfîicultés qui réfulcent de l’emploi des couleurs, & l’orî fe flatte qu’on trouvera , dans l’ufage de celles qu’on va donner , autant de facilité que dans le defTin à l’encre de la Chine. •

Parmi les coirleurs qu’on avoit coutume d’employer , plufieurs , après avoir paffé au feu , prenoient une teinte toute différente de celles qu’elles avoient avant d’avoir été mifes en fufion : il fUIoit que le peintre eût toujours dans la tête une palette idéale , ou fous les yeux un elTai de chaque couleur qu’il employoit : celles que nous allons propofer auront, après la fafion , à-peupres la même teinte qu’au moment où l’on en fera ufage au pinceau.

Les peintres en émail donnoient le nom d’ennemies à certaines couleurs dont le mélange fe détruifoit à la fuficn , ou qui bouillonnoient lorlquon les couchoit les unes fur les autrestoutes celles dont on va donner la compofition ’ n ont aucune antipathie entr’elles , fe mêlent parfaitement& ne font pas fujettes à bouillonner. Lqs mêmes peintres avoient deux efpéces dé couleurs ; les unes qu’ils appelloient dures & les autres tendres. Ils couchoient les coule’uis dures dès le premier feu, & quelquefois, au dernier feu, a peine avoient-elles pris leur luifant : les bleus étoient de ce nombre. Les couleurs tendres s’employoient au dernier feu -, fans cela elles fe feroient altérées , & auroient été même quelquefois tout-à-fait emportées. Cette diftinftion de couleurs dures & de couleurs tendres n’aura pas lieu entre celles que nous donnerons ici. On peut les employer toutes également au premier feu , fans crainte qu’elles loient ni altérées ni détruites.

Lorfqu’une couleur n’avoit pas réufli lorfqu’une teinte fe trouvoit défeiSueufe , le peintre n’avoit d’autre moyen que celui d’effacer fbn ouvrage , & d’emporter la couleur avec une pierre & du fable. Dans l’emploi des couleurs que nous donnerons , on peut mettre couleur fur couleur , & corriger comme dans la peinture al’huile, fans que la couleur du deirousparoifTe & empêche celle de dclTus de faite fon effet. * Dans l’ancienne façon de poindre, lorfqJe le feu occafionnoit des bouillons ou des fentes l’ouvrage étoit perdu , & il falloir ie recommencer : dans celle-ci, on remédie à tous ces accidens de manière qu’il eft difficile de s’en appcrcevoir. "

Dans l’ancienne Jjeinture en émail , on n’avoit pas affez de différentes couleurs pour rend.-e’ tous les tons que produit la peinture à l’huile & on étoic obligé de réferyer Vémail blanc qui fais 510

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le fond du tableau , pour exprimer les blancs & les clairs ; ce qui étoit fort ûiflicile dans les petites parties , & rendoitla peinture féche & dure : au moyen des couleurs que nous allons donner, on eft en état de compoler unaufli grand nombre de difFërentes teintes que les peintres à l’huile. Ainfi l’on pourra peindre franchement & (ans être obligé de réferver les fonds. On place les clairs Se les reflets où ils font néceflaires , ce qui donne un empâtement moelleux à la peinture, & procure la facilité de copier avec précifion tous les tableaux de quelque genre qu’ils puiffent être.

Dds Fondans. Tous les difFérens genres de peinture , excepté la peinture en paftel , exigent une matière liquide , qui mêlée avec les couleurs , en lie toutes les petites parties les unes aux autres , & les rendent capables d’être appliquées avec le pinceau ; ce liquide venant à lécher, attache les couleurs ftir le fond, & leur donne de la confiftance. Les huiles , les gommes , les colles, &c. s’emploient ordinaiiement pour cet ufage : l’huile effentielle de lavande efb ce quiréuiïit le mieux dans la peinture en émail. Mais comme il eft abfolument néceffaire que cette huile foit totalement évaporée avant de porter i’ouvi’ageen fjnte, il faut une autre matière qui lie les couleurs à l’émail blanc , fur lequel on peint, & qui les y fifle pénétrer dans le moment de la fution. Cette matière ne pouvant être autre choté qu’un ve-re , il elt à propos d’examiner de quelle nature il doit être, & : les qualités qu’il doit avoir pour remplir l’objet qu’on le propoie.

On fera furpris qu’après avoir profcric, il n’y a qu’i :n infiant, de la peinture en émail, tout ce que l’on peut regarder comme verres colorés , à caufe de la grande difficulté que l’on trouve à les employer au pinceau , on propofe ici de mêler du verre avec les couleurs ; mais il faut faire atte.Ttion que les couleurs auxquelles on le mâle , n’étant point vitrifiées, fervent de njoyen d’union entre l’huile de lavande <V le verre ; d’ailleurs , fl à deux matières difficiles à mêler ehfembie par la trituration, on en joint une troifiéme qui tienne un milieu entre les deux pi’eraières , ces trois matières fe mêlent ik i’e broyent beaucoup plus parfaitement. C’efr préciftment ce qui arrive ici,& l’expérience prouve que fila quantité du verre que l’on mêle avec les couleurs n’excède pas le poids des couleurs de plus de fix ou iept fois, elles coulent avec l’huiie au pinceau , !k. font fort aifces à employer.

Le verre que les artifies ont appelle Fondant , & : qu’on nommera ainfi dans tout le cours de cet ouvrage , eft de la plus grande importance dans la peinture en émail. C’eft lui qui donne de la liaifon & de l’éclat aux couleurs ; c’eft lui qui le,s fait pénétrer dans l’émail blanc du fond fur E M a :

lequel on peint , & qui , par ce moyen , en ren<î la beauté & la vivacité éternelles. Pour remplir ces conditions , il doit avoir plufieurs qualités, dont on va donner le détail.

I °. l-e fondant doit être général , c’eft-àdire, qu’il doit fervirà toutes les couleurs, quoique celles-ci foient tirées de différentes fubftinces ; il doit donc entter en fuflon avec toutes ces-qouleurs au même temps & dans le même inftant. S’il entroit en fuiion plutôt ou plus tard avec une couleur qu’avec une autre, on ne réulTiroit plus dans les mélanges qu’on eft obligé de faire des couleurs, pour produire les différentes nuances dont on abefoin. Il faudroit réferver de certaines parties de l’ouvrage, qui ne pourroit plus fe faire également & uniformément.

". Le degré de fufibilité àa fondait doit être proportionné à celui de l’émail du fond furiequel on peint ; il ell même effentiel qu’il Ibit un peu plus facile à mettre en fufion que cet émail. On lait que de deux corps qui le touchent , (î l’un eft plus ai fé à fondre que l’autre , la fuflon de l’un entraîne dans le moment celle de l’autre. La f^fion des couleurs entraînera donc celle du fond, & les y fera pénétrer. Au lieu quefi l’émail du f :nd entroit en fonte le premier , les couleurs qui auroient déjà paffé au feu pourroient en fouffrir , & la furface de celles que l^on viendroit de coucher ne prendroit pas le Uiilant : & le poli qu’elle devroir avoir. Au contraiie , fi e fondant le mettoit en fufion trop promptement, il ne pourroit pénétrer l’émail dufond, les couleurs refteroient defius , & formeroient un relief, ce qui produiroit un mauvais effet.

°. Le fondant doit être clair, net, tranfparent & inattaquable par tous les acides. S’il avoic de la co.ileur , il la communiqueroit aux matières colorées avec lefquelles on le mêleroit ; s’il pouvoir être attaqué par quelqu’un des acides , il le feroit à la longue par celui de l’air , qui terniroit enfin l’éclat de ; couleurs ; d’ailleurs , il ne feroit pas poflible d’expofer les ouvrages à l’eau féconde, pour les dérocher , fans couvrir la peinture de cire , ce qui fait une manœuvre peti sûre & fort embarralîante pour les artifies °. Il ne doit point entrer de plomb dans la compofltion du fondant ; on en doit bannir par confjquent le minium, le fucrc de Saturne, la • litharge, la cerufe • &c. en un mot , toutes les préparations dans lefquelles il entre du plomb , ou qui en font tirées. Ce métal , mêlé avec du fable & des Tels, le vitrifie très-aifement dès qu’on l’expofe au feu ; mais il le revivifie, ou { ce qui efc la même choie) il reprend fon état de métal avec beaucoup de facilité : l’air fuffic même quelquefois pour le revivifier, fans qu’il foit belbin du feu. C’eft à cette révivification du plomb qu’il faut attribuer en partie les changemens que l’air apporte dans la peinture à l’huile,.

E M A

ijiiel fervîce ne rendroit-on pas (i l’on pouvoît ’bannir les préparations de plomb de la peinture à l’huile, comme on l’a fait de la peinture en émail !

Les fondans faits avec des préparations de plomb, Ibnt cependant les ieuls qui nous foient indiqués daus le peu d’ouvrages que nous avons fur la peinture en émail. Le» artiftes qui ne connoiffoient point la nature dev matières qu’ils employoient , étoient fort étonnés de voir que les mêmes couleurs employées avec la, gomme , étoient plus brillantes que lorfqu’ils s’en ler-Voient avec l’huile eflentielle de lavande ; ils ne voyoient pas que l’huile étant une matière gi’alTe , quelque foin que l’on fe donnât pour la faire évaporer, il en refloit toujours afféz pour ■influer &• agir fur le plomb qui entrait dans leurs fondans.

On a vu que e fondant étolt un verre. Oneft entré dans le détail de toutes les qualités que ce verre doit avoir pour être propre à la peinture en émail ; il faut donc mettre toute fon attention à en compofer un qui les remplifle. On fait que le verre , en général , efl compofe d’aikali fixe & de terres vitrifiables , commele caillou, le fable ou le quartz. Mais comme la diflérence des matières & de leurs dolès, celle de la force & de "a durée du feu , donne des verres dont les qualités font tout- à-fait différentes , on fent bien qu’il faudroit faire un traité complet de la verrerie, fi 1 on vouloir encrer dans tous les détails qu’exige un art aufïï compliqué. On peut aifément s’en épargner une partie, en prenant d’abord un verre tout fait ; on en fera quitte pour fuppléer aux qualités qui pcurroient lui manquer. Diaprés un grand nombre d’épreuves que l’on a faites à ce fujet , le verre des tuyaux de baroromètres a paru le plus propre à remplir cet objet ; il efl : fort net & fort tendre ; & s’il n’a pa ? encore affez de fufibiiité , il eft facile de lui en donner une plus grande en le faifant fondre de nouveau avec une quantité fufSfante de fels. Après deseffais multipliés, on a pris le parti de ne fe fervir que du boiax calciné &. du nitre le plus purifié , pour attendrir ce verre & le rendre plus fufible.

Lorfquc le ver e qui réfulte de ce mélange , a été au feu pendant un temps convenable , il eft net, compaft , exempt de bulles & très brillant -, il ne pouffe point de fels, & ne peut être attai[ué par aucun des acides : il convient à toutes les couleurs, même à celles qui" font tirées du fer ; il le ;; met en fonte facilement & dans le même temps : il eft vrai qu’il a une petite couleur jaunâtre qui lui vient du borax , & qu’il feroit mieux qu’il n’en eût point du tout-, mais cette couleur ne peut rien gâter : elle efl : fi légère que b verre paroît très-clair & très-blanc lorfqu’il eft en laiaes fort minces , & la lame qu’il forme E M A’

riï

fur l’émail dans la peinture, efl : d’une finefle fingulière.

On a retranché^ autant qu’il a été poffible, de ce traité , les termes conlacrés à la chymie , pourne pas enibarroffer ceux des lefteurs qui ne feroient pas verfés dans cette (cience. Cepend.int on n a pas cru devoir fupprimer tous les détails qui rendent railbn des motifs qui ont dirigé l’auteur , o ; du choix de fes procédés : mais , pour épargner aux lefleurs étrangers à la chymie une lecture fatiguante , on a eu foin de marquer par des guillemets ee qui regarde effentiellement les opérations. Ainfi les peifonnes qui voudront s’en tenir à cette partie , pourront aifément palfer le refte.

» On ne peut réuffir dans une opération qu^autant que les matières qu’on y employé font » bien choifies & préparées avee foin ; il faut » donc prendre, parmi les tuyaux dont on fait » les baromètres, ceux dont le verre efi : le plus » blanc LV le pJus-ailë à fondre : il faut encore » fe bien affurer qu’il n’efl : point entré de plomb » dans la comncfition de ce verre ; pour y » parvenir, il fuffira d’expo’er l’extrémité des » tuyaux au fcuiïlg de la lampe ou du chalumeau • » des émailleurs ; on connoîira par ce moyen fi » le verre eft facile à fondre , & fi îa flamme ne » le noircit point, de façon qu’après i’ayoir nettoyé , la couleur noiie y refle ; dans ce dernier cas, il faudroit ablblument le rejetter » comme contenant du plemb ou qiselqu’autre » matière nuifible à la perfcâiion àa fondant. » Lorfqu’on s’efl bien afluré de la bonne qualité du verre, ilfaut l’écraferdaniun mortier de )) verre , de porcelaine ou d’agate , avec un pi-Ion de la niêmematière. On ponrroit , à la ri- ^ » gueur , fe fervir d’un mortier & d’un pilon de n fer, pourvu qu’ils fufl’ent bien propres ; mais » il faudroit enfuite avoir attention de, faire » tremper la poudre du verre dans de l’eati dans » laquelle on auroit rris environ un quart d’efprit de nitre ou d’eau forte , après quoi on lavetoit la poudre à piufisurs eaux, & affez » pour être sûr qu’elle ne contiendroit plus aucunes parties métalliques 5 puis on la feroit » fécher. Les mortiers de maibre étant trop tendres , communiqueroient. une partie de leur » fubftance au verre , ce qui demanderoit la » même purification par l’efprit de nitre que » pour les mortiers de fer. Enfin les porphyres » mêmes n’étant pas tout-à-fait auffi durs que » l’agate, ne font pas exempts de foupçon. Oa » eft obligé de i’en tenir aux trois efpéces de » mortiers dont on vient de parler. On com- >3 mence par concaffer le verre doucement & à » petits coups , de peur de caiïer le mortier que )3 l’on aura couvert auparavant ; lorlique ie verre » eft en poudre affez fine , on le triture dans le » mortier d’agate : on paffe enfuite la poudre 512 E M A » » » » » » n » » » » »

» » » »> par un tamis très-ferré , & on la garde pouf s’en Ibrvir. n II faut que le borax Toit calciné avant d’être mêlé avec le falpêtre , fans quoi il !e gonfleroitau feu au point de faire répandre hors du creufet la plus grande partie de la compodtion -, mais cette calcination exige une attention particulière. Après avoir concafle groiïiérement le borax , on le mettra dans le tond d’un creufet qui puixTc en contenir au mo’ns fix fois davantage ; on met ce creufet fur des cendres chaudes , & l’on range tout autour des charbons ardens , éloignés du creufet environ de deux ou trois pouces -, aullitôt que le feu agit furleborax, il commence à fondre & à fe gonfler extraordinaircment. Si le feu eft bien égal tout autour du creufet , il ne faut point y toucher jufqu’à ce que le bruit qu’il fait en fe calcinant , foit abfolument ctffé ; alors on retire le creufet , & il eft facile , avec un couteau , d’en détacher le borax qui eft très-fpongieux, très-léger & fort blanc. Si l’on donnoit , furtout dansle commencement, un feu trop vif, le borax fe vitrifieroit , & on l’ôteroit difficilement du creufet auquel il relleroit attaché. » Il n’y a point de préparation à faire au falpêtre -, il faut feulement avoir attention de le choifir bien purifié , fans quoi la compofition pourroit donner un verre de couleur verdâtre , ce qu’il faut éviter avec foin. Le falpêtre criftallifë en petites colonnes tranfparentes , eft le plus pur & celui qui donne le plus beau verre. DOSES. Poudre du verre de tuyaux de baromètre 4 g’"» Borax calciné a gros ii grains. Nitre ou falpê-.re purifié., 4 gros 14 grains. » Il faut commencer par bien mêler le falpêtre &le borax dans un mortier de porcelaine » ou de verre, avec un pilon de la même matière. On y met enfuite la poudre de verre, & » Ton triture bien le tout enfemble avec le pi-Ion pendant plus d’une bonne heure-, on laiffe » repofer ce mélange dans le mortier au moins » pendant douze heures ; arrès quoi on le met » dans un bon creufet d’Allemagne qui en piiiffe » contenir nois fois autant , & dont l’intérieur n a érc frotté auparavant avec le doigt & un peu n du blanc de ces pains que l’on fait à Rouen ; » cola empêche la compofiàon de percer le cretjfet. On a du chai bon allumé dans une cheminée ordinaire ; on place le creufet couvert au » milieu après en avoir écarté les charbons ; on » rapproche peu-à-peu les charbons du creufet, j> & on le découvre. Cette opération ne fauroit s> fe faire trop lentement & par degrés. Les Ver-E M A » r’ers appellent cela y^/ter la comporuîon , ce » qui efl proprement la purifier de toures lei » matières fufceptibles d’être brûlées, & : dont n la fumée pourroit gâter le verre. Toutes les » fois que l’on rapproche les charbons du creufet, il faut avoir foin de le bien couvrir, » parce que , s’il y tombait la moindre parcelle » de charbon , le verre feroit enfumé & gâté. » Lorfque l’on voit que la compolition commence à rougir, on met le couvercle fur le » creufet, & on l’environne de charbons ardens ; on entretient le feu ainfi pendant environ deux heures, après lefquelles la matière » ayant bouillonné & fait tous fes gonflemens, » fe trouve ralfife au fond du creulet ; on laiffe » éteindre le feu , & lorfque le creufet efl froid , » on voit au fond la compofition qui paroît » opaque & d’un rouge très-foncé. On couvre le » creufet & on l’envoyé pour être placé fous le n four où l’on cuit la porcelaine, dans l’endroit n le plus expofé à la vivacité du feu, pendant » tout le temps que la porcelaine efl à cuire. On y> ne lute point le creufet avec fon couvercle, » parce que l’on a remarqué que le lut venant » à fe vitrifier de bonne heure , couloir quelquefois dans le creufet, & gatoit la compo» » ûtion. » On doit fe fervir de creufets d’Allemagne, )> parce qu’ils tiennent mieux le verîe en fonte ; » il y en a cependant au travers defquels le » verre paffe lorfqu’il efl en fufion ; on s’en apn perçoit aifément, lorfqu’après avoir expofé le » creufet au feu pour frirer la compofition , » comme on vient de le dire , on reconnoît les » fels qui fe font mis en fonte , ^ qui fe font » voir au dehors du creufet , au point que même » quelquefois il s’y attache de la cendre ; alors » on nettoyé bien le creufet par dehors , & on » le fait entrer dans un fécond creufet , de façon » que le creufet dans lequel efl la compofition , » ne touche pas le fond de celui dans lequel on n l’a emboîté ; par ce moyen le verre qui paffeia » au travers du premier creufet , fe trouvera » raffemblé tout entier dans le fécond ^utre fondant général. » Comme il peut arrîver que l’on ne fe trouve point à portée d’avoir » des tuyaux de baromètres, au lieu de fe fier » aux autres efpèces de verres qu’on pourroit » leur fubflituer , il eft beaucoup plus sûr d’en » faire un foi-même avec les matières premières j n il efl vrai que cette manière de faire lefondant , demande la plus grande attention dans » la manipulation , & qu’elle ne peut être portée à la perfedion qu’après plufieurs opérations » fur la même compofition. » La matière dont on compofe le verre , doit » être un fable très-blanc ( celui de Nevers eft » le meilleur ) -, on le fait calciner fous le four n d’une fayancerie , après l’avoir lavé à plufseurg eaux j fi l’on craint de n’avoir pas un "" » jfTej

E M K

rr-’iffez beau fable , on peut y fubftituei" des pierres à fufil noires ,>que l’on réduit en poudre 5> blanche ; il fiifBt , pour cela, de les éteindre » dans l’eau froide , après les avoir fait rougir » au feu : il faut répéter cette opération, jufqu’à ce qu’elles deviennent fiiables. Cette » poudre , quel’on niêleavec du borax calciné , » du (a !pétré& un peu d’arfenic, fait un beau 1» crf fiai bien compad & très-brillant. » Le grand point efl : de ne mettre dans la » compofition que la quantité de borax & de » falpêire nécetlaire pour difToudre le fable 8c le « vitrifier : lorfqu’on en met plus qu’il ne faut , » l’excédent s’attache aux parois du creufet , B qui, étant fouvent d’une matière mêlée de » fer , fait un verre de couleur verie & dur, qui 9 fe mêle avec celui de la compofition, &. la 3» gâte entièrement. On voit par-là qu’il efl im-V poffible défaire, à la première opération, un » verre aufli pur & auffi facile à fondre que le « doit être celui dont on a befoin pour mêler V avec les couleurs dans la peinture er. émail. » Il faut donc commencer par faire un verre » très-pur & tres-net, en ne mettant que la » quantité de borax & de falpêtre nécefTaire » pour vitrifier le fable. Lorfque ce verre efl p fait, commeil fe trouve tropdifficileàfondre , » on le retire du creufet après l’avoir caffé ; on » en ôte avrc grand foin ce qui pourroit s’être » attaché à la matière du creufet. On écrale ce » verre dans un mortier, comme on l’a dit de » celui des tuyaux de baromètres ; on le fait » paffer au tamis , & on le remet au feu de nouveau, en y ajoutant du borax & : du falpêtre , » & en obfervant du refte les mêmes précautions » dont on a parlé. Si ce verre ne fe trouvoit » point encore affez fufible , on le remettroic » au feu en y ajoutant de nouveau du borax & « du falpêtre , mais en moindre quantité. PREMIERE COMPOSITION.

E M A

jij

DOSES.

Sable de Nevers calciné... 4

Salpêtre très - purifié j

Borax calciné 2,

Arfenic 8

gros,

gros,

gros i8

grains.

grains.

» Il faut commencer par bien broyer îe fable dans un morrier d’agate. On triture enfemble, à l’aide du pilon , le falpêtre ik le borax dans un mortier do verre ou ce porcelaine, après quoi on y mêle l’arfenic & le iable -, on continue de triturer le tout enfemble au moins pendant une heure -jon laifie repofer la compofition dans le mortier pendant un jour ,• on la met dans un creufet dont le dedans a été frotté de blanc ;on met le creufet au feu pour friter la compofition -, & enfin on le place après Beaur-^rts. Tome II,

» cela fous le four d’une manufaclure de porcclaine , le tout en obfervant les précautions que n l’on a prefcrites pour le fondant fait avec les » tuyaux de batomètres. La feule dlft-irence qui » fe trouve entre ces deux opérations , c’eft » qu’après avoir frite la compofnion du fonàanc » de tuyaux de baromètres , on a dît qu’elle » étoit d’un rouge forcé, & que celle-ci en » fortanr d’être fritée , fe trouvera prefque blanche,

n’ayant qu’une très-légère teinture de

» rouge , parce qu’il n’entre point de manganefe » dans cette dernière compofuicn, & qu’il s’en <9 trouve dans la cumpofition avec laquell-e on » fait le verre de tuyaux de baromètres. » Cette compofition, après avo’r eu fi ffifamment de feu , donne un beau crvftal , très-net » & : très-brillant, qui pourroit même fervirà » faire de belles pierres de couleur , fi l’on » ajoutoit, dans la compofition, des chaux tî- »

»

»

rées des métaux , fuivant la co’ileur qu’on pourroit dtfirer ; mais comme il fe trouve trop dur à fondre pour l’émail, il faut cafl’er le creufet , ôter avec le plus grand icrupuîe tout o ce qui fe pourroit trouver des parties du creufet attachées au verre , le piler enfuite dans » un mortier de porcelaine ou d’aga’e , le taniifer, & en former la compofition fuivante. SECONDE COMPOSITION.

DOSES,

Poudre du cryflal cl-defftis. 4 gfos. Salpêtre très -purifié... ., . x gros 48 grains. Borax calciné i gros 2,4 grains. V On prendra exaflement, pour lamanipulau tion de cette compofition , les mêmes prccaurions que l’on a prefcrites pour le fondant qui » fe fait avec le verre des tuyaux de baromètres ;’ a lorfque le creufet aura été fous le four d’une » manufafture de porcelaine, pendant tout le » temps de la cuiffon de la porcelaine, on aura » un beau verre bien compaâ 8c très-brillant , » quoiqu’un peu jaunâtre-,il fe parfonddans un » temps égal à ce que met pour entrer en fufion celui qui efl : fait avec les tuyaux de baromètres, & il a même un peu plus d’éclat &. n de vivacité. Chacune de ces opérations pron duit ordinairement 6 gros de fondant tout » épluché , lorfqu’il n’en a rien pafTé au travers » du creufet.

» Pour bien éplucher le fondant, c’e(l-à-d !re, » pour ôter du verre toutes les petites parties du » creufet qui pourroient y être refiées attachées, » on vifxte chacun des morceaux du verre , après n avoir caffé la creufet, 8c avec la panne d’un » marteau , on fait fauter ce qui eil refté du » creufet Lorfque les morceaux font trop gros , » pour que cela fc falfe aifément , on les cafFs Tt t

514

É M A

» en plufieurs autres , & avec de petites pinces » on égrife ce qui pourroit Ce trouver de malpropre. Il faut ainfi paffer tous les morceaux » en revue , & n’en pas mettre un (eul qui puiffe » être tant (bit peu ibupçonné,

» Toutes ces opérations font en petites dofes , » parce que l’on a remarquéqu’en les faifant en » trop grandes dofes , la compofition éioit fujette à paflerau travers du crpufet. Il faut awiVi » faire attention que,fi l’on n’obferve pas fcriipuleufement toutes les manœuvres indiquées, » ou fi l’on ne tra^zille pas avec la plus grande » propreté, on ne doit pas Être furpris de trouver des réfultats tous difFerens , & : de ne pas » réuffir. »

On a reconnu que le fondant, qui vient d’êtie drcrit, broyé, tam’ife , & : gardé en cet état pendant deux ou trois ans, s’altère, & que le poli oirle luifanc des couleurs n’eft plus aiilh parfait ; il faut donc n’en broyer qu’une petite quani ;é à la fois , ou bien il faut paffer un peu d’eau féconde fur le fondant broyé que l’on fourçonne ; c’efl-à dire , le laifTer léjourner quelque temps dans de l’eau mêlée avec un peu d’efprit de nitre ou d’eau forte ; on lavera enfuite ce fo>dant broyé dans plufieuri. eaux, & on le fera fécher ; par cette opération il reprendra toutes les qualités qu’il avoit auparavant. Au’ relie, cet inconvénient ne doit point étonner, puifiqu’iî arrive auin à l’empli/ blanc dont on fait les fonds ; les éraailleurs s’en délivrent en prenant les précautions que l’on vient de rapporter. Tous les chymiftes tombent d’accord que c’ell un fluide qui eft le principe ou la caufe des couleurs ; ils conviennent en même temps que ce fluide eft fi fubtil, qu’il pénètre tous les corps, & qu’il eft l’ame ou l’agent de tous les phénomènes de la nature. Les uns le regardant comme le principe du, feu , l’ont appelle fimplement matière inflammable ; d’autres l’ont mommé foufe principe ; enfin Stahl lui a donné le nom de pklo^ijîique ( r ) , qui a été adopté par tousceuxqui l’ont fuivi. Le phlogifVique n’ayant aucune couleur par lui-même , & étant toi ;ioL.rs intrinféquement de même nature , tiC peut occafionner tant de variétés de couleurs dms les corps, qu’autant qu’il y rencentre une bai’e à laquelle il s’unit en plus ou moins grande quantité. C’cfl à la quantité du phlcgifllque, à la nature de ccae baie , & à la façon dont il eft combiné , qu’il fjut attribuer la variété des couleurs. Cela pofé, li le phiogiftiqiie eft légèrement combiné , il produit certaines couleurs ; s’il l’eft plus fortement ou en plus grande quantité , il en produit d’autres. Les chaux de plomb (i) Nous couferverons le mot phlogiftiqtie par-tout ou il eft employé par M. de Moniaray , cjuoique defuis les idées &. le langage des chimistes aient changé. É M A

différemment colorées, fuivant les dîfFérens dégrés de feu qu’elles ont foufferts , ne laiffent rien à defirer fur la vérité de ce que l’on avance ici. Il faut trois chofes pour faire un verre coloré. °. Unefubftance qui mette la matière vitrifiable en fufion.

°. Une lubftance qui fe vitrifiant avec elle, foit de nature à retenir la phlogiftique. ". LTne fubftance qui fourniffe le phlogiftique , & dans laquelle il Ibit allez fixe pour n’être pas diflîpé par le feu , avant que le verre foit en fonte.

Ce qui arrive dans les procédés qu’on vient de donner, pour faire tes deux efpéoes de fondans ci-deffus , paroît conforme à ces principes ; la couleur rouge foncée que prend la compofition dans le procédé du premier fondant , a été produite par le phlogiftitjue du nitre , qui venant à pénétrer le verre des tuya. x de baromètres en fulîon , y demeure fixé par la manganefe , qui avoiiété employée dans la première origine de ce verre.

Dans le procédé du fécond fondant ou il n’entre point de manganefe , cette couleur rouge ne paroît point , parce que le phlogiftique du nitre ne trouvant point de matière qui le fixe, paffg tout au travers de la compofition , & fe diiïïpe par la force du feu. Ce n’eft point la manganefe feule qui a produit cette couleur foncée, puifqu’il n’en paroiffoit aucune dans le verre des tuyaux de baromètres, puifque cette couleur lorfqu’elie a paru , s’eft diffipée à mefure qu’elle eft reftée plus longtemps expofée au feu. La manganefe cependant continue de refter dans le verre ; carfi l’on vient à le remettre au feu avec du nitre , la couleur rouge foncée reparoîc de nouveau, parce que la manganefe, à qui la force du feu avoit enlevé le phlogiftique du nitre, en étant débarraffée, fe trouve, par ce moyen , en état d’arrêter encore le phlogiftique que lui fournit le nouveau nitre. D’où l’on voit que , dans ce procédé , c’eft le bo’ax qui a mis

!e verre en fufion ; que c’eft la manganefe qui a 

re.en-u le phlogiftique qui a coloré le verre & que c’eft le nitre qui a fourni le phlogiftique. On a fait entrer l’arfenic dans la compofition du fe>.ond fjndant à la place de la manganefe non-feulement parce qu’il eft lui-même un fondanr , mais encore parce qu’étant extrêmement vo’iaril, il entraîne avec lui, en fe fubliraant, les fubftances qui auroient pu donner de la couleur au verre, ce qui lui donne plus de netteté & de brillant. Il faut cependant prendre garde que la dofe n’en foit pas trop forte ; parce que, dans ce cas, il nuiroitàla tranfparence du verre, & le rcndroit laiteux.

