Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/traite s. f.

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Administration du grand dictionnaire universel (15, part. 2p. 401-402).

TRAITE s. f. (trè-te — féminin du participe français trait, qui signifie proprement tiré, et qui représente le latin tractus, participe du verbe trahere, tirer). Trajet que l’on fait d’une seule haleine, sans s’arrêter : Faire une grande, une longue traite.

Adieu, dit le renard, ma traite est longue à faire.
              La Fontaine.

Tout d’une traite, Sans s’arrêter en chemin : Le jour suivant, je me rendis tout d’une traite à Ségovie. (Le Sage.) || Sans s’interrompre : J’ai lu ce roman tout d’une traite.

— Transport de marchandises d’une province à une autre ou d’un État à un autre, et particulièrement Trafic, échange de marchandises que font tes bâtiments de commerce sur les côtes d’Afrique : Faire la traite. Faire la traite de la gomme, de l’ivoire.

Traite des nègres ou simplement Traite, Trafic des esclaves noirs : Les immunités pour la traite des nègres furent supprimées par un décret en 1793. Le premier qui fit la traite méritait l’exécration du genre humain (Raynal.) La traite flétrit aux yeux de l’Europe et ceux qui la font et ceux qui la tolèrent, (B. Const.)

— Fam. Traite des blancs, Commerce d’hommes que faisaient les agents de remplacement militaire. || Exploitation des salariés.

— Banque. Commerce des banquiers : Ce qui caractérise une lettre de change, c’est la traite de place en place. (Acad.) || Lettre de change, considérée relativement à celui qui la tire : Ce sont des traites signées de vous et passées à notre ordre par des tiers porteurs. (Alex. Dum.)

— Fin. Droits qu’on prélevait autrefois sur toutes les marchandises qui entraient dans le royaume, qui en sortaient, ou même qui passaient d’une province dans une autre : On payait la TRAITE des marchandises en Bretagne, en Dauphiné. (Acad.)

— Anc. monn. Tout ce qui s’ajoutait au prix intrinsèque des métaux employés à la fabrication des monnaies, et qui était indépendant du poids et du titre : La traite comprenait le seiqneuriage, le brassage et les remèdes de poids et de loi.

— Techn. Nom que les tanneurs donnent au bord du plain sur lequel ils étendent les peaux pour les égoutter,

— Econ. rur. Action de traire le lait.

— Syn. Traite, trajet. La traite est proprement le temps que dure une marche, un voyage par terre, ou l’action même de marcher, d’avancer, considérée comme durant plus ou moins longtemps. Trajet peut se dire d’un voyage par eau, et quand il s’applique à la terre il a rapport à la distance parcourue, à celle qui sépare le point de départ du point d’arrivée.

