Grenade (Dousseau)/1

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Imprimerie Lepelletier (p. 3-65).

GRENADE

PREMIÈRE PARTIE

À TRAVERS LE PAYS

Visiter, étudier pour la première fois un pays très curieux, c’est fort bien ! y retourner, plusieurs fois même, s’il est possible, c’est encore mieux ; car à l’intérêt du nouveau voyage se joignent les souvenirs des visites précédentes ; — on a, d’abord, fait connaissance avec des sites, des êtres intéressants, et savouré l’attrait de la nouveauté ; puis on retrouve des amis ; et si on ne doit plus les revoir… puisque, comme on l’a dit :

Il est un âge dans la vie
Où tout voyage doit finir……

Alors au plaisir de la contemplation, à celui de la souvenance, se joint la mélancolique émotion des derniers adieux, et c’est un charme de plus… et c’était bien un voyage d’adieux que faisait le vieux touriste lorsqu’en 1866 il reparcourait l’Espagne.

Temps et touriste voyagent de compagnie ; mais tandis que l’un, s’il a le feu sacré, la rage de voir et de savoir, fait de nombreux zigzags et de fréquentes stations, va par monts et par vaux, examinant, furetant partout, tant pour le plaisir présent qu’en vue d’un avenir dont il ne jouira peut-être pas, — l’autre va droit son chemin, et il emporte avec lui la jeunesse aventureuse, la vigueur du corps, l’ardeur de l’âme du pauvre touriste qui, d’infatigable qu’il était, devient lent, lourd, souffreteux, grincheux, et incapable de voyager désormais ailleurs que dans ses souvenirs ! en attendant une si déplorable décadence, revisitons l’Espagne.

L’Espagne ! Que de poésie dans ce seul mot ! — Dans cette Europe encore fortement teintée d’Afrique, que de beautés, de singularités naturelles et que le temps respecte, et combien d’autres curiosités insignes, œuvres de l’art humain, et que le temps outrage ! Combien de reliques de siècles écoulés et de civilisations éteintes, de monuments abattus, de débris épars ! Tristes témoignages du choc des nationalités et des religions diverses, des efforts de l’ambition et des fureurs de la guerre ! Dans cet étrange pays, le touriste rentre la tête pleine et de légendes entre lesquelles l’entente cordiale ne règne guère ! C’est une confusion de casques, turbans, lances et cimeterres, preux chevaliers et brigands endiablés, femmes adorables, tendres caresses et grands coups de poignard, castagnettes, guitares et sérénades ; trabucos, navajas et autres bijoux ; et la croix et le croissant, les arrières et les toréadors, les cathédrales et les alcazars — La cervelle du touriste, qui déjà connait bien le pays, est comme un bazar rempli des objets les plus bizarres et les plus disparates.

Avec tout ce bagage, le 1er mai 1866 le touriste traverse la Bidassoa à son embouchure, rentre en Espagne au point où il en était sorti dans un voyage précédent et quitte le chemin de fer à la station d’Irun ; c’est que la route de la côte est une promenade très pittoresque, bien qu’assez rude ; donc sac au dos, et vive la liberté… de l’allure !… San Sebastiano, avec son roc qui en fait un petit Gibraltar, Bilbao, port de rivière, et ses collines ; Santander avec sa petite baie, sont trois havres intéressants, qui, à eux trois, sont loin d’égaler le havre normand ! entre eux, côtes hautes et rocheuses, falaises, vallons et ravins. — De Santander, vue de l’énorme groupe des monts asturiens, toujours plus ou moins neigés ; c’est là que le vaillant Pélage… nous y reviendrons.

Grenade est notre objectif ; il nous faut donc traverser l’Espagne du nord au sud, et de part en part ; et comme nous voulons dire un mot des principales localités sur la route, allons vite et soyons bref. — Repris le ferro-carril (chemin de fer), traversé la chaîne des Pyrénées au col de Reynosa, entré dans le bassin du Douro ; plateaux sablonneux, pierreux ; — longé Palencia, — Valladolid, la nouvelle capitale de la vieille Castille, — ici mourut Christophe Colomb, et ici recommencent nos recherches pour la biographie du grand navigateur, que notre Société a publiée en 1869-70. — Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon contractèrent ici cette union qui causa la ruine des Maures de l’Espagne ; à Médina del Campo, où mourut Isabelle, le plateau qui nous porte, déjà très élevé, se soulève davantage pour former la vaste et très rocheuse chaîne de la Guadarrama ; à Avila la pente devient très raide et nous franchissons, à la Cañada, le col qui a 1300 mètres d’élévation ; c’est en Europe, le plus élevé des cols franchis à la vapeur ; au revers voici l’Escurial (el Escorial) à 910 mètres d’élévation, vaste masse mi-palais mi-couvent, sombre et sévère d’aspect comme le terrible Philippe II, qui la fit construire en souvenir de la bataille de St-Quentin, où nous fûmes battus le 10 Août 1557 ; puis nous descendons rapidement jusqu’au Manzanarès, la plus commode des rivières pour la parcourir à pied et à cheval, comme on dit, et de la station nous montons à Madrid.