Après avoir vu les raîfons qui ont engagea retrancher abfolument de la compofition du fondant toutes les préparations de plomb , on pourroit demander pourquoi on ne les bannit pas auffi É M A

, delà compofition de l’ema// blanc, danslaquelle I entrent ce->préparationb. Ne doit-on pas craindre que les couleurs qu’on applique par-deffus , ne revivifient !e plomb, & ne le trouvent par-li I noircies & : garées ? Il efi ; certain que cela ne I manqueroit pas d’arriver s’il n’entroit que du plomb dans la compofition de Vémall blanc ; I mais il faut faire attention que le plomb v efl combiBe avec l’étain : tout le monde fait combien la chaux de ce dernier métal efl : difficile à , revivifier , quelque feu qu’on lui donne , quand on ne l’a pas mêlée avec des matières grafTes , parce q^’il n’y a qu’elles qui puiflent rendre à l’é ;ain le plilogiftique qu’il a perdu. C’eft donc l’éiain qui empêche, dans la compofition de ^ lé.nail blanc , que le plomb ne foit aulli fufcep-J tible d’être révivifié, qu’il le feroit fans cette ( eombinaifon.

j Le fondant fait , dans la peinture en émail, r le même effet que l’huile , la gomme ou la colle font dans les autres peintures ; lorlqu’il entre en

r.fion,il fert de lien entre les petites molécules

’i de la couleur , & il ies attache en même tempsà . lafjrface de l’cm^zi/ blanc , & vitrifie les cou-’ leurs avec lui ; il fuit de là que l’on ne doit point fe flatter de pouvoir employer les fubftances . dont le^feu enléveroit la couleur -avant que le ’ fondant lui-même filt entré en fufion ; telles font I celles qui font tirées des végétaux , & :c. Ma’s comme .] fe trouve des l’ubftances qui fe vitrifient avec le fondant plus ou moins facilement fin efl obligé d’obferver fur chaque couleur la . quantité de fondant qui lî.ii efl : néceffaire pour la faire entrer dans une parfaite vitrification. Si l’on met trop peu de fondant , la couleur relie bien attachée fur Vém ail hlznc ; mais le fondant n’étant peint en affez grande quantité pour la pénétrer & la vitrifier , elle refte terne ’& fans auctin luifant. Si l’on met trop de fondant , nonfeulement l’on affaiblit la couleur, mais elle . s’étend & s’imbibe dans rem.7/i blanc ; les contours ne font point exafts & terminés, & les traits déliés deviennent toiit-à fait impoifibles ,

! parce qu’ils ne relient point tels que le peintre 

’. les a faits.

Il faut donc avoir grand foin d’examiner les , petits elTais que l’on fait de chaque couleur, afin de favoir fi l’on doit diminuer ou augmenter la quantité du fondant ; on en jugera aifement par les remarques que l’on vient de fa re. Il pourroit cependant arriver qu’une couleur exigeroit une trop grande quantité de fondant , pour que la peinture eût le luilant qu’elle doit avoir. On a éprouvé que lorfqu’on mettoit avec une couleur plus de fept foisfon poids de fondant, elle étoit difficile à employer, parce qu’alors la couleur ne coule point facilement au pinceau, & Ion retombe prefque dans le même inconvénient qu’on éprouvoit , quand on peignoit avec, ^u verre : dans ce cas, il n’y a d’autre parti à É M A

r^r

prendre que d’abandonner cette coi ;Ieur, & de fe retourner d’un autre côté.

Il re.le cependant un moyen , mais dont il ne faut fe fervir que dans la dernière nécelTité S’il arrivoit qu’après l’ouvrage fini, on vînt à t’appercevoirque quelque couleur n’eût pas pris le luifant que doit avoir l’ouvrage total , on pourroit y remédier par le moyen du fondant que 1 ou broyeroit pendant longtemps l’ur l’agate avec de l’eau fimple , &" que l’on appliqueroit avec le pinceau , uniquement fur l’endroit qui n’a pas pris le luifant ; fi , après que l’ouvrage efl fec , on le met à parfondre de nouveau, l’endroit qui n’étoit pas luifant fe trouvera rétabli. Le fondant bien broyé avec l’eau , fera une couleur blanche qu’il faut avoir attention de coucher avec la pointe du pinceau, Si fi claire, qu’elle ne forme fur la couleur que l’on veut rendre luifante, qu’un petit nuage prefque Itu» perceptible.

On en a dit aîTez fur le fondant : il faut préfentement parler des couleurs avec lelquûlles on le mêle. On va les traiter férarémtnt , en commençant par le blanc, comme la plus utile pour former , avec chaque couleur, les différentes nuances ou teintes, dont le peintre peut avoir beibin.

Le Blanc. Si les peintres en émail d’aujourd’hui ne le fervent point de blanc dans leurs ouvrages, ce n’eil pas qu’il ne leur foit bien néceffaire ; la difficulté d’en avoir de beau , jointe à celle de pouvoir l’employer avec facilité, les a déterminés à s’en palTer ; pour y fuppléer, ils ont pris le parti de ne peindre que fur des fonds blancs , & ds fe fervir du fond , en l’épa’gnant , pour produire les blancs & les clairs dont ils ils peuvent avoir befoin.

On fera peut-être furpris de ce qu’ils n’one pas cherché à employer , pour leurs blancs , la même matière dont ils fe fervent pour les fonds, c’eft-à-dre , Vémail blanc ; mais il faut faire attention que l’émail efl un verre , & que l’on a vu qu’il étoit impoillble de peindre fimp’emenc avec un verre. D’un autre côté , il no faut pas . que la couleur porte d’épaiffeur fur le fond , ce qui ne manqueroit pas d’arriver fi l’on fe fervoic d’e'mji/ blanc : La difficulté étoit de ménager îe fond pour faire paroître le blanc dans les petites parties oià il étoit abfolument indiPpenfable de le voir pur ; par exemple, dans une tête, les deux petits points blancs qui doivent être fur la prunelle , devenoient impoflibles à ménager pac leur extrême petiteffe. C’eft ce qui a quelquefois obligé des peintres à ne mettre ces points blancs dans les yeux , qu’après qu’ils étoient entièrement finis ; & pour cela ils choifuToienc dans de l’e'/naiV écrafé deux petits grains qu’ils colloient avec de la gomme , & ils les falfoiene T ttij

i^

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-enfuite légèrement parfondre pour leur donner àe la rondeur & les attacher.

Lorrqu’on étoit afTez heureux pour avoir une couleur foncée & folide , on n’avoît aucun moyen pour l’éclaircir & en faire une fuite de nuances différentes ; fi par malheur cette couleut devenoit plus foncée au feu & ne le trouvoit plus d’accord , i] ne refloit pas d’efpérance de pouvoir raccommoder ce défaut. Si une couleur le trouvoit dégradée par le feu , on ne pouvoir y remédier en mettant une autre couleur par dcflus , puifque cette dernière la’fToit toujours apprrcevoir les défauts de celle qui étoit deffbus ; ies reflets & les coups de lumière qui donnent de la rondeur & de la vérité aux objets, étoient toujours mal exécutés. Des couleurs cjui s’é'endoient trop& s’imbiboient dans les fonds ; des fentes iv des œiUers qui furvenoient dans les feux ; tout contribuoit à défoler un artifte, qui voyoit perdre ou devenir défeélueux, en moin,’, de deux minutes, un ouvrage qui lui avoir covlté cjuelquefois philieursmoisde travail. On ofe aff’urer qi ;e le blanc , don ; on va donner la compofirion , remîdie à tous ces inconvéniens , & que , par fon moyen , le peintre en email pourra compofer une palette de couleurs avec autant d’étendue & : de facilité qu’un peintre à l’huile. Il fe mêle également bien avec toutes les couleurs, fans leur donner aucune épaiffeur ;il leur donne même de la force, & ■ les met en état de (butenir tous les feux fani fe dégrader. On n’eft point obligé de ménager aucune partie des fonds, & l’on peint large ; ce t]ui fait que la peinture paroît mieux empâiée & plus mnëileufe. Ce blanc s’cmploye trèi-facilement ; ainfi on peut, par Ton moyen , rehauffer les couleurs & donner des coups de lumière où le peintre en a befoin. S’il arrive que quelques-unes des couleurs n’ayent pas réufli , on peut peindre par defTuS Se raccommoder l’ouvrage fans que les couleurs qui font deflbus , puiffent nuire. Si , en paffant l’ouvrage au feu , il arrive qu’il fe fafle un œillet ou quelque fente, on perce l’œillet avec un diamant, on remplit le troti avec le blanc mêlé de la couleur qui convient , on fait pa-rfonjre, & on peint deffus comme s’il n’étoit rien arrivé : on raccommode de même les fentes. Lorlirju’on doute de la qualité de Vémail , dont on s’eft fervi pour le fond , on peut , avant de peindre , mettre une couche de blanc tur toute la pièce , & la faire parfondre enfuite fous lamoufle ; on fènt aiiément que les couleurs deviennent alors plus analogues au fond , & font moins fujettes à foufFrirun changement. D’ailleurs, fl le fond avoit quelques taches , cette manœuvre empêcheroit que les couleurs puiffent en être gâtées.

Puifqu’au moyen du blanc on eft le maître â’é end.e les nuances des couleurs autant qu’on is dciire, il paroît ^u’à la rigueur , furtout lorf-E M A ■

qu’on peint en camayeu , on pourroït fînîr nlJ ouvrage en ne le failant pafTer qu’une fois au feu ; ce qui lëroit un grand avantage , principalement pour la peinture fur la poryelainc. Entre tous les métaux dont les diflblutions donnent des précipités blancs , Tétain paroît le plus propre à fournir le blanc dont on a befoin. On tire des précipités blancs du plomb & du bifmuch qui fe vitrifient aifément ; mais la moindre fubflance étrangère eft capable de les réduire, c’eft-à-dire , do leur reftiiuer leur forme métallique. Il n’en eft pas ainfi de l’étain dont la chaux fupporte un très-grand feu fans fe revivifier ; d’ailleurs , cette chaux fe mêle aifément avec le verre en fufiorî qu’elle rend opaque. blanc & facile à mettre en fonte ; elle a aufli l’avantage d’entrer pour beaucoup dans la compofition de l’émail blanc , fur lequel on peint, ce qui rend le blanc qu’on en tire, plus analogue au fond , & plus propre à s’y joindre. Il n’eft donc plus queftion que de trouver un moyen pour calciner l’étain , de façon que’la chaux enfoit extrêmement blanche. Parmi tous les difiérens procédés que l’on a effayés pour parvenir à ce but , il n’y en a point qui ait mieux réuffi que la calcination de l’étain par le fel marin. Il eft eflentiel que les chaux mé’alliques que l’on employé dans la peinture en émhil^ foient délivrées d’acide autant qu’il eft poïïible ; celui du fel marin eft plusaifeàchaffer que celui du vitriol , & mêtne que celui dû nirre ; d’un autre côté , le fel marin contient une bafe alka» line, très-facile à mettre en fufion, & propre par fa nature à rendre le verre opaque & : blanc par l’extrême divifion dans,laque !le elle eft. » Le choix de l’étain eft important à caufe de » la variation que l’on trouve dans les différens allisges que les potiers d’éta^n y mêlent, » S’il étoit poffible d’en trouver oïl il ny eût n point du tout d’alliage , ce feroit, fan’s contredit , le meilleur ; mais coinme il eft très-difficile de faire venir celui que l’on connoît » en Angleterre foi.’S le xom à’éiain vierge, oa n a.pris le parti de fe fervir de celui que les potif ^rs d’étain appellent cîain heuf ou haitt » doux.

» Pour le fel marin, le pliis blanc eft le meil-r n leur ; on le prend de i’efpéce de celui que n l’on met fur les petits pots de beurre qui vienncnt de Bretagne. Il eft encore mieux, pour n le purger de toutes les falerés qui pourroient « s’y rencontrer, de le faire diffoudre en v^rfaot « de l’eau deffus ; on filtre cette eau en la faifant paffsr au travers d’un papier gris. On la. » met fur le feu dans un vafe de terre ou de » porcelaine bien propre, jufqu’à ce que l’eaa » s’étant évaporée fur le feu , laiffe le fel à fec ; » par ce moyen, il fe trouve très-blanc : oa » met ce fel dans un creufet qui n’ait point encore feryi : on le couvre , j& on le tient au feu E M A

fe iufqu’à ce qu’il ne fe faffc plus de craquement » ou de décrépitation.

DOSES.

Etain doux , i gros.

Sel préparé 2 gros.

E M A

yi ?

» On commence par mettre un creufet à rougir dans le feu , après l’avoir couvert , de peur qu’il n’y tombe du charbon ou de la cendre ; lorfque le creufet cft rouge, oti y met l’écain , on le recouvre , & on le laiffe ainfi , jufqu’à ce que l’on juge que i’étain foit nonieulement fondu , mais même qu’il foit rouge ; alors on met dans le creufet , fans le retirer du feu , le double du poids de I’étain , de Tel marin préparé comme il a été dit. On remue j :iqu’au fond du creufet avec une baguette de fer, dont on fait châiifîérle bout, afin de bien mêler enfemble I’étain fondu & le Tel. On recouvre le creufet que l’on continue à tenir bien entouré de charbojis ardens ; on le découvre par intervalles pour remuer avec labaguettede fer, dont le bout eft propre & chauft’é. Lorfque le bout de cette baguette commerce à blanchir , c’eft une marque que la calcination eft : bien avancée : on continue cette manœuvre pendant près d’une heure, après quoi on retire le creufet du feu, » On écrafe la maiière qu’on a tirée du creufet , dans un mortier de verre ou de porcelaine , & on la met dans une capfuls , qui n’eft : qu’un tefTon des petits pots de grès , dans lefquels on apporte le beurre de Bretagne. On met cette capfule au milieu des chaibons ardens , en prenant bien garde qu’il n’en tombe dedans , & on la couvre d’une moufle ouverte parles deux bouts. La moufle eft une petire arcade de terre à creufet , qui empêche la charbon de tomber dans la capfule. On met d’abord peu de charbons ardens fur la moufle , & on augmente enfuicelefeu pardegrés, jufqu’à ce que la moufle foit couverte par-deffus , par devanr & par derrière de charbons ardens. On continue le feu de cette façon pendant trois bonnes heures ; après quoi l’on dégage la moufle du charbon qui eft : autour , on la lève , & , avec des pincettes , on retire enfuite du feu la capfule.

» On trouve la matière affez dure & un peu attachée à la capfule ; on la fait tomber avec la lame d’un couteau , dans un mortier de verre oa de porcelaine, & : on la broyé bien longtemps avec un pilon de la même matière. » Lorfque la matière eft : réduite en poudre , on la met dans un grand vafe de verre ou de cryflîal , & on verfe deffus de l’eau filtrée très-chaude , jufqu’à ce que l’eau furpaffe la matière de deux ou trois doigts. Alors on » agite fortement cette eaa avec une lame de » verre ou de cryftal , & tout de fuite on verfe » l’eau en penchant doucement le vafe , & prenant garde de ne pas verfer ce qui fe trouve » au fond : on remet de nouvelle eau chaude » fur la matière qui eft : refl :ée au fond, qu’oH

! « agite & qu’on reverfe enfuite, comme on a 

n fait la première fois. On continue cette ma- )j nœuvre tant que l’on voit que l’eau chaude » que l’on a remife , devient blanche ; on garde » ce qui eft demeuré au fond , & qui ne teint » prefqae plus l’eau. En broyant ce refte fur » une agate ou fur une glace , & reverfant da » l’eau deffus , comme on a déjà fait , on en tireroit encore un blanc ; mais qui n^^étant pas » de la même fineffe & de la même teauté que » l’autre, ne pourroit fervir que dans les mê-. » langes des couleurs.

» On laiffe reposer routes ces eaux blanche» » dans le vafe où on lésa verfées enfemble, julqu’à ce que la matière blanche qui les teint , felbit précipitée au fond , & que l’eau foit devenue claire ; on verfe doucement cette eau claire , ik. on remet de nouvelle eau chaude fur la matière qui eft reftée au fond ; on continue à changer cette eau lorfqu’elle eft devenue claire, & à en remettre de nouvellejufqu’à ce que l’on juge que les eaux ont entiérement emporté, l’acide du fel. Ordinaire- )) ment fur trois gros de matière fur laquelle on » a mis un demi feptier d’eau , il fuffit d’avoir 53 renouvelle cette eau à cinq ou fix reprifes. ■a On tranfporte enfuireleblanc dans un grand pot de terre bien verniiTé , contenant au moins deux pintes ; on achevé de l’emplir d’eau filtrée , & on la fait bouillir à gros bouillons pendant doux heures, en remettant de nouvelle eau chaude à la place de celle qui s’évapore. Plus ce pot contiendra d’eau , & mieux » l’opération réufTira. On ôre le pot du feu , & B on laiffe repofer l’eau pendant plufieurs heures ; » après quoi on panche doucement le pot,& » l’on décante l’eau tant qu’elle fe trouve claire 5 » on verfe le refte dans un gobelet de verre , n qu’on achevé de remplir d’eau fraîche ; on » vuide cette eau lorfqu’elle eft claire , & oa » verfe le blanc dans une foucoupe ou dans une » taffe à café. Un jour après , lorfque 5e blanc » eft tout-à-fait dépofé au fond , on applique » dans l’eau qui le furnage , une mèche de coton que l’on a imbibée d’eau auparavant , & » dont le bout qui pend hors de la taffe, eft » plus long que celui qui eft dedans. L’eau s’é- > coule ainfi peu à peu , & le blanc refte à fec, » On couvre la taffe avec un papier pouf empêcher la poulîière d’y pénétrer , & on laiffe fécher le Ijlanc ainli tout-à-fait ; ou , fi l’on efï’ » preffé , on met la taffe fur la cendre chaude. » Cette poudre broyée fur ufte agate , avec sa

i8 E M A

» peu d’eau & trois fois ("on poids du fondant , » donne un trcs-bçau blanc. .

» On a vu qu’après qu’on a Isivé , aufortir de » la moufle , à plufieurs eaux , la matière dont j) on tire le blanc , il en relloit au fond du vafe « une partie qui ne teignait plus l’eau , qu’on » appellera le’marc ; fi la calcinaeion n’a pas été » aflez ferre , ce marc refléta d’un gris brun , & » dans ce cas il ne peut être d’aucun ulage. Si la » calcination a été affez forte , le marc fera d’un » grisbîanc ; d^ns ce cas , il faut le broyer fur » une agate ou fur une glace , en l’humeflant » de temps en temps avec un peu d’eau ; fi on le » broya allez longtemps , il devient très-blanc ; » on le lave enfuite à plulieurs eaux, & on le » fait bouillir dans un grand pot , comme on >> a fait le premier blanc , dont il dilîere affez » peu pour la bonté tk la beauté. Ce blanc pourroit être employé dans la peinture en huile, » aveclaquelle il le mêle très-bien. Ilneferoit » fujetà aucun des défauts du blanc de plomb , » qui, par la fuite du temps, noircit les couleurs , & les fait changer de ton. » Si l’on a employé un gros d’étain avec deux » gros de lel , on trouvera que le tout pefera » 3 { gros après la calcination ; ce qui donne » -j gros d’augmentation. Après toutes les purifications par l’eau, on aura •’- gros 32 grains » pour le blanc fin , prêt à être employé. » Ce qui refle ou ce qui ne s’efl : point détaché H dansles lotions, & qu’on appelle le marc, après » avoir été broyé & purifié comme le premier » blanc , pefera 56 grains ; le tout pelant 1 gros » 31 grains , il y aura par conféquent 32 grains » de la bafe du fel marin , qui fe trouvent unis à » la chaux del’étain , puifque l’on n’ayoit employé qu’un gros d’éiain.

» On manquera l’opération ci-defTus , fi l’on 8 n’a pas eu foin d’employer l’étain le plus pur & j» le plus fin que l’on puilTe trouver chez les » marchands.

» Si dans la calcination il efl tombé quelque » peu de charbon ou de cendre dans le creufet » ou dans la capfule.

» Si le charbon dont on s’efl : fervi, n’a pas » été parfaitement allumé avant de s’en fervir. » Si la calcination n’a pas été affez vive & » affez longue.

» Si l’on n’a pas verfé de l’eau fur la matière » aulFitôt après la dernière calcination ; & fi on » lai a lailTé ie temps de prendre l’humidité de a Pair.

» Enfin , fi en dernier lieu on n’a pas fait » bouillir le blanc dans une affez grande quantité d’eau , & affez Tongtemps.

» On ne fauroit trop recommander , furtout » dans cette opération , la grande propreté qu’il » faut pouffer jufqu’au fcrupule». Puifque les opérations fur lefquelles la peinture en émail eft fondée , confiftent principale-É M A

ment à réduire les métaux en chaux pour en compofer les couleurs , il efl à propos d’examiner les difFérens moyens que les chymifles peuvent mettre en pratique pour y parvenir. On peut les réduire à deux -.l’avoir, la voie humide&la voie féche.

Par la voie humide , après avoir fait diffoudre le métal dans les diffolvans ou menffruesqui lui font propres , on cherche à en féparer les fels qui ont produit la diffolut ion ;il paroît que , pour en venir à bout, ci pourroit limplement, après avoir fait évaporer la diffolution jufqu’à parfaite flccité , & avant qu’elle eût pu reprendre de l’humidité de l’air, mettre le réfîdu dans une capfule ou teffon de pot de grès , pour le porter tout de fuite fous une moufle , que l’on ehtoureroit de charbons allumés , en les approchant peu à peu , par dégrés , jufqu’au point d’en couvrir la moufle. On croiroit parvenir ainii à enlever les acides par la force du feu , Se à délivrer la chaux du métal , que l’on édulcoteroit enfuite à plufieurs eaux, poLir emporter ce qui pourroit y être reflé.

Mais cette manœuvre eft défeftueufe à plufieurs égards. Quelquefois les fels qui compofenc le diffolvant, & qui reftent joints à lachaux du métal après que la diffolution a été pouffée à ficcité , in mettent en fufion par la force du feu avec la chaux du mctal. Si , dans ce cas , on tente de les enlever par l’édulcoration , la diffolution fe remet dans fon premier état , & l’on n’eff pas plus avancé qu’au commencement : cela arrive dans les travaux qi,ie l’on fait fur le cuivre. Souvent une po tion des acides relie fi fortement attachée aux partie^ métalliques , & les pénètre de façon que le tcu le plus violent ne peut l’en féparer totalement : cela arrive quelquefois ( furtout lorfque la diffolution a été faite par l’acide vitriolique) , dans les diffolutïons faites par l’acide du nitre ; le feu néceflaire pour enlever l’acide , ayant en même temps enlevé tout le phiogiflique de la chaux métallique, cette chaux le vitrifie ou fe fond trè^-malavec le verre quî lui fert de fondant , & donne des couleurs ternes & : fauffes. Le blanc que l’on peut tirer de la détonation de l’étain avec le nitre, tombe dans ce défaut, malgré toutes les édulcorations que l’on peut lui donner.

Si , après avoir fait la diffolution d’un métal, on prend le parti d’en faire la précipitation pour l’édulcorer enfuite avec beaucoup d’eau , il eft certain qu’on en dégagera par ce moyen , la plus grande partie de l’acide ; mais il faut faire attention que le métal, dans la précipit.ition, entraîne avec lui une petite portion du précipitant, ainfi qu’une portion du diffolvant. Le mélange de ces deux iubftances avec le métal, formg une efpéce de matière vifqueufe ou de magma, qui paroît augmenter beaucoup le volume de la précipitation ; il n’y 3 point d’édul- ; E M A

corations ni de diffolvans qui puîffent détruife cette matière vifqueufe , au point d’en délivrer tout-à-fait le métal qui a été précipité ; il n’y a d’autre parti à prendre que de bien édulcorec le précipité, pour le faire fecher enluîte dans une capfuleou fur un filtre de papier ; a’.îffirôt que le précipité eft tout-à-fait fec , on peut l’édulcorcr ds nouveau , fans que le mdo-ma vifqueux reparoiffe. La quantité de ce magma eft plui grande à proportion que l’on a ete obligé d’employer plus de précipitant.

. C’efl vraifemblableifient la terre réfultante de la décompofition du précipitant, qui ne ie mettant point en vitrification avec aulîi peu de feu qu’il en faut pour parfondre les couîeurb fur Vémall , contribue quelquefois à les rendre ternes & faiiffes , puil’que la même chofe’ arrive lorfqu’on veut employer des matières terreufes, coirim ; des cailloux rouge> , opaques , &c. pour en tirer des couleurs. Il fe pourroit fa re auffi que la llibftance méralliq’.ie qui entre dans la combinailbn , n’eût pas affez perdu de l’on phlogiftique.

La voie féche eft le fécond moyen employé par les chymiftes , pour réduire les métaux en chaux ,îls ont donné le nom de cémentaiion à cette opération ; elle confifte à mettre les métaux en lames très-njinces , & à les expofer enfuite au feu après les avoir ftratifiés dans un creufet avec des fe !s ;mais cette méthode eft fort inférieure à celle qu’on va propofer , qui eft ’fondée fur ce qu’un des grands moyens de rendre les métaux fulceptiblcs d’être attaqués par les ’acides, eft de rompre leuraggrégation. Oncomjnence donc à réduire le métal en poudre, la JjIus fine qu’il eft poffible , foit par le moyen de la lime , foit autrem.ent ; on triture enfuite cette

Iimaille avec le Tel dans un mortier ; on met le

tout dans un creufet , & on l’expofe d’abord à [lin petit feu , que l’on augmente par dégrés , iuiiTan : le plus ou le moins de réfiftance du métal. A mefure que le fel vient à s’échauffer , les va-’peiirs qui en fortent , font d’autant plus capables de pénétrer chacune des petites molécules du métal , qu’elles les entourent de tous côtés , & que, les trouvant rouges, elles s’infinuent plus aifsment dans leurs pores, en même temps que le fel emipêche la fufion du métal & la réunion de ces petites molécules. C’eft de cette fuçon que l’on vient à bout de faire attaquer l’argent par l’tfprit de fel , ce qu’il ne peut point faire J^rla voie humide.

j Plufieurs chymiftes ont prétendu que les métaux qui fe mertoient en fulion avant de rougir , comme le plomb & l’étain , n’étoient point fu’iceptlbies d’être travaillés par la cémentation, cela peut être vrai, lorfqu’on fe contente de Ie= ; réduire en ’âmes ; mais il paroî :, dani l’opération ,par laquelle on a fait le blanc , qu’il fuiBt de mettre le fel dans l’étain lorfqu’il eft en fonte , E M A’

îi>

au point d’être ronge , & qu’en agitant bien le tout avec une baguette de fer, le fel pénètre le métal , & fe réduit avec lui en une mafle , qu’on peut facilement mettre en poudre après qu’elle a reçu un degré de calcination fufEfant, On a préféré , pour calciner l’étain , le fel marin aux autres Tels , parce qu’il eft celui dont 1 acide divife le plus parfaitement lesmaffes aggrégatives ; parce qu’il eft auffi celui dont l’acide enlève le moins le phlogiftique aux iubftances métalliques , 8c celui dont la bafe donne plus aifément à ces fubftances le degré de fufibilité capable do les amener au point de la vitrification, avant d’avoir perdu la portion de phlogiftique qui conftitue leur couleur. On ne peut nier que , dans l’opération que l’on vient de donner pour faire le blanc , une partie de la bafe du fe ! marin ne foit entrée dans la combinaifon , puifqu’après toutes les calcinatîons & toutes les édulcoracions, on a trouvé parle calcul ; qu’en employant un gros d’étain & deux gros de fel marin , il eft refté 32 grains de la bafe du fel maria unis à la chaux d’étain ; car le blanc tout-à-fait fini, a pcfe i gros 32 grains ; s’il n’en eft pas refté une plus grande quantité , c’eft que les édulcorations en ont enlevé une portion. Il feroit mieux que toutes les édulcorations , dont on parlera dans cet ouvrage, ne fe fiffent qu’avec de l’eau diftillée ; mais à caufe de la grande quantité qu’on eft obligé d’employer , on a cru pouvoir fe contenter de l’eau de rivière filtrée , pour rendre les opérations plus faciles. Les rouges & les autres couleurs tirées du fer. Entre tous les métaux , il n’y en a point qui produife dans la nature une plus grande quantité & une plus grande variété de couleurs que le fer. lia été démontré que prefcjue toutes les pierres & toutes les terres , de quelque efpéce qu’elles puiffent être , qui contiennent des couleurs, ne les doivent qu’au fer. En effet , après les avoir travaillées de façon à leur ehleverlefer qu’elles contenoient , elles font reftées blanches & fans aucune couleur.

Comme la terre végétale contient auflî du fer, on a foupçonné (& c’eft affez le fentiment de Henckel dans fon Flora oaturni :^ans ) qiie ce métal pourroit bien être la principale caufe des différentes couleurs que tous les végétaux nous prefentent dans leurs feuilles, leurs fleuri & îeurs fruits. On a trouvé du fer attirable par l’aimant dans les cendres de plufieurs végétaux, que l’on a fait brûler ; mais on ne doit pas en conclure que ceux dans les cendres defquels on n’a pas trouvé de fer attirable par l’aimanr , ne piiffent en contenir : on n’ignore pa^ qtiO ie fer pouffé à à un certain degré de calcination, perd fon phlogiftique , & que , dan^ cet état , il i,e peut plus être attiré parl’a'mjnt.

La facilité avec laquelle le fer peut être acta» ^20

É M A

que par tous les diflblvans , & l’extrême dîvîfion dans laquelle il peut être mis , le rendent fufceptible d’être traniporté dans les petits canaux des végétaux ; s’il eft vrai que ce folt lui qui y produife toutes les différentes couleurs que nous y appercevons , on doit tout attendre , dans la peinture en émail .y des propriétés d’un métal, qui par les différentes combinaifons où il peut entrer, peut produire une aufli grande variété de couleurs.

Le rouge écarlate que produit le fafran de mars, étoit furtoiit de la plus grande importance pour les peintres en émail. Cette couleur, dont le jaune paroît être la bafe , étoit abfolument néceflaire dans les car^iations , fur-tout dans celles des jeunes perfonnes. La choie ne paroilibit pas difBcile ; la calcination du vitriol de mars , celle de la couperofe verte , & toutes les préparaiians de fafrans de mars, décrites dans l’art de la verrerie de Kunckel , fourniffoient abondamment un très-beau rouge , & facile à employer au pinceau. Mais , malgré toutes les édulçorations que l’on avait pu faire à ces couleurs , & les divers fondans qu’on y avoit appropriés , elles étoient enlevées par le feu au moment qu’elles consmençoient à parfondre , & ne laiffoient fur l’émail , que quelques traces fales & informei. Il falloir donc, pour conferver ces couleurs , les retirer du feu avant qu’elles fuftcnt tout-à-fait parfondues , & avant qu’elles euffent pris le luifant. Les fondans danslelquels il entre du plomb , patoiflbîent plus propres à les fixer ; mais ils ne laiflbient pas l’avantage de pouvoir en faire des mélanges avec les autres couleurs. Ces inconvt’niens ont paru fi grands aux peintres en émail, que depuis Petitot, qui pofledoit l’art de les employer , il ne s’en trouve prcfque aucun qui ait ofé s’en fervir. Ils ont mieux aimé employer dans leurs carnations le pourpre , qui efl une couleur fine, au rifque de les faire paroître violettes , que des’cxpofer à perdre leur travail , en le fervant des fafrans de mars. On fe trouvoit privé de toutes les couleurs que l’on tire du fer j & qui font de la plus grande utilité dans la peinture en émail, comme des bruns , de l’écatlane, des couleurs ’de bois , des olives, des noirs, &c.

» On appellera ici les couleurs que l’on tire « du fer, ées fafrans dé mars : parmi tous ceux » dont on va donner la préparation , il n’y en a « aucun qui ne foit de la plus grande fixité , & » qui ne fe mêle très-bien avec toutes les autres » couleurs.

» Prenez de la limaille de fer très-épurée, » comme celle que l’on vend aux apoticaires ou » aux médecins ; ou , pour être plus afluré de la » pureté du fer ;prenez des doux des plus petits >i qui fe faflént en fer , que l’on nomme doux » d’épingles ; il fera mieux encore de -prendre E M /C

» un paquet d’aiguilles très-fines que l’on paffera au feu pour les détremper. » Mettez environ deux gros de ce fer dans un » gobelet de verre ", verfez de l’eau deffus, jul^ » qu’à ce qu’elle couvre le fer de lahauteur d’un » bon pouce.

» Verfez dans le gobelet de l’huile de vitriol » ordinaire j peu à peu, en remuant le gobelet » de temps en temps, jufqu’à ce que vous apperceviez du mouvement dans le fer qui efl » au fond, & qu’il s’en détache un grand nombre de petites parties qui montent à la furface « de l’eau en bouillonnant.

