Histoire de l’abbaye d’Hautecombe en Savoie/III-CHAPITRE VIII

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CHAPITRE VII


Vacance du siège abbatial. — Réduction de l’abbaye sous la main du duc de Savoie. — Sa situation matérielle.

Après la mort d’Adrien de Saluces, il fut procédé à la prise de possession de l’abbaye, au nom du souverain. Christine de France, veuve de Victor-Amédée Ier, était alors régente au nom de son fils Charles-Emmanuel II, et, sous son autorité, dom Félix, frère naturel de son époux défunt, gouvernait la Savoie depuis 1634.

Dès qu’il eut connaissance du décès de l’abbé d’Hautecombe, le gouverneur s’empressa d’en informer officiellement le Sénat. Le 6 juillet 1640, le premier président, Hector Milliet de Challes, fit appeler, vers onze heures, le sénateur Prosper d’Avisé, lui enjoignit de partir promptement en compagnie du procureur général « pour réduire sous l’autorité de S. A. R., entre les mains de la justice, tous les biens dépendants de ladite abbaye. »

A deux heures après midi, d’Avisé et son secrétaire montent à cheval et se rendent au Bourget, où ils sont rejoints par le procureur général Pantaléon Vissol, suivi d’un commis-greffier et d’un scribe. Les montures prennent le chemin de la montagne et, malgré un gros temps, les commissaires montent dans des barques qui les transportent péniblement à Hautecombe. Ils n’y touchèrent qu’à onze heures du soir. Les propriétés de l’abbaye étaient affermées, depuis 1635, à Charles Lomel, qui demeurait au Val-de-Crenne[1]. Sommé de venir de suite déclarer et faire connaître les biens et revenus du monastère, il arrive vers minuit à Hautecombe, et les opérations sont remises au lendemain.

À sept heures du matin, sur la place publique qui s’étend devant l’abbaye, le procureur général annonce officiellement que le sénateur d’Avisé a été chargé d’opérer la réduction de l’abbaye, d’en inventorier les biens et les titres, de prendre acte d’état des bâtiments et d’y établir un économe. Puis il requiert du fermier général la remise des clefs de l’abbaye, ce qui eut lieu entre les mains du sénateur commissaire.

Le long rapport, dressé à l’occasion de cette réduction, nous fournit de nombreux renseignements sur le bénéfice d’Hautecombe ; ne pouvant néanmoins l’insérer ici in extenso, nous en donnerons un résumé développé :

Le nombre des religieux était tombé à quatorze, y compris les quatre qui devaient résider au prieuré de Saint-Innocent. Voici leurs noms : Claude Comparat, prieur claustral ; Louis de Macognin, sous-prieur ; Godefroy du Mollard, Jacques de La Croix, Claude Dupra, Jacques Jorrand, Antoine Brunet, confesseur des Dames de Sainte-Catherine d’Annecy. Ces sept religieux, les seuls prêtres de la communauté, recevaient le titre de dom (dominus), que les religieux-prêtres d’Hautecombe ont conservé jusqu’à l’arrivée des cisterciens de Sénanque. La communauté comptait encore quatre religieux profés, non prêtres : Marc Lomel, étudiant à Annecy ; Catherin Thorombert, Antoine Neyret et François Biset ; et enfin trois novices : Jeau de Chalandières, Philibert Simon, habitant alors chez son père, et François de Macognin. En résumé, le monastère ne renfermait que onze personnes portant l’habit monastique.

Après avoir parcouru l’intérieur et les dépendances de l’abbaye, dressé l’inventaire des meubles, les visiteurs constatent l’état déplorable des bornes-fontaines, des conduits d’eau, et le sénateur-commissaire accorde au fermier général les autorisations nécessaires pour parer aux besoins les plus urgents[2].