Madrid et Tolède, la nouvelle capitale et l’ancienne, l’une se déployant horizontalement sur son plateau sablonneux à 697 mètres au-dessus de la mer, l’autre parsemant de ses débris un âpre rocher à demi entouré par le Tage ; à Tolède 18,000 habitants et jadis 200,000 ; une magnifique cathédrale, les ruines d’un alcazar sur lesquelles Charles-Quint a fait construire un palais, en ruines comme son prédécesseur, — bien d’autres débris encore, mais si délabrés ! l’antique pont d’Alcantara ; la très curieuse église de St-Jean-des-Rois, etc., rien de tel à Madrid, mais, 300,000 habitants, un splendide musée, et un palais royal très bien situé, et qui serait superbe s’il était terminé. — Remarquons que Tolède est au centre même de la péninsule ; Madrid est à 20 lieues au nord-est.

Trois lignes ferrées aboutissent à Madrid ; nous reprenons celle du sud, car il serait trop ennuyeux de parcourir à pied les tristes plaines de la nouvelle Castille, où nous entrons en traversant la chaîne monotone des monts de Tolède ; une autre chaîne se dresse devant nous, plus haute, plus accidentée, c’est la Sierra Morena, la brune, naguère encore, comme de temps immémorial, la belle patrie d’une horde de gitanos et autres chenapans romantiques, mais très malsains ; — cette aimable population a perdu de sa spécialité, et c’est heureux pour nous ; car grâce à une circonstance imprévue, c’est à pied que nous parcourerons ces défilés dangereux, des pluies diluviennes ayant renversé les viaducs et bouleversé le chemin de fer depuis Venta de Cardenas, au pied de la Morena, jusqu’à Andujar, au bord du Guadalquivir. — Il y avait bien la diligence, mais point de place, ce dont se consola facilement le touriste, léger de bagage et marcheur jeune et gaillard depuis très longtemps !

Nous voilà sans encombre dans l’Andalousie ; mais quelle belle occasion perdue ! — n’avoir pas rencontré un seul pauvre petit brigand ! rien que quelques carabiniers prosaïques. — D’Andujar, le chemin de fer nous mène à Cordoue, la Cordoba antique, la Cordova espagnole, prise par les Goths en 572, par les maures en 711, et de 756 à 1031 capitale du califat d’occident, puis d’un royaume particulier ; enfin reprise en 1236 par Ferdinand III et presque détruite alors. Cordoue, longtemps riche, puissante, fastueuse, n’a plus que 42,000 habitants au lieu des 300,000 qu’elle comptait ; son spacieux et somptueux alcazar devint au xvie siècle le palais de l’inquisition, maintenant il loge un haras, et la triste ville est peut-être le plus maussade labyrinthe de toute l’Espagne : très belle position d’ailleurs, rive droite du Guadalquivir, au pied de riantes collines et au centre de l’Andalousie.

Cordoue a conservé ses vieux murs et ses tours vénérables, et surtout la mosquée fondée par le premier Abdérame, et devenue une cathédrale merveilleuse où 850 colonnes de jaspe, de porphyre et de marbre, forment 19 nefs, ici nous stationnons, remarquant mille détails mauresques, si curieux ! — la cour aux fontaines, orangers et palmiers, sur un côté de laquelle s’élève, isolé, le beau clocher de la cathédrale. — la petite église, si riche et si ornée, construite au milieu de la mosquée qu’elle a déplorablement mutilée ! — quel dommage que l’admirable monument arabe n’ait pas été conservé intact ! et qu’il ne reste plus rien du merveilleux palais, le Medina-al Zarah qu’Abdérame III avait fait construire en 940 près de Cordoue, pour la belle Zarah, sa sultane favorite ! — la mosquée de Cordoue est une des trois merveilles arabes que nous venons admirer ; Séville va nous en offrir une autre, et la troisième nous attend à Grenade.

Séville, illustre de plus d’une manière et depuis longtemps ! — Illustrée surtout par notre ami Figaro, le célèbre barbier (barbero) fils de Beaumarchais et de Rossini, Séville a moins souffert du temps et de la guerre que Cordoue ; elle a 110,000 habitants et c’est encore en population la troisième des villes espagnoles (Madrid et Barcelonne sont les deux premières) Séville, sur la rive gauche du Guadalquivir, avec son grand faubourg de Triana sur l’autre rive, son énorme cathédrale, une des plus grandes et des plus curieuses églises de l’Europe, y compris son fameux clocher, la Giralda ; un magnifique Alcazar, moins grand, moins bien situé que celui de Grenade, mais si bien restauré, entretenu, qu’il semble radieux de jeunesse ! La Tour del Oro, la ceinture des vieux murs et leurs tours, et tant d’autres reliques des siècles passés ! Séville est toujours la digne capitale de l’Andalousie, la reine du Guadalquivir. — Andalousie, Guadalquivir, Alcazars, Mosquées ! ces mots semblent exhaler un parfum dont s’enivre l’âme poétique ! C’est comme une ivresse fascinante, pendant laquelle on se trouve transporté en plein islamisme espagnol, — mais Séville, situé au, milieu d’une vaste plaine et en terrain tout plat, n’a rien de pittoresque et ne jouit d’aucune perspective ; comme site et entourage, c’est de la prose vulgaire, tandis qu’à Grenade… aussi quand les sévillans s’écrient :

