Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MARIE II ou MARIA II DA GLORIA (Jeanne-etc., dona), reine de Portugal, fille de dom Pedro Ier, empereur du Brésil

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 4p. 1199).

MARIE II ou MARIA II DA GLORIA (Jeanne-Charlotte-Léopoldine-Isidora-da-Cruz-Françoise-Xavier-da-Paula-Michaela-Gabriella-Rafaela-Louise-Gonzaga, dona), reine de Portugal, fille de dom Pedro Ier, empereur du Brésil, née à Rio-Janeiro en 1819, morte à Lisbonne en 1853. À la mort du roi de Portugal Jean VI (1826), son fils, dom Pedro Ier, empereur du Brésil, accorda une nouvelle constitution au Portugal, renonça à ses droits en faveur de sa fille, Marie II, qu’il fiança à son oncle, dom Miguel, et nomma ce prince régent du royaume (1827). Lorsque dom Miguel, après avoir prêté serment à la constitution, fut entré en fonctions comme régent (février 1828), dona Maria, sa nièce et sa future femme, partit pour l’Europe ; mais pendant ce voyage, dom Miguel, appuyé par le clergé, par l’aristocratie et par le parti absolu, se fit proclamer roi (30 juin), et la jeune reine dépossédée fut forcée de se réfugier en Angleterre, pendant que ses partisans, à la tête desquels se trouvaient Saldanha, Pizarro, Villaflor, les chefs du parti constitutionnel, tentaient en sa faveur des mouvements qui avortèrent. En 1830, Marie retourna à Rio-Janeiro, auprès de son père. Ce prince, ayant été obligé d’abdiquer la couronne du Brésil en faveur de son fils, dom Pedro II, résolut d’aller en Europe et de rétablir sa fille sur le trône de Portugal. Sous le nom de duc de Bragance, il se rendit en Angleterre, puis en France, leva une armée de volontaires, avec laquelle il débarqua sur les côtes de Portugal, et soutint un long siège à Porto. La destruction de la flotte de dom Miguel par l’amiral Napier et la victoire remportée par Saldanha à Almoster lui ouvrirent enfin la route de Lisbonne, où, après une lutte de deux années, il replaça sa fille sur le trône (1833). En qualité de régent et de tuteur de dona Maria, il rétablit l’ordre, supprima les congrégations religieuses, dont les biens vendus servirent à suppléer à la pénurie du trésor, et força dom Miguel à se réfugier en Italie. Le 12 septembre 1834, il se démit de la régence, fit déclarer par les cortès sa fille majeure, et mourut six jours après. La jeune reine, peu après son avènement, épousa à Lisbonne le prince Charles-Auguste-Eugène-Napoléon de Leuchtemberg (27 janvier 1835), qui la laissa veuve au bout de deux mois, et se remaria, le 9 avril 1836, avec le duc Ferdinand de Saxe-Cobourg-Kohary, qui prit le titre de roi, sous le nom de Ferdinand II, lors de la naissance d’un prince héritier du trône.

Pendant le règne de cette princesse, le Portugal fut en proie à des troubles incessants, causés soit par le parti révolutionnaire, soit par les partisans de dom Miguel, qui n’avait point renoncé à ses prétentions et avait été reconnu par le pape comme souverain légitime. Le gouvernement constitutionnel se traîna péniblement, sans cesse entravé dans son développement par des intrigues et des machinations de partis, par le déplorable état des finances, par l’hostilité de la cour de Rome, irritée des mesures prises à l’égard du clergé, par la lutte des ambitions rivales et avides de gouverner, enfin par la trop grande confiance que la reine accorda aux frères Cabral, dont l’un, Costa Cabrai, créé comte de Thomar, s’attira, comme ministre dirigeant, à la fois la haine du parti libéral et l’opposition d’une grande partie de l’aristocratie. Après un court passage aux affaires du comte Villaflor, devenu duc de Terceira, puis de Saldanha, le chef des libéraux, les cortès refusèrent d’adhérer à la nomination du roi comme généralissime de l’armée, furent dissoutes à deux reprises, et, à la suite d’une insurrection du parti ultra-libéral à Lisbonne, la reine dut prêter serment, le 4 avril 1838, à une nouvelle charte, rédigée dans un sens démocratique. Mais les élections de 1840, favorables aux partisans du régime aristocratique, la réconciliation de la cour de Lisbonne avec le saint-siége, l’appui du gouvernement anglais, parurent affermir le pouvoir de la reine. En 1842, elle rétablit la charte de 1826 et forma un nouveau cabinet sous la direction du duc de Terceira, nommé ministre de la guerre et président du conseil. Costa Cabral, créé comte de Thomar en 1844, fut alors mis à la tête du cabinet et excita un mécontentement général par sa politique violente et inconstitutionnelle. Plusieurs mouvements insurrectionnels avaient été comprimés lorsque éclata en 1846 une révolte formidable. Dona Maria, voyant la nécessité de faire des concessions, appela au pouvoir le duc de Palmella, puis Saldanha (6 octobre) ; mais le mouvement révolutionnaire ne continua pas moins à s’étendre dans le pays, et l’on vit les démocrates se coaliser avec la noblesse mécontente, avec le parti miguéliste, pour menacer le trône. Vainement le maréchal Saldanha remporta quelques avantages sur les insurgés ; la révolte gagna les Algarves, les provinces méridionales, les Açores, et il ne fallut pas moins qu’une intervention combinée de la France, de l’Angleterre et de l’Espagne pour conjurer la chute de dona Maria (1847). Pendant quelque temps, la reine laissa Saldanha diriger les affaires ; mais en 1849 la coterie Cabral avait repris toute son influence, et le comte de Thomar, appelé à la présidence du conseil, continua son système de violences et d’illégalités. Le mécontentement était devenu général, lorsque Saldanha se mit à la tête d’une insurrection militaire, força le comte de Thomar à prendre la fuite, prit la direction des affaires, contraignit le roi Ferdinand à se démettre du commandement en chef de l’armée et fit reviser la constitution par de nouvelles cortès, qui votèrent une loi électorale démocratique. Mais Saldanha, craignant d’être entraîné trop loin, se retourna bientôt vers le parti conservateur, voulut modifier la loi électorale, transformer la dette publique en 3 pour 100, et recourut à un coup d’État pour se débarrasser de l’opposition faite à son administration par les deux Chambres. Sur ces entrefaites, la reine mourut en couche, laissant à son époux, Ferdinand, la régence au nom de son fils mineur, Pedro V. Cette princesse joignait à des vertus domestiques une grande bonté ; mais elle n’avait aucune qualité brillante et forte, aucune vue politique. Elle avait eu de son mari cinq fils et deux filles.