« Advenu le lendemain, jour de dimanche, huitiesme du dit juillet après la sainte messe nous avons continué la facture de l’inventaire des dits meubles de l’abbaye, pendant quoy deux maistres charpentiers seroient arrivés en icelle environ l’heure de dix du matin. L’un d’eux nommé Claude Jorand et l’autre Jean Ravet, tous deux de la vallée de Crena, desquels n’ayant pu recepvoir le serment du dit jour pour être férié en l’honneur de Dieu nous leur aurions ordonné et enjoint de voir et deuement visiter tous les couverts tant de l’église que de l’abbaye et tous les planchers et traleysons d’icelle tant en la maison abbatiale que ès chambres des religieux et tous autres étant dans l’enceinte et cloistre de lad. abbaye et puis le lendemain après avoir été assermentés nous faire le rapport fidelle et au vray de l’estat d’iceux. »

Continuant l’inventaire des meubles, Charles Lomel fit observer qu’il faudrait au moins quinze jours pour prendre note de tous les titres et volumes contenus dans la salle des archives et qu’il serait le cas de se borner à un inventaire sommaire et d’apposer les scellés sur les coffres et buffets ainsi que sur la porte d’entrée. Déférant à cette réquisition, les commissaires constatèrent seulement que « dans la grotte appelée la Cartollerie » il se trouvait « 39 livres terriers et de recognoissances en grand volume couverts d’aix et basanne rouge, noire et verde ;

« Un autre livre de recognoissances mesme forme de l’année 1479 reçue par Girard juge de Rumilly et François de Darina ;

« Oultre autres livres tant extraits que minutes et une grosse liasse de grosse de la hauteur d’un pied et demi liée avec une corde ;

« Un autre livre de grosse aussy en grande forme de l’année 1477 reçu par Mr  de Darina et Girard ;

« Plusieurs autres cayets de grosse cotté par les lettres de l’alphabet faicts par Mr  Girod de l’année 1607 de la Grange d’Aix ;

« Et le reste des archives n’ont esté inventorisé ains demeure en l’estât que ont le a treuvé tant dans les courbets ( ?) que coffres. « Et le membre des archives avons fait cacheter et la porte serrant à trois clefs…. et nous nous sommes saisis de la grosse clef, laquelle les seigneurs abbés soulaient garder, que nous avons fait remettre au seigneur procureur général, ayant laissé aux dits religieux la leur. »

Dans la sacristie, se trouvait « un petit coffre à bahu, plein d’argenterie, lequel coffre le dit Révérend Prieur avait en garde du feu seigneur abbé dernier décédé dès qu’il partit pour Lyon ce mois de juin proche passé à dessein d’y revenir pour la fin de juillet suivant. »

Après l’avoir fait ouvrir, ils constatèrent qu’il renfermait vingt-quatre plats d’argent tout neufs, d’environ deux marcs et demi chacun ; une bassine ovale, une grande aiguière, quatre grands chandeliers à flambeaux, un cocomal, une boîte pour serrer les amicts et quelques autres menus objets, le tout en argent.

L’inventaire des meubles et des archives étant terminé à deux heures après midi, le sénateur d’Avisé et le procureur général remontent à cheval, et, suivis de leurs secrétaires, du fermier général de l’abbaye, des experts, ils se rendent au château de Pomboz, dans le Val-de-Crenne, pour y accomplir les mêmes opérations et reviennent le soir à Hautecombe.

Le domaine de Pomboz, dont le nom a été modernisé en celui de Pontbeau, était une ancienne propriété de l’abbaye, qui l’aurait reçue, en 1160, d’une dame de Sillan[3]. Relevant d’abord du fief de l’abbaye, elle fut ensuite érigée en baronnie avec juridiction limitée. Son château, situé dans une magnifique position d’où la vue s’étend sur une grande partie du Val-de-Crenne, a subi deux incendies récents, en quinze ans. Depuis la derniére, qui éclata en 1866, il a perdu son aspect antique et ne conserve aujourd’hui que bien peu de vestiges féodaux. Une partie du mur d’enceinte formant un parallélogramme dont chaque angle est muni d’une tour ronde à meurtrières, un écusson d’abbé se trouvant autrefois sur une grande cheminée et placé par le propriétaire actuel au-dessus de la porte d’entrée, l’écusson de Savoie encastré dans le mur de façade, un puits dans l’une des tours du midi : tels sont à peu près tous les souvenirs du temps passé que l’on rencontre encore à Pomboz. Au centre du parallélogramme de l’enceinte, s’élevait la maison-forte avec créneaux et peut-être mâchicoulis, et, au-devant, une chapelle. Un pont-levis protégeait l’entrée de la cour au levant[4]. A 300 mètres environ, en avant du château qui le domine, s’étend le village principal de la localité, entourant l’ancienne église, dont le curé était nommé et rétribué par l’abbé d’Hautecombe, décimateur dans la paroisse. Devant cette église,