— Encycl. Traite des nègres. Les asientos, traités ou contrats du gouvernement espagnol avec divers particuliers ou diverses compagnies étrangères pour fournir des esclaves noirs à ses possessions d’outre-mer, furent très-fréquents depuis le XVIe siècle. Comme ce trafic était entouré de beaucoup de garanties, et qu’au monopole de la vente des nègres s’ajoutait le bénéfice d’introduire en fraude beaucoup d’autres objets de commerce, les gouvernements de l’Europe tâchaient, par tous les moyens imaginables, d assurer ce privilège à leurs sujets. Charles-Quint l’octroya en 1517 à ses compatriotes les Flamands. Ils en tirèrent de tels bénéfices et se multiplièrent à un tel point en Amérique qu’ils en vinrent aux mains avec les Espagnols à Saint-Domingue, tuèrent en 1522 le gouverneur de cette île et assiégèrent le fort. Depuis lors, le gouvernement se résolut à limiter considérablement les asientos. Ils cessèrent en 1580 ; mais les besoins du trésor, la nécessité de rembourser aux Génois les sommes énormes qu’ils avaient fournies pour l’expédition de l’invincible Armada, portèrent Philippe II à conférer de nouveau le privilège de l’asiento. Gomez Reinel en fut gratifié de 1595 à 1600. En cette année, on traita pour neuf ans avec le Portugais Jean-Rodriguez Coutinho, gouverneur d’Angola. Il s’engagea à fournir aux colonies 4,250 esclaves par an et à payer au roi une rente de 162,000 ducats. Sa mort, en 1603, fit passer le contrat à son frère Gonzalez-Vaez Coutinho. Le 26 septembre 1615, nouvelle concession à un autre Portugais, nommé Antonio-Fernandez Delvas, pour huit ans. Il s’obligeait à introduire 3,500 esclaves et à payer 115,000 ducats par an. Un autre Portugais, Manuel-Rodriguez Lamego, traite pour huit autres années en 1623 et s’engage à fournir 3,500 esclaves et à payer 120,000 ducats ; 2,500 esclaves et 95,000 ducats sont les conditions stipulées en 1631, pour huit nouvelles années, avec les Portugais Cristobal-Mendez de Sossa et Melchior Gomez Anjel. La guerre entre la France et l’Espagne et d’autres motifs ignorés interrompirent les asientos jusqu’en 1662. Domingo Fullo et Ambrosio Lomelin en jouissent alors pour neuf ans, pendant lesquels ils doivent fournir 24,500 nègres et payer au roi 2,100,000 piastres. La ferme passe pour cinq ans, en 1674, à Antonio Garcia et dom Sébastien de Siliccas, moyennant 4,000 esclaves et 450,000 piastres. Le contrat est rompu, faute d’exécution, et un autre est conclu en 1676, pour cinq ans avec le consulat de Séville, offrant de payer 1,125,000 piastres et 1,200,000 de prime, puis le 27 janvier 1682 avec don Juan Barrozzo del Pazo et don Nicolas Porcio, de Cadix, pour 1,125,000 piastres. Il est transféré après eux aux Hollandais don Balthazar Coimans puis en 1692 à don Bernardo-Francisco Malin de Guzman, résidant au Venezuela, moyennant 2,125,000 écus d’argent, pour cinq ans ; enfin à la compagnie portugaise de Guinée, de 1696 à 1701. Ce contrat, par lequel la compagnie s’obligeait, en propres termes, à fournir 10,000 tonnes de nègres (diez mil toneladas de negros), donna lieu à tant de scandales et de difficultés qu’une transaction pour le mettre à néant dut intervenir, le 18 juillet 1701, à Lisbonne, entre les rois d’Espagne et de Portugal, Philippe V et dom Pedro II, traitant, comme d’usage, au nom de la sainte Trinité (el nombre del santisima Trinidad). Au traité avec le Portugal succède un traité avec la France. Le 27 août 1701, le roi Très-Catholique et le roi Très-Chrétien stipulent pour dix ans (1702-1712) que le monopole du transport des nègres dans les colonies de l’Amérique appartiendra à la compagnie royale de Guinée, représentée par M. du Casse, chef d’escadron, gouverneur de Saint-Domingue. Elle se charge de l’asiento, c’est-à-dire de l’introduction des esclaves nègres dans les Indes occidentales de l’Amérique appartenant à Sa Majesté Catholique, afin de procurer par ce moyen un « louable, pur, mutuel et réciproque avantage » à Leurs Majestés et à leurs sujets ; elle fournira en dix ans 4,800 « pièces » d’Inde, des deux sexes et de tous âges, tirées d’une partie quelconque de l’Afrique, excepté de Minas et du Cap Vert, attendu que les nègres de ces pays ne sont pas propres pour lesdites Indes, soit 4,800 nègres par an (art. 1er). Pour chaque nègre, la compagnie payera 33 écus, chaque écu valant 3 livres tournois (art. 2). À cause des besoins pressants de la couronne d’Espagne, la compagnie avancera 600,000 livres tournois (art. 3), sur les 4,755,000 qu’elle doit, et en retour il lui est fait remise des droits sur 800 nègres par an. Les navires doivent être français ou espagnols, les équipages de toute nation, mais exclusivement catholiques (art. 8). L’introduction pourra avoir lieu dans tous les ports où il y aura des officiers de l’Espagne. Dans les îles du Vent, Sainte-Marthe, Cumana, Maracaïbo, les noirs ne pourront être vendus au delà de 300 piastres, mais partout ailleurs le plus cher que la compagnie le pourra (art. 9). Sa Majesté Catholique place le traité et les opérations de la compagnie sous la protection de tous les fonctionnaires des possessions espagnoles. Elle engage « sa foy et sa parole royale à ladite compagnie, regardant le traité comme son propre bien et se réservant à elle seule la connaissance de tous les cas qui peuvent survenir dans l’exécution du traité. »