» Mettez tout ce qui eft dans le gobelet, en

!» l’agitant, de peur qu’il ne refte rien au fond, 

» dans un vafe de tetre vernifTée , qui puifle » fupporter le feu , & le iaiffez fur la cendre » chaude pendant cinq ou fix heures. » Verfez dans le vafe au moins le double d’eau r> chaude , de celle qui s’y trouvera ; entourée » alors le vafe de charbons allumés, jufqu’à ce » que l’eau jette un bouillon.

» Retirez le vafe du feu & le Iaiffez refroîdir. Remarquez qu’il faut qu’il foit reflé au » fond du vafe une petite portion du fer qui n’ait » pas été diflbute ; fi cela nVtoit pas, vous feriez » obligé d’y ajouter un peu de fer, & de faire n bouillir le tout de nouveau.

>i Paflez la liqueur dans un papier gris ployé » en double, & ajufté en filtre dans un entonnoir de verre.

» Mettez l’eau qui aura pafTé au travers du » filtre de papier gris, dans lemême vafe de terre » verniffée, oi^ vous l’aviez mifc d’abord ; (la » porcelaine de la Chine feroit ce qu’il y auroit » de meilleur, ) & entretenez de la braife chaude deffous & tout autour , jufqu’à ce que l’eau » étant très-diminuée, vous apperceviez qu’il » commence’à fe former des cryftaux au fond » & tout autour des bords du vafe. » Retirez alors le vafe du feu, & le Iaiffez , » fans y toucher, dans un lieu frais , pendant 24 )5 heures ; fi vous appercevez que les cryftaux » ne foient pas formés , faites encore évaporer » un peu en remettant le vafe fur la cendre chaude , & Iaiffez repofer de nouveau pendant 14 » heures.

» Vous trouverez dans le vafe un fel en cryf» « taux verds & une efpéce d’ochre jaune aufond. » Choiliffez parmi les crylîaux les plus purs & » les plus verds ; mettez les fëcher fur une » feuille de papier gris , dans un lieu qui ne foit » point humide.

» Lorfqiic ces cryftaux auront perdu la plus » grande partie de leur humidité , mettez-les » dans un vafe de verre ou de porcelaine placé » fur une étuve ou fur des cendres chaudes ; » ayez foin de les remuer de temps en temps, » afin qu’ils ne s’attachent point an fond du » vafe : ils perdront peu à peu let^r couleur » verte, Ë M A ■

» verte, & : fe mertront en une poudre qui )) deviendra plus hjanche à melure tju’cile fera «plus f ;clie.

» Mettez cetre poudre blanche fur un teffon )) ou fragment de ces petits pots de grès dans » lefquels on apport-e le beurre de Bi-erng :>e, » placû fous une raoufHe dans le feu ; li vous j> n’avez pas de mouffle, vous pouvez .vous

!) fervir à fa place d’un autre telTon de pot de 

35 grès : il fera bon, pourvu qu’il fjiuaiTez » grand pour empêcher la cendre & le charbon de tomber dans la poudre blanche ; )i entourez la moufFie d’abord dun tic. -périt » feu ; augmentez enfuite un peu le feu en » mettant quelques charbons allumés far la >■> moufïïe ; la poudre blanche comnic-ncera par » devenir jaune ; enfuite elle prendi-a une couleur orangée , & finira par devenir d’un beau s5 roiige.

» Retirez alors la capfuîe , ou, poiir mieux » dire, le teffbn du feu-, la poudre paroiira » noire en fartant du feu ; mais lo ;f(jaelle fera « froide , elle fera très-i^uge. » Mettez cette poudre d ;ins un grand gobelet de verre ; vrrfez defius de l’eau tiode y> très-propre ; laiffez-la repolbr juiqu’a ce qire Il vous voyez la poudre rouge toute entiers » au fond, & l’eau qui lui furnage devenue » claire.

» Vuidez cette eau claire en inclinant doiice-’ » ment le vafe, jufqu’à ce que la poudre qi ;i I» eft au fond, foit prête à en fortir ; remettez I» de nouvelle eau chaude ; réitérez cette manœuvre cinq ou fix. fois, jufqu’à ce que » vous voy^z qu’il refte un peu de poudre » rouge fur la iurface de l’eau, quoiqu’elle » paroiffe dans k refte très-claire ; vuidez alors

« l’eau pour la dernière fois ; brouilltz ce qui

I» refte au fond, & le renverfez brufquement i» dans une taffe de porcelaine. » Laiffcz repofer le tout, jt.fqu’à ce que iî vous voyez que l’eau qui furnage la poudre, foit claire. Tenez la taffe un peu penchée , & mettez-y un bout de mèche de coton que vous aurez auparavant fait tremper » dans de l’eau ; ajuftez votre mèche de fa, :on » que le bout le plus court trempe dans l’eau I.» de la taff», & le plus long pende au-dehors, paf ’» ce moyen t.juie l’eau s’écou-lerago^itte à goutte, » & la poudre rouge reftera à fec ; on peut [ » même, pour s’aflUrer que la poudre efl : parfaitement feche , placer la taffe fur les cendres D chaudes.

« Ce fafran de mars feroit volatil , iî on I» l’employoit tel qu’il eft. Mais pour le rendre ^j) fixe, prenez en la quantité que vous vou- ■■» drez , mêlez-la avec le double de fon poids » de fel taarin bien blanc , que vous aurez » auparavant fait rougir dans un creufot couift vert ; triturez long-temps cei deux marieras Ueaux-Ans. Tome II,

E M Â ^ :s,iî

» enfemble dans un mortier de verre ou de » porcelaine, avec un,pilon de même matière» » Mettez ce mélange au feu dans un crèufet » que vous couvrirez ou dans un tsff.jn degrés fl fous une mouffle pendant deux heures , en » commençant par un petit feu , & finiffant par couvrir & entourer la mouffle de » tous côtés avec des charbons allumé.’. » On retire la mat’.ère du feu ; on la laifft ; » refroidir, & on la triture dans le même » mortier dont on s’eft fervi la première fois ; » on la met dans un grand gobelet de fayjLnce , » qui ait un bec pour verfer plus aifcm ;nt ; n on verfe defTus de l’eau chaude que l’on » agice avec une lame de verre ; on décante « oa l’on vuide tout de fuite ce que l’eau » emporte ; on continue de verier de no ;rvfc ;ie n eau chaude fur ce qui eft reSé au fond, de » l’agiter avec la larae de verre, &c de décanter l’eau qui fe trouve teinte de la co :ileur, jufqu’à ce que l’on voie qu’elle n’en » prenne plus , alors on peut négliger ce qui » relie au fond d.i gobelet.

» Toutes les eaux qui ont entraîné de la » couleur ayant été d ;can :ées dans un grand » gobelet de verre , on les y laiffe repofer juf- >5 qu’à ce qu’elles paroiffentrout-à-fain claires, 5) & que la couleur foit entièrement dénofee » au fond ; on décante alors cette eau claire, 5) & on en met de nouvelle fur le rcfi.lu ; on » réitère cette manœuvre cinq ou fix foi ;, on « verfe le réîîdu dans une taffe de porcelaine • )3 on l’y laiffe repofer, & on en retire l’eau » par une mèche de coton, comme on l’a dix » ci-defîus.

» Lorfque ce fafran de mars eft fec , on en >î trouve , à très- peu de choie près , la mêms n qu.inrité & de la même couleur que celle » qu’il avpit avant de l’avoir calciné avec le » fel marin , avec la diiFérence qu’après cett» » dernière calcinatisn il n’eft plus volatil , Se » qu’employé avec trois fois fon poids de notre » fondant, il prend un beau luifant, reftant » fi.Ke à tous les feux ; ce qui fait qu’on peut >3 le coucher fur l’émail ^a premier feu comme » au dernier. On peut aulFi hardiment le mê- » 1er avec toires les autres .couleurs , fans » craindre qu’il en gâte aucune, » Il tfî abfolument effentiel , lorfqu’on s » fait la dernière calcination avec ie fel marin, & lorfqu’on a verfé de l’eau chaude n pardeffjs dans un gobelet, d’agiter cette eau » avec une lame <de verre, comme on l’a dic. » pour ne prendre que la couleur qui fe laiffe 33 entraîner par l’eau ; parce qu’on eft affuré >3 par ce moyen de n’avoir que le fafran de » mars, qui a été vérirablement diffout ; fans 33 cela on feroit fujet à trouver de petits points » noirs dans la couleur , qui ne viennent uai.

J22

E M A

» qiiement que des petires parties de fer qui 5) n’auroient point été diiîbuces. » On peut encore tirer de trè^-beau fafran » de mars du réfidu de la diftillaiion du viiriol ; on en trouve chez les aporhicaires , » {bus le nom de colcothar de vitriol ; on » fait calciner ce colcoth.ir à irès-gra ;id feu >3 dans un tetlbn de pot de grès, ii&as une » mouffle ; on le met enfuite dans un grand » gobelet de fayance ; on vcrie de l’eau chaude » pardeffus -, on agite le tout avec une lame » de verre ; on verfe tout de fuite l’eau qui » efl : colorée dans un l’afe ; on continue de » mettre de nouvelles eaux chaudes fur ie » colcothar , & de les décanter j«(qu’àce quMles ne fe teignent plus -, on latfTe repofer toutes ces eaux teintes, & lorfq^ii’eiles font » claires, on les décante ; on r ;met de naarelie eau chii’de fur le fafran do mars qui » e(f refté au fond du vafe , que l’on vuide » lorfqu’elle eu devenue claire ; on réicere ». cinq ou fîx fois cette dernière manœuvie ; » on fait (echer le (àfran de mars comme il » a étié dit ci-defFus., 8c on le fait caicin^er » avec deux fois Ion poids de fel marin , en » fuivant pour le refte Ja manipulation qui a » été iadiquée..

» Il faut feulement avoir attention de ne » pas pouffer à un trop g-and feu la cal-’ cination des fafrans de mars avec le fel marin , l&r.’qu’bn veut avoir de beau rouge. » Ptiifque ii caicination des mars avec le » fe ! marin les rend fixes fur VémaiL , & qu’ils » confervent, après cette calcinacion, à peu » de chofe près , la couleur qu’ils avoient » auparavant, on peut en conclure qu’il n’èft 3î pas difficile d’avoir des fafrans de mars fixes » de différentes teintes, comme on va le voir » dans les deux exemples fuivants. Brun maron. » Prenez du vitriol de mars j> ordinaire -, faites-le ficher peu à peu fur un » petit feu jufqu’à le faire rougir ; la’ez ce » fafran de mars à pluiieurs eaux , & : après » que vous l’aurez fait fecher, mettez-le avec »i ie double de fon poid, de fel marin dans

un mortier ; triturez bien le tout enfemble 

j5 pendant long-temps ; expofez enfuite au feu » ce mélange dans un teffon de grès fous une 51 mouffle, en donnant d’abord un périr feu, j> & finiîfant par couvrir la mouffle de charboi >s ardents pendani : deux heures. Retirez « !a matière du feu , & la mettez en poudre » très-fine dans un nsortier ; lavez la dans un » gobelet pour ne prendre que te que l’eau ». emporter-a ; vuide ? cette eau loriqu’elle fera

claire, & verfez fur la matière d’au’re eau 

•», chaude que vous changerez à pluûsurs re- ■». prifes ; ôiez l’eau tout à-fait, & faites lécher » ; fe TafraiL da mari (^i. fera. d’un, brun tiraut E M A

» fur le café & très-fixe , en fuivant le ; précautions déjà indiquées dans le premier proet dé.

Brun très-foncé. » Prenez de la limaille de » fer épurée,- telle que les médecins & les » apothicaires ont coutume de l’employer ;, » mettez-la dans un moràer avec le djuble n de fon poids de l’el marin cjui ait été aupafavant rougi dans un cretifet couvert ; triturez » ce mélange avec le pilon pendant tfès-longtemps ; plus la trituration fêta longue, mieux » l’opération réuflîra ; expofcz le mélangea 35 un petit feu dans un teifon de grès , fous )3 u ;ie mouffle , peniant deux hetires , en coîamençant par un petit feu ;,. & fini-lfant par )3’ un feu très-fort ; retirez la matière du feu ; a tciturez- !a dans un mortier pour la- réduire- 33 en poudre très-fine ; mettez-la dans un gobelet , & verfez de l’eau chaude pardelfus ;. » agitez îq tout avec une lame de verte, & » fur-tout, ayez grande attention, en vuidant » cette eau, de ne prepdie de la matière quece qui iera entraîne par l’eau ; continuez 33 tant que l’eau fera teinte ; laiffez dépofer )> toutes ces eaux ; lavez ce qui fera dépofé à : » plùfieurs autres eaux ; & lorfque vous juge- )3 rez le dépôt affez purifié, faites-le fécher , >3 en fuivant dans tout la manipulation indiquée dans )e premier procédé. Vous aurez » un fatran de mars fixe , d’une couleur très-brune & très-foncée.

» On peut être affuré de réuffir à fixer tous a les différents fafrans de mars dans la pein— » ture fur l’émail, pourvu que l’on ait eu la » précaution de les faire calcineravec le doublede leur poids de fel marin ; & en leur ajou^ » tant alors ie triple de leur poids de notrefondant , ils donneront des couleurs très-fixes, » très- luifantes & très -durables à tous les- >3 feux 33,

Les pourpres & les autres coulews tiré : s de îor. Le^ anciens alchyniiftes n’ont pas ignoré que l’on pouvoir tirer une couleur rouge del’or ; lejirs livres font remplis de flattsufes efpérances que leur faifoit concevoir cette couleiir , à qui ils donnoient les noms pompeux de lion rouge j de manteau royal, d’ame pourpre’ de l’or , ucc.

La précipitation dé l’or en rouge par la diffolution d’ciain , demande beaucoup d’atientîon ; mais on efpere faire voir que quand une fois on a trouvé ce qui peut Vempêcheîs de réiiJir, t ;^ efl- en état de l’obtenir fans la manquer . & même de pluficars tâçons. Toutesles précipitations d’or donnent difR’rentes cou-- leurs fur rémail ; mais chacune tient cepen" dant plus ou moins de ia couleur pourpre,, somme les gris da lin., les violets,, lesbnuis^ E M A

& même certaînes couleurs prefqiie noires. La dive.fité de ces couleurs dépend parnculiertment de l’alliage qui peut fe trouver dans 1 etain, & de la qualité des différents d flolvant.s qu’on peut emcloyer à le diffoudre ; elles font toutes très-fixes ; & comme elles ne font pas vitrifiées , elles fe couchent fort aifément au ■^)inceau, pourvu qu’après qu’elles ont cré préparées , on ne lésait pas fait réverbérer a trop grand feu ; dans ce cas on retomberoit prefquo dans la difficulté que l’on éprouve à peindre avec des verres colorés. Ce défaut fe rencon_ troit fouvent dans les pourpres dont on s eft ’ fervi jufqu’à préfent , & dans ceux quo l’on acheté àVenife. Le feu de réverbère aiiRmcnte îa couleur pourpre des précipitations d’or, & même la donne à celles qui ne t’onr point ; ainfi il y a, toute apparence que ceux qui font réverbérer ces couleurs , n’emp’oient cette manœuvre que dans certe vue ; mais il f-iut remarquer que fi le feu eft trop fort, il calcina îa précipitation au point de la rendre prelque ’auffi -difficile à fjire couler au pinceau , que Û elle avoir été vitrifiée ; parce qii« la pointe du pinceau devenant bourbcule , la couleur ne s’anplinu’ ? qu’avec beaucoup do peine. Opération, n Pour avoir de beau pourpre , » l’or & l’etain que l’on emploie , doivent » être de la plus grande pureté, c’eft-à-da-e , » con-enir le moins d’alliage qu’il eft poflible. s, L’étain fans alliage eft plus difficile a troun ver que l’or pur. Cependant l’étain dont on » s’eft lervi pour faire le blanc , & qu’on ^yend » ch ?z les potiers d’étain , fous le nom d’érain ■ » doux, réufiit alTez bien ; il faut commencer » par le réduire en lames aufli minces qu’il » eft poflible, en le battant entre deuxfeuil- 5) les de papier fur une enclume avec un marteau. Si l’on veut s’épargner la peine de mettre » l’étain en lames, on peut fe fervir des feuil-B les d’éiain dont les miroitiers érament leurs » glaces II faut aufii mettre l’or en lames » très-minces, en le battant entre des feuilles de papier fur une enclume avec un marteau ; cela donne la facilité d’en, couper des » morceaux , & de n’en mettre à chaque fois « que la quantité que l’on veut dans la diflb- 5, lution. On fait diffoudre l’or dans l’eau que jj l’on trouve toute faite chez ceux qui vendent » de l’efprit de nitre & de l’efprit de fel. On B peut auffi en faire foi-même , en mettant » une pa-tie de fel ammoniac fur quatre partîes d’efprit de nitre ; on met l’efprit de » niire dans un vafe fur les cendres chaudes ; » on y ajoute peu à peu le fel ammoniac par » peats morceaux ; on attend , pour en mettre » de nouveau , que ceux qu’on a mjs foient entiérement diffous.

» On met l’eau régale furies cendres chaudes, & on laiffe tomber dedans l’or par E M A

s^ :

» petits morceaux. Lorfque cet or efl di.Tour , » on a foin d’en remettre de nouveau j’jfqn’à » ce qu’il en refte au fond du rafe qui ne » veuille plus fe diffoudre. On peut même » porter au nez la diffo’.ution ; & lorfqu’elle a n’a prefqL’e plus d’odeur acide , on eft affuré » qu’elle eft à fôn point.

» Il y a encore une autre façon de faire a une eiu régale , dans laquelle on peuc faire % diffoudre l’or. On prend de bon el’prit do fel » que l’on met dans un gobelet de verre ; » on met dedans de petites lames d’or très-minces ; on ajoute enfuite dans ce gobelet » de l’efprit de nitre goutte à goutte, en obfervant au travers du gobelet le moment oii » l’or commence à être attaqué ; ce qui fc voit » lorfqu’il monte dans la liqueur de petites >■> bulles qui partent de lor ; ordinaircme-t iî n faut rres-peu d’efprit de nitre pour produire » cet effet. Alors on ceffe d’ajouter de l’el’f rit » de nitre, & on fe contente de mettre dans 11 la liqueur de nouvelles lames d’or à la n place de celles qui auront éré diffoutes ; ce -1 que l’on continue de faire jufqu’à ce qu’il » en refte au fond du vafe qui ne fe diffolvent « plus. On fe fort aulFi de cette diffolution » d’or , parce qu’elle donne quelquefois des » couleurs d’une nuance différente de celles » que produit la première f au régaie dont on a >3 parlé d’abord.

n La diffolution de l’ét.iin demande une attention beauco ;;p plus grande , parce que » tout le fuccès de la précipitation de l’or en » rouge dépend de la façon dont elle eft conibinée avec l’eau, qu’ ; n doit néceflàirement : » y mêler , afin d’affoiblir le dlffolvant de fan çon que la diffolution fe faffe lentement & » fans ébullition.

n On fera l’eau régale propre à cette opération , en mêlant enfemble cinq parties (en » poids) de bon efprit de nitre avec une partie de bon efprit de fel. On prendra plein le » quart d’un demî-poiffon de cette eau ré’galè » (cette mefure fe vend chez, les potiers d’é- ■>■> tain ) , qu’on verfera dans une bouteille de n verre ; on ajoutera à cette eau régale un«  » do-ible, ou , fi l’on veut, une triple quantiré dans la même mofare d’eau de rivière » filtrée. On mettra dans ce mélange une pen tite feuille d’éiain battu mince à peu près » comme du papier ; ou , pour abréger , on n prendra un petit morceau de ces feuilles >i d’étain que l'on vend chez le> miroitiers , » qui s’en fervent à étamer les glaces ; on en » prendra environ ce qu’il en faudroit pour » couvrir une pièce de vingt-quatre fols (i). ( I ) La pièee de vingt-quatre fols a un pouce is di»mèue.

y V y- ij

f.Z’-li

E M A

s Cet étaiii commencera par devenir noïr ; j » enfui, e il fe mettra en pièces, Se finira par yy fe diifoudre avec îe temps. Il fe dépotera » une petite poudre noire au fond de la bouteille. Vingt-quatre heures après , on mettra » dans la liqueur une nouvelle feuille d’étain « comme la première ; ce que l’on continuera >) toutes les vingt-quatre heures pendant fix | » jours.

» Après ce temps la liqueur prendra uns petite

!» teinte jaunâtre ; alors on la fera p ?.fler au 

» travers d’un papier gvis. plié en entonnoir, » dans lequel auparavant on aura fait palfer de » l’eau, afin de mouiller le papier ; on féparera » par ce moyen la poudre noite reflice au fond « de la bouteille , & loriqu’elle fera féparce ■>■> de la liqueur, on la remettra dans certe » bouteille après l’avoir bien lavée. On la :ffe"a « repofer cette- liqueur pendant dciix ou trois « jours , après quoi cils fera en état d’ctre employée,

» On peut encore faire une autre efpèce d’eau » régale , qui ne fera pas moins bonne que » la première poLir cette opération, en faifant » diifoudre une partie de fel ammoniac bien » purifié dans quatre parties d’efprit de nitre. « Il faut mettre le fel ammoniac par petites 53 parties dans l’efprit de siitre, & tenir la bouteille débouchés fur les cendr-es chaudes, » julqu’à ce que la dilTolution entière du fel » ammoïîiac foit achevée. Pour purifier le fel » ammoniac , il faut le faire diflbudre dans une 3> grande quantité d’eau chaude, filtrer l’eau, » & la faire évaporer doucement fur le feu » dans un vafe de terre, jufqu’à ce que le fel » ammoniac devienne fec ; alors il faut remuer 89 le fel avec un bâton , de peur qu’il ne s’attache >} au vaiffeau.

) On procède avec cette eau régale en fuivant y) les mêmes proportions à l’égard de l’eau & J3 de Tétain , que l’on a obi’orvées dans la pre- >3 mière ; avec la différence que dans celle-ci » oncontinue à mettre des feuilles d’érain toutes » les vingt -quatre heures pendant huit jours, 33 au lieu que l’on n’en a mis que pendant fix » jours dans l’eau régale précédente ; » Oh peut aufîi faire-uns troifième efpèce de » ccrapofition , qui aura la même vertu de précipirer l’or en rouge, en mettant dans, l’eau » régale faite avec l’efprit de nitre & l’efprit 33 de fel, deux fois autant (en mefures ) d’ef- 33 prit -de - vin que l’on a mis d’eau régaie. On ». y ajoute toutes les vingt -quatre heures des >3- feuilles d’étain, comme on a- fait dans les »•■ compofitlons précédentes ; mais dans celle-c-i » il ne faut mettre de l’étajn que pendant cinq 33 jours , pour qu’elle fe trouve portée à fon » ? peint. ; alors on la fait psfler par un papier JM gris, &c,.

.11 faut remarquer que- les deux’ premières E M’ A

» de ces compofitions, excepté la dernière d’aift- 33 laquelle on a f.iit entrer de l’efprit- de -vin ^ « pe’dent la propriété qu’elles ont de précipiter 33 l’or en roiigeapiè un certain tem. ;, c’eft-àdire , au bout de trois femaines ou d’un mois,, 33 fuivant qu’il fait plus ou moins chiud ; mais 33 lorfqu’ons’en appcrçoit, il f.ffit , pour la leur 33 rendre entièrement , de mettre dedans la )3 même quantité d’étain en feuilles que l’on etl )3 avoit mi’e la première fois, & vingt-quatre >3 heures après la compofiîion- fe trouve avoir » repris la vertu d’opérer la précipitation rouge ; )3 ce qui peut fe réitérer autant de fois que 33 l’on i’appercevra que la compofition l’aura. 33 perdue.

)3 U peut arriver que la compofition mêlée- 33, avec ta dilToiution d’or, produife une couleur-’ » bleue au lieu d’une rouge , ce qui eft une- 33 marque que cette compofition commeace a^ ■33 perdre de fa vertu ; on efl alors sûr de la lui- 33 rendre toute entière par l’addition d’une nou- 33 velle feuille d’étain, comme on vient de la-. 33 dire.

>3 II faut encore obferver qu’en ne mettanc 33 que deux niefires d’eau fur une mefure de’ 33 l’eau rt’gale qu’on a donnée la première , at 33 compofition, quoique très -claire quand elle- >5 eft finie , commenc. quelques jours après »■ 33 paroître trouble , & dBvient enfin opaque j, » mais dans cet état elle n’en efl, pas moins 3» bonne à précipiter l’or en rouge ; on s’ap-- 33 perçoit même au bout de quelque temps que- 33 cette compofition s’éclaircit peu -à- peu, & =3 redevient tranfparente comme elle 1 etoit , 33 fans plus redevenir opaque lorfqu’on e& 33 obligé de mettre dedans un nouvel étain ; 33 celle dans laquelle on a etnployé trois mefures- 33 d’eau contre une mefure d’eau régale, n’efti >3 pas fi fujette à devenir trouble.

Lorfqu’on croit que la difTolution d’étain- 

3) efl en état de produire ffin effet, on met un- 5) demi-poifTon d’eau de rivière bien claire & 33 bien filtrée dans un gobelet de verre très- 33 propre ; on prend un tuyau de baromètre affez’ j !3 gros, dont une des extrémités a été mife en- 33 pointe, & l’autre arrondie parle moyen du 33 chalumeau d’un émailleur ; on trempe ce tuyau- . 33 par la pointe dan ; la difTolution d’or, à une 33 hauretir que l’on a foin de remarquer ; & tout’ 33 de fuite on le tranfporte dans l’eau que ToiX’ 33 a- mife dans le gobelet ; on l’agite un peu, )3 afin qu’il y dépofe ce qu’il a emporté avec lur » de la difiolution d’or. On retourne enfuite- >3 le tube, & on le trcn-ipe par l’extrêmité- 33 arrondie dairs la diffolution d’étain, en l’enfonçant dedans au m-oins à la même profon- 35 deur que Ton a enfoncé la pointe dan-i la^ 33 diffoiûticn d’or ; on tranfporte tout de fuite’ 33 ce tube dans l’eau du gcbelet dans laquelle’ » on ad-ijàro-is delà diifclution d’or ; on agit»-’ E M A

un peu l’eau, afin de lui communiquei- ce que le tuyau a emporié de diffolution d’étain 5 on nettoie le tube , S« : lorsqu’on voit que la liqueur devient rouge, on remet encore de même deux fois autant de diffolution d’étain avec le tube que l’on en a mis la première fois.

» C’efl : alors que la liqueur fe teint d’une très -belle couleur rouge foncée comme du gros vin 5 on la verle dans un grand vale de verre ou de cryftal ■,, on recommence à faire lamêm« teinture dans le petit gobelet, après l’avoir bien nettoyé, qu’on verfe enluite avec l’autre dans le grand vafe lorfqu’on la croit affez rouge. On continue cette manœuvre julqu’à ce que l’on juge que Ton ait une fuffifante quantité de couleur dans le grand vafe.

» On laiffe repofer le tout pendant vingt-quatre heures. Lorl’qu’on voit la couleur rouge bien dépofée au fond, & l’eau q.ii la fumage bien claire ; on incline doucement le vaie pour en retirer cette eau ; ce que l’on continue jufqu’à ce que l’on voie que la couleur rouge eft prête à fortir avec l’eau ; alors on ceffe de verfer , & l’on remplit le vai’e avec de nouvelle eau qu’on laiffe repoier, jufqu’à ce que la couleur foie précipitée, & que l’eau qui lui fumage foit claire ; alors on recommence à vuider cetie eau comme on a fait la première fois, & on en remet de nouvelle à la place.- Pourvu que le vafe foit affez grand, il fuffit défaire cette manœuvre trois ou quatre fois.

a On n’a point marqué la grandeur du vafe ni la quanité de l’euu dans cette opérat-on ; il fuffit d’avertir en général que ce lavage de 4a couleur doit fe faire avec une affez grande quantité d’eau , & que l’on n’a point remarqué [qu’après la première précipitation prife , un ’ peu plus ou un peu moins d’eau employé pour laver le précipité, changeât rien à fa couleur. « Lorf.ju’on croira la couleur bien lavée par la quantité d’eau qu’on aura fait paffer parfdeffus, .on décantera l’eau jufqu’à ce que la |couleur foit prête à fortir ; on remuera bien le vafe, & on verfera la couleur & rcaii ■ reftante dans une taffe de porcelaine : on l’y laiffera repofer pendant un jour, après quoi on nietwa dedans une mèche ccmpofée de plufieurs fiis de coton , que l’on aura auparavant bien trempée dans de l’eau ; on ajuftera la mèche de façon que le bout le plus court entre dans la fu>fice de la liqueur, tandis que lebout le plus long doit pendre au dehors de la taffe ; par ce^ moyen toute l’eau s’écoulera, & la couleur reftera au fond de la talfe, iamblable à une efpèce de gelée de grofeillesrouges : alors on enlèvera la mèche , loi on laiffera féclier à l’ombre la couleur-, A

y^ ?,

n qui diminuera prodigieufcmènt de volume , » ik paroîtra comme une poudre noirâtre, lorfqu’elle fera tout-à-fait léchée. n On fera tomber cette poudie avec un cou» » teau , fur une agate , fur laquelle on la raniafn fera en un petit tas. On prendra de l’eau avec » le bout du doigt , que l’on liscouera fur la » couleur ; & lorfqu’elie en fera bien humeftée,- )) on la broyera avei-. une molette pendant longtemps, en humectant la couleur lorfqu’elie » v’ionc à fe trop lécher. On la laiffera enfuite » fecher à l’ombre ; & lorfque la couleur fera » parfaitement feche , on la ramaffera avec un >5 couteau^ -couleurs.

)3 II e(r aifé de varier la nuance de ces » pourpres ; on vient de donner la manipulation qui fait ordinairement les plus "beaux. » S’il’on met une plus grande quantité de diffof > hition d’étain, les pourpres qui en viendront n feront d’un violet foncé. Il eft pofTible auili îs de produire des pourpre, bruns ; cela dépend’ » Ibii/enrdela pureté de l’or Se de i’étain qus’ » l’on aura employés dans les diffolutions. » Si l’on veut avoir un pourpre tirant fur le’ » noir, on mettra fur un demi - poifibn d’eau ,■ )3 de la diffolution d’or, j.iftju’à ce que l’eaU’ )5 commence à prendre une petite couleur jaurie » très-légère ; on lufpend ;a dans cette eau, , 13 avec un fil , un petit morceau d’antiiMoine n jovial , fait avec trois parties dctain, & deux- ■ 9 parties de régule d’antirooine (on trouve cet » antimoine jovial chez les apotiquairts). Ort » laiffera pendant douze ou treize jou s ce morceau fufpendu dans la liqueur , ayant foin de’ » l’effuyer de temp^ en temps légèrement , afia’ » que la diffolution d’cr oiiffe mordre deffus ;. » après- quoi on retirera- le morceau d’antiinoine ; on verfera la liqnear & la po.dre’ » qui fera précipitée au fond , dans un puisgrand vafe, qu’on remplira d’eau. Lorfqne lapoudre fera tout-à-fait tombée au fond,- ëc a que l’eau qui lui furnage , fe trouvera claire ,> » on dé ;anter.i cette eau claire, & l’on éii^ » mettra d’a-jtre à la place , à plufiours reprifes., » & on achèvera le-refte de l’opératiori , eri » fuivant ce que l’on vient de .dire pour lesautres. -

» Chacune Je ces poudres, broyée avec fix’ »• fois fon poids du fondant gir’néral , produit ù ;r’ » l’ém-îil de ; pourpres de différentes : nuances ,. » & très - folidés.