on remarque une colonne on pierre, d’un mètre d’élévation, terminée par un creux pouvant contenir quatre à cinq litres et qui servait vraisemblablement à mesurer le blé. Sur un des côtés, a été figuré un écusson orné des deux clefs symboliques du patron de la paroisse, posées en sautoir, et, au-dessus, une couronne. Au bas de l’écusson, on lit :

F. P. 1547[5].

Il y avait alors à Pomboz un juge, un châtelain, un vice-châtelain, un curial, un procureur d’office, un greffier, en un mot, tout le personnel d’une seigneurie. Ces fonctionnaires dépendaient de l’abbé d’Hautecombe et devaient être confirmés dans leurs charges par les commissaires, pendant la durée de la vacance du siège abbatial. Mais ils se trouvaient absents au moment de la visite des représentants du Sénat, et Charles Lomel déclara que le juge en était alors noble et spectable François Favier ; le châtelain, Me Borgel ; le vice-châtelain, Me Benoît Roche ; le procureur, Me Vial, et le greffier, Me Claude Boson.

Le lendemain lundi, les maîtres-charpentiers et maçons, ayant pu prêter serment, furent entendus et rapportèrent qu’à Hautecombe les murailles et les toitures du vieux couvent où les religieux faisaient autrefois leur demeure, sont entièrement ruinées et abattues[6]. Quant aux autres murs, ils sont partout dégradés ou lézardés : les uns doivent être reconstruits entièrement, les autres fortement consolidés. « Au dessoubs de la grande salle du cousté du parterre visant sur le lac fault aussy faire une aultre harquade ; » les marches des escaliers sont rompues ; le grand dortoir des religieux est inhabitable ; vingt-une chambres sont entièrement détruites. Il faut refaire les portails de l’abbaye et du mur de clôture, rétablir ce mur en divers endroits et ceux de la boucherie qui est en dehors de l’abbaye ; quant à l’étable qui s’y trouve annexée, il n’en reste que quelques pans de maçonnerie.

La muraille qui la reliait à la tour voisine, les fours, les bâtiments qui les joignent du côté du Bourget, le cellier des rendus et celui des religieux, sont presque entièrement ruinés.

« Les escalliers descendants à la porte appelée Saint-Bernard les faut reflfaire et iceux mettre en bon estât. Les murallies des bastiments de Saint-Bernard sont abbattues presque entièrement du cousté desdits escalliers. »

La porte et le mur des écuries, du côté du lac, — probablement celles des comtes de Savoie, — ont besoin d’être reconstruits et repris par-dessous afin d’éviter leur ruine.

Après avoir entendu cette triste description, qui donne une idée de l’importance des constructions groupées autour de l’église abbatiale, les commissaires nomment Charles Lomel économe de l’abbaye, lui en remettent les clefs, reçoivent son serment de bien et fidèlement en régir et gouverner les biens. Puis ils quittent Hautecombe pour continuer leur mission, remontent en bateau et se dirigent vers la tuilerie et la maison de Porthoud, situées à l’extrémité du lac, près du canal de Savière. Ils emmènent avec eux toute leur suite, moins les charpentiers experts « n’ayant pu les mener à l’occasion de leur vieux sage » et ayant, dès le matin, fait embarquer leurs chevaux sur deux autres bateaux pour les reprendre à St-Innocent.

Les bâtiments sont dans une situation aussi déplorable que ceux d’Hautecombe. La tuilerie a été louée, le 13 février de l’année précédente, à Pierre Durand, de Fors, en Bugey, à raison de 12,000 tuiles ou 800 florins par année, au choix de l’abbé d’Hautecombe. Vu l’urgence des réparations à faire aux toitures de l’abbaye, sur la réquisition du procureur général, le sénateur commissaire déclare saisir « entre les mains du sieur Durand, les 12,000 tuiles plates qu’il nous a déclaré être dans la fournaise à poinct d’estre cuittes, » et autres tuiles encore qui durent servir aux mêmes réparations.