Lorsque ce traité prit fin, l’Angleterre obtint que le monopole lui fût concédé pour trente ans (1713-1734). Ce fut l’objet du traité connu sous le nom de traité de l’Asiento (23 mars 1713). Sa Majesté Britannique se chargeait d’introduire dans l’Amérique espagnole 144,000 pièces d’Inde des deux sexes, de tout âge, soit 4,800 par an, moyennant 33 piastres écus et 1/3 de piastre par tête (art. 1 et 2). Les conditions étaient à peu près les mêmes que celles du traité avec la France. Même obligation d’avancer, à cause des besoins de la couronne, 200,000 piastres escudos (art. 3) moyennant remise annuelle du droit sur 800 nègres (art. 4). Même droit d’importer dans tous les ports du Nord et Buenos-Ayres (art. 7) ; mais les Anglais, plus habiles, obtinrent de plus grands avantages commerciaux. Ils pouvaient introduire plus de 4,800 esclaves par an, pendant les vingt-cinq premières années, en ne payant pour ce supplément que 16 piastres 2/3 (art. 6). Ils recevaient des terrains pour établir leurs factoreries aux lieux d’embarquement et de débarquement (art. 4). Ils firent changer la peine de mort pour contrebande en une peine et une amende (art. 22), se firent accorder quinze jours de répit avant de payer pour les nègres débarqués en état de maladie, et dispense si le nègre mourait dans ce délai (art. 24). Les deux rois étaient intéressés pour moitié, chacun pour un quart, dans le trafic, et le roi d’Espagne dispensé de payer sa part en capital, à condition de servir un intérêt de 8 pour 100, comme dans le précédent traité (art. 28). Enfin, par un article additionnel, pour témoigner à Sa Majesté Britannique « l’envie qu’elle a de lui faire plaisir », Sa Majesté Catholique accordait la faculté d’envoyer annuellement un vaisseau de 500 tonneaux pour commercer avec l’Amérique, à condition de ne vendre les marchandises qu’au temps des foires, pas avant l’arrivée des flottilles et galions, Sa Majesté se réservant d’ailleurs encore dans cette opération un quart des profils et 5 pour 100 sur les trois autres quarts (art. 43). Toutes ces stipulations furent consacrées de nouveau dans le traité de paix préliminaire, signé à Madrid le 27 mars 1713 (art. 9), et par l’article 12 du traité d’Utrecht (13 juillet 1703), le même traité qui fixe la succession d’Espagne et cède à l’Angleterre la possession de Gibraltar et de Minorque. En 1743, l’Angleterre faillit rallumer la guerre en Europe parce que l’Espagne refusa le renouvellement de ce traité.

Pendant plus de deux siècles, l’Europe trouva, pour se ruer sur l’Afrique, cette activité fébrile qui avait précipité l’Espagne sur l’Amérique à la suite de Colomb. Si l’Angleterre eut toujours l’avantage dans cette course frénétique ; si elle importa, dans une seule année (1786), jusqu’à 38,000 esclaves, la France tint toujours le second rang et rétablit en quelque sorte l’équilibre en restant plus longtemps dans la carrière. On trouve, au 2 juillet 1789, un arrêt du conseil d’État qui maintient les immunités en faveur de la traite. Bien plus, ces immunités ne disparurent que par un décret du 27 juillet 1793 qui, en les supprimant, respecta cet odieux trafic lui-même. Voici le texte de ce document, qu’on ne trouve que dans la collection dite du Louvre : « La Convention nationale décrète que toutes les primes accordées jusqu’à présent pour la traite des esclaves sont supprimées. » L’esclavage lui-même fut aboli par un décret du 4 février 1794. On sait le mot du premier consul ; il avait demandé, en prenant le pouvoir, sous quel régime les colonies avaient le plus prospéré ; on lui répondit que c’était sous celui en vigueur au moment où avait éclaté la Révolution : « Alors qu’on le leur applique de nouveau, et au plus vite. » répondit-il. La sénatus-consulte qui rétablit l’esclavage et la loi du 30 mai 1802 (10 prairial an X) qui ouvrit de nouveau le commerce de la traite, avec tous les errements, immunités et primes usités en 1789 furent les conséquences de cette volonté si péremptoirement formulée. Le dernier acte qui figure sur cette matière dans le code de nos colonies est du 9 novembre 1805. C’est une proclamation du gouverneur anglais de Sainte-Lucie, possession récemment enlevée à la France, qui autorise l’importation par tout pavillon, pour relever cette colonie que la guerre avait dépeuplée.

Telle fut la législation de la traite jusqu’au jour où elle passa dans le domaine de la politique internationale. À partir de ce moment, c’est par les actes des chancelleries européennes que se marque sa carrière. Pendant la paix d’Amiens l’importation des nègres à la Martinique s’éleva à 3,558 ; mais l’exportation fut de 1,766 et la réduisit à 2,792. En l’an XII, la guerre interrompit ce commerce ; cependant, en l’an XIII, 730 esclaves furent encore introduits par un négrier venant de la côte d’Afrique. Pendant la Restauration, la traite fut à peu près nulle dans nos colonies, excepté celle de Bourbon ; mais elle acquit une grande extension à Cuba et au Brésil. Des documents authentiques, recueillis par M. de Humboldt, établissent qu’en dix ans, de 1811 à 1820, Cuba reçut plus de 116,000 esclaves. Les seules introductions de nègres au Brésil, par le port de Rio-Janeiro, s’élevèrent :

En 1821, à 20,852 esclaves.
En 1822, à 17,008 esclaves.
En 1823, à 20,610 esclaves.

Ce trafic d’hommes n’a pas duré moins de trois cent vingt ans. Si, pendant la dernière moitié de cette longue existence, il a seulement enlevé d’Afrique autant d’esclaves qu’il le fit en 1786, on peut croire sans exagération qu’il en a tiré 12 millions pour peupler et cultiver les seules colonies à sucre intertropicales. C’est assurément la plus grande émigration au delà des mers qui ait jamais eu lieu. En admettant qu’il y ait eu 150 nègres par cargaison, il n’a pas fallu moins de 80,000 navires ou expéditions pour faire traverser l’Atlantique à cette immense population.