Quien no ha visto a Sevilla
No ha visto a maravilla.

Qui Séville n’a vu n’a pas vu de merveilles !

Les Grenadins ne manquent pas de répliquer :

Quien no ha visto a Grenada
No ha visto a nada.

On n’a rien vu si l’on n’a vu Grenade.

Nous en jugerons bientôt. Remarquons que Séville est port de fleuve comme Bordeaux, que Bordeaux est la capitale de l’Andalousie française, que Garonne et Guadalquivir sont cousins, et que chez l’un comme chez l’autre on cultive la gasconnade avec un succès digne des plus grande éloges.

Xérès, 35.000 habitants, est un autre Bordeaux pour le commerce des vins, seulement les vins ne se ressemblant pas comme les gasconnades, le Xérès du Midi ayant le tempérament plus méridional que celui du Nord. Donc ici, vignobles et celliers où se prépare le fumeux Cherry anglais, quand il ne se fabrique pas à Londres — au pied des riches collines de Xérès, si chères à Bacchus, au bord du Guadalette, remarquons la plaine où se répandit tant de sang lorsqu’en 711 les arabes de Tarick mirent en déroute les chrétiens de Roderic… nous en reparlerons.

Coquettement s’épanouit sur sa presqu’île la jolie ville de Cadix, la plus jolie ville de l’Espagne, la plus propre, la plus gaie, du moins, et peut-être la plus ancienne. 54,000 habitants, pas de port proprement dit, mais rade sûre et commode, et marine active ; remarquez les nombreux miradores (belvédères) d’où les négociants se plaisent à voir de haut et de loin leurs flottantes richesses ; et l’Alameda, qui fait tout le tour du rocher, promenade délicieuse lorsque les brises du soir ont enfin dompté les fureurs d’un soleil plus ardent ici que partout ailleurs en Espagne. — Alors les pimpantes et gracieuses gaditanes viennent décorer la promenade des murs ; elles sont charmantes, le savent très bien et ne s’offensent point qu’on les trouve telles, — Cadix est une pierre brute recouverte d’une pierre précieuse ; une oasis cher aux nymphes de la mer, mais comme Venise, privée de toute nymphe bocagère.

Tout autre chose est ce formidable roc de Gibraltar et son entourage d’engins de destruction ; dangereux repaire d’un Rodomont étranger, passé maître en contrebande et en mauvaises raisons ; enfin hôte fort incommode, que l’Espagne souffre chez elle parce que ses moyens ne lui permettent pas de l’en chasser. — Nous avons fait ample connaissance avec ce personnage, et nous avons pris la liberté grande d’en parler sans cérémonie dans le volume publié par notre Société en 1868 — avant de quitter le détroit faussement dit de Gibraltar, répétons qu’en conscience on devrait dire de Tarifa — car à Tarifa se trouve l’Estrecho, l’étroitesse, et cette moindre distance entre l’Europe et l’Afrique est précisément cette de notre église Notre Dame à la nouvelle Notre-Dame des-Flots, de Trouville, 3 lieues et demie kilométriques ; — autre remarque : c’est au bord de cette petite rivière, le Salado, dont nous avons vu l’embouchure un peu avant de passer devant Tarifa, qu’eut lieu, en 1340, la sanglante bataille où furent défaits les Maures mérinides ; événement qui ne laissa plus subsister de puissance mauresque en Espagne que le royaume de Grenade, nécessairement condamné à succomber à son tour.

Reprenant la mer et quittant l’Océan pour la Méditerranée nous longeons la côte de ce que les Grenadins nommaient leur royaume du soleil ; terre ensoleillée, en effet ! car d’une haute chaîne de monts qui s’étend de Tarifa au cap de Gata, avec un déploiement de 90 lieues, descendent jusqu’à la mer des pentes très raides et qui plongent droit au midi ; c’est une succession d’âpres collines, de monts pelés, brûlés, rocheux, de ravins et de vallons, au pied desquels se trouvent Estepoña, Marbella, Malaga, Velez-Malaga, Almuñecar (sur le méridien de Grenade), Motril, Adra et Alméria ; — vers l’Est et au point le plus septentrional de la courbe extérieure du croissant que forme cette chaîne et la côte, se soulève l’énorme Névada qui domine de beaucoup sur tout le reste ; elle est si haute que du large on l’aperçoit pendant tout le parcours jusqu’à Alméria ; nous n’allons pas jusque là ; nous prenons terre à Malaga, le plus grand port de mer de l’Espagne après Barcelonne, et la plus grande ville de l’Espagne méridionale après Séville : 80,000 habitants, situation très heureuse, au débouché de la vallée du Guadalmédina, au pied d’une colline qui porte le fort du Gibralfaro, et à mi-hauteur, les ruines considérables, mais presque informes, de l’Alcazaba ou citadelle, dont la première construction remonte aux Phéniciens.

