Histoire des églises et chapelles de Lyon/Annonciation

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H. Lardanchet (vol. IIp. 191-195).

L’ANNONCIATION

En mars 1860, le cardinal de Bonald voulant donner une vie spirituelle plus intense à l’agglomération ouvrière de la récente gare de Vaise, désigna pour créateur d’une nou velle paroisse, M. l’abbé Reuil, prêtre de haute valeur qui allait transformer, en peu de temps, ce quartier déshérité.

Il naquit à Lyon, en 1813, « d’une honnête famille d’ouvriers ; après avoir fait sa première communion à l’école cléricale de Saint-Denis de la Croix-Rousse, il fut destiné au métier de tisseur ; mais ses aspirations le portaient au sacerdoce. D’un esprit observateur, entreprenant, il attira l’attention du populaire abbé Collet, fondateur de la providence des orphelins de Saint-Joseph, à Cuire. Celui-ci proposa au jeune apprenti d’entrer dans l’atelier de tissage de sa providence d’abord comme ouvrier, puis comme contre-maître, et avec la promesse formelle qu’on lui donnerait des leçons de latin, préparatoires à celles du séminaire ».

Comme on ne remplissait guère cette condition, il fut reçu au séminaire Saint-Jodard « comme surveillant et y recevant en particulier des leçons de latin. Louis Reuil, après quelques années, fut jugé capable d’entrer au grand séminaire. Il avait alors vingt-huit ans. Après trois années de théologie, ses supérieurs l’envoyaient achever son éducation sacerdotale au séminaire Saint-Sulpice, à Paris. Ordonné prêtre en 1845, l’abbé Reuil retourna à Saint-Jodard comme préfet d’études ; mais bientôt il en fut retiré par le cardinal de Bonald, heureux de lui donner une marque particulière de sa haute estime en le plaçant vicaire à Saint-Nizier », et quelque temps après en lui confiant, comme on l’a dit, la fondation de l’Annonciation.

L’église provisoire fut bénite le 16 décembre 1860 ; le dimanche suivant eut lieu, à Saint-Nizier, la première messe de MM. les abbés Lémann, israélites convertis, nouveaux prêtres et nommés de suite vicaires de M. Reuil ; l’année suivante, le 13 décembre 1861, la paroisse fut, par décret, reconnue et érigée en succursale, et le premier conseil de fabrique installé le 9 mars 1862 ; on y remarquait des noms connus : MM. Jacquin, Chamecin, Forestier fondateur de l’œuvre des sourds-muets, Teste industriel. Les bienfaiteurs abondèrent ; on doit signaler en particulier les familles Récamier, La Porte, Mme veuve Royer, MM. Claudius Duc, Aimé Perret, Granger et surtout Joseph Renard.

Aussi, M. Reuil fit-il sortir de terre, en moins de dix mois, une église provisoire, rue de La Claire, un presbytère et des écoles ; il appela à son aide les sœurs Saint-Charles, les frères Saint-Viateur et ceux de la Doctrine chrétienne ; il ouvrit une école gratuite pour les fillettes, une pour les garçons, des classes payantes pour les enfants des deux sexes, une école cléricale, enfin une salle d’asile la plus confortable et la mieux tenue de cette époque.

Les deux vaillants vicaires établirent des catéchismes de persévérance féconds en bons résultats. Deux ans plus tard, l’abbé A. Dubois, leur successeur, continua leur œuvre et transforma l’école cléricale en institution d’enseignement secondaire, avec élèves internes et externes. Une maîtrise, établie par le célèbre organiste Tony Guerrier, exécutait la musique palestrinienne aux offices paroissiaux que la population fréquentait avec une louable avidité. Une société de pères de famille s’occupait des pauvres et leur portait des secours à domicile : le budget de leur charité dépassait annuellement 4.000 francs. Cette institution, comme celle des écoles et des œuvres de persévérance, s’est conservée et développée.
l’annonciation
M. André Montfrey qui, en 1873, succéda à M. Reuil fit construire le patronage des garçons, inauguré en 1878, et celui des jeunes filles, béni en 1881 par Mgr Mermillod.
Église provisoire de l’Annonciation. L’autel.