L’honneur de l’abolition de la traite revient, sans contredit, à Wilberforce, Clarkson, Grenville, Sharp et Buxton. « Sept fois, dit M. Augustin Cochin (l’Abolition de l’esclavage), ils proposèrent le bill d’abolition et sept fois il échoua. Lorsqu’ils réussirent enfin, ils avaient à lutter contre les plus puissants personnages de leur pays : lord Eldon, qui affirmait encore en 1807 au Parlement, que « la traite avait été sanctionnée par des parlements où siégeaient les jurisconsultes les plus sages, les théologiens les plus éclairés, les hommes d’État les plus éminents ; » lord Hawkesbury, depuis comte de Liverpool, qui proposait de rayer dans le préambule de la loi les mots « incompatible avec les principes de justice et d’humanité » ; le comte de Westmoreland, qui déclarait que, « lors même qu’il verrait tous les presbytériens et les prélats, les méthodistes et prédicateurs, les jacobins et les assassins réunis en faveur de l’abolition de la traite, il n’en élèverait pas moins sa voix dans le Parlement contre cette mesure. » On a accusé l’Angleterre d’avoir agi par intérêt ; on a même prétendu qu’elle avait pour but de ruiner toutes les colonies à travailleurs africains, y compris les siennes, afin d’assurer le monopole agricole et commercial de ses immenses possessions des Indes. On a prétendu qu’elle avait voulu conquérir, sous prétexte d’humanité, la surveillance de toutes les marines du monde, la haute police des mers. Ses efforts, ses dépenses, les difficultés auxquelles elle s’est exposée, le langage de ses nommes d’État mettent hors de doute le complet désintéressement de l’Angleterre. Il est possible qu’elle ait trouvé son intérêt dans son devoir, et que, parmi ses hommes d’État, les uns aient été plus sensibles à l’utilité, les autres à l’humanité. Sachons féliciter la nation dont les intérêts sont si bien d’accord avec ceux du genre humain, sans chercher toujours de petits motifs aux grandes actions. L’abolition de la traite dans l’univers entier est devenue comme un article de foi de la politique anglaise. Au congrès de Vienne, le 8 février 1815, une déclaration contre la traite fut signée au nom de l’Angleterre, de l’Autriche, de la France, du Portugal, de la Prusse, de la Russie, de l’Espagne et de la Suède. Déjà, l’Angleterre avait obtenu de la France, dans le traité de Paris du 30 mai 1814, un article ayant pour but de condamner cet odieux trafic. En 1818, au congrès d’Aix-la-Chapelle ; en 1822, au congrès de Vérone, les cinq grandes puissances répètent les mêmes déclarations. L’Angleterre employa sans relâche tous les efforts de sa diplomatie, depuis 1814, pour obtenir des diverses puissances des traités particuliers. Elle eut besoin de vingt-sept années pour persuader le Portugal. Par une convention du 21 janvier 1815, suivie d’un traité signé le 22, l’Angleterre avait promis la remise d’une ancienne dette et 300,000 livres sterling pour indemniser les propriétaires des bâtiments portugais capturés avant cette époque par les croiseurs anglais, et le Portugal avait interdit la traite sous pavillon portugais, excepté pour alimenter ses propres possessions. Par une autre convention du 28 juillet 1817, les deux nations s’accordèrent le droit réciproque de recherche, de détention des négriers, de jugement par des commissions mixtes. Le Portugal promit une pénalité spéciale contre les sujets portugais qui se livraient à la traite. En dépit de ces conventions, près de 60,000 esclaves étaient transportés au Brésil en 1822, l’année où ce vaste empire se sépara de la métropole. Notes, remontrances, menaces demeurèrent sans effet jusqu’en décembre 1836.

Un décret défendit alors aux sujets portugais d’opérer la traite ; mais il ne fut exécuté nulle part et ne fut pas même publié dans la capitainerie de Mozambique. La traite continua à se faire sous pavillon portugais, avec la connivence des fonctionnaires portugais, au profit de l’Amérique et de tous les aventuriers des colonies d’Europe. Le 24 août 1839, les deux Chambres anglaises votèrent un bill qui autorisait les croiseurs britanniques à arrêter les négriers portugais et les cours des vice-amirautés à les juger. C’était punir une violation du droit des gens par une autre violation. Vaincu, le Portugal concéda, par un traité du 3 juillet 1842, le droit de visite et de recherche, le jugement par des commissions mixtes, l’obligation de démolir ou de vendre les navires condamnés, l’assimilation de la traite à la piraterie, l’application aux condamnés de la peine inférieure à la peine de mort, la liberté des esclaves saisis. Il fallut user du même procédé, en 1845, avec le Brésil, bien que le traité de 1817 avec le Portugal eût été suivi d’une convention nouvelle du 23 novembre 1828. Plus de 50,000 esclaves étaient encore importés en 1849. Une loi du 17 juillet 1850 réprima enfin cet abominable trafic. Avec l’Espagne, la lutte dura vingt et un ans. Le traité du 28 août 1814, celui du 23 septembre 1817, par lequel l’Angleterre avait promis 400,000 livres sterling, le décret du 19 décembre 1819, la convention additionnelle du 10 décembre 1822 demeurèrent sans effet. À Madrid, le gouvernement prohibait la traite ; à La Havane, ses agents l’encourageaient et la mettaient à profit ; toutes les représentations les plus énergiques furent inutiles jusqu’au 28 juin 1835. À cette date, après la mort du roi Ferdinand, le gouvernement constitutionnel conclut avec l’Angleterre un traité efficace, au moins pour la traite sous pavillon espagnol.