Stationnons au Gibralfaro, d’où la vue est si vaste et si belle ! très agréable encore est la vue des gracieuses malagueñas, odalisques aux petits pieds et aux grands yeux, se promenant par une fraîche soirée à l’Alameda, spacieuse promenade bien ombragée et ornée de statues, et de deux fontaines jaillissantes, l’une desquelles offre un groupe de petits personnages qui devraient bien aller exécuter leurs jets d’eau dans un water-closet, tant leur réalisme est immodeste ! — La cathédrale est digne de remarque aussi, bien que ne datant que de la Renaissance, comme le prouve son style. Malaga, depuis si longtemps riche, heureuse et prospère, et renommée surtout pour ses vins et ses raisins, se rendit aux Maures presque sans coup férir, après la désastreuse bataille de Xérès, mais opposa une résistance héroïque aux efforts de Ferdinand d’Aragon ; prise en 1487, cruellement dépeuplée, dévastée, ce fut pour les Maures de Grenade le présage de leur ruine prochaine, et l’avis de ne pas prolonger outre mesure une résistance aussi désastreuse qu’inutile.

Le ferro-caril qui de Santander, passant par Madrid, nous a amené à Cadix, bifurque à Cordoue et sa ligne du midi aboutit à Malaga en passant à Antequera ; de ce point un embranchement ira bientôt jusqu’à Grenade ; — on peut encore, quittant la voie ferrée à Andujar, se rendre directement à Grenade par Jaën, par une grande route carossable et très pittoresque ; nous avons préféré faire le grand tour et nous avons eu grandement raison. — À Grenade maintenant, et nous sommes impatient d’y arriver ! Un service de diligences quotidien mène d’une ville à l’autre ; la route se divise en deux moitiés bien différentes, la montagne et la plaine, et les heures de départ sont fixées de manière qu’en été, le trajet montueux se fasse de nuit, à cause de la chaleur, et de la fatigue des bêtes de trait ; — la montagne est un vaste prolongement des Alpuxarres, très haut, tortueux, raviné, accidenté, sauvage, et dont le promontoire du Gibralfaro est la dernière proéminence de ce côté ; — la plaine, c’est la Vega, cette partie si luxuriante du bassin du Génil, à un bout de laquelle se trouve Loja, et à l’autre Grenade. — Notre lourd véhicule traîné par quatre mules : Rita, Pépita, Mariquita et Dolorès, et autant de chevaux, avec le mayoral (conducteur) et le zagal (postillon) qui voltige autour de ses bêtes, leur parle, les stimule incessamment, et une quinzaine de voyageurs, plus une masse de bibelots… monte lentement et en serpentant beaucoup. — Malaga et tout son fertile bassin, sa baie et ses côtes reparaissent plusieurs fois. — L’horizon s’agrandit et s’assombrit ; la fraîcheur et la nuit succèdent à un jour brûlant, — la montagne est de plus en plus sauvage, enfin à force de monter, de descendre et de pirouetter, on se trouve dans la vallée du Génil à Loja.

Lorsqu’on n’a vu une ville que de nuit et en passant, on n’en saurait guère parler de visu, nous savons du moins que Loja, jadis place très forte et dont nous aurons occasion de reparler plus d’une fois, est une ville de 44,800 habitants, assez mal bâtie, s’appuyant à une montagne, rive gauche du Génil, au point où les deux chaînes qui enclosent la Véga se rapprochent et ne laissent entr’elles que l’espace indispensable au cours de la rivière. — Loja est donc la clé, la gardienne de la Véga… nous verrons que son rôle lui a coûté cher !… Nous entrons dans la riche et verdoyante Vega, et le terrain s’aplanit, — les étoiles pâlissent et l’aurore commence à poindre, — la silhouette des Monts voisins se dessine vaguement ; devant nous, au-delà de cette si longue plaine brumeuse, et qu’on prendrait volontiers pour un lac, diverses crêtes âpres s’aperçoivent ; en arrière et sur la droite, nous voyons surgir, flotter sur la brume une vaste masse aux nuances azurées, violacées, capricieuses, fugitives ; puis on dirait une lame monstrueuse et hérissée d’écumes… c’est l’énorme Nevada, c’est le Mont Blanc de Grenade… Tout-à-coup les premiers rayons du soleil frappent ces crêtes argentées ; les neiges s’illuminent de teintes radieuses, dorées, qui resplendissent dans l’éther ; le Titan semble grandir, se rapprocher rapidement de nous, s’enflammer, flamboyer ! et nos regards émerveillés ne peuvent se détacher d’une telle magnificence…

GRENADE. — topographie et panorama.