» On auroit pu faire ces précipitations tout’ » d’un coup, en employant une plus grande » quantité d’eau, & à proportion plus de diffo-»- >s lution d’or, & plus de diffolution d’étain ;mais cela aiirbit été embarraffant pour des’ )> artiftci qai ne font point accoutumés à’ me-’ » furer ou à peler des diffolvans : il fiiffic d’à--’ vertir ceux qui -voudront prendre ce parti » qu’il faut mettre plus de trois fois autans jaÔ’

E M A

» (en meruresjde diffolution d’étaîn , que de >) djflblution d’or.

J.es couleurs Bleues. Parmi le peu de procédés qui ont été publiés fur la peinture en émail, on trouve des au tel ! ri qui recommandent de tirer la couleur bleue de l’argent ; il faut imaginer cjue celui qu’ils ont employé, n’étoit point exempt <ie cuivre , & qu’il n’en avoit point été affez purifié , vu qi.e , dans toutes les opérations que l’on a laites avec l’argent totalement délivré da cjivte, on n’a jamais pu ob’enir qu’une couleur jaune, irès-fixe , à la vérité , mais laie , d’un ion fiux , & qui n’eft pas jaune quand on l’emp’oye. D’auties oîit voulu q€fe Ion employât l’outremer ; mais cette couleur cfl : tirée du lapis lazuli , qui efl : Ibuvent une pierre calcaire , puilqu’elle eu attaquable par les acides ; par conlequenr fa couleur peut être emportée par le feu , lotfqu’il eft poulTé au point nécel" faire f o r parfondre : c’eft ce que l’expérience a confirmé toutes ies fois qu’on a voulu s’en lérvir. Le lapiî iazuli , comme M. Margisft l’a prouvé , tient la couleur bleue du for ; ccite couleur , il efl vrai, rcfiileàun feu médiocre ,& aux extinfiions dans le vinaigre , que l’on fait du lapis après l’avo :r ro’jgi ; mais, broyée & : employée avec trois fois fon poids de fundant, elle ne produit fur l’Jni -il qu’une couleur verdârre & teryeufe , qui s’altère niême lorfqu’on l’expofe plufleurs lo s au feu.

De plus 3 quoicjue !£ lapis donne quelques étincelles lorfqu’on le frappe avec le briquet , jl ne Uifie pas d’éire facilement attaqué par les acides après avoir été calciné au feu , & alors il fe réfouî .en une efpéçe de mucilage blanchâtre, doDC on ne peut plus tirer aucune couleur. En général , i) faut oblerver que les terres & les pie res colorées donnent, dans Vémail, des coule- rsqu» n’ont ni la pureté ni la vivacité de celles que l’on tire d^s chaux pures des métaux. Il rtft.e le (afJ-’re & le fmalc, ou bleu d’e'ma ;7 ; niais le lafFre eft une compofition faire avec le cobalt , à qui, par la calcination , on a enlevé l’arfenic qu’il contenoit ^&. qu’on amêlé enfuiie ■avec de la poraffe & du fable yitrifiable ton fent lùtn que l’on ne peut pas effayer de peindre avec ce mélange ; & quand oi) viendroit ,à bout de féparer le cobalt calciné, du labls & de la potaflé , ou qu’on auroit du cobalt feul que l’on feroit calciner, le cobalt, dans cet état, eft d’un grisnoiiâtre ; ce qui obligeroit le peintre d’avoir une palette idéaie fur cette coulpur, es qu’il faut tâcher d’éviter.

Le bleu d^ émail eR .ce même cobalt calciné, mêlé avec de la poîalfe Ik du lable ou de la pierre vi.rifiable , dont on vient de parler, qui, mis au feu & poKlTeà la vitrification , donne un beau verre bleu , que l’on écrafe enfuite , & dont on j^^it une poudre très-^ne par des Igclons j mais E M A

quelque degri de fînefle que l’on ait donné cette poudre , ce n’eft jamais que du verre pu ! .vérife qui ne coule point ailénient au pinceau & qui ne fe mêle point avec l’huile : tous le peintres lui connoiffent ces défauts , d’aiikuri ce verre étant très-dur à fondre , il faut lui ajouter du fondant pour l’attendrir ,&. on e{ oblige d’y en mettre une fi grande quantité que la couleur en eft confiderabiemeni aftoiblie Puirqu’on ne peut peindre avec du verre , S qu’il faut qi.e les matières , dont on ie Icrr poul peindre fur ? émail , ayent à peu près la mêtti ! couleur lorfqu’on les employé, qu’elles doivenj avoir après qu’elles auront été paifondues, i. faut tâcher de tirer la couleur bleue du coualt tell.(3 qu’il la donne au verre , fans qu’il Ibitvi trifi^c.

Il y a une infinité d’efpéces différentes de co balis , dont chacune contient pluo ou moins d’at lenic , de foufre & do quelques portions de dif férens métaux ; mais nous pouvons nou5 paffe d’entrer dans cette difcuflion qui regarde le^ mi néralogifles. Il nous l’utH : de favoir quelle ei l’efpéce qui donne le plus beau bleu- ; nous iiou en tiendrons donc à ce qu’en dit M. Hellot dans deux mémoires trè ;-curieux , qui fe trot, vent parmi ceux de l’Académie royale des S’cien ces , année 17 37 , p. ipl & 228.

Ce favant’ académicien a très-bien remarqu ( comme quelques autres l’avolenffait avant lui que le cobalt qui d nne une diflblution roiig dans l’el’prit de nitre , efl ; ce’iii dont on tirel plus beau bleu. C’cft donc à celui-rlà que nou nous nous arrêtons, fans nous embarralTer d (avairfice cobalt contient une portion de bi ! muth ou n’en contient pas. Il fuflit d’afiTurerqu’i n’a pas été poffible de tirer du bleu de la diffoli. tion des cobahs qui donnoient une autre coi leur , & que le bleu qu’on a tiré , a été plus bea St plus vif à proportion qae 1a ^’ffoluiion éto d’un plus beau rouge.

Comme on a vu que les mines, dontontiro Le bieu dHémail, contenoient toujours de l’arff nie y i>n a donné le nom de cobàh à toutes celk qui , dans la calcination , ont produit une fumé blanche qui fenioit une ode.ur d’ail. Il y a c£ pendant de ces mines qui contiennent beaucou d’arfenic , & qui ne donnent point du tout d bleu ; & celles qui donnent la pliis belle diflc lutio.n rouge dans l’el’prit de nitre , çontiennei ordinairement affez p£u d’arfenic II eft f ertai qti’il faut le chaffer ; la façon dont on s’y pren pour cela dans les manufaéluresde bleu d’èmaif paroîr la meilleure à caufe du contaél immedi ; du charbon , ou plutôt de la flamm.e qui y e employé. Il refte à lavoir s’il eft abfolument ni ceffaîre que la totalité de i’arfenic foit expulfi de la minç. Il y a tout lieu de foupçonner qu eft au contraire utile qu’il en refte un peu. Lin feiiis , dans fa d.iffertation fur le cobajt , rappoj E-M A V

eparM.Hellot, dans la tradiiôion de Schlutr, tom.l,pag.ï^o, §. 182., di : que la couar bleue fera plus belle fi l’on ajoute de la ludre arl’enicale au mélange pour faire efmaLt. pourrok bien fe faire que lescotahs que l’on

ru avoir perdu la touleur bleue pour avoir été

m calcinés , ne manquaffent à donner cette ’uleur que pour avoir perdu tout leur arlenic ; I voit que dans cette fuppof’.ion il ("croit facile , leur reftituer cette faculté en leur-sn ajoutant ( nouveau. D’ailleurs, lorlque, dans la compo-

ion du verre ordinaire, on n’ajcate cju’une

l’S-peiite quantité d’arfenic , le verre n’en efl : lepUis beau & plus brillant. Cetre manœuvre ( pratiquée dans toutes les verreries. Lorfqus , par la calcinaiion, on n’a pas afléz «affé du bon cobalt , l’arlénic qu’il conrenoit , 1 diflbiution par l’efprit de nitre , n’en eil pas liins rouge ; après l’avoir laiffjc repofer pencit plufieurs jouf^ , il fe forme fur la iurface de lliqueur de petits crvftaux blancs, qui font de 1-fenic, & qu’on peut enlever aifément , en fTant deffous une lame de verre très-mince. Zomme le fuccès ^^e cette opération dépend eierement de la bonté du cobalt , on ne fiiarc apporter trop de précaution pour en avoi- : de Ineilieure qualité, & l’on pourra s’e^n afiurer pdes expériences ; pour cet effet , il faut ef-Jierles d’iffcrens cobalts en mettant un trè-pit morceau de chaque efpece, (ans erre caicif , dans l’efprit de nitre , alîoibli par deux tiers dm ; & t’nnpeut travâi 1er avec confiance fur lobait, dont i’éch.-inîillon donnera une cou-Itr ro’Jgeàla diffolution.

ne faut pas s’attendre qu’aulTitôt que l’on a 

n le bon cobalt dans l’efprit de nitre étendu ac deux tiers d’eau, la diffolurion qui com-Hiice par s’en f.iire , fe trouve rouge dans les f tniers momens -, il faut au contraire la laiffer aVpendant quelques jours, afin qu’elle prenne c-e CD ileur , en la mettant par intervalles fur ( cendre chaudes ; ce neft qu’après ce temps q ; la diffolution devient claire & d’un beau rige-,alor. on la décante en prenant garde qu’il Jl’s'y mêle rien de ce qui refce au fond du vafe ; &m verie , fur ce réfidu , de l’eau & : un peu de n-vel efprit de nitre que l’on tait digérer pard u<., comme on a fait la première fois, pour tir encore de la teinruie rouge.

• On met toutes ces teirâtures rouges dans »’neîa{ ?e de porcelaine de ia Ch ;ne, ic l’on »’ joint alors, commu a fait M. Hellot , fiir »■ gros de teinture rouge i gr0'> & demi de »^ !l ma^in, le plus blanc & le meilieDr qu’on «’uiffe trouver ; on agite le lél marin , avec » n tu3’au ou une lame de verre, afin qu’il » ; diflolve ; on laiiTe repofer le tout pendant ■ »îueVque temps ; on décante la liqueur claire, » : ofl jette ce qui a pu reficr au fond. On »i ;inet la liqueur da-ns la talTe- de poicelaine j E M A

^27

» fur des cendres trèi-chaudes ; Se s’il fe faic » après quelques heures d’évapnration un peu » do dépôt au fond , on a grand iijin de decanter encore la ciiffolution pour jetter le » dépôt qui a pu s’y faire.

» Lorfque l’évaporation eff avancée au point » que la diffolution commence à s’i-pailiir, » elle forme des cercles verds fur la taflé à » fa ùirface ; (i le cobalt ell d’une mcdiucre » < :ualité , cette couleur verte fe communique » à toute la diffolution à mefure qu’elle s épaiiTit ; c’efî alors qu’il faut remuer le tout » avec une lame de cryflal ou de verre , de » peur que la compofic ;on nes’at’ache au tond » ù2 la taffe ; ce verd fe charge bien.ôt ea » rouge , & : !e rouge en b|leu.

« Si le cobalt elt de la meilleure qualité ^ » tel que celui qui vient d’tTpagne , la co.ileur verte ne paroît point d’abord, non plus « que la rouge ; mais la diffoiution en s’epail^ » fiffant , paffe tout d’an coup à la coaleuE » bieue , la plus forts. On continue de rem.,er « av’ec la plus grjnde attention, en de-achanf «-tout ce qiii t.ent au fond de la taffe , jufqu’à « ce que la compiiidon fe foit formée en un » lél grené d’un beau bieu. A’orb ie^. vapeurs » nitreufes fortant du fel en grande quantité, » il efl à propos de s’en garanâr en faiiant » l’opération fous une cheni ;ri£e. On continue » de tenir le fel fur le feu , & de le remuer « jufqu’à ce qu’il devienne prerque fec (car » il ne faut pas qu’il foit totalement privé’ » d’iiumidité) , c’eft-à dire, il fai ;t qu’il n’exhaie prefque plus de vapeurs nitreulés. li » ne faut pas preffer le feu, fur-cout vers la’ » fin de l’évaporation.

» Après que l’on a laiffé le fel fur les cendres* » chaudes pendant ure ou deux he-.re ;. , on’ » retire la taffe , & on l’expofe à l'air K>re ;■ » le fel y prend un peu d’iumidité & une pe-" » tite teinte de’ rouge qui augmente tous Je» « jours , jufqu’à le faire devenir rrsqi.e cra-

!j m jifi ; alors on remet la rafle fi.r Irs cndres 

» chaudes. Le fel reprend ia &Dulfî.r bieueaulFi-tô " que la chaieur s’y fai’- fentir. Sî « l’on porte la taffe au nez, on s’appe-çoîcqu’il s’exhale encore des vapeurs ritreules ; » on remue le fel avec la lame de, verre ;.fan» » cela, il fe mettroit en grumeaux : on la r> tient ainfi à une petite chaleur peidrtn ; une’ » heore •, après quoi, un retire la taffe , & on f> l’expofe à l’air de nouveau pendant quelques » jours. L’huiniJi ;e revient , & la cfuleuiT » ro ;ge reparoît, itiaii plus lenfenient , & ea’ » rao !r..’^re quantité. On continue û’-bf.rves’ » la même marG3uv :é penchant un moit ou (ix » femaines, en evpofanr ie fel alterrativemenc » fur les cendres chauder,& enfi.ue à l’air-’ 5> froid ; pendant ce temj s on s’arperço’t que’ )3 i’éxhalaifon des vapeurs niireafesfe fait moins52B

E M A

» Icnth- à cliaque fois qu’on expofe le Tel à la » chaleur, (k qu’à la iin on n’en fenc prcl’que y> plus du [out £n portant !a tafTc foiii- le nez. ■» On s’appcri^oît ai :!îi que rhumiJité Sz la » couleur ciaruo^fif ; roviennent au l’ei pluslcii-y > teraent à l’air froiJ,

» Par ce ;ve manœuvre réitérée , on vient à » -bout d’arrêter la couieur" dans la bafe du Tel » marin, de façon qu’elle peut îbutenir l’cdulccranon fans qu’elle fe mêle ’avec l’eau : » ce qu’elle n’auroit pas manque de faire fi » l’on a/oic voulu tenter i’édulcoratren auffitôt après les premières defllcations. Pour être y> affuré que ce (ël eft parvenu au point de- 51 firé , on peur eifaj’er d’en mettre, au fortir « du feu, un peu dans i :n petit gobelet de 5> cryftal ; fi l’on voh qu’après avoir veif’é | » doucement de l’eau- deiius , de façon qu’ells j » ne fumage le fei que de trois ou tjuatre { w lignes, & l’avoir lailTce pendant une dtmiheure, le fe ! devient roige, fans conin :u- >) niqucr at.jcur.e couleur à l’eau , on ell afl’uré « que le Tel efi : en état de donner la couleur » bleue fixe. Si, au con’.raire^ l’eau le’ charge » de la couleur rouse , ii faut con inuerd’expofer encore aherr’aïiveraent le (el lur les jvcendres, &c à l’air froid, pendant quelque » temps.

« Lorfquc pa" l’efTai dont on vient de par- » 1er, on i’efl afiuré que ie fel peut fuppor.er » rédulcoru’ion, fans que la couleur le inèio » avec l’eau ; il faut, peu de temps après que » le fel efl rcriro de deffiis les cendres chaudes, y> vsrfer doucement de l’eau par-deîTus , de « façon qu’elle lurnage au fel d’environ un 3) pouce ; au bout d’un quart d’heure, on décai. te cette eau pour en remettre autant de «_ nouvelle ; on réitère cette manceuvre quatre » ou cinq fois, & Is fel qui étoit bleu devient rouge.

»I1 arrive très-fouvent qu’en faifant chauffer » & fécher ce fel rouge , comme on vient de » le dire, il ne reprend que très-peu l’humii > dite de l’air ; alors il faut verfer fur ce Tel n à peu près la même quantité d’eau qu’on y >> avoit mis d’abord , & remettre de nouvel » efprit de nitre , peu à peu , jufqu’à ce qu’on j) voie que la diflblution fe refait de nouveau ; >5 lorfque tout le fel eft diffcut , on décante » l’eau qui a repris la coi^îeur rouge ; on jette » ce qui s’eft dépofé au fond , & l’on recom- •n mence l’évaporation , & à mettre le fel en K grains, comme on a fait ci-deCTus, en obferrant que ce fel qui devient bleu, ait » encore pafrablement d’humidité lorlqu’on le )) retire du feu. Le fel devient rouge auffitôt qu’il eft refroidi. Vingt-qustre heures >■) après, on reme : la taffe de porcelaine qui le » contient, fur des cendres très- chaudes ; alors â le fel devient bleu h jnefuro cju’ii fent [a E M A

À chaleur : on prend garde qu’il ne s’attacha » au fond de la taiîe, en le remuant avec un( ! » lame de verre , à mefure qu’en le fai » chacfîer. On continue à remettre ce fel il, n le feu à différentes rt.’prr(cs., comme on ; >’ lait la première rois ,• on le lalffe enfi.iti " quelque temps f’ar.s y loicher ; onen pteni » en fuite un pstit cffai qu’on met dans nr » gobelet de verre : on verfe un peu d’eai » par-doffus ; & lorlqu’on voit que cette eai » ne prend point la couleur rouge, ce qu » marque qu’elle n’eft point enlevée au fel, » on décante cette eau,. & on en vcrfe di » nouvelle, feulement de l’épaifteui’ d’un ot » dtn ;x pouces au-deîTus du fel ; on réitère » celte opéi’atîon trois ou quatre fois ; on dé » cante enfuite toute l’eau ; on fait fecher 1 ; » coi :lcur , qui eft très-rouge, fur les cendre » ciiaudes ; on finit par, la mettre furun ted’ir » de porcelaine qui ait le moins d’épailTem n pod’ible ; on fait une place au miiieu de ; » charbons ardens , de façon, que ces charbon : )’ foient rout autour & plus élevés que le tel’ » fon fur lequel la couleur eft placée , iati ; » cependant que le teffon piiiife rougir ; dan’ » un inftant , la couleur rouge fe cliange er » une belle couleur bleue , qui ne redevien » plus rouge , à moins qu’on ne la garde long « temps ; & : alors on lui rend la couleur ci » l’expofant de nouveau dan^ les charbons ai » dens , corsrae on a déjà fait. Cette coulcu » employée fur l’émail , avec trois fois foi » poids du fondant général, fait un très-beat » bleu, trèa-fondant & fort facile à employer )) On ne peut pas d’fiîniuier que ce bleu m » perde beaucoup de fa couleur lorfqu’on h « broie far l’agate avec le fondant & de l’eau « comme on a coutume de faire aux autre ; >) couleurs ; mais il y a plufieurs façons de remédierà cet inconvénient ; on peur faire dii « foudre dans un peu d’eau , de l’indigo oi » du bleu dePruiTe, & en fecouant un peud( n cette eau bleue avec le bout du doigt fu » la couleur mêlée avec le fondant, afin delà )■) broyer enfemble , la couleur paroîtra , ei » l’employant , d’un bieu aulfi fort & aull » approchant de celui qu’elle aura, après êtn » parfondue , qu’on pourra le défirer ; ces bleu » qu’on ajoute à l’eau, fe brûlant au feu, ri’ » font aucun tort au fond de la couleur bleu » du col ait , parce qu’ils font brûlés avant qu » le cobalt & le fondant foisnt en fuTion. » Il y a encore un autre moyen de donne » un grand éclat à ces bleus : c’eft de mettr, » avec le fondant & le cobalt , partie égale oi » même jufqu’à deux fois autant que l’on a mi » de cobalt, d’un très-beau bleu d’azur quei’o) » vend à Paris fous le nom de bleu d’argent » quoiqu’il n’en foit pas tiré , mais du cobal » pgpt il n’eit qu’une préparation faite ave E MA

  1. foîn ; cet azur fe vend à Paris un écu le j

» gros. Il faut feulement avoir attention d’ajouter un poids égal de fondant au poids que » l’on a mis vis-à-vis d’une partie de cobalt. » Ce mélange préfente à l’emploi une couleur » bleue l’iifiilante ; il fond très bien à tous les a feux , & fait fur l’émail un bfeu auffi bril-- lant que le plus bel G’a :remsr. » Si l’on s’apperçoit que le bleu de cobalt » vienne à rougir en le gardant, c’efl une » preuve qu’il contient encore trop d’acide rii-

  • treiix i dans ce cas on le remet dans l’eau,

» comme on a déjà fait ; on change l’eau deux » ou trois fois ; & après l’avoir fait Kcher, » on l’expofe de nouveau fur un teffon dans » les charbons ardents ».

Remarques fur le bleu tiré du. cobalt. Il n’étoitpas difficile de tirer du cobalt la ma- ! tière qui donne la couleur bleue dans la vitrification ; les bleus de fma’.t ou d’azur font très-communs & très-faciles à faire ; mais il falloir ici non-feulement tirer du cobalt la matière qui donne le bleu, mais encore qu’elle eût cette couleur bleue , fans qu’elle fût entrée en vitrification , afin que le peintre ne pût pas s’y tromfer & en fentît les efteis. Il fjUoîc en même temps que la couleur pût s’employer avec facilité, & : qu’elle le mît aifcment en fufiort ; ces deux qualités ne fe trouvoien : poinr dans, le bleu d’azur i on ne pouvoit l’employer aif :ment, parce que ce n’eftqu’unevitrifica ;ion, & qu’on nepcut peindre avec du rerre , quelque peine que l’on ait prife 3. le broyer. La quantité de fondant qu’on tentoic d’y ajouter , pouvoii le rendre plus fufible 4 mais ce n’étoit toujours que di» verre qu’on y mettoit déplus, ’ ;ui d’ailieurs n’ayant ■point da cotileur lui-même , diminuoit prodi» gieufement la couleur bleue de i’azur. La couleur bleue que fournit le cobalt , qui cfl : fi belle & fi fine quand une fois elle eft entrée en vitrification , efc ttès-volatile -, & il ell facile de la perdre avant qu’elle y l’oit entrée. henù-kel , flora Saturn. traduc. F. anç, p. 506 , dit que lorl’qu’on vitrifie dji cobalt , on a quelquefois du noir au lieu du bleu , & même que la couleur difparoît tout-à-fait fi i’on calciffie trop la mine. Il efi : donc néceflaire qu’il foit,refl :é un peu d’arfenic dans la mine après qu’elle a été calcinée. Lorlque la raine efl : calcinée àce point, on la mêle avec de l’alkali fixe & de la matière vitrifiable , pour, en mettant le tout en fonte , en tirer un verre bleu dont on fait l’azur ; il paroît que , dans cette opération , il faut que l’alkali fixe fe Ibitmis en fufion avant que le feu ait étéaffez fort pour enlever la terre qui , jointe à l’arfenic qui refle , fournit la couleur bieue ; il faut donc que cette terre ait une grande affinité avec l’alkali fixe, puifque le feu , ncceflaire à la Beaux-Ans, To’ne II.

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vitrification de toute la compofition , ne l’enlevé plus, & que l’alkali fixe qui lui fert de moyen d’union avec la matière vitrifiable, la porte dans cette matière en même temps qu’il la met en fufion.

En fuivant ce raifonnement, il paroît qu’il faudroir employer l’alkali fixe pour avoir la couleur bleue du cobalt ; mais il elt nécelTairc que cette couleaf foîtféche pour pouvoir être employée ; &ralkali fixeefl : non-feulement fufceptiblede l’humidité de l’air, mais fi l’on tentoit de l’édulcorcr , il s’en iroit toutentier dans rédulcoration , &il n’en refleroit rien d’attaché au cobalt qui pût développer fa couleur bletiej il falloir donc trouver moyen d% joindre !a couleur donnée par le cobalt à une bafe que l’eau ne pût point diffoudre, & emporter par les édulcorations ; le fel marin a paru d’autant plus proore à remplir ces conditions, que perjonne n’ignore que fa bafe eftalkaline ; & d’ailleurs , qu’en le joignant aux autres acides , lorfqu’elle en trouve, elle forme des mixtes , qui par-là deviennent beaucoup plus fufibles. On va voir cependant q-u’il efl : abfolumenc néceflaire qu’après les différentes difTolutions, évaporations", &c. que l’oa efl : obligé de faire pour parvenir à la couleur defirée , il refle encore un peu d’acide nitreux dans la couleur.

Si , après avoir diffout du cobalt par l’acide du nitre, avoir évaporé la diffolution à ficcité , & l’avoir édulcoréc , on met fur ce rifidu de l’acide du lel marin , la diffolution qui fe ferafera verte , parce que ce cobalt ne contient plus d’acide nitreux. En efFer, fi l’on ajoute tantfoit peu d’acide du niire fur l’efprit de fel , il tV fait une eau régale qui rend la diffolution ro’.ige ; .Se comme on a vu dans les manipulations précédentes, que pour avoir une couleur bleue dans le réfidu , il falloir qu’il fût rouge quand , en dernier lieu , on l’expofe au feu au milieu des chatbons ardens ; il faut donc que dans ce temps-là il y rsfle encore un peu d’acide nitreux pour que lephlogiftique des charbons puiffe lui donner la couleur bleue.

C’efl fur ce principe que l’on fe fonda ; lor(^ ([ue , par malheur, on a pouffe l’évaporation de l’acide nitreux trop loin , on voit que la couleur du réfidu ne devient pas bleue dans les charbons ardens ; on en efl : quitte alors pour mettre de nouveau de l’efprit de nirre Se de l’eau fur ce réfidu , jufqu’à ce qu’il foit entièrement diffout, & : il faat recommencer l’évaporation & les deiTications de la matière , comme on a fait la preiiixre fois , en fuivant ce qui eft décrit dans les manipulations -, il faut même moins de temps & de dedications dans cette féconde opération que dans la première , pour amener le réfidu au poinc o-ù ildoit être, c’cft-à-dire , pour qu’il ne fe diffolve pas dans l’eau dans laquelle on l’éjul-X X X

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cor€ , & qu’il prenne la couleur bleue dans les charbons atden".

On a vu qu’il falloit employer des deUications de la couleur à différentes repriCes & pendant longtemps, afin de chafier toujours à chaque defhcation un peu de l’acide nitreux quieft en trop grande quantité , & pour que l’acide de l’air, qui eft l’acide vitrioHque , s’infiniiât un peu dars la couleur à chaque lois , & l’J- réduisit parce xnr.yen’au point de n’être plus emportée par l’eau dont on !e fert pour l’édulcorer. Or. voit que c’eft le phlog’iftique fourni par les charbons ardens, qui change la couleur rouge du rêfidu en bleu ; mais le phiogiftique des charbons n’eft arrêté dans le cobalt qu’autant que le cobalt confervc fa chaleur ; à mef’.re que le cobalt fe refroidit , cette couleur fe diffipe au point qu’il redevient rotige , comme il étoit avant d’avoir été mis au feu ; il faut donc , dans le réfidu rouge du cobalt , une fubfiance qui y fixe leph’ogifbique des charbons ardcns, fi l’on veut qu’il garde la covileur bleue ; c’eft ce qu’on obtient par l’acide vitriolique répandu dans l’air, lorfqu’on eft venu à bout d’y en fixer une certaine quantité par les différentes delTications. C’efl par cette raifon, que pour faire du fmalt ou de l’azur, on préfère la potafl’c aux autres al-Icalis fixes, parce qu’elle contient un peu d’acide vitriclique.

Si l’on ne met qu’une petite quantité de fel marin dan» ladiflblution du cobalt qui donne du roiige , on aura par la deffication , un rciidu rouge , à qui la chaleur ne donnera point la couleur bleue y mais fi l’on ajoute une ditîblution de fel marin , la couleur bleue paroîtra dans ladeflication ; ce qui prouve bien que cette couleur bleue efl : due à la jufte combinailbn de l’acide nitreux avec l’acide marin, couleur qui ne s’y trouve enfin fixée que par l’acide vitriolique que l’air a iourti’u n.

Obfirvatîon de VEditeur. Malgré les détails où notre auteur vient d’entrer fur le b’eu que l’on tire du cobalt , il refre encore bien des choies à dtrfirer fur cet article ; & nous lavons queM. de Montamy fe promettoit de faire une fuite d’expériences pour conflaterla vraie nature du cobalt, qui fait aujourd’hui un ft’jet de difpute entre les chymilles ; les uns le regardent comme un dcmi-mctal, & fe fondent fijr le régule que l’on en obtien" ; d’autres regardent ce récrule comme une combinaii’bn particulière du fer avec l’arfcnic. Quelques expériences faites par de très habiles chymilles, femblent confirmer égalem-nt ce ? deux fentimens. M. Rouelle , dont les talens font connus de toute l’Europe , perflfte à regarder le cobalt comme un demi mral particulier, vii que ce célèbre chyraifte a tiré ce qu’on appelle le régule du cobalt, du fmalt même , ou de cette matière vitrifiée & pul-E M A

vérifée d’une couleur bleue qui nous vient ié Saxe ; d’un autre côté , M. Her :ckel nous apprend qu’en faifant réverbérer le tiers d’une drachme de limaille de fer pendant un quart d’heure, il lui fit prendre une couleur d’un violet foncé ;& qu’ayant môle cette limaille rév. erbérée avec un quart de drachme de caillou blanc pulvcrile & de fel alkali le plus pur, & ayant placé ce mélange dans un creufet bien luté, expol’é à un feu violent , il eut un verre de la couleur bleue d’un faphir.

En fuppofant cette expérience vraie , comme on ne peut guère en douter, il paroît que la propriété de donner au verre une couleur bleue, appartient au fer , & feroit foupçonner la prc- (ence de ce métal dans ce qu’on appelle le ré~, guU decobalt , qui n’eft peut-être qu’une combinailbn intime du fer avec l’arfénic au point de Gtiiration ; ce qui rend leur union très-forte , & capable de rcfilter à l’adion du feu jufqu’à un certain point.

Une autre expérience de Henckel femble confirmer cette idée : il dit qu’en mêlant une partie d’arfénic avec quatre parties de limaille d’acier , & en faifant réverbérer ce mélange pendant troisjours& trois nuits, en commençant par un feu trè-douxj on obtient une matière propre à colorer le verre en bleu. Cette expérience de Henckel a été réitérée par M. de ,Montamy, qui plaça le creufet, contenant fon mélange , fous le four où l’on cuit la porcelaine de S. Cloud ; mais le mélange pad’a au travers du creufet qui avoir peut-être quelque défaut ; cette expérience n’a point été réitérée depuis, comme il eût été à defirer.

S’iléroit permis de bazarder ici une conjecture que l’on a communiquéeàM. de Montamy, mais qu’il n’a pu vérifier, on croiroit qii’en mêlant la limaille de fer avec l’arfnic, dont il faudroit tâtonner les dofes , & en la traitant de la même manière que M. de Montamy a fail avec le fel marin , c’eft-à-d-re , en mettant une certaine quantité de fer très-divife , comme il l’efi : par l’opération qui donne le fer ou fafran de mars ou l’ffthiops martial ( voyez la féconde partie ) ; ci3 fer ainfidivife & mêlé par la triturat : on avec un quart de fon poidi d’arfénic , & renfermé dans un fragment de canon de fiifil bien luté , & expofé quelque temps au feu des charbons, formeroit peat-ê ;re une comb na fon intime avec lui , & donncroit une fubftance fenibiable à celle qu’on appelle régule de cohah,

!k propre, comme elle, à faire de la couleur 

bletic.