« Ce fait, nous serions tous remontés sur le batteau avec les trois batteliers et serions allés à Challières[7], sellier dépendant de la dite abbaye où estant et ayant pris port les dits maistres massons Girer et Vignet anroient visité les murallies dudit sellier et cuverie tant les descouvertes que les couvertes ensemble les couverts tant du sellier à tuiles que du pressoir à paille, auroient rapporté les murallies estre en bon estât mais aux couverts y avoir des gouttières en divers endroits qui pourroient notablement endommager les bois si les couverts ne sont quant et quant regouttoyés.

« Delà nous sommes tournés sur le lac et serions venus prendre terre au terroir de Sainct-Innocent et delà serions montés à cheval et serions arrivés à Sainct-Innocent environ les huit heures du soir et serions allés loger chez M. Jean-Claude Thorombert, chastelain du dit lieu, ou pour l’heure tarde nous n’aurions pu travailler au fait de nostre commission jusques au lendemain qu’après la saincte messe. Comme nous voulions faire visiter les bastiments y estant dépendant d’Hautecombe, M. Rey, syndic du dit lieu, nous aurait requis assisté de plusieurs de la commune de enjoindre au dit honorable Lomel de fournir argent a forme de Tarrest provisionnel d’entre le deffunt abbé et les communiers du dit lieu pour recouvrir la nef de l’église laquelle, faute de ce, menacerait ruine prochaine et de ce qu’il ne manquait que de l’argent pour la réparer, les matériaux estants prêts. Auquel nous aurions dit de se pourvoir au Sénat comme à Révérend Maître Julie de Richard estably sacristain au dit lieu par le dit seigneur, abbé d’Hautecombe, dernier décédé, et au Révérend curé du dit lieu et aux Révérends religieux d’Hautecombe et à tous autres qui se seraient adressés à nous pour avoir payement de leurs prébendes. »

Cet incident vidé, les experts confirment les plaintes des habitants de Saint-Innocent relativement à leur église : les voûtes et les murs sont ouverts et tomberont si on ne procède promptement à la réfection de la toiture ; la sacristie a besoin d’être consolidée par une arcade. Il est nécessaire « d’augiver[8] » ou de refaire les cloîtres « aultrement ils tomberont pour avoir quitté la murallie d’haut en bas. » Dans le prieuré proprement dit, les toitures en lambeaux ne recouvrent qu’une partie des bâtiments ; on y a fait une cloison qui laisse pénétrer la pluie, et l’on y trouve à peine une pièce habitable. Tout le reste est réduit en masures ; et si les murs sont encore debout, c’est grâce à leur épaisseur.

Tout le mobilier se compose d’un coffre à serrer le blé.

Ayant été informé que le châtelain de Saint-Innocent était cofermier de cette dépendance d’Hautecombe, le sénateur-commissaire le requit de déclarer s’il possédait quelque terrier. Me Thorombert ou Thollombert déclara « estre saisy de deux livres de grosse à la grande forme relies en potz (peau) couverts de basanne rouge, » l’un de 1484, l’autre de 1549, tous deux appartenant au prieuré de Saint-Innocent.

De là, la commission se dirige sur Saint-Simon et Méry pour répéter les mêmes opérations. À la Grange d’Aix, la chapelle est découverte et menace ruine ; les autres bâtiments sont en assez bon état.

Le château de Méry, qui appartient à l’abbaye, laisse également peu à désirer. Mais le mur de clôture est tombé en partie depuis environ quinze mois, au dire de Claude Chevallié dit Ennemond, mistral du lieu ; la viorbe ( ?) et les autres constructions menacent de tomber ou sont déjà à terre depuis le temps de la prélature de Sylvestre de Saluces.