Loja est à 51 kilomètres de Grenade ; Santa-Fé, que nous traversons, n’en est qu’à 10 kilomètres, Santa-Fé, la ville improvisée, la seule en Espagne où les Maures ne soient point entrés… nous en reparlerons — nous sommes au centre d’un amphithéâtre de Monts, sur lesquels la Nevada domine comme un phare sublime la brume qui flottait sur la plaine s’est dissipée… la silhouette de Grenade se dessine enfin nettement ; elle se déploie, se soulève, et les tours de l’Alcazaba la surmontent… Vive Grenade ! nous y voila !… Le touriste saute à terre et avance à petits pas. — Voilà bien la reine des Grenades… et pourquoi on l’a comparée à une grenade entr’ouverte, de là son nom : la Granada ! c’est bien cela !

Grenade s’étend dans la plaine et s’élève en amphithéâtre contre et sur deux collines séparées par le vallon du Darro… à cela près de ce vallon, c’est exactement la forme et la position du Havre ; — c’est d’ailleurs même superficie peuplée, même distribution de quartiers ; nous pouvons donc comparer entre elles les deux villes. — Pour rendre la ressemblance plus frappante, faisons déboucher un vallon, celui de Sainte-Adresse, par exemple, dans le prolongement de la rue de Paris, rien de plus facile ! Alors nous aurons deux collines au lieu de celle d’Ingouville ; — la colline de droite, en regardant du bas de la ville, c’est le plateau de l’Alhambra, qui se présente de biais et s’étend des terrains Boulogne jusque la Mare-aux-Clercs ; — sur la colline à gauche, de la Côte Morisse au fort de Ste-Adresse, s’étend la partie haute du quartier de l’Albaysin ; et derrière, c’est-à-dire au-dessus de l’église de Sanvic se soulève une haute croupe mamelonnée, la Cuesta de San Miguel ; où nous allons monter, car c’est le point culminant des environs immédiats de Grenade et le centre d’un panorama merveilleux d’intérêt, d’étendue, de variété.

Ces rapprochements sont assez exacts et ils donnent une idée de l’assiette de la ville ; nous pourrions continuer le parallèle sans tomber dans la fantaisie ; mais aussi que de différences ! — dans l’orientation, d’abord, la côte du Havre regardant le Midi, et celle de Grenade, l’Ouest. La différence de latitude suffit d’ailleurs pour en nécessiter bien d’autres ; la latitude de Grenade est de 37° 20 et celle du Havre, 49° 30 soit un écart de 12 degrés. Remarquons que le parallèle de Grenade est aussi celui de Girgenti, en Sicile, et celui de Bizerte (Tunis), le point le plus septentrional de l’Afrique ; pour la longitude, c’est le 6me degré ouest de Paris, précisément le même que celui de Santander et de Madrid ; le Havre est au bord de la mer, tandis que Grenade, comme Madrid, est à 2,000 pieds au-dessus. Enfin au Havre, la mer et pas de montagnes, et le contraire à Grenade — mais laissons le Havre à sa place et tel qu’il est ; sa côte n’a rien à envier à celle de Grenade, à l’Alhambra près, et le spectacle dont nous jouissons de la côte d’Ingouville est délicieux aussi, bien que tout autre chose que celui qu’offrent les environs de Grenade ; pour bien jouir du panorama qui nous attend, montons sur le mont San Miguel.

Le panorama du mont San Miguel est infiniment plus remarquable que le mont même ; ce petit mont s’élève pourtant à 860 mètres ; en effet, la ville basse est à 680 mètres au-dessus de la mer, et nous la dominons de 180 mètres ; aussi la voyons-nous tout entière à nos pieds, ainsi que l’Albaysin, le vallon du Darro, l’Alhambra, le Généralife, etc. le cours du Génil parmi les jardins, les vergers, les prairies et les cultures est déployé sous nos yeux : châteaux gracieux (Los Carmenes) — bois et bosquets sur les pentes de nos collines ; du côté opposé, aspects tous différents : ce sont les âpres croupes dénudées de la Sierra del Sol, chaîne de hautes collines qu’un ravin sépare du massif de l’Alhambra, — en face, à l’angle formé par ce ravin et le val du Darro, nous remarquons le Généralife, qui semble examiner ce qui se passe chez son voisin, étant un peu plus élevé que lui ; nos regards, de ce côté se portent avec empressement beaucoup au delà, et s’arrêtent, émerveillés, sur les neiges éblouissantes de la Nevada ! — telle est la puissance de l’illumination et la transparence de l’atmosphère, que cette crête dentelée nous semble peu distante ; elle est pourtant de 8 à 12 lieues de nous, et entr’elle et nous s’élèvent plusieurs plans de montagnes inférieures ; le sommet culminant, le Mulhausen, s’élève au sud-sud-est : haut de 3,573 mètres il surpasse de 86 mètres la Maladetta, reine des Pyrenées, et domine sur toute l’Espagne ; — plusieurs cimes voisines sont presque aussi hautes, el Pico de la Veleta a 3,447 mètres et el Coro de la Alcabaza en compte 3,403, enfin cette chaîne superbe dépassant de 5 à 600 mètres la ligne de neige perpétuelle à cette latitude, porte les glaciers les plus méridionaux de l’Europe.