Cette méthode aurait , en cas de réufllte, de grands avantages , vu qu’elle épargnero-ic l’embarras de fe procurer du bon cobalt , ce qui n’sft pas fort aif ;; d’ailleurs , elle mettroit à portée de faire du fafre en tout pays , puifquele chymiile, ’ dans fon laboratoire, imiteroit ce que la natuje ME M A

àtten Saxe ou êrt Efpagne dans l’întérîeur de_l«  jferre. On ofe croire que cette cônjeaure mérite liu moins d’êire vérifiée à plufieurs reprifes avant que d’êcre rejettée.

Les expériences que M. Cadet a faites fur le cobalt, prouvent que le régule de cobalt eft (l’arfenic combiné avec une fubflance métallique, puifque ce régule , pouffé au feu pendant longtemps , finit par b’évaporer tout-à-fait, en répandant une odeur d’ail, f^oyei les Mémoires de VAeadémie royale des Sciences , année ij6o, dans les Mémoires étrangers.

M. d’Arcet ayant mis du cobalt fur une pièce de, porcelaine , pour effayer de lui donner une couleur bleue , fut très-furpris de voir qu’une partie , après la cuifl’on, étoit devenue d’un brun foncé, ce qui annonce du fer, tandis que le refle étoit devenu bleu.

D’un autre côté, M. Margraft" a prouvé que la couleur bleue auife trouve dans le Japis lazu- 4i, étoit uniquement due au fer , & non au enivre, comme on l’avoit cru jurqu’icî. Peutêtre que cette couleur bleue auroit plus de fixité , & : ne dilparoîtroit point dans le feu , fi le fer qui la produit, étoit intimement Combiné avec l’arfénic , comme on a lieu de le préfumer dans le Speijf des Allemands, ou dans ce que l’on nomme le régule de cobalt. Toutes ces chofes viennent à l’appui de nos conjeftures , & doivent engager à examiner fi réellement il ne fefoit pas poffible de faire du cobalt artificiel ; ce qui procureroit beaucoup de facilité à tous ceux ^ui peignent, foit en émail , ibit fur la porcelaine.

M. Lehmann , dans fa Minéralogie , dit que la matière colorante qui fe trouve dans le cobalt , eft quelque chofe de purement accidentel ; c’eft pour cela qu’elle fe fépare de la partie réguline , tant par la vitrification , que par d’autres opérations chymiques ; & même fi l’on fait fondre à plufieurs reprifes le _//’«i^ produit par le cobalt avec du fel alkali & du fable , il perd à la fin toute fa propriété de colorer le verre en bleu. Le même auteur dit encore que l’on peut s’affiirer de ce qui entre dans la compofition de la matière réguline du cobalt qui donne le bleu , en faifant fondre ce régule à plufieurs reprifes avec de la fritte du verre , &en le remettant de nouveau en régule ; fi Ton extrait enluite la partie cuivreufepar l’alkali volatil, jurqu’à ce qu’on n’ait plus de bleu , & qu’enfuite on diffolve le téfldu dans les acides , & qu’on précipite la diffolution, on ne tardera point à appercevoir le fer.

D’un autre côté, M. de Jufli dît que fi l’on fait calciner le cobalt noir qui donne peu d’arfénic , avec du cobalt gris ordinaire qui contient plus d’arfénic , la couleur bleue en devient plus belle. Le même auteur prétend /jue tout cobalt contient du fer, & même de l’argent , ainfi que E M A

jir

du cuivre. Il ajoute quelamanganefè , qui con-I tient du fer, jointe avec de l’arfénic , ik caicij née enfuite , devient propre à donner une couj leur bleue au verre.

! M. de Montamy préfumoit que l’arfénic en 

entrant dans le verre , y fixoit le phlogiftique du cobalt ; il s’appuyoît , dans cette conjeflure, fur ce que le cobalt , calciné au point de ne plus contenir d’arfëfiic, ne donne plus alors de couleur bleue au verre. Pour vérifier ce fait, il fe propofoit de tejoindre de l’arfénic avec le cobalt calciné au point de n’en plus contenir, & de voir fi , par là , il reprendroit la propriété de colorer le verre en bleu. Il fe propofoit auffi de joindre de l’arfénic & du fel marin à de l’émail des quatre feux, pour voir s’il deviendroit plus bleu. Mais la mort eft venue interrompre le cours de Tes expériences.

La Couleur jaune. » Celle que l’on peut employer fur l’émail , fe fait à l’aide de l’érain » fulminé fur le plomb. Voici comment on peut » faire cette opération. On met à fondre dan» » une capfulc , à grand feu , trois parties da » plomb ; & lorfqu’il eft fondu , on y joint une » partie d’étain qui fe réduit à la furface du n plomb en une poudre jaune , que l’on peut » retirera mefure qu’elle fe forme. On pourra » faire réverbérer cette poudre jaune , Se enfuite » on mêlera & triturera cette chaux d’étain avec • » du fel marin bien pur ; on l’expofera au feu o fous une moufle , comme on a fait pour le» » fafrans de mars ; & après l’avoir traitée de la » même manière que ces fafrans , on pourra la » joindre avec le fondant général , 8c s’en fervir » pour peindre fur l’émail ».

./^utre manière, n On prend un creufet que « l’on met au milieu des charbons ;& lorfqu’il » eft chaud , on y jette deux parties de nitre • » quand ce fel eft bien fondu , on y joint quatre » parties d’étain ; on pouffe le feu , & il refte » une chaux’ jaunâtre , que l’on peut faire réverbérer , & enfuite laver dans un grand n nombre d’eaux pour l’édulcorer ; après quoi » oti pourra l’appliquer fur Vémail aprts l’avoir » mêlée avec le fondant général ». Autre. » L’étain s’enflamme avec le foufrç. » comme fait le plomb : on doit faire cette opération dans un creufet bien couvert. Par ce ,51 moyen rétain le convertît en une chaux qui » calcinée fortement , prend une couleur brunsfemblable à celle delà terre d’ombrs, qui peu » à peu devient jaunâtre. On peut édulccrer » cette chaux , 8 :. la traiter de la manière accou» » tumée pour peindre fur Vémail ., en lui joignanc le fondant ».

Ce qu’on vient de lire fur la couleur jaune eft beaucoup- înpins détailla que ce qui concern» X x X i^

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les autres couleurs , parce que la mort a prévenu M. de Montamy lorfquil en étoit à cette partie ile fon traité. Son éditeur a été obligé de recourir , pour ce qui manquoit au manulcrit , à des notes trouvées dans les papiers de l’auteur. D’ailleurs il foupçonne que M. de Montamy fai :blt encore ufage du jaune ds Naples , & il regarde comme vrailemblable que cette fub fiance , traitée comme les iafrans de mars, & mêlée avec le fondant , doit donner du jaune fur Vémail. Foyei les procédés de M. de Montamy fur les fafrans de mars, à l’article oïl il a traité des Houges 6- autres couleurs tie’es du fer. Nous al ons joindre ici l’ei Ke-narques fur le jaune de Naples , imprimées avec diltercns mémoires à la fui’.e de fon Traité fur les couleurs en émail. Tout le monde convient que le jaune de Na ■ ^Zfjeftune eipéce de pierre jaune qu’on tire de la terre aux environs de Naples. Cette pierre , dont il y a des elpcces d’un jaune plus ou moins foncé , elt très-poreu.ie,- & ne païuîr compofée cjue de grains de fable jaune , médiocrement liés l’es uns aux autres , puifqu’-on lesécrafe ailëment 9veo le pilon. Cette matière ne change pas de couleur au feu , &- n’eft fufceptible d’être diffoute dans aucun des acides. Le pays d’où elle vient fait fôupçonner qu’elle doit êire la production d’un volcan. Le P. Maria , dans la defcription qu’il a donnée des matières produites par le • Véfuve, chap. 5, parle d’une matière que l’nn tire de l’intérieur du Véfuve , qu’il appel le_/ô//à frujtato^ ( foafre ufé ou épuifé ) qui a beaucoup de rapport avec It jaune de Naples. Suivant le même auteur ,. -toutes les pierres forties des volcans font fpongieufes , & la lave même perd de fon poids par le temps. On peut d’autant mieux croire que le jaune de Naples eftune produftion de cette natu ! e , que les fels que l’on trouve fur les laves prennent la couleur jaune au feu. Les volcans étant très-abor.dans en fer , on peut regarder ïe jaune de A aples co-mme un fafran de mars , travaillé d’abord par un volcan , & perfectionné dans la couleur jaune parle’féjour qu’il a fait dans la terre ; ou comme des matières ferrugineufes à demi vitrifiées parla chaleur du volcan , & dont la vitrification imparfaite s’eft en-Suite décompol^e par le féjour que ces matières ont fait dar.-s la terre.

Ce- pierres ne contiennent aucun foufre , puifqu’olles n’en donnant aucune odeur lorfqu’on les expofe au feu ; la quantité de petits trous dont elles font remplies, & la facilitéavec laquelle on les p-.ilvérile, font des marq-.ies certaines de la perte qu’elles ot^t faites des matières qui les rendoient plus compailes , ou qui leur (donnoient de la liaifon. Il eft cert ?in que la pierre friable dans ]3.queUe ïc jaune de l^aples i’c trouve, fembie annoncer une décompolition. . M.. Pott prérend que le jaune de Naples con- , jtîem quelques portions de chaux d’etain. Ce-E M A

pendanton ne peut en retirer la moindre partît de ce métal. Cette fubftance a la propriété de blanchir le verre beaucoup mieux que la manganefe , & de lui ôter parfaitement fa ve-deur : il faut , pour cela, mêler une partie àe jaune de Naples fur centparties de friite.

Au premier coup d’oeil on feroit tenté de croire que cette expérience prouve que le jaune de Nû^/fj ne contient point ai fer. Cependant, fi l’on réduit cette fubftance en poudre ^ en verfant deffus un peu d’efpritde vitriol , & en mettant le tout à digérer fur des cendres chaudes ; fi l’on filtre la dilTolution après l’avoir étendue d’eau , en y verfant , goutte à goutte , un peu d’alkali fulfuré, en voit fe précipiter un très-beau bleu de Pruffe, qui eft : un figne indubi-i table de la préfence du fer.

L’ochre d’Italie, qui eft d’un très-beau jaune, devient d’un très-beau rouge par la calcination. Quand cette fubftance a cette couleur , fi on Ja triture avec le double de fon poids de fel marin , & qu’on expofe le mélange, qui eft rouge, à un grand feu , dans une capfule , le fer lé revivifie Ibus la forme de petits globules j& la terre refte d’un jaune pâle.

De la couleur verte. Défauts de celles qu’on tire du cuivre. Il n’eft pas difficile de tirer la couleur verte du cuivre ; ce métal eft attaqué par tous les dUTolvans quelconques , foit acides, foit alkalis ; les huiles & les graiffes mêmes le diffolvent à caufe de l’acide qu’elles contiennent ; toutes ces diffolutions font vertes, excepté celles qui ont été faites par les alkalis volatils qui font d’un trèi-beau bleu , mais qui deviennent vertes lorfqu’on les a fait évaporer,, c’eft-à-dire, aufti-tôt que le feu en a chafTé l’alkali volatil ; mais la facilité qu’on a de di !-Ibudre le cuivre, eft auùi eaufe de la difficulté que l’on rencontre non -feulement à le précipiter , mais encore de la difficulté bien plus grande que l’on a pour^ édulcorer le préciDité quand on eft une fais parvenu à le faire. On fait que le précipité participe toujours un peu des fels qui ont conftitué le dîflblvanit ; ces fels fe diflblvent de nouveau dans l’eaa que l’on emploie pour l’édulcoration , & remettent lé précipité en diffolution dans cette eau.

Avaat de chercher à édulcorer le précipité, on a la précaution de l’expofer au feu fous une mouffle ; pour pou qu’on Ty laifle, le feu brûle le cuivre , Se le précipité devient noir comme Vas uJliLtn : il eft vrai que, dans cet état, il fouffre l’édulcoration fans fe mê’er avec l’eau ; mais le verd qL.’il donne fur l’émail , tire fur le noir ; Se quand même il donneroit un beau verd, il ne rerapliroit pas notre objet, qui’ cor.Gfie à n’employer que les matières qui ont une E M A , ._ ...

îonleuï approchante de celle quéla tonte leur donnera fur rémail.

! On a vu que l’on ne pouvoir employer dans 

lia peinture fur l’émail, que les fubftances qui stoient abrolumen : délivrées des feis ; ces Tels étant des diffolvans, on ne peut en dégager le icuivrèque de deux façons, ou en faifant réverbérer la matière, afin que les diffolvans en foient enlevés par la force du feu ; & dans ce cas la matière de verte devient noire ; oii par les édulcorations, & dans ce cas, Teau n’enlevant les fais qu’en les diffolvant , cette eau chargée de Tels, remet le cuivre en diffolution. D’un autre côté, le cuivre ns donne une couleur verte qu’autant qu’il eft en diffolution ; & il ne la donne au verre que par cette même railbn. Dans la précipitation que l’on fait du cuivre diffout par l’efprit de nicre , en mettant un morceau de fer dans la diffolution , le cuivre précipité de icette diffolution , qui eu verte , n’a plus cette couleur, & reprend fa couleur métallique qui elt rouge ; parce que l’elprit de nitre lâche le ’cuivre pour attaquer le fer avec lequel il a plus d’affinité ; & alors le cuivre dégagé de fon diffolvant , reprend fa couleur naturelle. Les cryftaux de verdet étant de toutes les opérations que l’on peut faire fur le cuivre, celle qui contient la plus grande quantité du métal en couleur ver ;e fous une forme feche , paroîtroient être ce que l’on peut employer de mieux.

Le cuivre fg diffout dans tous les diffolvans ’minéraux ou végétaux , par conféquent dans tous les fels acides, alkalis ou neutres, de même que par la voie feche dans les verres. Il prend toujours une couleur verte ou bleue dans toutes ces diffolutions ; c’eil-à-dire , verte fi la diffalution eft par des acides : bleue, fi elle a été faite • par des alkalis volatils ; ik verd bleuâtre, fi c’eft par des fels neutres ; il ne perd qut ; peu ou point de fon phlogiftique par la diffolution , ■ différent en cela de plufieurs autres métaux qui . le perdent tout entier ; cela eft cauié que les précipités que l’on en fait, non -feulement font îblubles dans les acides, mais même dans l’eau commune. Lorfqu’on expofe ces précipités au feu jufqu’à un certain point , ils devientienc noirs, &. alors on les édulcore très -bien avec de l’eau , fan. qu’ils s’y mêlent ,• mais ils reftent noirs.

Ainfi il arrive deux chofes lorfqu’on édulcore le précipité verd du cuivre ; ou les fels qui renûoient le cuivre werd, fe remettent en diffo-’ : liuion dans l’eau, & y remettent auffi le cuivre I (ce que l’on apperçoit par l’eau qui devient l verte) ; ou fi le cuivre ne fe remet pas en diffolution dais l’eau de l’édulcoration , il ceffe ’ ie. refter vert à mefure que l’eau en ôte les fels, & redevient rouge , ce qui eft fa couleur na-

? lUrelle. 

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" Ceftîcî que M. de Montamy en eft refté fur cette couleur verte ; ce qu’il çn dit, fuffic pour montrer les inconvéniens qu’il y a d’employer le cuivre dans la peinture en émail ; ainfi pour travailler avec plus de sûreté, ’il faut faire la couleur verte en mêlant les jaunes & les bleus en différentes proportions : on pourra encore les éclaircir en y joignant du blanc, ou les rendre plus foncés en y joignant des bruns, fuivantles différentes nuances que l’on voudra fe procurer.

En général, comme les différentes couleurs, dont l’auteur donne la préparation dans le cours de cet ouvrage, ont l’avantage de pouvoir fe mêier fans inconvénient, c’elt aux peintres à chercher les difFérens mélanges «Se les diverfes dofes qui peuvent convenir aux diftërens objets qu’ils voudront repréfenter ; le blanc fervira toujours à les rendre plus claires ; le brun à les rendre plus obCcures, Quelques fafrans de . mats d’un beau rouge vif ou d’écarlate , mêlés ^^fc du bleu , donneront du cramoili ; les mêmes fafrans de mars, mêlés avec du blanc, donneront des couleurs de chair. Les fafrans de mars les plus jaunes, mêlés avec le blanc, pourront donner des jaunes clairs ; en un mot, le peintre en émail, à volonté, pourra fe former une palette avec autant de facilité que le peintre en huile.

N". Toutes les couleurs qui font propres â être employées fur l’émail, peuvent aufli être employées fur la porcelaine ; il ne s’agit que de proportionner la quantité du fondant à la folidité de la pâte dont eft compoiëe la porcelaine fur laquelle on voudra peindre. {Article extrait du traité de M. de Montamy fur Les couleurs dans la peinture en émail). Comme dans le traité que l’on vient de lire, les procédés pour fe procurer des couleurs jaunes ne font pas aulFi approfondis que le refte , parce que la mort a arrêté l’auteur lorfqu’il en étoit à cette partie de fon travail , nous croyons devoir joindre ici une note trouvée dans {’es papiers, & extraite des Mémoires de l’Académie de Berlin, année 1746. M. de Montamy avoic copié cette note de fa main, & l’on a lieu de croire qu’il comptoir en faire uf’age. Manière de f.iire une couleur d’un jaune citron avec L’argent.

On fait diffoudre une demi -once d-’argenc le plus pjr & le plus dégagé de cuivre qu’il elt poflible , dans une quanti. é fufSfante d’efpric de nitre très-pur, jul’qii’an point de la faturation. On diffout dans quatre parties d’eau diftillée, une once de fel d’i-rine, qui fait la bafe du phofphore : on fait tomber goutte à goutte la diffolution dans l’elprit de nitre qui a diffouc l l’argent étendu avec quatre parties d’eau j os 534

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continue de laiffer tomber la dlffulution de Tel d’urine, jufqu’à ce qu’il ne fe précipite plus rien : par ce moyen, on obtient un précipite de la plus belle couleur de citron. Cette couleur , dont la découverte eft due au célèbre chymifte Marggraf , pourroit , félon toute apparence, dit l’éditeur des mémoires de M. de Montamy, ê-re"employée avec fuccès fur l’émail & la porcelaine, en rédulcorant foigneufement, & en la faifant calciner avant de l’appliquer.

Voici le moyen d’obtenir le fel d urine dont on vient de parler. Il faut amaffer une grande quantité d’urine de perfonnes faines, & préférer celle des perfonnes qui boivent de la bière ; on l’expofera à une chaleur modérée pour la fa’re entrer en putrcfadion : après quoi , on la fera bouillir lentement dans des vafes de terre verniffée , julqu’à ce que l’urine prenne la confiftance d’un firop que l’on mettra au frais pour cryftalliler. Au bout d’un mois , ou même plutôt en hiver , on aura des cryftaux que l’on diffoudra dans de l’eau chaude bien pure que l’on filtrera toute chaude ; par ce moyen , on aura de nouveaux cryftaux. On réitérera cette dépuration julqu’à ce que les cryftaux foient parfaitement blancs & dégagés d’odeur. Cent vingt pintes d’urine donnent trois ou quatre onces de ce fel, qui eft celui qui fe cryftalife le premier.

Dorure yîir l’émail ^ fur la porcelaine. On prendra un gros d’or pur, battu bien mince, ou bien d’or en feuilles. On mettra cet or dans un creufct que l’on placera dans le feu pour le faire bien rougir , fans pourtant que l’or entre en fufian. On mettra pareillement dans lin autre creufet une once de mercure très -pur ou revivifié de cinnabre , mais on ne fera que le chauffer. Quand l’or fera bien rouge , on verfera par - deffus le mercure chauffe ; on remuera bien le mélange avec une baguette de fer , & lorfqu’il commencera à s’tlever en funice, on jectera promptcmen : ce mélange dans un vaiffeau de terre verniffé & rempli d’eau. Lorl’que le mélange fe fera épaifli, on décantera l’eau , & on palfera le mélange au travers d’un chamois pour en fsparer le mercure. La matière qui reftera dans le chamois fera mife dans un val’e verniffé & plat, ou bien dans une Ibucoupe de porcelaine que l’on placera fur un feu doux, cependant a{rez fort po’jr évaporer le mercure. Par ce moyen , l’or réduit en une poudre très-fine reftera i’ur la fqiicoupe.

Quand on voudra dorer une pièce d’émail ou de porcelaine , on mêlera de cet or en poudre avec un peu de borax bien pur, & d’eau gommée ; &, à l’aide d’un pinceau , on tracera les lignes & ; les figiîres que l’on voudra. Lorfque 1 e tout fera féché , on paffera la pièce au feu , É M A !

tjuî n*aura qu’autant de force qn’îl en fau pour fondre légèrement lafurface delà peintun en émail, ou de la couverte de la porcelaine & pour lors , on éteindra le feu. En fortant di fourneau, l’or fera noirâtre ; mais, pour lu. rendre fon éclat , on n’aura qu’à frotter le ; endroits dorés avec un peu de potée ou d’émeril {Article extrait des mémoires de M. d e Mo h-TA MF ).

^ EMBOUTIR. Voyez Amboutir.

EMERIL ( fubft. mafc. ) Mine de fer dure , refraSaire & vorace i méprifable par le peu de métal qu’elle aontient , eftimable par les feryices qu’elle rend aux arts. Elle eft utile aux lapidaires ; elle fett à dégroflir & à polir les ouvrages de verrerie ; enfin les graveurs en pierres fines en font ufage dans leurs ébauche» & dans les grandes maffes. Mais on ne peut approuver ceux qui , par économie , la font fuppléer à la poudre de dianiant , même dans les travaux qui exigent de la délicatelTe ; elle a le défaut de faire beaucoup de boue , & d’empêcher l’artifte de bien voir fon ouvrage,-EMPREINTE (fubft. fém. ). Tirer une empreinte , c’eft imprimer une chofe fur unef autre, & donner à cette féconde chofe la figure de la première. L’empreinte eft donc l’impteflion de la chofe & une repréfentation fi pat fi ’te , qu’abftraflion faite de la matière, elle eft aulîi précieulë que la ehofe pliemême.

On tire des empreintes de médailles , de monnoies , de cachets, de pierres gravées, c’eft-à-d re , on en prend artiftement une repréfentation rigoureuiement femblable à l’original , par le moyen d’un corps mou. Cependant , comme d’un côté on n’y fauroit parvenir fans en favoir la manœuvre, & que, dj l’autre, il eft aufiï utile que fatisfaifant, pour un vrai curieux , d’avoir en fa porfeifion le plus grand nombre qu’il eft poffible d’fmfnintes tirées fur les plus belles pierres gravées & les autres ouvrages de l’art , on fers bien aife de fa/oir la manière de les faire. Je vais l’apprendre d’après M Mariette. Cette pratique n’a rien de difficile pour les gravures en creux ; route perfonne , pour peu qii°elle ait d’adrefle , en eft capable. Les maricres qu’on emDioye ordinairement pour cetts opération , font la cire d’Efpagne , ie foufre , & le plâtre.

La premitie a cet avantage, que les empreintes fe font fur le champ fans beaucoup do préparation , & que la matière encore liquide s’infinuant exaftement dans toutes les cavités de la gravure, le relief qui fort eft prefque toujours très- complet & très-net : î^ E M P

jaglt feulement d’avoir de la meilleure cire e graveur. , .

, Au lieu d’appliquer la cire fur une carte a ’ oiier, ou Cur du carton, il fiut au contraire lire ufage de papier bien uni. Pour faire cette Ipéraiion avec loin ik avec propreté , on aura ne aflîetre d’argent qu’on mettra fur un réhaud rempli de feu (i) , Se lorlqu’clle fera iffifammsnt échauffée, onpoferadans le fond |n morceau de papier bien fec, fur lequel on ’=pand-a la cire qu’on aura fait fondre en ’expofant au feu , & non en la prcfentant à ’i flamme d’une bougie. On évite par ce jioyen que la fumée ne s’attache, comme il

ft ordinaire , au bâton de cire, & n’en altère

k couleur. On tiendra pendant quelque temp^ icire en fufion , on la remuera , Ik quand oir erra qu’elle eu bien unie & bien liée , on y tnprimera le cachet. Il eft comme indubirablo u’il en fortira une bonne empreinte. ’ ■ Mais comme toutes ces précautions n’emjêchent point la cire d’être une matière ca !iinte, qui fe tond très-aifément , M. Mariette sroit d’avis qu’on renonçât aux empreintes de ,ette efpèce, à moins que la nécelTlté n’y obli-’eât -, comme s’il n’y avoit aucune elpérance e retrouver i’oîcafion de tirer autrement l’ent feinte d’une belle pierre gravée qui fe préante, 8c qu’il fallût abfolument la faire fur le ihamp.

On trouve encore un autre défaut aux em-’reintes en cire d’Efpagne : elles ont un luiant qui ne permet pas de jouir de la gravure k. ô :e le repos qui doit y régner. C’elb pourijuoi les conno’.ffeurs préfèrent les empreintes ■}ui le font avec le plâtre. La difficulté elî de rouver du plâtre affsz fin-, & peut-être vau- ■Iroit-il mieux prendre de : morceaux de taie, es faire calciner Ibi-mêrae dans un feu arilent , & , quand ils feroient refroidis , les ^jroyer -dans un mortier, en poudre la plus ine qu’il feroit polTible. Enfuire on pafTera piuleurs fois cette poudre au tamis , & on 1 emijloyera comme on fait le plâtre , en la courant un peu claire fur la furface de la pierre ■travée qu’on a eu la précaution d’entourer d’une carte ou d’une petite lame de plomb , pour contenir le plâtre , ik empêcher qu’il ne , !e répande au dehors.

Mais le= empreintes qui fe font en fonfre

méritent encore la préférence , parce qu’il eft plus aifé d’y réaffir , & que la diverfité des couleurs qu’on peut leur donner en rend l’afpeft plus agréable. Voici comme il faut y procéder.

On fera fondre dans une cUiller de fer , fur E M P

n ?

(i ) Une plaque de cuivre lendroit le même feivice çi’unc affiette d’argent.

un feu modéré , autant de foufre qu’on aur^ defFein d’en employer , & lorfque ce foufre fera liquéfié , on le jettera dans la couleur dont on voudra le colcrier. Sue-une once de foufre ? on ne peut mettre moins d’une demi-once de couleur, autrement les foufres feroienc trop pâles. Le cinnabre ou le vermillon, la terre verte, l’ochre jaune, le maflicot , ainfi que le noir de fumée, font, de toutes les couleurs, celles qui s’incorporent le mieux avec le foufre : mais fi la jonftion de ce dernier minéral fe faifoit moins difficilement avec la mine de plomb réduite en une poudre très-fine, ce feroit une des teintes les plus flatteufes à la vue. Celle que donne le vermillon eft aufii très-bonne ; & quand on veut qu’il ait plus de brillant . on frotte à fec avec un pinceau & un peu de carmin la furface de l’empreinte. La couleur jettée dans le foufre , on aura attention de tenir la cuiller dans une agitation continuelle , tant afin que le foufre ne s’attache pas à la cuiller & ne fe brûle point, que pour faciliter rincorporatiba de la couleur. Pendant ce temps-^là , il fe forme fur la furface du foufre une efpèce de craffe ou d’écume , qu’il faut en féparer & enlever avec une Ipatule ou le tranchant d’un couteau. Au bout d’un demi-quart d’heure, la cuiller étant toujours reftée fur le feu, pour empêcher le foufre de figer , on verfe le foufre .par incli^ naifon ou fur une feuille de fer-blanc bien planée, ou fur une feuille de papier huilé, & on l’y laifl’e refroidir. Le foufre en fort ayant la forme d’un gâteau. Cette première préparation eft pour le colorier & le purifier de fes ordures les plus grollières. Veut-on faire des empreintes ? On coupe un morceau de ce gâteau de foufre ; on le fait fondre une féconde fois dans la cuiller de fer, toujours fur un feu modéré : on remue la cuiller, pour empêcher le foufre de brûler ; on en enlève encore la craffe, en cas qu’il en paroiffe , & l’on en verfe doucement fur la pierre gravée qu’on a préparée pour recevoir ce foufre liquéfié. On l’a enveloppée , ou plutôt on i’a Avironnéc d’un morceau de carte fine , ou d’un papier fort, qui eft affujetti avec un fil de laiton, & replié fous la pierre , de façon qu’il prend la forme d’un petit godet , & ne peut permertre au foufre de s’échapper par aucune ouverture. Au lieu de cane ou de papier , on peut entourer la pierre d’une petite lame de plomb mince , qui l’embraffe exactement. - Ces difSirens moyens réuflîffent également ; on choifira celui qui paroîtra le plus commode.

A peine le foufre aura-t-il été verfé dans cette efpèce de petit moule, qu’il commencera à figer. Mais , fans lui en donner le -temps , auffi-tôt qu’on jugera qu’il fe fera déjà formé $3$

’E M P

fur la furface de la pierre une légère couché de Ibufre fîgé , qui s’y fera étendu comme une peau, & la couvrira tou[-entière , on furvuide’ra fromptement dans la cuiller la partie de foufre qui fera encore liquide , pour la reverfer tout de fuite , & en remplir le moule. On continuera ces tranfyafions , jufqu’à ce qu’il y ait une afiez forte épaifleur de foufre figé, pouj donner du corps à l’empreinte. C’eft de cette manière qu’on évitera les foufflures. Quelque temps après, le foufre étant figé , on l’ôtera de deffus la pierre gravée qui s’en déiacheva aiiëment Se ians le moindre effort ; &r il ne faut pas douter , fi l’on a ufe de toutes les précautions qu’envient d’indiquer, que l’empreinte ne foit exacle & parfaite : mais pour peu qu’elle manque en quelqu’endroit , on ne doit pas balancer d’en recommencer une féconde. Le même foufre fervira , & l’opération n’eft ni affez coûteufe, ni aflez fatigante pour qu’on doive craindre de la répeter. Telles font les difFrentes pratiques qu’il faut obfervcr , toutes les lois qu’on fera des empreintes avec des pierres gravées en creux ; tic rien , comme l’on voit, n’eft plus fimple. Il n’en eft pas de même des gravures en relief, dont on voudra pareillement avoir des empreintes. Celles-ci exigent une double opération ; car la première empreinte q..’on en tera , ne donnera tju’un crenx , i*t il i’agit d’avoir un relief femblable à l’original.

Il faut donc commencer par mouler le relief, & : par en tirer un creux qui fervira à faire l’empreinte de relief, & c’eft ce qui efl : pret’que toujours accompagné de grandes difficultés , & qui devient même impraticable dans certains cas. Si le relief eft plat ou en très-bafl’e taille , le moule fe fera aifément avec du plâtre fin ; mais pour peu que les objets ayent de faillie , & qu’il y ait des parties éminentes , travaillées & fouillées en-deffous, ce qui ne peut guère manquer de fe rencontrer dans un relief, le plâtre dont on le fert pour faire le moule, le loge dans les cavités ; & quand X)n ient à vouloir le fiparer de la pierre gravée, non-feulement il en refle dans ces petits creux oir il s’etoit infinué , mais ces arrachemens en entraînent fouvent d’autres plus confidérables encore. Le moule .demeure imparfait & ne peut fervir.

Après avoir fait plufieurs tentatives, on n’a rien trouvé de mieux , pour faTe ces moules , que la mie de pain & la colle forte. Voici la manière de prijcéder, •

Il faut avoir de la mie do pain très-tendre , d’un pain qui foit pru cuir , & qu’on appelle cuit gi as. On la prend entre fes doigts ; on la manie & remanie à pluiieurs reprifes, jufqu’à ee qu’elle commence à devenir pâteufe : on y mêle alors tant foit peu de vermillon ou ds E M ^

carmin ; on la repaîtrit encore ; & quand o efl parvenu à la rendre bien molle & bie fouple , on y imprime le relief, qu’on retir fur le champ , & le moule fe trouve fait & afftz bien formé : car cette pâte a une efpèci de reffort naturel , qui fait qu’elle fe prêti fans fe déchirer ; & comme elle embrafTe aîTe exaftement un relief dans toutes fes parties elle s’en fepare aufli fans former aucune ré fi [lance.