Nous l’avons dit, la France avait promis, au traité de Paris (1814), l’abolition de la traite. Le 29 mars 1815, à son retour de l’Île d’Elbe, Napoléon la déclara abolie. Une ordonnance du 8 janvier 1817 répéta cette interdiction. Cependant le gouvernement de la Restauration refusa d’entrer dans une ligue, proposée aux grandes puissances par l’Angleterre, pour assimiler la traite à la piraterie, retirer aux trafiquants la protection de leur pavillon national, interdire l’accès aux produits des colonies à esclaves. On se borna à prononcer, par une loi du 25 avril 1825, la peine de l’amende, de l’emprisonnement et de la déportation contre les Français engagés dans le commerce de la traite. On connaît les traités du 30 novembre 1831 et du 22 mars 1833, qui concédèrent le droit réciproque de visite, les débats auxquels ils donnèrent lieu, le refus de ratification du traité du 20 novembre 1841 entre les grandes puissances, enfin la convention du 28 mai 1845, dont le terme expira sans qu’elle ait été renouvelée. C’est d’ailleurs à la fin de 1830 que remonte la constatation du dernier fait de traite sous pavillon français.

L’abolition de la traite est un des articles de la constitution des États-Unis ; mais cet article ne devait être mis à exécution qu’en 1807. Toutes les propositions de traité adressées au gouvernement de Washington par l’Angleterre en 1819, 1820, 1823, 1824, 1831, 1834, 1839, 1841, les résolutions du Congrès en 1821 et 1822 n’ont pas abouti à une convention. Les États-Unis se sont toujours refusés au droit de visite ; seulement, par un traité du 9 août 1842, les deux puissances se sont obligées (art. 8) à entretenir séparément en surveillance à la côte d’Afrique une force navale d’au moins 80 canons.

L’Angleterre a traité plus aisément avec la Hollande, la Suède, le Danemark (le premier État qui ait aboli la traite), la Russie, l’Autriche (dont les bâtiments transportaient des noirs de Barbarie en Turquie), la Prusse, le royaume de Naples, la Toscane, la Sardaigne, les villes hanséatiques, Haïti, le Texas, le Mexique, la Colombie, la Nouvelle-Grenade, Venezuela, l’Équateur, l’Uruguay, Buenos-Ayres, le Chili, le Pérou et la Bolivie. Par vingt-trois traités, obtenus en moins de trente ans, l’Angleterre est ainsi parvenue à décider presque toutes les nations civilisées à prendre place parmi les grandes puissances qu’unit entre elles un sentiment commun de commisération et de justice.

L’œuvre eût été incomplète si l’on n’eût agi que sur les acheteurs d’esclaves, sans influer sur les vendeurs. Aux traités avec les grandes puissances de l’Europe ou de l’Amérique succédèrent les traités avec les petites puissances de l’Afrique. On aurait pu être tenté de malmener par la force ces infimes monarques régnant par la brutalité sur des territoires mal définis et sur des sujets misérables ; l’Angleterre crut digne d’elle de les traiter selon le droit des gens. C’est dans toutes les meilleures formes des chancelleries que le gouvernement britannique signa des conventions avec Nama-Comba, chef de Cartabar, en Gambie ; avec Obi-Osai, chef du pays d’Abok, sur les bords du Niger ; avec Eyamba, chef du Calebar, ou avec Radama, roi de Madagascar, en 1841 ; puis, en 1847, avec presque tous les chefs des côtes des Bissagos, de Sierra-Leone, du Congo, du Gabon, de Loango. Pour donner une idée de ces sortes de conventions, nous citerons la plus courte, faite le 7 mars 1841.

« William Simpson Blount, lieutenant commandant le bâtiment à vapeur de Sa Majesté le Pluton, au nom de Sa Majesté la reine d’Angleterre, et le roi Bell, du village Bell, à Camerooms, sont convenus des articles et conditions qui suivent :

« Article 1er. Les deux parties contractantes arrêtent qu’à partir de la date de ce traité cesseront entièrement sur le territoire du roi Bell, et partout où son influence peut s’étendre, la vente et le transport des esclaves ou autres personnes, quelles qu’elles soient, et que ces personnes ne pourront être transférées d’un point quelconque du territoire du roi Bell dans une autre contrée, île ou possession d’aucun prince ou potentat. Le roi Bell fera une proclamation et une loi défendant à ses sujets ou à toute personne dépendant de lui, soit de vendre aucun esclave pour le transporter hors du territoire, soit d’aider ou d’encourager aucune vente de cette espèce, sous peine de punition sévère.