La vaste chaîne dont la Nevada est la reine s’étend donc de Tarifa au cap de Gata, elle bifurque près de Guadix ; une de ses branches tourne au nord, sépare l’Andalousie de la Murcie et le bassin du Guadalquivir de celui de la Ségura — près d’Alcaraz elle aboulit à la Sierra Morena, et de Tarifa à Alcaraz elle forme l’extrémité méridionale de la grande dorsale européenne ; d’Alcaraz les deux chaînes vont ceindre toute l’Andalousie, et la source supérieure du Guadalquivir est à Alcaraz même ; — souvenons-nous que l’Andalousie est l’ancienne Bétique qui s’étendait, à l’Ouest, jusqu’à la Guadiana inférieure. Phénicienne d’abord, puis Carthaginoise, puis Romaine, elle changea de nom quand les vandales s’en emparèrent, ils en firent Vandalusia, et le Betis devint le Guad-el-Kebir, d’où nous avons fait le nom moderne. — La Sierra Nevada protège Grenade contre les violences du soleil du midi, et combat la pernicieuse influence du Solano, le Sirrocco africain, si débilitant ! aussi la nomme-t-on vulgairement l’Abanico, l’éventail ; en toute saison elle fournit abondamment à la ville la glace dont on fait un si grand usage ; c’est une industrie lucrative pour bon nombre d’arrieros (muletiers).

La Véga est une bienfaitrice non moins précieuse ; c’est la mère nourricière de la ville, mère généreuse jusqu’à la prodigalité, car c’est bien la terre la plus fertile de l’Europe ! ses produits sont d’excellente qualité, elle donne annuellement trois récoltes ; (la Huerta de Valencia, si renommée pour sa fertilité, l’égale à peine), outre le Génil qui la traverse dans sa longueur en faisant de nombreux méandres, elle est arrosée par diverses petites rivières et par de nombreux canaux, œuvre des Maures, dont profite encore l’indolente Espagne ; en sortant de la Véga, le Génil tourne au Nord et va se perdre dans le Guadalquivir, dont il est le principal affluent. — La Véga tout entière est sous nos yeux ; c’est un bassin ovale, partout ceint de montagnes et dont le grand axe a 13 lieues de longueur, il est posé exactement Est et Ouest, et notre horizon occidental est formé par les Monts de Loja ; au Nord la Véga est bordée par une chaîne pareille à celle du Sud, — ce sont les Monts proprement dits de Grenade et qui séparent cette province de celle de Jaën ; — sur divers sommets des deux versants se voient encore les ruines des châteaux qui protégeaient la Véga et gardaient les principaux défilés, — une grande route vient de Madrid, s’allonge droit au Midi, passe à Jaën, puis à Grenade, et traversant l’énorme massif qui joint les Alpuxarres à la Nevada, aboutit à la mer à Motril.

Tournons maintenant nos regards vers l’Est. — Cette partie du panorama est l’antithèse de la Véga, et l’ensemble y gagne beaucoup en variété ; c’est un labyrinthe de Monts à vallées verdoyantes, à cimes rocheuses et dénudées ; — ce sont les Monts de Cogoloz, où nait le Darro, ceux si rocheux ! de Mocklin et de Colomera, — c’est la Sierra Elvira, avec ses crêtes stériles, ses phénomènes de volcanisation et ses sources thermales ; le Parapanda qui annonce la pluie quand il se coiffe de nuages, comme le Pilate de Lucerne, le Wetterhorn du Grindelwald, le Pic de Skye dans les Hébrides, etc., aussi les cultivateurs de la Véga disent-ils :

Cuando Parapanda se pone la montera
llueve, aunque Dios no lo quisiera.

Quand Parapanda met son bonnet, il faut qu’il pleuve, même en dépit de Dieu.

Le labyrinthe est traversé en zigzags par la route peu sûre, peu commode, peu fréquentée, qui mène à Guadix, et là, bifurquant, descend à la mer à Almeria, ou court à l’Est jusqu’à Carthagène et à Alicante ; ici et là, elle aboutit à une voie ferrée qui vous mènera où vous voudrez, — mais nos regards sont fatigués d’avoir tant erré sur ce vaste panorama ; laissons donc les yeux se reposer et pendant ce temps, rappelons-nous l’histoire des arabes, à laquelle, pendant huit siècles, celle d’Espagne est intimement liée ; — remontons même aux premiers temps vraiment historiques ; et partant de si loin, allons vite, surtout jusqu’à l’époque où Grenade commence à jouer un grand rôle.