Si eh fe détachant de la gravure, quelque portions de la pâe qui étoient entrée^ dansle cavités ont été obligées de céder à des partie faillantes qu’elles ont rencontrées dans leu chemin , & de s’écarter , elles ont b eu’ôt , p :jr leur reflort , repris leur véritable place. El

  • peu de temps , cette pâte fe durcit, & acquier

aflèz de confiftance pour devenir un moult capable de recevoir le p ârre ou le foufe 11 quide q’.'on y veut couîer. Mais elle a un défaut effentiel : quelque bien paierie qu’elle foit, elle ne s’infinue jamais affez parfaitemen» dans tous les petits traits de la gravure , & demeure toujours graffe & pâteulé : ainfi let reliefs que fourniffent ces fortes de moule n’ont aucune fineffe , & font privés de tou. ces détails qui donnent l’ame Se l’efprit à ui ouvrage.

C’ell ; ce qui a fait imaginer à un curieux homme adroit , d’employer plutôt la colle forte. Il eft un inftant oii , fortant d’être mifc en fufion, elle a la même Ibupleffe & le mêmE reffort que la mie de pain réduite en pâte ; & . rendue à fon premier état , elle a la même dui reté que celle-ci étantféchée. Cecurieux , ayani ’ fait fondre àî la colle-forte dont fe fervent Isi menuiliers , la verfe encore toute chaude fur h relief qu’il veut mouler , en ufant des même précautions qu’en prend pour lei empreintes à’ fjufre ; & quand la colle eft entièrement prife. mais encore molle , il retiie légèrement fa gra| vure , qui refre imprimée dans la mafle de ij colle. Celle-ci fe durcie promptement , & pro-j diiit un moule ^audi net & aulh ex aéi qu’il efj polTible ; on y peut couler du plâtre ou di ; ibufre, & i’v.n en tire un relief affez jufte. Priais fi le trop de faillie d’une gravure i rendu l’opération du moule difficile, les emj preintes qu’on doit faire dans le même mou !4 rencontreront encore plus d’obftacles , & il ni| faut pas mê.me efpérer qu’elles réulTiffent jamais. Quelque moyen qu’on employé , il y aur : toujcirs quelque partie du relief qui , ncpou’^ var.t fe : dépouiller , reftcra dans ie creux dij moule. Il faut renoncer à faire des empreinte^ de ces fortes de gravures trop taillantes &. trof évidées.

Les empreintes fsites , on en abat les ba lèvres, on les rogne, on les lime, on leuj don^e une forme régulière, four dernière fJ jon

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foB, ôh les environne de petits morceaux de carton doré fur la tranche , où elles fe trouvent renfermées comme dans une bordure ; & qui , loutre cette propreté qu’ils y mettent , leur .fervent encore de rempart con-re le choc , & [les rendent plus durables. Sr l’on a beaucoup de ces empreintes , on leur donne un ordre ; & pour les pouvoir conildérer plus commodément, on les colle fur des cartons ou des planches, qui, comme autant de layettes, fe rangent .dans une petite armoire , ainfi qu’on l’obferve par rapport aux médailles.

Il y a encore une autre façon de faire des 

empruntes des pierres gravées ; mais elle ne

peutêrre de longue durée , &
ne fert que pour

’le moment à faire connoître le mérite d’une rravure en creux : ce font les empreintes qui le font avec la cire molle. On ne voit guère de curieux nul ne veuille avoir à la main de iquoi faire de ces empreintes , & qui ne porte ipour cela de la cire fur lui. I !s en font rem islir de petites boëtes qui fe ferment à vis, & Ikuxquelles on donne allez volontiers la figure

!i’un petit œuf. La compofriun de cette cire 

|ïft particulière, & js ne doute point qu’on ne }ne Cache gré d’en donner ici la recette, telle [qu’une perlbnne de l’art l’a communiquée à M. jMariette.

] Sur une once de cire-vierge qu’on a fait [fondre doucement dans un vaiffeau de terre yerniffée, fans la trop échauffer, & dans laïquelle on a mis un gros de’ lucre -candi , broyé très-fin, pour en accélérer la fufion , on jette, • la cire étant tout-à-fait liquide,) une demi ionce de noir de fumée qu’on aura fait re- (suire pour achever de le dégra’iffer, & une fgoutte de thérébentine : on remue le tout, fe [fervant d’une fpstule, jufqu’à ce que toutes les drogues foient parfaitement incorporées ; & après l’avoir tenu un peu fur le feu , on le l.iailTe refroidir Se on en fait un pain. f Pour ce qui eft des pâtes ou empreintes de

verre, qui imitent parfaitement les pierres

fines, & qui moulées defTus en font des copies fidelles, voy« :j l’article Pâte. I Voilà les manœuvres connues de tirer des [empreintes de toutes fortes de pierres gravées en creux & en relief ; & de produire & multiplier les plus beaux ouvrages de ce genre. Blême les chefs-d’œuvre d’un Pyrgotcle, d’un Cronius, d’un Apollonide , d’un Diotcoride , d’un Solon, d’un Hyllus. Eh ! quel plaifir, que de pouvoir fe procurer des richeffes fans embarras, fans frais & fans remords ! Les em-’. prùntts fourniffent à un particulier l’agrément de jouir , far des images parfaites , de ces morceaux rares gravés far des pierres précieufes , qu’il n’appartient qu’aux rois & aux gens riches de pofleder dans leurs cabinets. Si le-, pierres gravées repréfentenc les adions Hcaua-Aris. Joute IJ,

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  • 37

des îiommes îlluftres de la Grèce & de Rome ; fi elles peuvent fervir à éclaircir plufieurs faits importans de la mythologie , de l’hiftoirc & des coutumes anciennes ; li elles ornent l’efprit do grandes & magnifiques idées ; en un mot (i elles font la fource d’une infinité de ccyinoiClances, comme on n’en fauroit douter, les reprcfencations fidelles de ces pierres , ne procureront-elles pas les mêmes avantages ? Qu’im-» por ;e pour l’utilité le prix de la matière , l’émeraude , & le rubis, le IbufFre ou la cire d’Efpagne ? (Qu’importe ai ors que ce foit la pierra gravée elle-même , ou fa parfaite reffemblance î <^u’importe enfin la valeur de l’original ? Ce n’efl prefque qu’une valeur idéale & ficlîve , comme de tant d’autres chofes de la vie. (M. DE Jaucourt dans l’ancienne Entydopidie.) ENCAUSTIQUE. Peinture à Pencauftique. Tel eft le nom que le cmte de Caylus a donné à cette manière de peindre dont il eft l’inventeur , !k ce nom a été confervé. Il auroit été plus régulier, & plus conformer l’éty.mologie da mot , de dire Peinture encaufiiqite , ce qui lignifie peinture brûlée intérieurement. Le premier embarras du comte de Caylus en voulant faire revivre Vencaujîique des anciens, étoitde pouvoir rendre la cire qui devoit fervir de bafe aux couleurs , capable d’être maniée au pinceau : car il écoit perfuadé que c’éroit au pinceau qu’avoient peint à ? encauftique les artiftes de l’antiquité. Il cite Pline : mais il ne s’eft pas apperçu que cet écrivain n’a fait mentipn du pinceau pour la peinture encaiijlique , que lorlqu’il parle de la peinture des vailfeaux , & qu’il femblë l’exclure de celle des tableaux. Nous allons tranfcrire ici ce que nous avont dit à ce fujet dans un mémoire tu dans nos fcancej particulières de l’Académie des Belles-Lettres. )) Le comte de Caylus , célèbre par fon amoui ? » pour les arts, & par fon zèle pour rappel !er les » arcilles au goût pur & fage de l’antiquité, )5 a cru retrouver Vencaujlique des anciens, & « n’a trouvé en effet que de nouvelles manières » de peindre avec des cires. Il nous veftefi peu >) de chofe fur Vencaufiique des Grecs , que , fi » même on la recauvroit , on ne pourroit affurer » que ce fût bien elle qu’on eût découverte. » Mais il eft prouvé que le comte de Caylus , ert « croyant renouvelhr le procédé des peintres ds » tableaux , n’a trouvé qu’une manœuvre affez « femblable, peut-être , à celle des peintres de » vaiffeaux. Ecoutons Pline , le feul qui puifla » nous inftruire, & qui , à cet égard , nous inftruit bien foiblement»

y> Il efl certain dit- il, qu’il y a eu ancienne- )5 mentdeux manières de ^e’

àriyj.’ eiicaujliqui ^

» en cire , & fur l’ivoire , par le moyen c’u cef~ » trum., c’eft-à-dire , du poinçon. Quand on a » commencé à peindre les vaiffeaux , on a tïouF Yy y

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» vé alors vne trolfume manière , dans laquelle » on emploj-e au puceau des cires fonJues au x> feu ; cjtte peincme des vaiffeaux réfifte au » foleil , au ici de ’a mer , & aux vents. » Encaujli’ pingt :ndi duo jaijfe antiquitus genera çonjùii , cera & in ehore., cejiro , idefl-, r> virfculo Dum cuiffh’ : pingi ccepere^hoc terri ti.im adcejfit , teptutls igni ceris penicillo « utendi . quœ plcliiia in navihus nec foie , nec •a Jalz , ventifque cornimpitur. Lib. ij. c. ii. » s. 42. ( *)

» Voilà trois enca-ifîiqiies bien diftinâes » Dans la première on peignoi : à la cire : mais » commeni ? Pline ne le dit pas ; il nous apprend » feufement qu’on fe itrvoit de poinçons. La » féconde le faifoit fur l’ivoire , & aufli avec des n poinço’.s mais fans y employer la cire. : c’éroit » moin ; une peinture proprement dite, qu’une » gravure qui fe f’ailoit fur l’ivoire avec une » pointe roug’C au feu. Les tailles étoier.t d’ur^ » noir jaunâtre, & fe détachoient fur le blanc » de l’ivoire (*). Dans la troifiéme forte àencaujlique , c’eft-à-dire, celle des vaiffeaux, 3> on employoit au pinceau des cires fondues au » feu , & : c’eft aulli une manière de peindre au » pinceau avec des cives fondues que le comte » de Cayliis a inventée plutôt que retrouvée. Ce » n’eft donc pas celle des peintres Rhodiens » dont parle Anacréon , & de tant de grands » maîtres de l’antiquité.

Pline nous apprend lui-même qu’ils n’employoient 

pas le pinceau , & c’ed ce qu’a » très-bien obfer é SzeSer : In p^ioribus duohus ergo non ejlufus penicelli , fed vericuli. » ( Schetteri Graphice). En effet, Pline raconte D que Paufias , peintre i Vencaujlique , ayant » réparé à Thebes , ou à Thefpies, des peintures » faites au pinceau par Polygnote , & ; ayant fait » lui-même ufage du pinceau, pour s’accorder » avec l’ouvrage qu’il reparoit , fe montra inférieuraii maître contre lequel il avoità lutter, parce qu’il ne combattoit pas dans fon » genre. Pinrit & ipfe penicillo parietesThefpii. ’ : {al. Tliebis ) quum reficerentur , quondam » à Poly^noto piBi : multumque comparatione » Jiiperatus exijîimahatur, quoniam nonfuo generecertaJfec. L. z^. c, i. .

-

( * ) Le fens de ce paflage eft brouillé dans les éditions par une ponctuation vicieufe. (** ) Nous avjjns fuivi l’opinion de Scheffcr , qui HGus piroit leul expliquer le palTage de Pline. « Deinv dé aiternm piftiirœ hujus gcnus fie fe habuifle ceitum » cft. Stylo ferreo , igné candefafto , inuvebant ebori V aut cornibus linea» , quibus , quas vellent , imagines » e.Kpiimerent .... Hoc intereiat quod linearum duc-tu, ’ ; in ebore , cornuve , minus eifentprofundi, uniufque tactum coloris, fufci fcilicet, aut nigri : plané V fient ante paucos annos , in thecis corneis , quibus >i rii’vercm recondebant tormentarium , in maniibriis » ensimr, , am cultroium corneis ofleifve fieii confue- > veiat ji. (Schefferi Gliphice , paiag. 16.) E N C

» Ainfi , le comte de Caylus, en trouvant » diffîrenresmanières de peindre avec des cires, » & au pinceau, n*a fait que s’approcher des » procédés des anciens peintres de navires. « La quatrième manière du comte de Caylus^ » confifie à peindre d’abord en détrempe , & à a couvrir enfuite fon ouvrage d’une couche de » cire. C’efl celle que les anciens employoient « pour fixer fur les murailles les couches de » minium , qui , fans cette précaution , perdoient » en quelques femaines tout leur éclat. On » broyoit de la cire punique avec un peu d’huile , on l’étendoit fur le mur coloré avec des « broffes , on chauffoit cet enduit avec des char- )> bons de noix de galle , contenus dans des vafes » de fer , au point de faire fuer le mur , & jufqu’à ce que l’enduit devînt d’une parfaite égalite. Enfin on le frottoir avec du fuif & des » linges blancs , de la même manière qu’on » donnoit l’éclat au matbre. Tel eft le procédé » que Pline & Vitruve indiquent prefque dans « les mêmes termes, & qui n’étoit pas celui des >’ peintres de tableaux. Voyez Vitruve, liv. 7 » ch. 9. & Pline , 1. 33. c 7.

» Un favant qui , comme il nous l’apprend » lui-même , avoir exercé la peinture dès fon » enfance , & qui ^ lorlqu’il éctivolc, à l’âge de 1 » quarante-huit ans , fon livre intitulé Graphice^ I » avoit donné à la culture de cet art plus de » temps qu’à celle des lettres , Jean Scheffer » que j’ai déjà cité, croit que le procédé de » re ;!cai{/ ?/j«e, pour les tableaux, avoit quelque rapport avec celui de la mofaïque. Il colljeftureque le peintre , au moyen de poinçons 1 » rougis au feuj creufoit dans le bois qui lAî » fervoit de fond , les lignes qui repréfentoient » tous les objets qu’il youloit imiter. Enliiite 3. » rempliffoit ces lignes de cires diverfement » colorées , & il uniffoit enfin la furfjce de tout » fon ouvrage au moyen du feu. In tabulis ligt > neis , vel alterius nzateriis^irebantur duSus » lineares , qui figuram referekant futur œ piclu-Toe. Ducîus fin pojiea replebantur cerâ diverfi » coloris , pro ratione imaginis , quœ mox œ~ )5 quabatur tabulée admotis ignibus. ( Ibid. ) » Peut-être que , pour dernière opération , on )■) polilToitle tableau par un procédé femblable à » celui qu’on employoit pour les murailles «• Quoique les manières de peindre à la cire , inventées par le comte de Caylus en 1754, & publiées en 1755 foient déjà tombées en défuétude & prefque en oubli , après divers effais plus ou moins heureux , nous croyons devoir les détailler ici. Il faut conferver & répandre les inventions, parce qu’elles peuvent être un jour renouvellées & perfeûionnées.

Première manière de peindre à Vencaufilque. Nous avons vu que le comte de Caylus, perfuadé que les anciens peintres à Vencaujlique fc ferr E N C

Voient dir pinceau , cherchoit à rendre la cire propre à cet ufage. Conjointement avec M. Majaulr, favant mcdecin & habile chyniifte , il fepropofa de faire ufage de diffolvans qui , par leur analogie avec la cire , fuflent capables de la pénétrer & de la réduire en un état où elle pût être étendue avec le pinceau. Entre ces diffolvans, s’ofFroient les huiles effentielles, & lurtout 1 effence de térébenthine , que la mtidiocrité de fon prix mettoità la portée de tous les artiftes ; mais ce n’eût pas été une grande découverte que oel !e de diffoudre la cire dans les huiles effentielles, puifque cette voie de diffolution eft connue de tous ceux qui ont les plus foibles connoiffances en chyraie. D’ailleurs , il neparolffoit pas que ce procédé eût rien de commun avec celui des anciens , puifque Pline ne dit pas un mot des huiles effentielles, & l’objet qu’on fe propofoit étoit de faire revivre la véritable encaujiique des Grecs. Pline ne parle que de cire , de couleurs , de feu & de pinceaux ( car le comte ’deCaylus veut toujours voir des pinceaux dans Pline ) & il eft vraifemblable qu’il n’eût pas gardé le filence fur les huiles effentielles , fi elles euffent entré dans la préparation des couleurs. Il fallut donc abandonner ce premier projet, & chercher des procédés plus conformes à 4’expofé de Pline.

Toujours dans l’intention d’imiter les Grecs , M. le comte de Caylus & M. Majaulc imaginèrent de mêler les couleurs avec de la cire , de mettre toutes ces cires colorées en fufion dans ides godets , de les appliquer promp’.ement avec tin pinceau fur le corps defliné à être peint , de les tenir dans un état de demi fufion parle moyen d’un réchaut de doreur , & de donner ainfi à l’artifte le temps de fondre fes teintes. D’abord, ce procédé leur parut aufli facile que {impie j mais ’avec un peu plus de réflexion , ils fentirent qu’il neferoitpas aufli aifé qu’ils l’avoient cru d’abord , d’obtenir un feu qui, fans bruier les couleurs , pût les maintenir , furrout pour les ouvrages de longue haleine , dans l’état de fufion néceffaire aux opératitins du peintre, & à la perfeâion de la peinture. Ils pcnferent alors à l’eau bouillante. Illeur parut que, par l’égalité de fa chaleur, elle feroit d’un ufage plus facile : ils penferent même que , par fon moyen , on pourroit broyer les couleurs avec la cire, que ces couleurs broyées pourroient êire tenues en fufion dans des godets & fur une palette , & qu’il feroit encore poflîble de chauffer avec l’eau bouillante le corps fur lequel on voudroit peindre. Il falloit trouver aufli le moyen d’échauffer la pierre à broyer par l’eau bouillante ; nos inventeursy parvinrent aifément. Ils firent conflruire une efpéce de coffre de fer blanc très-fort , de feize pouces quarrés , fur deux & demi de hauteur , parfaitement foudé partout , Se n’ayant pour ouverture qu’un goulot d’un pouce de dia-E N C

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mètre à chacun des angles. Ce goulot s’éleroit de deux pouces au-deffus de la furface. Ils firent appliquera cette furface, par le moyen de huit tenons de fer blanc , une glace de l’epaiffeur ordinaire , non polie , & feulement adoucie, afin qu’elle eût affez de grain pour être capable de broyer les couleurs ; car elles ne feroient quegliffer , fans fe broyer, fur une glace poile. Ils remplirent ce coffre d’eau , & le mirent fur la feu ; la cire mêlée de couleurs dont la glace étoit chargée , fe fondit icrfque l’eau fut bouillante, & ils purent la broyer commodément avec une molette de marbre qu’ils eurent la précaution de chauffer. L’opération achevée , ils enlevèrent le mélange encore liquide avec un couteau d’ivoire , & le mirent refroidir fiir une afïïette de fayence. Toutes les couleurs furent préparées de la même manière, qui eut tout le fuccès qu’on avoir defiré.

Pour mettre ces mêmes couleurs en état d’ê :re employées, ils commandèrent un autre coffret aufli de fer blanc , long d’un pied fur huit pouces de large , &. épais de deux pouces & demi. On y pratiqua , comme à la machine à broyer , ua gouleau pour l’mtrodudion de l’eau. La plaque fupérieure du coffret fut percée de dix-huit trous arrondis, & de quinze lignes de diamètre chacun. Ces trous écoient deftinés à recevoir autant de godets de fer blanc du même diamètre que les trous & d’un pouce de profondeur. Les godet» furent foudés à la plaque, & plongeoient entièrement dans l’eau. On crut devoir mettre dans ces godets , d’autres godets de cryflal de ? tinés à recevoir les cires colorées , de peur que les teintes n’en fuffent altérées par l’étain qui recouvre le fer blanc. Elles furent mifes en fufion par l’aflion de l’eau bouillante , comme elles Tavoient été fur la glace qui fervoit de pierre à broyer.

Pour palette, on conflruifit un autre coffret plus petit, couvert, ainfr que la machine à Ijroyer, d’une glacé feulement adoucie & non polie , & on le remplit d’eau bouillante. On s’étoit bien procuré le moyen de tenir les cires colorées dans un état de fufion fuffifante pour qu’elles puffent fe prendre au pinceau j mais il reftoit un obftacle à vaincre : c’efl que le panneau fur lequel on de ’oit peindre étant froid , les couleurs dévoient s’y figer aulîi-tôt qu’elles y feroient appliquées. Il falloit imaginer un moyen de tenir le panneau affez chaud pour que les couleurs reftaffent dans un état de fafion qui permît à l’artifle de les coucher, de les fondre , de les noyct à fon gré. On fit donc conflruire une quatrième machine qui avoit la forme de celle à broyer les couleurs. La furface deftinée à recevoir le panneau étoic une plaque de cuivre d’une ligne d’épaiffeur. Aux deux bords étoit une couliffe qui devoir I affujetîir le panneau : le refle de la machine y y y ij

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étoit d’un fer-blanc trèi fort. Son épa’ffeur étoît de trois pouces dans œuvre ; ainfi elie devoit recevoir une épaifleur de trois pouces d’eau, A l’un des angles fnpérieurs’étoi : une ouverture pour recevoir l’eau ; à un angle intérieur écoic unrobiner p n.r la faire écouler, quand ilfalloit la rempiac ;er far de nouvelle eau bouillante. Le panneau di flriné à recevoir la peinture fut compufj de trois planches de lapin d’une ligne d’épaifTehr chacune , & collées l’une fur l’autre "de façun que les fibres le croii’aflent à angle droit. On crut devoir prendre ces précautions dans 11 crainte que le bois ne Te voilât par l’iinpreilîon de l’eau bouillante. Les auteurs ont cependant reconnu dans la fuite qu’une feule planche mince fuffiroit : que s’il lui arrivoit de fe voiler par la chaleur, elle fe rétabliroiç aifcment. Ils ont continué de donner la préférence au fap n , parce qu’il fe déjette moins que les autres bois, & ils ont conieillé de ne pas employer ceux qui, par la roideur de leurs fibres & la compacité de leur tiffu, fe redreffenc difficilement quand ils ont été courbés par la chaleur.

Ils enduirent le côté du panneau deiliné à recevoir la peinture, de plufleurs couches de cire blanche. Les premières couches furent fondues avec une poêle pleine d’un brafier ardent, pour les faire pénétrer dans le bais. Sans cette précaution la cire colorée le feroic décompofée en la faifant fondre avec le réchaud, parce que les pores du bois ablbrbant la cire des couleurs , ces couleurs feroient reliées à la furface dénuées de cire.

Les inventeurs de cette manière de peindre conviennent qu’elle eft trèi-compofée , & qu’il eft difficile de tenir l’eau au degré de chaleur néceffaîre pour chauffer les godets, la palette & ’le panneau. On en fit cependant l’eflai. Un favan- artifte, M. Vien, peignit parce procédé un bufte de Minerve, en fe fervant des broffes ordinaires des peintres à l’huile. Quelques parties du tableau faifoient de l’effet , mai» ne répondoicnt pas à l’idée que l’on fe forme de la peinture des anciens, & l’artifle , peu farisfait de fon travail , confeilla aux auteurs de «hercher des procédés plus faciles & plus (ïlrs. La recherche de la combinaifon des quantités âe cire convenable à chai-ue couleur, ne fut pas ce qui leur donna le moins de peine. « Certaines couleurs, diiént-ils, ne prenoient » qu’une très -petite quantité de cire, quoiqu’elles parulTent devoir en abforber beaucoup ; on obfervoit le contraire dans plufleurs » autres, : celles-ci, fans un excès de cire, » feroient devenues caflantes ; celles-là avec » ie même excès devenoient graïTes. Prefque » toujours trompés dans les premiers effais, il j) falloit les répéter jufqu’à ce que l’on eût » trouvé des proportious conveaables. Combien E N C

V de fo’s fut-on obiigé de chaufFer 8c de réc atifîer ia p.e ’e ? Combien de Lemps, comb ; en de cire, cr mbien de couleurs perdues ? o Nous allons tranfcnre la table qu’ont donnée les auteurs de la proriortion différente des quantités de cire , eu égard aux : différentes qualités des couleurs.

Blanc de plomb , une once. —Cire , quatre gros & demi.

Cérufe, une once. — Cire, cinq gros. Vermillon , trois onces. — Cire, dix gros. Carmin, une once. — Cire, une once & demie.

Laque, une once. —Cire, une once & demie. Rouge - brun d’Angleterre , une once,

— Cire, une once.

Ochre bri’ilée, une once, —Cire , dix gros. Terre d’Italie, une once. — Cire, dix gros. Jaune de Naples, une once. — Cire, quatre gros.

Stil de grain de Troies , une once. — Cire, une once & demie.

Stil de grain d’Angleterre, une once. — Cire, une once ik demie.

Ochre jaune, une once. — Cire, dix gros.’ Ochre de rut , une once. — Cire, dix gros. Outremer, une once. — Cire, une once. Bleu de Pruffe , ie plus léger , une once.

— Cire, deux onces.

Cendres bleues, une once. — Cire, fix gros. Email lin d’Angleterre, une once. — Cire, une demi -once.

Laque verte, une once. — Cire, une once deux gros.

Terre de Cologne, une once’. — Cire, une once & dem^e.

Noir de pêche, une once. — Cire, uneoncfe & demie.

Noir d’jvoire, une once. — Cire, dix gros. Noir de fumée, une once, — Cire, dix onces. La cire indiquée dans toutes ce- ; opérations eft celle que Ion nomme cire -vierge. Il faut prendre les couleurs que les marchands appellent broyées à l’eau, les broyer de nouveau à fec, & les mettre enfuite fur la machine à broyer, pour les incorporer avec la cire, delà manière que l’on a déjà détaillée. Il faut obferver que le Cirni^n . le vermillon , l’outremer, l’émail, le noir de fum-’^e n’ont pas befoin d’être broyés à l’eau , & que le blanc de plomb, la c’rafe , la cendre bleue , & !e noir de pêche une fois broyés à l’eau n’ont pas befoin d’ê'rede nouveau broyé ? à fec. Les couleurs dont on vient de donner un état lônr (liffifanxcs pour peindre totites fortes de fiqets ; mais d’ailleurs on pourroit préparer de même à la cire toutes les aatres couleurs.

Le comte deCaylus, & M. JTajaaIt,fur]’avîs de M. Vien, cherchèrent une autre manière E N C

flont la manœure fît plus facile. Voîcî la féconde qu’ils imaginèren :.

Seconde manière de peindre à Vencauflique. On prendra -des eires colorées pré- ■parées comme on l’a dit à l’arncle précédent : on les fera fondre dans l’eau bouillante , en prenant une once de cires colorées pour huit onces d’eau. Lorl’qu’elies r«ront entièrement fondues, on les bâtira avec une fpatule d’ivoire ou des oliers blancs, jufqu’à ce que l’eau foit i refroidie. La cire, par cette manœuvre, fe mettra en petites molécules, & fe divifera fuffilàmment pour êire réduite en une efpèce de poudre qui nagera dans l’eau. On la Conl’ervera toujours humide dans un vafe bouché ; car fi la I cire reftoic à fec , les petites parties adhéreroient les unes aux autres , & elle ne feroit plus propre aux ulages auxquels elle ell deftinée.

Pour peindre, on mettra la portion qu’on jugera neceffaire de ces cires humides dans des godets , & l’on opérera avec des brofi’es ou p ;nceaux ordinaires, comme fi l’on peignoir [ en détrempe. Le procède cltabfolument le même, puirque ce font toujours des poudres trè ;-fines , mê’iees avec de l’eau , qu’il s’agit d’employer. Mais comme les poudres que l’on emploie dans ■le genre de peinture dont il eft ici queftion Ibnî mêlées de cire , on ne peut , comme dans la , détrempe , fjire les teintes fur la paierie avec le couteau ; car les molécules de poudre colorée & ’mprégnce de cire , fe colleraient enlémble ’ & leroient une mafle : il taut donc faire les , teintes à la pointe du pinceau. Cette peinture peut s’exécuter fur le bois crud, ou liir un panneau couvert d’un enduit ’ de cire. Quand le tableau tft achevé , on fixe [fies cires colorées au moyen du réthaad de doreur, ou d’une poêle m-nce remplie de feu. ’ Si l’on donne la préférence au rechaud , il faut tenir le tableau verticalement : fi l’on adopte l’ulage de la poêle , on mettra le tableau dans une polition horizoniale. De l’une ou de l’autre fa^on, les eues fe fondant facilemeiît, contractefont une forte adhérence avec le bois , & prendront une co’jleiir plus vive. M. Vien répit, fuivant cette féconde manière de peindre , le buile de Minerve qu’il a-’oit commencé fuivant la première. Il fut plus content du dernier procédé, mais il y trouva encore des difficultés que n’offro’t pas la peinture en huile. Cette difficulté ne feroit pas une raifon abfolue pour faire rejetter ce genre, s’il avoic d’ailleurs des avantages capables de le faire adopter. D’ailleurs les diliicu ! es que l’on éprouve dans une opération font quelquefois relatives à l’habitjde de celui qui opère : elles s’evanouiroient par la fréquence de cette opération, qui procurereit avec le temps une habitude E N C

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nouveîfe. Un peintre à l’huile trouve des difficultés à peindre en détrempe, & le peintre en détrempe n’eft pas à fon aife quand il veut elfayer de peindre à l’huile. Au relie, M. Vien ne termina pas encore le tableau par ce fécond procédé ; il le finit par une autre manœuvre que trouvèrent les mêmes inventeurs, & que nous ferons bientôt connoître fous le nom de peinture d la. cire.

M. de Caylus étoit perfuadé que, dans les" manières que nous avons détaillées, il s’étoit fort approché de l’encaujliqiie des anciens. II paroît avoir fenti qu’il s’en éloignoit dans deux autres fortes à’ encaujlique , qu’il inventa encore : mais homme d’el’prit, il employa fon efprît & ion railbnnement à fe perfuader à lui-même que non-feulement ces deux dernières manœuvres ne s’ecartoient pas de la prarique des anciens, mais qu’au contraire ce de voit être précifdment celles donc ils faifoient préférablement ufage. Voici les raifons qu’il fe donnoit à lui- même , & il faut avouer qu’elles fbnt au moins fpécieufes..« La peinture en détrempe » a été, die- il, la première peinture connue : » la peinture à Vencaujlique lu : a fuccédé, » Si les arts , comme on ne ûoic point en douter, » fuivent l’ordre des idées , un moyen en » fuggère un autre , & : le fécond participe ordinairement de celui qui lui a donné l’origine. » La peinture à gouache eft donc vrailèmblablement le principe delà peinture à Vencauftique. . . . Attacher fur le corps deftiné à être » peiftt des couleurs mêlées avec des gommes » folubles dans l’eau, peindre à l’eau fur des » corps qui retiennent la couleur com.me les » gommes j couvrir des mêmes gommes les » couleurs appliquées-, c’eft peindre en détrempe. Etendre à l’aide du pinceau des couleurs préparées avec de la cire pure, charger n de cire les couleurs déjà appliquées, mettre » des couleurs fur un corps enduit de cire » les fixer en fendant la cire par le moyen du » feu, pour les rendre impénétrables & indiffolubles par l’eau , c’eft peindre à Vencauftique, c’efl remplir les vues que les Grecs » fe propoioient dans cette peinture , c’eft-àdire , de faire des tableaux qui ne fufî’ent » point expolës aux inconvéniens de la détrempe.