« Art. 2. Le roi Bell s’engage à avertir les croiseurs de Sa Majesté Britannique de l’arrivée de tous les navires négriers qui pourraient entrer dans la rivière.

« Art. 3. En considération de cette concession du roi Bell, et pour remédier à la perte de revenus qu’elle doit lui occasionner, le lieutenant W.-S. Blount s’oblige, au nom de Sa Majesté Britannique, à remettre chaque année, pendant cinq ans, audit roi Bell, les articles suivants : soixante fusils, cent pièces de drap, deux barils de poudre, deux puncheons de rhum, un habit écarlate avec épaulettes, une épée. Lesdits cadeaux seront délivrés en échange d’un certificat, signé du roi Bell, constatant que les conditions ci-dessus ont été mises à exécution. »

Dans d’autres traités, des conditions plus sérieuses ont été introduites. Ainsi, dans le traité avec les chefs de Malimba (1847), il est convenu que nulle maison, magasin, baracoon quelconque ne peut être élevé pour la traite ; que les chefs doivent détruire celles qui seraient ou sont déjà construites, et que, s’ils ne le font pas, les Anglais peuvent les démolir eux-mêmes, de même que saisir les embarcations et prouver d’une manière sérieuse aux chefs de Malimba le déplaisir de la reine d’Angleterre. Il est convenu encore que les nègres déjà détenus pour être exportés seront remis aux Anglais, pour être conduits dans leurs colonies et libérés. Enfin, il est accordé aux Anglais une entière liberté de commerce. Des conventions furent signées en 1822, en 1839, puis renouvelées en 1845, avec un roi plus puissant, l’iman de Mascate, qui domine une grande partie de la cote orientale d’Afrique depuis le golfe Persique jusqu’aux possessions portugaises, y compris les îles de Zanzibar, Pemba, Monfia. Ses États sont le théâtre de la traite odieuse faite par les Arabes. Des nègres chargés de denrées sont conduits à la côte, puis vendus, par-dessus le marché avec leur fardeau. L’iman tire de ce commerce plus de 20,000 livres sterling par an. On vendait en 1844, au dire du capitaine Hammerton : un enfant, de 30 à 80 francs ; un homme, de 80 à 160 francs ; une femme, jusqu’à 190 francs, sauf à la revendre, dans le plus triste état, sur les côtes d’Arabie ou de Perse, de 15 à 30 francs. On jetait aux chiens les esclaves morts.

L’iman Seïd-Saïd promit de renoncer à la traite et de l’interdire à ses sujets. Un consul fut établi à Zanzibar, et les croiseurs anglais furent autorisés à saisir les navires et les sujets de Sa Hautesse ; mais la traite ne continua pas moins à y être pratiquée. Un certain nombre de traités furent conclus avec des cheiks arabes sur la côte occidentale du golfe Persique. La France, depuis la convention de 1845, fut associée à plusieurs de ces traités et en conclut directement quelques autres. Un comité d’enquête, nommé en 1853 par la Chambre des communes, constata qu’il y avait à cette époque, entre la Grande-Bretagne et les autres puissances civilisées, vingt-six traités en vigueur pour la suppression de la traite et soixante-cinq traités conclus avec les chefs africains. On a vu les stipulations contenues dans ces derniers. Parmi les premiers, dix traités ont établi le droit réciproque de visite et la juridiction de commissions mixtes ; quatorze, le droit de visite, mais avec la juridiction des tribunaux nationaux ; deux (avec la France et les États-Unis), sans garantir le droit de visite, contiennent l’obligation réciproque d’entretenir des escadres sur la côte d’Afrique. L’Angleterre n’a rien négligé pour assurer le succès de tous ces moyens compliqués. Pendant que le gouvernement établissait des croisières, des consulats, des commissions, des correspondances qui remplissent chaque année deux volumes in-folio, soumises aux deux Chambres, l’opinion abolitionniste organisait des missions, des voyages, des enquêtes, des sociétés, des meetings, des journaux.

En France, il se produisit une agitation moindre, notable cependant, et le gouvernement, avec le zèle le plus sincère, exécuta les traités, demanda des crédits, négocia des conventions, multiplia les instructions et, enfin, ordonna la traduction de tous les documents dans la Revue coloniale, dont les trente-trois volumes (1843-1857) contiennent l’histoire, jour par jour, de cet immense effort de deux grandes nations au service des membres les plus infimes de l’espèce humaine. Quel a été, en résumé, le résultat de tant de peine et de persévérance ?