ESSAI D’HISTOIRE

L’ESPAGNE AVANT L’INVASION DES ARABES. MAHOMET ET L’ISLAMISME.


Iberia, hesperia, hispania, españa la péninsule espagnole — car nous ne séparons pas le Portugal de l’Espagne, dont il n’eût jamais dû être séparé en aucune manière, de même qu’il ne l’est point géographiquement — le Portugal ! province à l’état de rébellion permanente, qui vole à l’Espagne le cours navigable de trois de ses principaux fleuves, et surtout celui du Tage, le plus grand de tous ! — la péninsule, disons-nous, est bien une presqu’île, car les sept huitièmes de son périmètre sont baignés par la mer, et sur l’autre huitième, par où elle confine à la France, sa seule voisine, la formidable chaîne des Pyrénées complète à souhait son isolement. Quel pays plus compacte et à figure plus mathématique ! c’est un carré formé par 600 lieues de côtes et 90 lieues de montagnes, — pendant qu’une moitié de la France ne possède pas une montagne, et que le centre du pays est une plaine si basse que les eaux ne savent trop de quel côté tourner, cinq grandes chaînes de monts courent Est et Ouest dans la péninsule, et une sixième chaîne gisant Sud et Nord traverse le pays, du cap de Gata aux Pyrénées ; l’Espagne, sur plus des deux tiers de sa surface, est un plateau haut de 6 à 700 mètres. On peut donc dire sans exagération que c’est le pays européen le plus symétrique, le mieux protégé par des frontières naturelles, le plus varié d’aspects, de climats, de productions ; pays un et indivisible, où ne pouvaient exister à la fois deux populations différentes d’origine, de mœurs, de religions. — Les Arabes ne tinrent pas assez compte de ces individualités antipathiques ; et pour avoir négligé de tout prendre, ils durent tout perdre.

Qu’était-ce donc que ces Arabes ? Quand se rendirent-ils maîtres du pays ; comment en furent-ils expulsés et que devinrent-ils ? — Et voilà la mémoire et l’imagination à l’œuvre ! Le romancero babille, les légendes racontent, l’histoire prend le ton grave qui convient à son métier ; tous s’efforcent de reconstruire la vieille Espagne et nous engagent à prêter l’oreille à leurs récits. — Ce n’est pas sans intérêt, ni sans difficulté ! il s’agit de mettre d’accord des gens qui ne s’entendent guère et veulent tous avoir raison. — Chrétiens d’un côté, musulmans de l’autre, se regardant de travers et embrouillant la question. — Cependant, écoutons ce qu’ils vont nous dire et nous en accepterons le plus vraisemblable.

Longtemps avant l’époque mahométane, l’Espagne, cette proie si belle et si enviable ! avait excité la convoitise de divers envahisseurs. Sans remonter jusqu’aux nébuleuses époques des Aryens et des Pelasges, nous trouvons les Celtes au nord et à l’ouest de la péninsule, les Ibères à l’est et au sud ; les Grecs fondant diverses colonies sur les côtes, et surtout Sagonte (de nos jours Murviedro) et les Phéniciens s’établissant à Tarragone. Ces peuples, ne pouvant subjuguer tout le pays, appelèrent à leur aide les Carthaginois qui, d’alliés devenant maîtres, fondèrent Carthagène, s’emparèrent des îles Baléares, soumirent toute la côte, poussèrent jusqu’à l’Ebre, et là rencontrèrent les Romains qui leur barrèrent le chemin ; le règne des Carthaginois dura de 438 av. J. C. jusqu’à 230, puis Rome alors s’empara de l’Espagne à l’aide de toutes sortes de perfidies ; on sait les terribles sièges de Sagonte par Annibal marchant vers l’Italie, 219 av J. C., et de Numance, par Scipion Émilien, en 133, et la vigoureuse résistance des Astures, des Cantabres et autres populations pyrénéennes ; enfin la cruelle guerre entre César, Pompée et ses fils ; — 45 ans avant l’Ère chrétienne, César avait triomphé, et l’Espagne était à la discrétion des Romains. — Elle y resta pendant quatre siècles.

Au commencement du vme siècle, la puissance romaine était, tombée en pleine décadence : les peuples qu’elle avait si longtemps opprimés s’entendaient enfin pour prendre leur revanche : en 439 les Barbares du nord envahirent l’Espagne, les Suèves s’établirent au nord et à l’ouest, les Alpins au centre, et les Vandales pénétrèrent jusque dans l’Andalousie. — Les Visigoths, ou Goths de l’ouest, chassant devant eux les Suèves, s’emparèrent à leur tour de la Catalogne, et en 415 Walha leur roi, subjugua grande partie du pays. — L’Espagne était devenue un royaume Visigoth et avait pour capitale la forte ville de Tolède, lorsque naquit en Arabie un homme extraordinaire, qui devait un jour causer la ruine de la puissance des Goths en Espagne. — Puisque nous allons être continuellement en présence des mahométans, parlons avec quelque détail de leur prophète et de ses premiers successeurs.