» Nous étions donc perfuadés que, pourvu » que l’on n’employât que de la cire pure pour » fixer les couleurs par le moyen du feu , nous o marcherions fur les traces des Grecs, Ibit que » les couleurs faffent liées à la cire , avant » que de les employer avec le pinceau , foit » qu’elles le fufTent après / & que, les em- )5 ployant même de la façon dont nous allons » donner les détails, nous marcherions avec » plus de vérité dans la route que les Grecs » ont naturellement dû prendre ; car il eiî Si2

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» probable qu’ils ont employé le moj’en le » plus limple & le plus analogue au moyen » déjà connu ».

Troisième manière de peindre à l’encaujlique. Cirez une p’anche , en la tenant horizontalement fur un braiier aident, & en frottant la lurface chauffée avec un pain de cire blanche. Continuez cette manœuvre jufqu’à ce que les pores du bois a’ent ablbrbé autant de cire qu’ils en pourront prendre. Continuez encore, jufqu’à ce que la couche de cire ait pris à peu-près l’épaiffeur d’une carte à jouer. Enluite peignez avec les couleurs dont on fait lifage à l’huile (*) , mais qui foient préparées à l’eau pure ou légèrement gommées. Ivlais ces couleurs , fi on laifie la cire nue , ne s’y attacheront pas, ou ne s’y placeront que par taches irrégulières. Il eft aifé de remédier à cet inconvénient ; il fuffit de prendre quelque terre crétacée, du blanc d’Efpagne , par exemple , de le réduire en une poudre très-fine, & de répandre de cette poudte fur la cire ; enfuite avec un linge, on la frotté légèrement. Il fe fixe , par ce moyen , fur la cire une légère furface de poufllere , qui fait un corps intermédiaire entre elle & la couleur. On peint enfuite aufïï facilement que fi le bois n’etoit couvert que d’une imprellion à la détrempe. Le tableau achevé on le préfentera au feu : la cire fe fondra à une chaleur même peu conlidérable , & le tableau fera fixé.

Nous n’omettrons pas ici une obfervation réceîfaire. On fait qu’à la détrempe , les couleurs s’àftbiblitfcnt en fe féchant-, & qu’il faut par conféquent peindre d’un ton bien plus vigoureux que celui que l’on veut produire , fans quoi l’on ne feroit qu’un ouvrage fade & décoloré. Il n’en efl pas de même ici , parce que la cire rend aux couleurs le ton qu’elles avoient lorlqu’elîesétoient encore humides. Ainli, dans la détrempe , il faut forcer le ton , & à Vencaufilque , il faut l’affoiblir.

Quatrième manière de peindre à l’jip.taii /lique. On commence par peindre en détrempe, de la manière accoutumée, fur une planche très-unie. Le tableau terminé, on le place horizontalement , on le couvre entièrement de lames de cire très -minces, & l’on fait fondre cette cire avec une poêle remplie d’un brafier ardent. La cire, en fe fondant, pénètre la couleur & le bois, & fixe la peinture de manière qu’elle efl îndiffoluble à l’eau. Pour préparer les lames de cire , on fait f*) L’auteur recommande d’employer les couleurs ont on fait ufage à l’huile , parce que les blancs dont on fait ufage en détienipe font noiicis par la ciie comme |>ar l’huile.

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chauffer de la cire blanche ; on la fend fouple^ on l’étend au moyen d’un rouleau fur une glace, ou fur un marbre humide & modérément chauffé, jufqu’à ce qu’elle n’ait à-peuprès que l’épaifleur d’une carte. Entre ces trois manières de peindre à l’en- ■ caujlique, a.tiroiûèm.s eftla plus facile. D’ailleurs elle ne diffère de la quatrième, qu’en ce que, pour celle-ci, la cire efl placée fous la couleur, & pour celle -là par-deffus. Toutes deux rempliffent les principales conditions de Vencaujlique des Grecs, pui’qu’il n’y entre que de la cire & des couleurs, & qu’elles font fixées par le moyen du feu. Les ouvrages, par ces deux procèdes, peuvent s’élever à une vigueur, à un éclat que n’ont peut- être pas furpaffé, peut-être pas même égalé les grandsmaîtres de la Grèce. Ils peuvent , fans craindre aucune altération , être expofés à la plus grande humidité, qualité qui a fur -tout fait préférer la peinture à l’huile à la détrempe. Quoique nous penfiuns qu’aucune de ces quatre encaujîlques n’ell celle que les Grecs employoient dans leurs tableaux , nous reconnoiffons qu’il feroit à fouhaiter qu’au moins l’une d’elles fût perfeclionnée. Il efl vraifemblable que ces genres de peinture n’auroient pas les inconvéniens de celle à l’huile, dont les couleurs s’altèrent différemment par la préfence de l’huite mê.iie , & finiffent par s’écailler quand l’huile a été entièrement defféchée par le temps.

C’efl donc avec raifon que ces découverte» ont fait beaucoup de bruit dans le temps parmi les artifles & les amateurs des atrs, ficfi, après quelques efTais, elles ont été négligées, & même prefqu’oubliées , il faut en accufer la force de l’habitude plutôt que les vices des nouveaux procédés. On ne pouvoir guère s’attendre que des artifles accoutumés à peindre à l’huile ou au paûel, adopteroient une nouvelle manœuvre qui devoir leur paroître difficile, parce que ce n’étoit pas celle qu’ils avoient l’ufage de pratiquer. Quelquefois les nouveautés font adoptées avec ardeur par la jeuneffe : mais il n’en devoir pas être de même ici , parce que les jeunes gens qui fe deflinent à la peinture, prennent des leçons de peintres à l’huile pu au pallel , & quand ils pourroient fair ? de nouveaux effais , ils ont déjà pris une habitude à laquelle ils font attachés. Ceux de ces jeunes gens qui fe diftinguent par le talent , & qui ont déjà une réputation commencée , ne fe hafarderont guère à tenter de nouveaux procédés, parce que leurs premiers, effais, moins heureux que leurs produ ;51ions ordinaires , pourroient nuire à leur réputation. Ceux qui pourroient, par leur médiocrité, avoir bêfoin de fe diflingaer par la ftngularité d’une iiianœuvre nouvelle , feraient peu propres à faire E N C"

valoir de fémblables découvertes, parce que la médiocrité de leur tajent feroit rejettée lur les procédés donc iis feroient l’effai. Quelle que puiffe devenir la fortune de la découverte faite par le comte de Caylus , cet ami des arts mérite de la reconnoiflance. Un M. Henri Liébaux , bien convaincu E N C

?4 ? 

amateur,

conferver à la

erte , a fait

de cette vérité , & voulant

poftérité l’époque de cette découv préfent à la bibliothèque âe l’abbaye de Saint-Germain - des - prés , à Paris , d’un tableau tncauflique repréfentant un bas - relief ^ en marbre. Le Temps, figuré par un vieillard ailé, tient un médaillon fur lequel on lit cette infcription :

A. D. M. D C C. L IV.

LUDOVICO XV

REGNANTE,

ErKAYSTIKH

R E D I VIV A

ET PICTURA CUM GERA DETECTA

A D. COMITE DE CATLUS,

ET d.Majauit, DOCT.

MED. Paris.

Sur le marbre on lit :

« Hocce monumentum piflarje encaufticse » reftitutoribus , & piauise cum cerâ inventoribus , dicat Henricus Liebaux , R.C^"" & » Ser."’ Principîs Lud. Borbonii, C.’^ Claromontenfis , geographus ordinarius , ccnfor » regius, nec non locietatis artium iecretarius » perpetuus , & in perpetuam rei memoriam » bibliothecœ San - Germani confecravit. » Les inventeurs des quatre encaujiiques dont on vient de lire les procédés , en s’occupant des j recherches nécçffaires à leur objet , ont trouvé" f une manière de peindre à la cke fans l’inrervenitîon du feu. C’eft ce que rappelle l’infcription i ia monument confacré pat M, Liébaux. Cette

forte de peinture ne doit pas être claffée entre

U&s encaujliçues , puifqu’on n’y fait point ufage I du feu. Nous allons rendre compte de cette découverte.

Peikttjre a la cire. Le comte de Caylus &M.Maiau !t avo’.entbien fenti que la diffolution des cires dans les huiies cflenrielles étoit étrangère à leur recherche de Vencaufiique des ancietiS , puifqu’il eft au moins douteux qu’ils aient connu ces effences ; mais ils n’avoient pas renoncé à en faire ufage pour parvenir à trouver une manière de peindre qui, fans appartenir aux anciens, pouvoir avoir des avantages particulier :.. Ilo ne préiendoiont pas que csiie manière dût faire rejetter ni la peinture à l’huile, nî celle à détrempe ; mais ils la regardoienc comme une richeffe nouvelle pour l’art , parce que , dans fes effets, elle devoit différer de l’une & de l’autre. Elle devoit avoir un mat qui manque à la peinture à l’hiiiie ; une vigueur, une iblidité qui manque à la détrempe. Il eil intéreffant de connoître les expériences répétées ,par lefquelles ils parvinrent à îa découverte qu’ils cherchoient.

Première expérience. On mit une livre de cire blanche, réduite en petits morceaux, dans ua poids égal d’effence de thérebentine, & on la lailfa infufer à froid pendant fix jours. Au bout de ce temps , l’eflence n’avoir encore diffout 1 qu’une moitié de la cire. On doubla le temps & la quantité de l’eflence , fans parvenir encore à une entière diflblution , qu’on ne put enfin opérer que par une addition de fix onces d’effence. On broya des couleurs avec cette cire liquéfiée, on s’en fervit à peindre un tableau, & l’on ne trouva pas de difficulté dans l’exécution : mais on s’apperçut bientôt qu’un lavage répété avec de l’eau commune enlevoit uns portion de la couleur. Or ce qu’on cherchoic étoit une peinture capable de réfifterj même mieux que la peinture à l’huile, à la plus forte humidité , & par conféquent on n’avoit pas trouvé ce qu’on cherchoit.

Mais on reconnut que les couleurs qui avoîent le mieux réfiflé au lavage étoient celles qui avoient le plus de cire r c’étoitune lumière qu’on acquéroit pour l’expérience luivante. Seconde expérience. On prit des cires colorées telles qu’on les avoit employées pour la première manière de peindre à l’encaujîique , & dont nous avons donné les proportions : on les fie diflbudre au bain - marie dans une quantité d’effence de thérebentine double de celle de la cire, & la diiïblurion s’opéra facilement. Seule- 1 ment les couleurs étaient un peu trop liquides, & l’on reconnut que fix ou fept parties d’elfence fur quatre de cire auroicnt été fuffifantes. On peignit aA’ec ces couleurs, elles réfillerent à l’eau, la d(^couverte paroiflbit conlommée. On avoit d’ailleurs acquis une connolflancs nouvelle ; c’eft que l’on pouvoir diminuer la trop grande quantité d’effence employée dans la première expérience, en faifant la diffolutlon à chaud, & que cette exccllive quantité d’effence avoit été la caufe du défaint de folidité . de la peinture. Mais quand on eut examiné le ■fécond tableau de plus près , on vit que les blancs étaient caffans & «qu’ils fe ge-çoient. On s’affura mieux encoie de ce dofiiiit, en appliquant des couleur ;; fur du papier. Tioi’^-ème fxpémnce. On ctut ote ie remèda étoit d’ajou.er à ia cire c^uelque corps gras y ^44

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tel que du faîn - doux , ou des huîles noft ficcatives. On en fit l’eiTai , & , comme on l’avoit ibupçonné, on reconnut que ces fubftances graffes, employées même en petite dofe , rendaient les cires gluantes.

Quatrième expérience. La peinture à l’huile efl : elle-même caffante , fur-tout dans les parties où l’on a employé des couleurs non ficcatives auxquelles on a joint des huiles graffes : mais on vouloit vaincre ce défaut dans le nouveau genre de peinture que l’on cherchoit. On fait que c’eft la réfine qui donne la foupleffe à la cire dans les petites bougies des lanternes : on crut qu’ilfalloit recourirau même moyen pour donner de la foupleffe aux cires colorées, & on mêla deux ou trois onces de térébenthine à une livre de cire. Les couleurs furent encore gluantes , moins cependant qu’avec le mélange d’un corps graiffeux. On effaya la thérébennne lèche appelée gallipot ; la cire devint caffante.- avec la colophone, elle eut le même vice, & les blancs, ainfi que les co :iIeurs tendres , devinrent laies. On fe promit un plus heureux fuccès par l’emploi des vernis gras. On fait que les vernis de la Chine & du’ Japon font à la fois fouples & Iblides. La compofition du vernis de la Chine n’étoit plus un myftere ; ce n’efl qu’un mélange d’une réfine & d’une huile qui reffemble à nos huiles ficcatives : nos inventeurs étoient donc condul-s par cette connoifTance à la compofition d’un vernis capable de donner à la cire la fouplefîe & la folidité. Cinquième & dernière expérience. » Compofer ft des vernis avec des réfines fol ub les dans l’effenn ce de térébenthine & un corps gras , faire fondredelacire. dans ces vernis, ajouter des couj » leurs à ce mélange , c’efl : , difent le comte de » Caylus & : Majault , tout le myfl :ere des ingrédiens de cette dernière efpèce de peinture » en cire.

» On commença par faire choix des réfines 1> convenables aux parties colorantes auxquelles » on vouloit les affocier. Celles qui, par exempie, auroient pu entrer dans la compofition » du vernis fait pour préparer l’ochre jaune, B l’ochre de rut, la terre d’Italie , le rouge » d’Angleterre, & la laque, ne pouvoient pas 3» convenir aux vernis pour îes blancs & pour » les bleus. Il falloir encore une autre réfine » pour les vernis des couleurs obfcures & » dorées. D’ailleurs les quantités de réfine & » de corps gras dévoient auiïi varier dans la » compofition des vern’is , félon que la couleur » étoit plus ou moins féche ou plus ou moins » graffe : le mêlang-e , par exemple , pour les >5 noirs, qui contiennent toujours par eux-mêmes ■» un excès de parties graffes , n’auroit pas con •-i

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» venu aux blancs qui font plus fecs S ? pTu# » caffans que toute autre couleur. Il étoit par » conféquent néceffaire de faire les vernis cour » les blancs plus gras que ceux des bleus, §£ » beaucoup plus fecs pour les noirs. Selon ce » plan-, il auroit fallu, pour s’élever à la plus » grande exa&itude , préparer autant de vernis » qu’il y avoit de couleurs. On voulut cependant fimplifier la compoluion des cires colorées , parce que leur compofition auroit » rendu la peinture en cire prelqu’impratiquable. Après beaucoup d’expériences, réitérées » chacune plufieurs fois , on réduifit le tout à >) cinq vernis qui ont femblé remplir toutes les » vues : on leur a donné les noms fuivans afiji » de les difl^inguer >>■

I. Vernis blanc très-gras.

.. Vernis blanc , le moins gras» . Vernis blanc fec.

Vernis le moins doré. 

y. Verni ; le plus doré.

L’effence de térébenthine , fort commune & de peu de valeur , a été choifie pour le diffolyant des réfines dont on a compofé les vernis. Pour la compofition du premier vernis, le vernis blanc très - gras ^ on fe fervit d’une réfip.e appellée malîic , qui eii très-blanche. On auroit préféré la gomme decopal, fi l’oa avoit connu l’art de la diffoudre dans l’effence de térébenthine. On mit dans un matras à cou long deux onces fix gros d ? maflic dans vingt onces d’effence de tércberthîne ; on fit la dit folution au bain de fable, & lorfque la réfina fut difroute,on y ajoura fix gros d’huile d’olive cuite, dont on donnera la préparation. On filtra le mélange , & : l’on ajouta autant d’effence qu’il en fallut pour que le tout fît un poids de» vingt-quatre onces.

Le vernis blanc moins gras fe compofe comme le premier , & ne diffère que par la dofe de l’huile cuite : quatre gros de cette huile fuffifent à vingt-quatre onces de vernis.^ Le vernis blanc fec ne veut que deux gro» d’huile (tir les vingt-quatre onces de mélange. Dans ces trois vernis diftérens , la dofe de la réfine efl la même.

Les vernis dorés font compofés d’ambre dit fout dans l’effence de térébenthine. On fait fondre à un feu modéré , dans une cornue , ou mieux encore dans un pot de terre neuve verniffée & fermé, de l’ambre jaune le plus beau,- & entier. Il ne doit occuper que la moitié au plus du vafe , parce qu’il fe gonfle beaucoup en fondant. Quand il efl : prefqu’entierement fondu, on découvre le pot. L’opération efl longue : on reconnoîtra qu’elle eft terminée , quand on n’appercevra plus de morceaux d’ambre en remuant la matière avec une fpatule de fer. Alors on le laif- j fera

E N C fefà refroidir , & on le réduira en poudre. On j compofera le vernis aux dofes fiiivantes : I Ambre préparé comme il vient d’être dit , deux onces lix gros. Huile d’olive cuite, fept gros. Effence de térébenthine , vingt onces. On met l’ambre dans l’effence de térében- 1 Aline : lorfqu’il eft diflbut , & ii Ce diffout aifément même à froid, on ajoute l’huile, & l’on filtre le mélange à travers un papier gris. Comme il fe difllpe de l’effence pendant la filtration , on finit par en ajouter autant qu’il en faut pour que toute la compofition pefe vingt-quatre onces. On conl’erye ce vernis dans une bouteille bien bouchée. La compofition que nous venons de donner cil celle du vernis le moins doré. Le vernis le plus doré n’en diffère que parce qu’on laiffe l’ambre fur le feu trois à quatre heures de plus, ce qui lui fait prendre une couleur plus haute.

’Compofition de r/iuile. Nos inventeurs fe 

propolbient d’éviter l’ufage des graiffes ou des huiles qui s’altèrent facilement à l’air , comme le fain-doux, les huiles de lin & de noix,& même celle de pavots qu’on appelle huile d’oliette. Ils avoient appris qu’un parriculier, ayant fait bouillir de l’huile d’olive dans un vafe de verre pendant une heure , & l’ayant filtrée , & expofée dans une bouteille à l’air froid , l’avoir trouvée plus figée que fi elle n’eût pas été cuite , mais reffemblante à une graiffe très-blanche -, que fept ans après , ayant regardé cette même huile qu’il avoit oubliée, il la trouva plus épaiffe que l’huile ordinaire ,

mais blanche comme l’eau la plus limpide.

Les huiles graffes, foumifes à la même expérience, croient devenues jaunes-rouges. Cette épreuve fit donner la préférence à l’huile d’o-

lives. On la fit bouillir dans un marras très-
mince , on la filtra ; elle devint plus épaiffe Se

très-blanche. Compojttion des couleurs. Quoique nous

ayons donné une table des proportions des cires

& des couleurs qui font propres à la peinture encauftique , nousfommes obligés d’en donner une féconde pour la peinture â la cire, parce que ces proportions ne font plus les mêmes ,

quoique l’aureur de l’article Encaujîique , dans

l’ancienne Encyclopédie, ait avance le con- < traire. ïl auroit reconnu fon erreur, s’il avoit ï lu avec quelqii’atention le mémoire du comte

âe Caylus & de M. Majault : il y auroit vu que la 

ij proportion de la cire doit être différente dans la

dernière manière dépeindre, parce que la quantité 

de r.fme & d’hnile qui entre dans le vernis, eompenfe la quantité de cire qu’il faut retrancher pour que l’enveloppe des couleurs relie JSmux-Arti, Tome II. E N C r,îç toujours la même, Sr les rende également capables de rcfifter aux iniprelFions de l’eau <ic de toute humidité. D’ailleurs la cire-viergè efl celle dont on fait également iifage dans les deux genres. PROPOsrroNi des couleurs , dt Li cire & du vernis. Blanc de plomb. Bknc de plomb, huit onces. Cire , quatre onces & demie. Vetnis blanc très-gras , huit onces. Cérufe. Cérufei, huit onces. Cire , quatre onces & demie. Vernis blanc très-gras, neuf onceî. Mafficot. Mêmes dofes que pour le blanc de plomb. Jaune de Naples. Jaune de Naples , huit onces. Cire , quatre onces. Vernis blanc le moins gras , huit once». Ochre. Ochre , cinq onces. Cire, cinq onces. Vernis le moins doré, neuf onces. Pourl’ochrederut, ilfaut dix onces de yernîsi Stil-de-grain, Stil-de-grain jaune , quatre onces. Cire , cinq onces. Vernis blanc le moins gras , neuf onces. On fe défie des ftils-de-grains dans la peinture à l’huile -, peut-être ne m-^ritent-ils pas plus de confiance dans la peinture à la cire. D’ailleurs ceux qui les cohipofent, y font entrer, fuivant leurs vues, diffarens ingréJiens , comme de la cérufe ou des terres crétacées qui en augmentent plus ou moins le poids , ce qui rend très-difficile de fixer ia dofe de la cire qu’ils peuvent exiger, puifqu’elle devroit varier fuivant leur compolitioD. Celle qu’on vient d’érablir eft pour le llil-de-grain le plus léger. Pour le ftil-de-grain d’Angleterre, on employera le vernis le plus doré, afin de fbutenir un peu fa couleur : il prend , d’ailleurs , la mémo quantité de cire & de vernis que le ftil-de-grain jaune , & ne mérite pas plus de confiance. Zz z

S±S • E N C Orpin jaune ou rùuge. Orpin , fix onces. Cire , de. IX onces. Vernis blanc, le moins gras, trois onces & demie. Les deux orpins, fiirtout le jaune, font perfides à l’huile. Non-feulement ils noirciffent, mais ils altèrent les couleurs cjui les environnent. Quand les peintres en font ufage , ils y ajoutent des vernis pour les rendre p.’ns folides. Comme ils feroient enveloppés néceffairementde virnis, dans la peinture à !a cire , il eft vrailëmblable qu’ils y feroient moins dangereux -, atifli a-t-on erii remarquer que , dans ceite peinture , ils ne .•i’altéroient pas facilement à l’air : mais c’eft un fait dont on ne pourroit le bien afl’urer qu’en multipliant les expériences. Ceux quivoudcoient reflufciter la peinture à la cire , feroient bien de fedéfier de ces couleurs. Elles pourroient perdre de leurs mauvaifes qualités , & en conferver encore trop. Laque, Laque très fine , quatre onces» Cire , cinq once ?. Vernis moins doré , neuf onces & demie... C’eft encore une des couleurs pour lefqùelles il eft difficile de bien déterminer la quantité de eire qu’elles exigent, parce qu’elles font louvent différeniment fallifiées, La dofe qu’on a déterm’née efl : proportionnée à la laque la mieux compofée Ik. la plus fine. Carmin, En le fuppofant parfait & (ans mélange, on le sompofera comme la laque. Vermillon., Vermillon , fix onces. , Cire, deux onces. Vernis moins doré , trois onces & demîe^ Rouge-brun d’Angleterre.. Rouge-brun , fvx onces. Cire , quatre onces & demie. Vernis le plus doré, huit onees» Terre _£haUe, TiSrre d^talrê , cinq once^ Cigë-jCinq^ onces.-E N C Vernis le plus doré , neuf oncei. Outremer, Outremer , une once. Cire , fix gros. Vernis blanc , le moins gras , dix à onae gros. Cette couleur fe manie plus facilement à la cire qu’à l’huile. Bleu de Prufe. Bleu de Prufle le plus beau, deux onees Si demie. Cire , cinq onces. Vernis blanc , le moins gras , neuf onces» Cendre bleue. Cendre bleue, quatre onces» Cire j deux onces & demie. Vernis blanc jle moins gras.„ quatre oncesSs demie». > Email bleu,. Email bleu , fix onces. Cire , trois onces. Vernis blanc, le moins gras, cinq onces & demie. Cette couleur noircit à l’huile , mais elle n’a pas le même défaut à la cire. On peut en faire ufage pour glacer, parce qu’elle couvre peu. Ella eft trèi-propre à couvrir des delTous peints en bleu de Prufle. Biflre , quatre onces Cire, cinq onces. Vernis le plus doré , neuf onces & demîiî» Cette couleur , dont on.jie fait ufage qu’endétrempe & au lavis , réuffit très- bien à la cire ^ & jointe au vernis le plus doré , elle monte prefque au ton du flil-de-grain d’Angleterre, & a plu- de .foliditc. Il faut ê :re averri queles marchands de couleur ont coutume d’ajouter de la gomme au biftre , après l’avoir broyé ai l’eau , & qu’il ne doit pas ê-re gommé dan ; la peinture à la cire. MêK- avec les ochres, le^. carmins , la laque, le rouge brun ^ le jaune de Naplei , il produit de très-beaux tons.. Terre de Cologne ; Terre de Cologne , q^uatre. onces»

j -E N C .

Ciré, cînq onces.

Vernis le plus doré , neuf onces & demie. Cette couleur a le défaut de pouffer dans la peinture à l’huile ; elle le perd dans la peinture a la cire.

Terre ^omhre.

Elle doît être préparée commela terre de Cologne, parce qu’elle a les mêmes principes & les mêmes qualités.

Laque verte.

taque verte , quatre onces.

Cire , quatre onces & demie.

Vernis blanc, le moins gras, huitoncesi Noir de Pêche.

Noir ds pêche , trois onces.

Cire , quatre onces & demie.

.Vernis blanc iec, huit onces. . Noir ([Ivoire,

Noir d’ivoîre , quatre onces.

Cire , quatre onces & demie.

Vernis blanc lec , huit onces. Noir de famée.

Noir de fumée , une once.

Cire, huit onces.

Vernis blanc fée y quinze onces.’ Il refte quelques couleurs, telles que le verd de gris , le minium, la terre verte , &c. que l’on n’a point mifes en expérience. Ceux qui voudroient en faire ufage , pourroient, d’après les proportions qui viennent d’être données, efli- . mer quelle qualité & quelle quantité de vernis , [ & quelle portion de cire il faudroit faire entrer dans leur compofition. D’ailleurs, quoique les auteurs ayent faif des expériences répétées, & qu’ils fe folent affurés qu’aveu les proportions qu’ils ont réglées, les couleurs feroient très-folides , &’ réfidèroient au temps au moins aufli bien que dans la peinture à l’huile , ils ont déclaré qu’ils n’affirmoient pas qu’on ne pût encore retlifier les combinaHops qu’ils ont établies. Manière dé préparer les couleurs. Cette préparation peut fe faire parle même moyen qui a été indiqué pour la première manière de peindre à Vencaujlique , en obferyant les proportions établies pour la peinture en cire. On prendra

  • jpes couleurs àinfi préparées , on les mettra d^ns

E N C J47

des pots de verre mince, avec le vernis qui leur convient ; on placera les verres dans ia machine qui fera à-peu-près la même que pour Veîicauftiqae : on fera fondre le mélange , & on le remuera continuellement, jufqu’à ce qu’il foit relToidi, avec une fpatule ou un couteau d’ivoire , pour que la cOuieur ne fe précipite pas. Enfuiteil faudra boucher le valeavec du liège, pour éviter l’évaporation du vernis. Mais le comte de Ca5’lus, perfuadé que la peine de faire chauffer l’eau chaque fois que 1 on met de nouvelles couleurs fur la pierre , eft capable de rebuter, indique une autre maniera à laquelle il ne doute pas qu’on ne donne la préférence : elle confille à fondre la cire dans Izs vernis ,& : à y ajouter la couleur. On met la cire & Je vernis dans un bocal de verre mince ; on fait fondre la cire dans la machine deftinée à cet ufage, & donc on va donner la conftruiTiion ; quand elle e(l fondue , on remue le mèlînge pour allier étroitement ia cire avec le vernis ; on ajoute la couleur bien broyée a fec, on retire le bocal , on remue le mélange jufqu’à ce qu’il foit refroidi, & on leconferve bien bouché.

Machine à préparer les couleurs. La raachînœ à préparer les couleurs à la cire , ne diffère de la machine à godes indiquée pour l’encaujlique , qu’en ce que la première devant contenir des pots de verre inégaux en diamètre tk en hauteur, doit avoir des loges proportionnées à ces verres.

Au refte, le Lorrain , homme à talent, & peintre de l’Académie royale de Paris , qui a travaillé en grand dans ce genre avec fuccès , négligeoit l’appareil d’une machine particulière. Il faifoit préparer fes couleurs dans de grand ? pots de terre verniffée, que l’on mettoit dans un chaudron plein d’eau bouillante. ■Il ne faut préparer qu’une couleur à la fois, ds peur que le vernis ne s’évapore fur le feu, tandis qu’on fera occupé à en remuer une autre jufqu’à ce qu’elle foit refroidie,.

Infirumens pour la peinture en cire. Des pinceaux & des broffe ? o-dinai ;es, une palette de bois , un Couteau d’ivoire pour préparer lei teintes, un pintelier contenant de l’effence de téré» benthine , pour humeéler les couleurs & laver les pinceaux ;tels fcnt les inftrumens nécelfaires pour cette forte de peinture.

On feroit cependant bien, au lieu d’une palette de bois , d’en avoir une d’écaillé , parce que celle de bois peut abforber une portion du vernis , & nuire à la fluidité des couleurs. On recommande un couteau d’ivoire , au lieu d’un couteau à palette à lame de fer, parce que le fét peutaltérer certaines couleurs & en décoiupofer d’autres,

Zz z ij

5fg

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Âlanicre de ge.rnir la palette. On la gafnît comme pour la peinture à l’huile ; mais comme la cire forme toujours , en fe reftoidiflant , de petits grains qui nuiroient à l’ouvrage , il faut pafier les couleurs les unes après les autres fous ie couteau , en y ajoutant un peu d’effence de térébenihir.e quand elles ne font pas affez fluides. ■ Veinturtà la cirefurbois. Cette peinture peut s’exercer furroute lorte de bois. Il fera pourtant mieux de choifir le moins compaâ , le plus uni , celui qui fera le moins fujet à fe déjetter &• à "être attaqué par les vers. Le fapin, & furtout celui de Hollande , eft très convenable à cette manière de peindre , & ne demande d’autre préparation que d’être bien rabote , parce qu’il a la propriété de haperla couleur. Le cèdre , le poirier, feront propres aux ouvrages très-finis ; on peut aulTi, pour le même ufage, employer le chêne , furtout celui de Vofge ou de Hollande. Mais ces trois fortes de bois , & ceux qui leur reffemblent , haperoient difficilement la couleur ; 51 faut leur donner un grain qairefiembleautiffu de la toile ; c’efl : à quoi l’on parviendra au moyen d’un outil qui a quelque rapport au berceau des graveurs en manière noire. Il eft compofé d’une lame d’acier & d’un manche rond. La lame , qui peut être longue de trois pouces, & large d’un pouce & quelques lignes, porte , à fon extrémité , fur une face un bifeau , & fur l’autre des filions très-ferrés. On aiguife cet outil du côté du bifeau , & alors les filions forment des pointes très - aiguës qui donnent du grain an bois. On paffe cet outil diagonalement fur toute la furface de la planehe en appuyant un peu. S’il arrive qu’on ait donné le grain trop profond , on l’adoucira en y paffant une pierre-ponce très-unie. Peinture à la cire fur toile. On préférera la toile dont le grain fera uni & ferré. Pour la préparer à recevoir la couleur , on appliquera avec une broffe deux ou trois couches de cire diflbute dans l’eifence de térébentine , ou dans le vernis blanc le moins gras. Il faudra laiffer fécher la première couche avant d’en appliquer une féconde , & lorfque la derniers fera feche , on fera fondre la cire en préfentant la toile à un brafier ardent. Cette toile ne doit être chargée que de - la quantité de cire néceffaire pour que teutes les paniesen foient imbibées également j mais fans excès.

Il efl encore une autre manière d’appliquer Î3 cire : c’efl de chauffer la toile au point qu’elle foit capable , par fa chaleur , de mettre la cire en fufion : ou encore de l’appliquer fur une plaque de cuivre bien chaude , & de la flotter avec un pain de cire. On comprend qu’à moins que la toile ne loit fort petite , le cirage ne peut fe faire que par parties fijeceflîves, & il faut avoir fois de le rendre trèj-égaL

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Sur la toîle cîrée de l’une de ces manières , 09 pourroit peindre fuivantle trolîiéme proGcdé de Vencaujlique vmais alors on feroit obligé de rendre le cirage beaucoup plus fort , puifque la cire du fond doit imbiber & envelopper les couleurs dont il fera couvert.

