Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MÉHÉE DE LA TOUCHE (Jean-Claude-Hippolyte), écrivain français, fils du précédent

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 4p. 1446).

MÉHÉE DE LA TOUCHE (Jean-Claude-Hippolyte), écrivain français, fils du précédent, né à Meaux en 1760, mort à Paris en 1826. Lorsqu’il eut achevé ses études à Paris, il mena l’existence la plus désordonnée, et, tombé dans une profonde dépravation, il se fit admettre dans la police secrète sous le nom de chevalier de La Touche ; il devint un agent des ministres de Louis XVI, qui l’envoyèrent en Pologne et en Russie. Chassé de Saint-Pétersbourg en 1792, il revint en France, se joignit aussitôt aux révolutionnaires les plus ardents, et parvint à se faire nommer secrétaire de la Commune. Méhée profita de cette situation pour vendre à un très-haut prix des passe-ports à des émigrés, qu’il faisait arrêter ensuite aux barrières, et joua le plus triste rôle lors des massacres de Septembre. Mais peu après il dut se démettre de sa place, fut poursuivi et se cacha jusqu’au 9 thermidor. Méhée reparut alors, et, voyant le vent tourner à la réaction, il devint un réactionnaire des plus fougueux, et se mit à publier, sous l’anagramme de Felhémési (Méhée fils), des brochures et des pamphlets qui semblaient écrits par un agent de l’Angleterre et des émigrés. Lors de la conspiration de Babeuf, il se vit compromis dans cette affaire et se sauva. Après le 18 fructidor, il devint un des rédacteurs du Journal des patriotes de 1789, et fut nommé, après le 30 prairial, secrétaire général du ministère de la guerre, puis chef d’une division au ministère des affaires étrangères. Vivement attaqué par divers journaux qui mirent au jour son honteux passé, Méhée donna sa démission ; mais il ne tarda pas à rentrer dans l’administration et devint successivement secrétaire général du département de Rhin-et-Moselle, chef du bureau des travaux du département de la Seine et secrétaire général des armées. Destitué après le 18 brumaire, il fit paraître le Journal des hommes libres ; mais le journal fut supprimé, et Méhée, décrété d’arrestation, se vit déporté à l’île d’Oléron. S’étant échappé en 1803, il gagna Guernesey, puis Londres, se mit en rapport avec des émigrés, qui le recommandèrent aux ministres anglais comme un habile agent de police secrète. Ses services furent agréés, et on l’adressa à un autre agent, nommé Drake, qui lui donna de l’argent, des instructions et l’envoya à Paris. Voulant soutirer de l’argent de deux côtés à la fois, Méhée ne trouva rien de mieux à faire, dès qu’il arriva à Paris, que de dévoiler l’objet de sa mission au ministre de la police. Celui-ci l’autorisa à garder l’argent qu’il recevait des Anglais, à continuer sa correspondance avec Drake, et le paya pour recevoir communication des lettres de ce dernier.

La découverte de la conspiration de Georges Cadoudal mit fin à cette exploitation. Méhée révéla sa duplicité dans une brochure qu’il désavoua depuis, et qui est intitulée : Alliance des jacobins de France avec le ministère anglais (Paris, 1804, in-8°). Il disparut alors et retomba dans l’oubli ; mais, en 1814, il fit paraître sous son nom une Lettre à M. l’abbé de Montesquiou et une Dénonciation au roi des actes par lesquels les ministres de Sa Majesté ont violé la constitution (Paris, in-8°). Accusé alors, par le Journal royal, d’avoir coopéré aux affaires de Pichegru et du duc d’Enghien, il poursuivit en diffamation le rédacteur de cette feuille et publia divers factums (Paris, 1814, in-8°). En 1815 il dut quitter la France, habita successivement l’Allemagne, la Belgique, et put revenir en France en 1819. Mais il continua à végéter, et termina sa honteuse vie dans une profonde misère. Outre les écrits précités, on lui doit : Histoire de la prétendue révolution de la Pologne (1792, in-8°) ; la Vérité tout entière sur les vrais auteurs de la journée du 2 septembre 1792 (1794, in-8°) ; la Queue de Robespierre (1795, in-8°) ; Rendez-moi ma queue (1795, in-8°) ; Défends ta queue (1795, in-8°) ; Lettre de Sartine à Thuriot (1795, in-8°) ; Antidote ou l’Année philosophique et littéraire (cahiers 1 et 2, 1801, in-8°), journal qui fut supprimé ; Mémoires particuliers et extraits de la correspondance d’un voyageur avec feu M. Caron de Beaumarchais sur la Pologne, la Lithuanie, la Russie Blanche, Pétersbourg, Moscou, la Crimée, etc. (Paris, 1807. in-8°) ; Mémoires à consulter (1814, in-8°) ; Contes, nouvelles et autres pièces posthumes de G.-C. Pfeffel, trad. de l’allemand (Paris, 1815, 2 vol. in-12) ; C’est lui, mais pas de lui ou Réflexions sur le manuscrit de Sainte-Hélène, réimprimé sous ce titre : Mémoires de Napoléon Bonaparte (Bruxelles, 1818, in-8° ; Paris, 1821, in-18) ; Touquetiana ou Biographie pittoresque d’un grand homme, en réponse à cette question : Qu’est-ce que M. Touquet ? (Paris, 1821, m-8°) ; Extrait de mémoires inédits sur la révolution française (Paris, 1823, in-8°) ; Deux pièces importantes à joindre aux mémoires et documents historiques sur la révolution française, par un témoin impartial (Paris, 1823, in-8°).