En Angleterre, le premier organe de l’opinion publique, le Times, a pris à tâche de nier les effets de la politique suivie pour la répression de la traite. Nous avons dépensé, a-t-il souvent répété, des sommes énormes, 400 ou 500 millions, pour arriver à quoi ? À faire payer plus cher le sucre et les nègres. La Société pour l’abolition de l’esclavage, contrairement à l’opinion de ses fondateurs les plus anciens et les plus illustres, a vivement attaqué le système des croisières, et quelques membres du Parlement ont, par des motions successives, demandé leur suppression, en prétendant qu’on dépensait 20 millions par an pour compromettre la vie des marins et rendre plus cruel le sort des noirs, à cause de l’embarras de les cacher et de les transporter clandestinement. Enfin, on sait les susceptibilités et les violents débats auxquels a donné lieu le droit de visite. Que l’abolition de la traite ait aggravé les souffrances des noirs, c’est ce qu’on admettra difficilement. Avant la traite, a-t-on dit, les rois indigènes sacrifiaient leurs prisonniers ; grâce à la traite, ils les vendaient à de charitables Européens ; depuis l’abolition de la traite, ils sont de nouveau conduits à les tuer. Les négriers, obligés de les cacher, les rendent plus malheureux.

Voilà ce qu’on affirme ; mais comment le prouver ? Comment savoir au juste ce que les petits souverains font de leurs prisonniers ? Comment, pour diminuer le crime douteux de ces souverains, tolérer le crime certain des négriers ? Si ceux-ci sont obligés de se cacher, c’est que la croisière est efficace. On assure qu’ils traitent les noirs plus mal qu’avant ; cela est impossible. Il faut lire les horribles descriptions des témoins de l’ancienne traite et notamment les rapports anglais qui nous dépeignent, par de si fortes expressions, les souffrances de ces malheureux, placés comme des coins (wedged them in), serrés comme des cuillers (spoonwise), en langage technique, pressés comme des figues et des raisins (stowed in bulk like figs or raisin).

Avec l’esclavage, la traite a disparu aujourd’hui de toutes les nations civilisées. Mais jusqu’ici les pays musulmans ont conservé l’esclavage, et il en est résulté que la traite existe encore entre ces pays et l’Afrique, restée le foyer de ce trafic. Les musulmans ne peuvent, d’après le Coran, réduire leurs coreligionnaires en esclavage ; mais ils trouvent tout naturel de prendre pour esclaves les idolâtres. Dans ce but, on enlève les nègres des tribus africaines, auxquelles on fait une guerre exterminatrice et les razzias se répètent presque chaque jour. Trois grandes régions de chasse à l’esclave existent en Afrique. La plus ancienne, celle qu’alimentait autrefois la cote de Guinée, entoure encore aujourd’hui le lac Tchad. Là, c’est le nègre cupide qui tend ses pièges au nègre imbécile. Dans la haute vallée du Nil s’ouvre un nouveau champ de rapine et de meurtre. À la honte de l’Europe, ce sont les aventuriers sortis de son sein qui y dirigent les captures. Le troisième théâtre de la traite africaine s’étend le long de l’océan Indien, un peu en arrière du littoral, à l’entrée de la mer Rouge, jusqu’à la hauteur de Madagascar. Dans ces parages domine l’Arabe seul. Les routes suivies par les convois de chair humaine sont connues : ceux du Soudan viennent presque affleurer la limite méridionale de nos possessions algériennes et, par l’oasis du Fezzan, pénètrent en contrebande sur la terre d’Égypte ; ceux de la Nigritie s’y glissent de même pour arriver au port de Massoua, où ont lieu les embarquements pour l’Arabie. Zanzibar est le lieu d’embarquement des autres. C’est là que se tient le grand marché de la chair humaine. Dans ces dernières années, l’attention publique a été de nouveau attirée sur la traite des nègres par les voyageurs qui ont visité le centre et l’orient de l’Afrique, notamment par Livingstone. Ils ont rappelé que, dans le Soudan, les chasseurs d’hommes troquent un nègre contre un âne, contre un mauvais fusil, contre quelques pièces de cotonnade ou quelques kilogrammes de cuivre. Le prix moyen d’un enfant mâle est de 40 fr. Les jeunes filles s’achètent le double ou plus, selon leur beauté ; les femmes adultes beaucoup moins, les vieilles presque rien. En 1871, les esclaves ordinaires se cotaient 60 francs et se revendaient à Khartoum, lieu d’entrepôt de la traite arabe, 500 francs la paire, ce qui constituait pour les marchands un beau bénéfice. Du Niger au Nil, du Nil au Zambie, le bétail humain est à vil prix et les trafiquants qui le conduisent à Zanzibar le revendent un prix élevé. Il est peu de peuplades nègres qui ne fassent le trafic d’esclaves, soit pour leur propre compte, soit pour en fournir aux peuplades voisines ou aux trafiquants de la côte. Le gouvernement anglais, sous la pression de l’opinion publique, a essayé dans la mesure du possible de remédier à cet état de choses. Impuissant dans le continent africain à obtenir un résultat quelconque, il a entrepris d’agir sur la côte orientale de l’Afrique. En 1873, sir Bartle Frère a été envoyé à Mascate et à Makullah dans le but d’y conclure des traités pour l’abolition absolue de l’esclavage. Cette même année, le gouvernement britannique a signé avec le sultan de Zanzibar un traité stipulant la suppression de la traite. Bien que cette stipulation soit en opposition ouverte avec les intérêts et les sentiments de ses sujets les plus influents, le sultan a pris des mesures pour supprimer le trafic dans l’intérieur de ses États et d’une partie du continent africain, et des navires anglais ont été envoyés sur la côte de Zanzibar pour y établir une croisière d’inspection. Enfin, en 1874, une expédition plus ou moins sérieuse a été envoyée dans le Darfour par le vice-roi d’Égypte pour soumettre les habitants et les forcer d’abolir la traite.

