Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/Le Naufragé et la Mer

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Traduction par Émile Chambry.
FablesSociété d’édition « Les Belles Lettres » (p. 108r-109r).

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LE NAUFRAGÉ ET LA MER


Un naufragé, rejeté sur le rivage, s’était endormi de fatigue ; mais il ne tarda pas à s’éveiller, et, voyant la mer, il lui reprocha de séduire les hommes par son air tranquille ; puis, quand elle les a reçus sur ses eaux, de devenir sauvage et de les faire périr. La mer, ayant pris la forme d’une femme, lui dit : « Mais, mon ami, ce n’est pas à moi, c’est aux vents qu’il faut adresser tes reproches ; car moi, je suis naturellement telle que tu me vois à présent : ce sont les vents qui, tombant sur moi à l’improviste, me soulèvent et me rendent sauvage. »

De même nous ne devons pas rendre responsable l’auteur d’une injustice, quand il agit sur les ordres d’autrui, mais bien ceux qui ont autorité sur lui.