Pierre Girod « cofermier et commissaire dudit membre de Méry » déclare qu’il a remis à Lomel deux terriers dépendant de ce fief, pour les produire au procès que soutenait le dernier abbé, Adrien de Saluces, contre les frères Sardes, relativement à la terre de Montagny, dressés l’un par Me de Marche, l’autre par Me Perrini ; qu’en outre, il était saisi d’une autre livre de grosses de 700 et plus de feuillets, remontant à l’année 1518, signé Pelard « couvert de potz et basanne rouge. » Inhibition lui fut faite de s’en dessaisir.

La délégation du Sénat a maintenant achevé sa mission. Elle paye les vacations des experts, remonte à cheval et rentre à Chambéry le 11 juillet, entre sept et huit heures du soir[9].

Le récit de cette excursion nous a fait connaître le nombre et l’état des principales propriétés de l’abbaye en Savoie. Pour en compléter l’énumération, il faut ajouter la maison de Saint-Gilles, située au nord d’Hautecombe ; la maison de Sainte-Barbe, dans la rue de ce nom, à Chambéry tout près du moulin de la Place ; le fief de Givry, près de Cessens, dont le revenu et les charges valaient 100 ducats ; Hauterive[10], le pré de l’Orme, la rente d’Yenne, ses possessions et droits dans les Beauges, et enfin différents droits sur un grand nombre de paroisses, mais qui n’avaient pas une grande valeur.

En outre, l’abbaye possédait, en France, la terre de Lavours, en Bugey ; la rente de la Serra, en Dauphiné ; la léproserie de la Madeleine, des vignes situées à la Guillotière, près de Lyon, et la rente de Mâcon.

Les revenus de ces diverses propriétés réunies furent évalués, en 1643, à 3,620 ducats et 7 florins correspondant à peu près à 24,000 francs de nos jours.

Voici maintenant les dépenses obligatoires de l’abbé commendataire :

1° Les pensions de quinze religieux profés ou novices, celles du prieur, du sacristain, des rendus, des étrangers, des ouvriers et attachés à la maison, du procureur, la pension laie, plus celles du curé et du sacristain de Saint-Innocent, payables tant en nature qu’en argent et s’élevant à 1,132 ducats[11], ci. . . . . 1132 »
2° Supplément de pensions congrues aux curés de Lavours et de Cessens, ci. . . . . . . 30 »
3° Aumônes ordinaires de l’abbaye et de ses dépendances, non comprises celles de Saint-Innocent, consistant en 50 veissels de froment, ci. . . . . . 100 »
4° Frais de justice et d’entretien d’un solliciteur à Chambéry, pour défendre les droits de l’abbaye, ci. . . . . . . 200 »
Total : ducats 1.612 »
Il restait « pour le plat de l’abbé » 2,008 ducats[12].

Nous connaissons maintenant la situation matérielle et financière de notre abbaye. Voyons-en la situation morale.

  1. Cette ancienne appellation a été changée en celle de Saint-Pierre de Curtille. On voit encore aujourd’hui l’habitation du fermier général d’Hautecombe près du chemin qui, sortant du vallon au N.-E., conduit à Hautecombe en tournant la montagne. Il y résidait de temps en temps et une partie de sa famille parait avoir été fixée dans cette localité. Les registres de la paroisse relatent, en effet, que, le 22 septembre 1633, fut baptisée Adriane, fille de noble Claude Lomel et de dame Jeanne Monde, et qu’elle eut pour parrain le seigneur Adrien de Saluces, abbé d’Hautecombe, et pour marraine, demoiselle Suzanne Carret, de Chambéry, veuve de noble Antoine Lomel. Dans l’ancienne maison de Charles Lomel, appartenant aujourd’hui au sieur Joseph Roux, son descendant par alliance, se trouvent deux tableaux, un crucifix incrusté de nacre, provenant de l’abbaye d’Hautecombe, et divers autres objets qui attestent l’ancienneté de cette demeure.
  2. … d’autant que les révérends religieux dudit Hautecombe estoient grandement incommodés de l’eau notamment en cas de feu et que à l’incendie dernière des fours d’icelle ledit révérend prieur claustral fut contraint de donner un tonneau de son vin pour éteindre le feu. » (Extrait du rapport.)
  3. Voici ce que je lis dans le livre de compte de Me Claude Blanchard, notaire et commissaire d’extentes pendant le siècle dernier :
    « J’ai vériffié que la terre de Pomboz fut donnée, en 1160, à l’abbaye par une dame de Sillan et qu’elle relevait du fief de l’abbaye. » Ces vérifications avaient été faites à Hautecomben dans les archives de l’abbaye et dans les titres de dame Lomel. (Papiers de famille de l’auteur.)
    Dans ces mêmes recherches, il fut encore remarqué que « la terre de Curtillies et le fief sont procédés d’une donation faite, en 1164, par Bernard de Saint-Genix ; » que ces possessions furent réunies aux terres appelées autrefois Charaya et Exendilles, aujourd’hui Hautecombe et Saint-Gilles, et étaient, en 1172, confondues avec le domaine de la « côte d*Hautecombe.
    De Pomboz dépendaient, entre autres, des terres sur Chindrieux.
  4. Le propriétaire actuel, qui a relevé cette demeure à la suite de l’incendie, est M. Luguet. Il l’avait achetée du général de Boigue, qui la tenait de l’acquéreur de la nation.
  5. On voit à Lucey, près de l’église, une pierre ayant probablement servi au même usage, après avoir fait partie d’un tombeau romain. D’un côté, elle est percée d’un trou rond, et sur l’autre, on lit cette inscription :
    D M