En résumé, la traite, qui était jadis l’apanage des rois, est considérée aujourd’hui comme un crime ; toutes les nations de l’Europe sans exception en ont, par des traités, promis la suppression à leurs alliés, interdit par des lois la pratique à leurs sujets ; cet odieux trafic a été traqué, circonscrit, puni, diminué, à une époque où l’immense accroissement de la consommation des produits coloniaux l’eût infailliblement augmenté. Les colonies ont-elles été ruinées ? Leur production a-t-elle baissé ? Nullement. L’esclave est seulement devenu plus cher et, par suite, il a été mieux traité ; le travail servile augmentant de prix, l’émancipation a rencontré moins d’obstacles. On ne peut nier que ce sont là des résultats dont ceux qui ont travaillé à l’abolition de la traite ont le droit de s’applaudir.

— Fin. On appelait traites, dans les anciennes ordonnances, les droits que l’on prélevait sur les marchandises, à l’entrée ou à la sortie d’une province ou d’un royaume ; elles se nommaient, dans le latin du moyen âge, tributum transitorium ou tributum transituræ ou simplement transitura (impôt payé pour le passage). Quelquefois on ajoutait au mot traites celui de foraines, pour indiquer qu’elles venaient du dehors. En 1551, Henri II fixa les droits de traites à deux, savoir le domaine forain et la traite foraine ; le premier était de 8 deniers pour livre sur toutes les marchandises, et la seconde 12 deniers pour livre. En 1563, Charles IX établit la douane de Lyon pour les draps d’or et d’argent et les soies qui passaient d’Italie en France. Deux ans après (1565), le bureau de la douane de Paris fut établi. En 1581, Henri III institua des bureaux de douane et de traites dans une partie des villes du royaume. Tous ces droits d’entrée et de sortie augmentaient considérablement le prix des marchandises et des denrées et entravaient le commerce. Aussi Colbert s’efforça-t-il d’établir un tarif uniforme en 1664. En 1720, les traites foraines avaient deux administrations différentes, l’une comprenant les droits levés sur toutes les marchandises importées ou exportées, l’autre les droits d’entrée et de sortie sur toutes les marchandises et denrées exportées des provinces renfermées dans toute l’étendue de la ferme générale, pour être transportées dans les provinces du royaume réputées étrangères, ou importées de celles-ci dans l’étendue de la ferme générale. Les provinces comprises dans la ferme générale étaient, en 1720, la Normandie, la Picardie, le Soissonnais, la Champagne, la Bourgogne, la Bresse et le Bugey, le Bourbonnais, le Berry, le Poitou, le pays d’Aunis, l’Anjou et le Maine. Il y avait une ligne de bureaux sur la frontière de toutes ces provinces ; on y percevait les droits d’entrée et de sortie fixés par le tarif des cinq grosses fermes rédigé en 1664. Ces traites ont été abolies, ainsi que tant d’autres abus, par la Révolution.

— Banque. La lettre de change s’appelle traite lorsqu’elle est tirée par un créancier sur son débiteur et donnée en payement à un tiers ; tandis qu’on l’appelle remise lorsqu’elle est fournie par celui qui la souscrit à un individu qui est déjà son créancier. D’après les décisions ministérielles du 8 ventôse an IX et du 18 juin 1816, le propriétaire ou consignataire de marchandises en douane peut, s’il est d’une solvabilité notoire, être admis à les faire enlever après la visite, en remettant des traites suffisamment acceptées et endossées, pour être acquittées dans le délai de quatre mois à partir du jour de la vérification des marchandises. Dans le cas de non-payement de ces traites, les agents chargés d’en opérer le recouvrement doivent les faire protester. Le protêt est présenté au trésorier payeur général du département dans lequel se trouve le chef-lieu de la direction des douanes où l’effet protesté a été souscrit. Le trésorier payeur général rembourse l’effet, sauf son recours sur le receveur des douanes chargé d’exercer les poursuites contre le souscripteur des traites. D’après l’article 53 de la loi du 24 avril 1806, ceux qui enlèvent des sels des lieux de fabrication peuvent également, lorsque la déclaration donne ouverture à un droit de plus de 600 francs, être admis à remettre des traites payables à trois, six ou neuf mois. V. LETTRE DE CHANGE.