L’ISLAMISME.

Mahomet ou plutôt Mohammed (digne d’éloges) (Ibn-Abdallah Aboul Cassem) naquit à la Mecque (Mekke) en 571, il appartenait à la puissante tribu des Koraïchites ; orphelin dès l’enfance, il fut élevé par son oncle Abou-Thaleb, commerçant, qui fit de son neveu un conducteur de chameaux et l’emmena en Syrie ; le jeune arabe y devint l’ami d’un moine nestorien, qui plus tard l’initia à la connaissance de l’ancien et du nouveau testament ; — il eut bien dû lui apprendre à écrire ! — Mahomet, paraît-il, ne sut jamais écrire ; ce qui ne l’empêcha pas de se rendre bientôt très remarquable par son intelligence des affaires. — Il devint l’intendant, puis l’époux d’une riche veuve, Kadija ; elle lui donna sept enfants : trois fils qui moururent en bas âge, et quatre filles, l’une desquelles, Fatima, épousa Ali, cousin de son père. Mahomet devenu veuf prit pour seconde femme la très jeune et si vindicative Aïcha, fille d’Abou Beker (le père de la vierge) puis, bien qu’il fut déjà vieux, il prit quinze autre épouses — sans parler des concubines, — lui qui ne permettait à ses adeptes que quatre épouses à la fois ! — ce qui prouve que sa vertu favorite n’était pas la continence, et qu’il avait fait la loi pour tout le monde, excepté pour lui même. — Mais voyez le guignon ! tant de femmes ne lui donnèrent que des filles ! ce fut le châtiment de sa paillardise.

L’Arabie, vaste plateau presque entouré de mers et pays mi-peuplé, mi-désert, comptait alors 10,000,000 d’habitants. Cette antique patrie d’un des plus vieux peuples du monde n’avait jamais été conquise. — Sa population se composait d’idolâtres de diverses espèces, de chrétiens de sectes variées, de juifs, de sabéens, etc. ; l’idolâtrie prévalait et le grand temple de la Mecque, capitale du pays, était entouré et rempli d’idoles. À toutes ces religions si discordantes, à des liens politiques très relâchés, Mahomet conçut l’audacieux projet de substituer une puissante nationalité et le dogme d’un Dieu unique, indivisible, dont il se dirait le prophète. Cette affirmation le séparait des chrétiens trinitaires et de tous les idolâtres ; il s’écartait moins des juifs : les arabes, d’ailleurs, se disant comme eux fils d’Abraham, mais par Ismaël. Mahomet acceptait donc tous les prophètes des Hébreux, et se donnait comme le plus grand de ces hommes inspirés, et comme closant leur série. Il acceptait aussi Jésus comme prophète, non comme fils de Dieu ; aussi chrétiens et juifs refusèrent-ils également de reconnaître sa mission : les uns parce qu’il restait étranger au dogme de la Trinité, tes autres parce qu’il était étranger à leur nation et qu’ils n’espéraient rien de lui.

Mahomet avait 41 ans lorsque, après s’être longuement préparé au rôle qu’il allait jouer, il se mit à l’œuvre ; il fit d’abord quelques prosélites dans sa famille, et longtemps il essaya de réussir par la prédication, imitant en cela le Christ, dont il était si loin de posséder la mansuétude, la pureté, la moralité parfaite, la philosophie sublime ! — Il reconnut enfin qu’il lui fallait employer d’autres moyens. — Le 10 juillet 622, persécuté par les Koraïchites, couvert de ridicule, menacé de mort, il s’enfuit de la Mecque et se réfugia à Médine, ville voisine ; — alors commença l’Ère musulmane, l’Hégyre (de Hiedjra, fuite). Déjà le prophète avait de nombreux partisans ; il les appela autour de lui, leva le masque, et à la prédication pacifique, il substitua celle par le sabre — Elle lui réussit infiniment mieux ! — cependant il éprouva d’abord de rudes échecs, malgré les talents militaires dont il fit preuve, et Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/33 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/34 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/35 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/36 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/37 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/38 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/39 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/40 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/41 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/42 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/43 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/44 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/45 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/46 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/47 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/48 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/49 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/50 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/51 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/52 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/53 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/54 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/55 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/56 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/57 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/58 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/59 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/60 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/61 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/62 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/63 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/64 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/65 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/66 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/67 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/68 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/69 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/70 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/71 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/72 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/73 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/74 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/75 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/76 Page:Dousseau - Grenade, 1872.djvu/77