    CARMINI BELLICI

    NI
  6. Quel était ce vieux couvent ? Il faut admettre que le rapport fait allusion à l’ancien logement de la communauté dans les mêmes bâtiments que ceux existant en 1640, et non point à une construction différente.
  7. Il était question de cette terre, donnée aux religieux, sur un registre de 1178 vu en 1772, à Hautecombe, par le notaire Claude Blanchard.
    La vaste ruine que l’on voit aujourd’hui sur la rive orientale du lac, en face d’Hautecombe, n’était point le bâtiment dont parle le rapport. Il était situé plus haut, dans l’angle formé par la rencontre du chemin quittant la rive du lac à côté de la ruine actuelle et montant à Saint-Germain par Cergoen, avec le chemin allant de Brison au même lieu, après avoir passé par-dessu8 le promontoire appelé la Buffa. Dans cet angle, se trouve aujourd’hui un cellier, ou s’élevaient les bâtiments appartenant à l’abbaye. Ses possessions à Salière, en 1732, se composaient d’environ 18 journaux de vignes, roc et broussailles, d’un chasal de maisons avec ses placéages. Les titres produits pour les faire considérer comme biens de l’ancien patrimoine ecclésiastique, prouvèrent que l’abbaye les avait dés avant 1528, que la terre de Salière relevait du comte de Cessens et faisait partie de la paroisse de Saint-Germain. (Archives préfectorales de Chambéry, Déclaration des des biens de l’ancien patrimoine.)
  8. Consolider par un contre-fort. — Voir, sur ce mot, Blavignac, Hist. de l’archilecture sacrée dans les évêchés de Genève, Lausanne et Sion.
  9. Archives du Sénat. Papiers divers.
  10. Hauterive était un domaine situé sur Saint-Marcel, Bloye et Salagine, au sujet duquel un contrat d’échange était intervenu, le 25 avril 1580, entre Delbene, abbé d Hautecombe, et dame Claudine de Bellegarde, comtesse de Tournon. (Préfecture de Chambéry, Déclaratoires.)
  11. Cette somme de 1,132 ducats est ainsi calculée :
    180 veissels de froment, à un ducat et demi, ci. . . . . 270
    38 charretées de vin, à 10 ducats, ci. . . . . 380
    En argent. . . . . 482
    1.132
  12. Archives de Cour, Abbazie. (Voir Documents, n° 51.)
    En 1635, Adrien de Saluces avait affermé à noble Charles de Lomel, de Quiers, en Piémont, bourgeois de Chambéry, tous les biens de l’abbaye, situés en Savoie, moyennant la somme annuelle de 1,850 ducatons, plus toutes les charges, sauf l’entretien du solliciteur. (Voir ce bail aux Documents, n° 50.)
    En 1646, la ferme générale de l’abbaye eut lieu moyennant 2,400 ducatons.