Pour les ouvrages d’un fini très-précieux, on pourroit coller du papier fur la toile, & avoir attention que le cirage pénétrât la toile & le papier.

Peinture à la cire fur plâtre ou fur pierre. Si l’on peignoit à crud fur le plâtre , la couleur refleroit à la furface , & la peinture fe détruiroit par écailles. Il faut donc couvrir le plâtre d’un enduit de cire , & mettre deux ou trois couches de plus que fur la toile. Pour que la cire pénétre le fond , on l’échauffera avec le réchaud de doreur. On employeralemême procédé pour la pierre , furtout quand on aura lieu de craindre les effets de l’humidité. La troifiéme efpéce de peinture encaujTi^ie peut être pratiquée fur le plâtre ou la pierre, en prenant la précaution d’en boucher les pores. Cette précaution eft néceffaire pour prévenir l’embut de la cire & les inconvéniens de l’humidité. Un vernis gras eft le plus sûr des moyens qu’on pourroit employer. On le compofera de parties égales d’huile de lin cuite , ou d’huile graffe des peintres , & d’ambre préparé de la manière qu’on a déjà prefcrjte pour les vernis dorés. On liquéfiera ce vernis avec de l’efTence de térébenthine, & on en appliquera autant de couches qu’il fera néceffaire pour boucher les pores du plâtre. Lorfque ce vernis fera fec , on mettra l’enduit de cire diffoute, comme on l’a dit, on le laiffera fécher , on peindra à l’eau avec les mêmes couleurs qu’on a coutume d’employer à l’huile , & on fixera la couleur avec le réchaud de doreur.

Blanc (Pauf far les tahlsaux à la cire ou à Vencaujîique. On prendra une broffè à peindre, neuve & très-propre , & de l’eau commune très limpide ; on lavera le tableau en le frottant légèrement avec la broffe, jufqu’à ce que l’eau ait pris partout : alors on enlèvera l’eau fuperfîue avec un lingue doux & humide , & avant que le tabkau foit fec , on appliquera le blanc d’œuf de la même manière que fur les tableaux àl’huile. Vernis pour les tahleaux à la elre. C’eft un des avantages de ces tableaux de n’avoir pas de luifant. Cependant fi, par un goût particulier pour cet éclat incommodeSc menteur, quelqu’un vouloir le leur procurer, il pourroii fe a : fair» en y appliquant un vernis compofé d’elprir de vîn ’& de maftic. Ce vernis r ;’enpê-heroit pas , (Je retons&er le tabljsaK ; mais cwmnie les réfine»

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les plus blanches jauniffent facilement, oti fera toujours mieux de s’en tenir au blanc d’œuf. On peut commencer un tableau à Vencaujlique & le terminer à la cire. C’eft de cette manière que M. Vien a fini fon bufle de Minerve. On eft maître de peindre les parties d’un tableau à des temps différens, fans que les jondlions des couleurs nouvellement appliquées , puiffent être diftinguées des anciennes ; avantage que n’a pas la peinture à l’huile. Le comte de Caylus penfoit que la peinture à la cire cjnviendroit mieux que celle à l’htiile pour reflaurer de vieux tableaux. S il ne fe trompoit pas , cette utilité feule rendroit fon invention précieule. Il avertit que les ébauches de la peinture à la cire ont quelque chofe qui pourroic piévenir contre elle , parce que les couleurs ne paroiffent pas couvrir autant que celles à l’huile ; mais que cet inconvénient cefle quand on termine l’ouyrage,

» Nous n’avons rien fait , dit-il en terminant » fon mémoire, qui n’ait été mis en épreuve par » d’habiles arrives ; nous nous fommes corrigés » d’après leurs réflexions ; nous avons enfin parlé » de perfeflionner ces deux genres de peinture >3 autant qu’il a été en notre pouvoir : nous ferons trop récompenfés de nos travaux , s’ils w peuvent être de quelque utilité ». Malgré l’abandon oià efl tombée fa découverte , nous ne pouvons nous perfuader qu’elle foit inutile. Elle renaîtra peut-être un jour avec gloire & perfectionnée. Nous ne ferions pas étonnés que cette réfurreflion fût opérée par les Anglois plutôt que par nos concitoyens. Ce ne feroit pas la première fois que nos induftrieux voifins nous feroient connoître l’avantage de ce que nous aurions d’abord négligé.

La découverte de Yencau/llque fit beaucoup de bruit dans la nouveauté. M. Bachelier prétendit l’avoir faite indépendamment de M. de Caylus , & même avant cet amateur ; cette afTertion fut loin d’être prouvée ; & d’ailleurs , la première invention qu’on peut accorder à M. Bachelier, &qui elle-même parolt être poftérieure à celle du comte de Caylus, n’eft pas celle d’une tncaujtlque , mais d’une peinture à la cire. Voyez l’article encaujlique car M. Watelet , dans le Diclionnaire de la théorie des Beaux- Arts , dont celui-ci n’eft qu’une fuite relative à la pratique des mêmes arts.

Comme dan s toutes les queflions aux quelles le public prend quelque intérêt, il feforma un efpric de parti. M. V/atelet lui mâme , qui embraffa le parti le plus jufte , ne fe montra pas tout-à-fait exempt de pafTion dans l’article auquel nous ve-

.Ilons de reroyer. Il y a traité avec trop peu d’égards

M. Bachelier, artille eftimable , qui fe dirtingua d’abord dans le genre de la peinture des fleurs, qui é ;on- :i enlhite le public par le wre talent avec lequel il peignit les animaux , & E N C

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qui peu d’années après , s’éleva jufqu’au génie de l’hiftoire, & mérita que l’Académie Royale le plaçât dans la claffe de les profeffeurs. Il auroit peut-être encore mieux affuré fa gloire pour la poftérité , fi , continuant de peindre des animaux, il avoir préféré l’honneur d’être, en ce genre , le premier artifle de fon fiecle , à celui de difputer une palme palTagère à une foule de rivaux fiers d’être cités quelque temps dans la première clafle de la peinture : car on ne peut le diflirauler ; de tous ces peintres d’hiftoire qui foutiennent la continuicé du corps académique, & qui méritent plus ou moins l’eftime de Lniri contemporains, il ne reftera pour l’avenir que le nom de ceux que la nature a marqués du fceau du génie

Dans le temps où le public fe partageoit entre M. Bachelier & le comte de Caylus, l’auteur de l’article Encaujlique dans l’ancienne Encyclopédie , M. Monnoye , montra fa partialité contre le comte de Caylus en faveur de M. Bachelier. Pour dégrader l’invention du premier, il tâcha de prouver que Vencauftiqus qu’il avoit trouvée n’éroit pas celle des anciens -, & nous penfons , comme lui , que ce n’étoit pas du moins celle des anciens peintres Je tableaux : mais l’invention de M. Bachelier ne fe rapproche pas davantage du procédé des peintres de la Grèce.

Dans l’intention d’établir fes preuves , il détaille les conditions que doit avoir Vencauftique pour être reconnue la même que celle des anciens : mais il confond les diffcrens genres d’«2i ;<2KyZz^ue qu’ils pratiquoient, &ne diftingue pas la peinture des tableaux de celle desvaiffeaux & de celle de bâtimens , que nous appelions peinture d’impreflion , peinture à la groffe broffe , peinturage, barbouillage. Ce n’ert pas avec des notions auffi confufes que l’on peut éclaircir une queftion.

Il établit, 1.° que les anciens peignoient avec des cires colorées, qu’elles étoient peat -être mêlées d’un peu d’huile pour les rendre plus fouples, & qu’ils les confervoient dans des boëtes à compartimens.

Puifqu’il efl : incertain que les anciens mêlaffent de l’huile à leur cire, il ne falloir pas comprendre l’huile dans les ingrédiens de l’ancienne encaujlique , 8c le comte de Caylus s’eft bien gardé de la faire entrer dans la fienne. Dans fa première manière , il a compofé les cires de façon qu’elles peuvent fe conferver dans des boëtes à compartimens : dans fa première & dans fa féconde manières , il fait ufage d-o cires colorées.

.° M. Monnoîe dit que les anciens faifbient fondre ces cires, &les eraployoient au piaceau, C’eft ce que penfoit aufli le comte de Cayius, & c’eft ce que Pline ne permet pas d’acîmectra pour la peinture des tableaux : il dit, comitia S^o

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nous l’avous vu , qu’on peignoît dans ee genre au cejirum, ou viriadum ou plutôt veruculum , c’eft-à-dire avec des efpèces de brochettes ou de poinçons. Les différences manières de peindre à Vencaujlique , inventées par le comte de Caylus & M. Bachelier, exigeant Tufage du pinceau , ne font donc pas Vencaujlique des anciens peintres de tableaux.

.° M. Monnoie implore le témoignage de Vitruve, pour prouver que les peintres anciens fixoient leurs tableaux par l’inuftion avec un réchaud plein de charbon qu’ils promenoient fur la fî.rface de la peinture. Vitruve & Pline, qui s’accordent à cet égard au point de s’exprimer prefque dans les mêmes termes , ne difent alîurément point que ce fût le piocédé des peintres de tableaux , mais celui des peintres de bâîimens, lorfq.i’ils vouloienc fixer fur les mura’lles des couchrsde minium. (3n peutmême conjeélur-sr du récit de Vitruve, que cette invention cft due aux Romains, &i qu’elle efl poltérieure aux temps d’un certain Faberius Scriba. Ce Faberius paroît n’avoir pas épargné les fras pour faire peindre les murailles de fa m^iifon en minium, Se il perdit fa dépenfe, parce qu’on n’avoit pas employé ce procédé. Croit -on qu’il n’en eût pas fait les frais, fi dès-lors ce procédé eût été connu. Vitruve dit que cette opcracion fe nommoir~en grec Kc.vs^if , ujlion , brûlure. La difF. rence dans les noms en témoigne ordnaiiomRnt dans les chofes. Il eft donc probable que la Kavi7iç jl’u-ftiori, n’étoit pas la même chofe que l’êj’Kciîic-K, kvx,a.v< !TiK] , V inufiion , la hrâlu.e intérieure , enfin Vencaujlique. Mais fi l’on admet que l’opération des peintres de murail’es, étoit la. même que celle des peintres de tableaux , les deux dernières manières de peindre à l^encaujîique du comte de Caylus s’accordent avec celle des anciens, .® La dernière condition établie par M. Monnoye , eft que les anciens froitoient & poliffoient leur ouvrage avec des linges nets. Mais il fe trouve que cette manœuvre étoit celle des peintres dj murailles, & Virruve ni Pline ne dit qu’elle leur fût commune avec celle des peintres de tableaux..

M. Monnoye oublie uiie des conditions les plus certai :;e3 de V encaujîique àes anciens ; c’eft qu’elle étoit exécutée fur le bois ou fur le mur. Cette omiflion efl peut-être volontaire ; car s’il eût exclu la toile de Vencaujlique des anciens, il auroit prouvé que celle de M. Bachelier différoit de celle des Grecs , puifqu’elle s’exécutoit fur la toile. Le comte de Caylus a fait faire fur bois les elfais de les inventions. M. Monnoye affure que la preiîiicre manière inventée par le comte de Caylus, n’eft point l’encaujîique, puifqu’on emploie l’eau bouillante au lieu du feu : cette objeûiou nous paroît très ’bien fondée,

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II déclare la féconde manière inventée par le comte de Caylus impoflible dans l’exécution. On a vu cependant que M. Vien avança fa tête de Minerve fuivant ce fécond procédé, & l’on ne peut contefter la polfibilité de ce qui a| été fait. AL Vien trouva même cette féconde, manière plus facile que la première , fuivant laquelle il avoic cependant travaillé. Dans la, fpiculacJilln elle paroît aiiffi a’ifie que la peinturai en détrempe, p.iifqu’on opère de même avec- ; des couleurs réduites en poudre & broyées à( l’eau. « Pour ne pas faire comme M. Monnoye, i » dit M. Watelet dans une note que nous tranf- , » cri vons littéralement, nous ne nous en fommes j n rapportés qu’à nos yeux, Se nous cfons af-j » furer, d’après ce que nous avons vu, que le n procédé de, cette féconde encaujlique eft très-poflibie & très -facile , & que les dérails de » l’opération que MM. de Caylus & Majault » ont donnés dans leur ouvrage ne laiffent rien » à defirer. »

La troifiemo & la quatrième manière inventées par le comte de Caylus & M. Majîult paroiffent ingénieufes à M. Monnoye : mais il 1 dit que les conditions de Vencaujlique n’y font) pas remplies. Elles le font cependant fuivant j lui-même , puifqu’il admet comme encaujlique’ le procédé des anciens peintres de murailles rapporté par Vitruve. On voit en lui l’opiniâtreté & la chicane de la palïïon , qui veut tout refufer au comte de Caylus , pour tout accorder à M. Bachelier.

Paffons maintenant aux procédés de peinture encaujlique inventés par cet artifte. Première peinture encaujlique de M. Bachelier. Elis ne cor.fifte qu’à fubûituer à i’huile la cire blanche diffbute dans l’effence de thérébencine.

Ce procédé, comme on l’a vu, fut le premier qui vint à la penfée du comte de Caylus : mais il ne s’y arrêta pas , parce que Pline garde le plus profond filence furies huiles effentielles, & qu’il n’eft point du tout vraifemblable que les anciens en aient fait ufage dans Vencaujlique. Au refte , la duToiution de la cire dans les huiles effentielles n’eft point une découverte ; c’étoit un procédé connu de tous les chymiftes. Quelques perfonnes ontfoupçonné que l’idée de peindre avec de la ciie diffoute dans 1 elfence de thérébentine vint à M. Bachelier , fur ce qu’on avoir fenti une odeur de thérébentine au tableau peint par M. Vien, d’après la découverte du comte de Caylus. Cette odeur venoit non de la partie du tableau peinte s.V encaujlique, mais de celle qui avoit été peinte fuivant la manière que le comte de Caylus appelle pein-f ture à la cire. Cependant M. Bachelier a affuré que, plufieurs années auparavant, le hafard lui ayoic fait découvrir la diffoiution de la cire E N C

ians l’efience de thérébentine, & que dès-lors il avoit fait quelques elTais de peinture avec des coiile-rs broyées dans ce mélange de cire & d’eflence. Il feroit peu honnête de ne le pas croire fur l’on affirmation.

Mais ce qui efl cer :ain , c’eft que cette manière n’a d’autre rapport avec ? encauftique des anciens que l’emploi de la cire. Ce qui eft , encore certain , c’efl : que ce n’efl : pas même une encduftiqne , puifqu’on opère en ce genre fans l’inie : veniion du feu. Enfin le comte de Caylus , dans fes premières expériences fur la peinture à la cire , a reconnu que cette pratique avoit de grands inconvéniens. Aufli le Lorrain, peintre dont nous avons parlé, qui avoir commence, comme M. Bachelier, par peindre à la cire diffoute dans l’effence de thérébentine , crut -il devoir abandonner bientôt ce procédé pour celui du comte de Caylus. Il a peint à la cire non-feulement des tableaux , mais même des plafonds.

) Cependant le Lorrain avoit, aufTi bien que M. Bachelier, inventé, ce procédé : il auroit ipu martre fa gloi e à le défendre ; il en fentoit les vices, & n’htfiia point à l’abandonner. Secondepeinture encavflïque de M Bachelier. Ayez une loUe forte & krree : lavez- la pour en ôcer l’apprêt ; tendez -la fur un chalïïs, & dilpofez ce challis de manière que vous puilTiez ’tourner autour. Ayez des couleurs telles qu’on les emploie dans la peinture en détrempe. (Il faudroit dire telles qu’on les emploie à l’huile ; car les blancs dont on fait ufage à la détrempe noirciroient. ) A mefure que vous peindrez faites humeSer votre tableau par = derriere avec une éponge. Par ce moyen , vous pourrez , à Totre gré, retoucher votre tableau, y mettre l’accord & le fini.

Prenez enfuite du fel de tartre ; faites -en djffoudre dans de l’eau tiède jufqu’à liiti :raiion. Filtrez cette eau faturée à travers un papier gris, & recevez -la dans un vaifltau de terre neuve &verniffee. Mettez ce vaif eau fur un feu doux : jettez-y les uns après les aunes des morceaux de cire vierge, bien blanche & bien pure. ’A mefure qu’ils fe diffoudronr, cette folution fe gonflera, montera comme du lait, & elle fe repandroit même, fi le feu étoit trop pouffe. Il faut fournir à cette eau oikaline autan : de ■cire qu’elle en pourra diffoudre. On s’affurera que la dilYolution efl parfaite , en la remuant doueement avec une fpatule de bois : quand elle fera parvenue à fon dernier degré, on aura une maffe d’une blancheur éblouiffanie , une eipece de favon d’^ine confiftance de bouillie qui fe diffoudra dans l’eau pure , en aufli petite quantité qu’on voudra, & : fournira

une eau de cire. 
! Le tableau terminé, on prend des broû’es , & 

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on donne au derrière de la toile une ou pkfieurs couches plus ou moins fortes de cette diiVolution de cire. L’épaifi’eur des couches doit être proportionnée à celle de la toile & à la force des teintes.

Enfuite on remplit de charbons a-dens des réchauds de doreur. Le peintre les fait promener derrière ia toile, mais lui-même refle placé devant la peinture : il examine les effets de l’inuiuon & de la fufion de la cire qui pénètre la toile & : les couleurs. Il dirige les mouvemens des réchauds , il ordonne de les hauffer, de les baiffer , de les fixer à une feule place , ou de les changer jufqu’à ce que tout le tabieau foit fuffifaniment brâlé.

On peut retoucher le ’tableau, foit avec des couleurs préparées au favon de ciie , fous forme liquide, ou £bus forme féche, foit avec de ia cire diffoute dans l’eflence de thérébentine : ces diiFerens moyens font au choix du peintre.

Ce qu’il y a de plus avantageux dans cetts. manière de peindre a le plus grand rapport avec la troifieme manière à Vencaujlique du comie de Caylus. Jl en a été queftion po^r la première fois dans l’ancienne Encyclopédie , arricle Encaustique, par’lVI. Monnoye ; & !cs mémoires du comte de Carias & de M. MajajlE a.oient été mis au jo-ir depui< : quelques mo’^. Le procédé du comte de Caylus peut s’exécuter fur le boi-i ; celui de M. Bachelier, t[ui ne peut s’exécuter que fur la toile, n’eîr ciitainement pas r£/2f<2z{/î/’jii5 des anciens, puifque les Grecs ne peignoient pas fur toile, que les Romains n’ont peint fur toiie.que fo.ts le règne de Néron, & que peut-être , dans route l’antiijuté, il n’y a eu de peint fur toile que -le portrait colofl’al de ce pviHce.

L’invention de M. Bachelier doit avoir un grani vice : c’efc qu’il entre de i’aikaîi dans

on ’avon de cire-, & que les alkalis gâ’ent un

gra ;id Tiomb"e de couleurs. Aufli les couleurs des tableaux que M. Ba-hel ^ï e>'pqlaau falcn fiour c.’niirmer fa découverte, étoient- elles grifes S : aie>.

Enfin le ; anciens, en pariant de Vencaufih^ue , ne font mention ciue de feu , de c.re & de ctjuleurs ; Se. le c< ;m-.e de Csyli" ; n’a pas emplo-yé au re chofe. Il s’efl : donc conL.’-mé plus exaftement au texte des anciens que M. Bachelier avec fes effences & fes alkalis.

Troifieme peinture encaujîiqué de M. Bochelier. On délaye les couleurs d.^ns l’eau de favon do ci’-e .’ont on vient de voir la recette. Orv • tieiu les couleu’s dans des godets , & on les entretient dans un éra’t d’hum’dité convenable en le- : hvmeclant avec quelques gouttes de cette

! même eau de cire. On fe ferc de pinccr.ux 3c 

I autres inllrumens erdinaites : mais ia palette 5r

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doit avoir reçu une préparation néceffaîre â ce genre. Il faut Ja tremper dans de la cire bouillanie pour qu’elle s’en pénètre , & la mettre enfuiie fous uneprefle pour qu’elle ne fe voile pas. On raiiffe ce qui peut refter de cire fur cette palette.

Il faut aufli a’oîr à côté de foi deux vaîffeaux de terre pleins d’eau, pour nettoyer les pinceaux dans chacun de ces vaiffeaux l’un après i’aure, afin de les décharger de couleurs : . après quoi , on les efluie fur une éponge. Avec plufieurs fervieties appliquées les unes fur les autres, on fait une forte de petit matelas qu’on humefle d’eau pure : on le tient appuyé derrière la toile, ou fi ce matelas paroîc trop incommode , on imprègne d’eau de cire le derrière de la toile , & on l’humefle deux ou trois fois en hiver, & plus fouvent en été. .-^11 rtfte , le matelas & l’éponge ne font nécedaire ? qu’à ceux qui , n’ayant pas l’habitude d2 peindre à la détrempe, ne favcnt pas fondre une teinte humide avec une teinte lèche. Le tableau terminé par ce procédé , il ne refte plus qu’à le brûler : cette opération ell indiipenfable. Allumez donc un grand feu qui forme une nape ardente ; préfeniez- y votre tableau du côte oppofé à la peinture ; approchezle davamage à meiure qu’il cefTera de fumer : vous verrez la cire fe gonfler, le gonflement fe promener fur la furtace, & difparoure quand il fera devenu générai. Alors le tableau fera brûlé. Retirez - le pcu-à-peu, comme vouï l’avez approché, de ptur que la furface ne refte inégale par un refroidiffement bralque & fubit. L’inuftion , loin de détruire la peinture, la rend fixe Se folide : elle change un enduit fans corps & lans confidance, que le frottement le plus léger pour. oit emporter, en une couche dure, compade , adhérente, mince, flexible, incapable de prendre le poli.

Si le tableau ctoit grand, on le brûleroit. par parties , en promenant par - derrière le rJchaud du doreur , comme dans la méthode qui précède.

L’artifle peut encore retoucher le tableau , même après qu’il eft brûlé. Il faut l’humeder d’eau de cire. Le procédé convenable eft de glacer la couleur ; c’eft-à-dire, que f} l’endroit eft trop dur, on y étendra une teinte plus claire , & l’on répétera l’uftion pour l’endroit retouché : elle rétablira l’accord, On pourra aufli, pour retoucher l’ouvrage , fe fervir de paftels dont nous allons parler. Quatrième peinture encaujlique de M. Bachelier. Prenez de l’eau de cire dont vous venez de voir la préparation. Donnez-en aux couleurs la quantité convenable. Broyez-les. Tranfportezles du porphyre fur un papier gris qui en boive l’humidité. Appliquez delfus un morceau de E N C

carton avant qu’elles foient entièrement féclies. Donnez- leur la forme ordinaire de paftels, en les coulant & les laifTant enfuite fécher lentement à l’air libre : ces paftels font tendres & mous , & capables de s’étendre (bus les doigts. Travaillez avec ces paftels , & fixez la peinture par l’inuftion , comme dans la méthode précédente.

Dans ce que les anciens dilent de Vincauftique, il n’eft queftion ni de l’avon ni ds paftels. Si l’on veut que encauflique qui ie peignoit aux pinceaux , & qui étoit celle des peintres de navires , fût aufli celle des peintres de tableaux, Pline dit qu’ils employoient avec le pinceau des cires fondues au feu, refolutii igni ceris penicillo utendi, & c’eft, il en faut convenir, une condition que n’a rempli ni le comte de Caylus ni M. Bachelier. C’eft une obfervation que M. Monnoye n’a pas faite, parce qu’il vouloir préfenter le dernier comme le reflaurateur de ’ encauflique des Grecs. Mais en examinant la chofe avec impartialité, on reconnoîtra que le comte de Caylus & l’habile chymifte qui l’a fécondé dans fes recherches , ont plus approché que M. Bachelier de ce que Pline nous apprend de l’encaufliçue des anciens. On peut ajouter qu’ils en ont plus approché en admettant même les conditions que M. Monnoye exige pour cette encauflique. Je fuis loin de croire cependant qu’ils l’aient renouvellée. Je fuis très-perfuadé qye Vencaufti’iue des Grecs étoit très-d fférente de la leur ; mais je penfc auflî que ^encauflique qu’ils ont inventée eft d’une pratique plus facile & en même temps d’un meilleur effet que celle des anciens.

Explication de la plrnche de la peinturt facauflique.

Figures I , î £■ 3 , palettes de différentes formes. Pour celle des peintures inventées par le comte de Caylus, qu’il appelle peinture en cire, & non encauflique ., il fera bon d’avoir des palettes d’écaillé. Pour la troifième forte à’encauflique de M. Bachelier, eltes font de bois , mais elles doivent avoir été trempées dans de la cire bouillante.

Figure^, pinceaux.

Figure y , couteau à broyer les couleurs fur le ? palette^. Le comte de Caylus recommande qu’il foir d’ivoire pour la peinture en cire. Fig- 6, fornie de la boëte dans laquelle on tient de l’eau chaude pour fondre les couleurs , liiivant H fecpnde manière du eomie de Caylus.

Fïg. J, glace qui tient lieu de pierre à broyer les couleurs, &qui eft appliquée fur un coffre de fer blanc. A l’un des angles de ce cofîre eft un goulot p^r lequel on verfe l’eau bouillante.

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lante. Sur la glace efl : une molette de marbre.

^g. 8, boëte de fer- bîanc avec un goulot qui iert à la remplir d’eau bouillante. A la furface de cette boëte font à&s trous dellinés à recevoir les godets remplis de couleurs. Fi^,’ ^ & 10 , godets de cryftal. Pour la peinture en cire du comte de Caylus, les godets -font de différentes grandeurs , ainli que les trous du coffre.

Fig. II, vaCes ou pinceliers , pleins d’eau, pour nettoyer les pinceaux luivantla troilîèms manière de M. Bachelier.

ENCOLLER. ( v. a£l. ) On e.vcoKê, avant de les imprimer , les coiles deftinces à être peintes. Il y a des peintres qui ne veulent pas que leurs toiles foient encoUées , parce qu’ils craigneiK que cei.e préparation ne taiîc écailler les couleurs. Les doreurs £n6’o//< ?nc le bois qu’ils fe préparent à dorer , & en lauirent de colle tous les pores.

E N C RE de la Chine. Elle tire fon nnm de Jl’Empire qui la fournit. On en compo’e de fictice. On en peut faire avec de l’extrait de rcglifle & du noir de chaibon réduits en bouillis lou" ; la mollette. On joint à cette pâte un peu de colle de poilïbn , & on la met dans des moules frottés de quelque fubTinnce graiffeufe. Ces mou- ■ les peuvent (e faire avec des cartes. Cette encie fert àdeffiner à la plume , & à faire le trait des deffins qu’on fe propofe de finir au lavis. Souvent on lave entièrement le delun à Vencre de la Chine : quclquefoi* elle ten à faire les j touches dans des deffins au biflre -, elle fait le I noir dans les lavis colores que l’on nomme ajuarellt.

ENDUIT, (fabft. mafc.) Comporition dont on revêt les murs. Il faut que les par :ie3 d’un ♦ édifice qui doit étrs orné de peinture- à frcliquc . i foit préparé à les reccvoi : par un cndulc. 11 en I fera parlé à l’article Fresque. ENTAILLE. ( fubfl. fém.) Les graveurs en bois donnent ce nom à un inftiumenî de bois dont ils fe fervent pour ferrer & : contciir les petits ouvrages qu’ils no pourro^ent ailïment tenir entre leurs doigts. On peur confidérer Yentaille comme un quadre dans lequel ces ouvrages font preffés, & qui en augmente le volume. ENTRE-TAILLE. (fabfV. comp. fém.) ATot epufage dans la gravure en bois, pour défigner des tailles plus nourritsen cert.^ins endroits que danslerefte de leur longueur. Dans la gravure au burin, on no’.irric ainfi les tailles en les rentrant ; mai^ dans la gravure en bois V entre- taille àoit être gravée au premier coup. Ëeaujc-j^rts. Tome 11.

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Ventre-taille , dans la gravure au burin , eu une taille fine , pafl’ée entre deux autres taiiles plus nourries. Ce travail fert à exprimer les fubftances luifantes , comme les eaux, les étoffes de foie, les métaux. La moire , les taches du marbre s’expriment par des entre-taides interrompues. C^s entre-tailles font auiFi connues dans la gravure en bois. On peut, de même, dans la gravure à l’eau-flirte , gliffer des entre-^ tailles au moyen d’une pointe très-fine : mais ce travail n’a jamais le brillant qu’il peut recevoir du burin. ,

ESTOiMPE. (fubft.fém.) Veftompe fe fait ordinairement d’une bande de peau de chamois que l’on roule &c qu’on affujettit dans la forme cylindrique en la coulant. On taille en pointe ce cylindre de peau , avec un rafoir ou un canif bien coupant. En paffant ’eJlompe fur les hachures de crayon dont on a couvert le papier, on les adoucit , on les noyé enfemble , comme dans la peinture, on fond les teintes avec le pinceau. On peut fe fervir de Vejlomp ; au crayon rouge fur papier blanc ; mais iLefb rare qu’on on faffe ufage dans cette manière de deffiner, parce que le crayon rouge eflompé prend une couleur peu agréable. On rcferi-e ordinairement rs/7o,7ioê pour les deffins au crayon noir fur papier de demi- teinte : on ri’ejlompe point les lumières. Si l’on trouve quelquefois couvenable de fondre certaines hachures faîtes au crayon blanc , c’efl alors le bout du doigt qui tient lieu A^ejîompe. Voyei à l’article Crayon , ce qui a été dit fur les DeJJïns au crayon.

Nojs venons de parler de Yejljmpe comme fervant à donner & : fondre Ici hachurei fjirci au crayon t mais fouvenr on deffine avec Vefiomve elle-même. Pour cela on écrafe du crayon noif tendre lur un morceat ! de papier : les dcliinateurs appellent zslzfairedelafaujfe. On frotte Vcftompe ^m- ce cr.iyon écrafe , 6z l’on deffine avec ce^ inftrument comme on peint avec la broiTe. C’ell avec Vejlompe qu’on établit les mafles ; c’crt afec l.a pointe de {^ejlonipe qu’on fait des hachures lur ces mafTes c’èfl encore avec cette pointe bien nourrie de poudre de crayon , que l’on frappe les touches : ce qui n’empêche pas que le delilnateur ne roir maître de donner quelques touches avec le crayon lui-même quand il letrouve convenable ; car tout ce que no.is difons fur la pratique , cft toujours fubordonnéau goilt & à l’intelligence. Cette manière de deffiner efl : très - convenable aux peintres, parce qu’elle a beaucoup de rapport avec la manière de peindre. Un autre avantage de Ve.flo :npe efl de faire gagner un temps , qui eft toujours beaucoup mieux employé à l’étude , qu’aux pratiques de la manœuvre. Une maflequi efl : établie en un inftar.t à Veflompe ^ exigeroit beaucoup de temps pour l’établir àia po’nte du crayon, Enfi^ Aa a a

yy4 EST les maffes font plus fourdes à X^eftompe qu’au crayon , parce qu’elles couvrent parfaitement le papier, dont la couleur eft uniquement réfervée pour les demi-teintes s’il eft coloré , ou pour les lumières s’il eft blanc. On employé quelquefois Vejiompe pour des EST deffîns en petit : mais comme elle feroît trop forte fi elle étoit faite de peau , on la fait avec de petits morceaux de papier roulé ; la pointe n’en doit pas être coupée , mais déchirée , afin qu’elle puiffe happer le crayon. .p