L’église provisoire était artistement décorée et ornée d’un mobilier de choix ; en effet, Domer avait peint la chapelle Notre-Dame de la Salette ; L. Bégule et Hazuret avaient fait la décoration murale ; Bossan avait donné le dessin d’un devant d’autel ; Bourguignon, ornemaniste sur métaux, avait construit deux girandoles en cuivre repoussé ; enfin Fabisch avait sculpté la statue.

L’église définitive de l’Annonciation fut construite « sur un terrain cédé gratuitement à la société par les familles Laporte, Récamier et Dupré-la-Tour, co-propriétaires, sous la condition expresse que l’édifice serait toujours affecté à l’exercice public du culte catholique romain », comme le porte une inscription placée dans la chapelle de la Sainte-Vierge. La première pierre en fut posée par le cardinal Foulon, le 27 septembre 1891, et en carême 1896, le cardinal Coullié présidait à la cérémonie par laquelle on ouvrait au peuple chrétien le nouveau temple. Enfin, le 4 juin 1899, le même prélat consacrait solennellement l’église entière et l’autel majeur. Le principal bienfaiteur fut M. Joseph Henard-Villet dont la générosité était sans bornes. M. le curé de l’Annonciation a pensé rendre un juste témoignage à ce digne bienfaiteur en plaçant, après sa mort, son buste dans le porche de l’église.

L’Annonciation est l’œuvre de M. Bourbon, architecte, et du zélé curé M. Vaudier. Le portail est accosté de deux statues : saint Pothin tenant l’image de la Vierge et saint Irénée, second évêque de Lyon. Au-dessus du portail deux anges, l’un armé d’un glaive, l’autre portant un lis ; plus haut encore, deux vitraux éclairent l’église ; enfin, tout au sommet, on a sculpté les symboles des quatre évangélistes. Surmontant la flèche, une niche de goût discutable, contient un groupe de l’Annonciation.

Intérieur de l’Annonciation.

Pénétrons dans l’intérieur, après avoir traversé le porche où on a sculpté les armes du cardinal Coullié. L’édifice est de style gothique, à trois nefs et transept. Le maître-autel de marbre blanc est décoré, sur le devant, d’un bas-relief représentant la Cène, et au retable de petits anges ; des stalles de chêne sculpté sont placées le long du chœur. Dans la nef, se trouve la chaire dont la tribune est de pierre et décorée d’un bas-relief représentant le Christ enseignant au milieu des apôtres Pierre et Paul ; l’abat-voix est décoré d’un Saint-Esprit avec anges de pierre et de bois. Le chœur est séparé de la nef par deux tables de communion en pierre blanche, ornées de croix, de raisins et d’épis avec portes en cuivre. Au fond de la grande nef, au-dessus de la porte d’entrée, on a sculpté une grande croix de pierre et les instruments de la passion vénérés par deux anges.

Au sommet de la petite nef de gauche se trouve la chapelle de la Sainte-Vierge dont l’autel est décoré d’un bas-relief représentant l’Annonciation et surmonté d’une statue de la mère de Dieu. Tout à côté se trouve la chapelle du Sacré-Cœur ; à l’autel on a sculpté un groupe : Notre-Seigneur apparaissant à la bienheureuse Marguerite-Marie, et au-dessus de l’autel, on a placé une belle statue du Sacré-Cœur. Dans le transept se trouve un petit autel accompagné d’un grand et beau retable de pierre supportant un groupe : Notre-Dame de Pitié au pied de la croix, avec ange portant la couronne d’épines. Au bas de la même nef sont les fonts baptismaux, avec cuve en pierre el sculpture représentant le baptême de Notre-Seigneur.

Transportons-nous dans la petite nef de droite. La chapelle principale est dédiée à saint Joseph ; l’autel est orné d’un bas-relief représentant la mort du patriarche, dont la statue surmonte l’autel. Tout près est la chapelle Saint-Antoine de Padoue dont l’autel de pierre est décoré d’un bas-relief représentant ce saint religieux prêchant au peuple ; sa statue est placée au-dessus de l’autel dans une niche. Au fond du transept de droite, se trouve l’autel dédié à la Sainte-Famille, avec un beau retable sculpté et un groupe de la Sainte-Famille.

L’église est abondamment éclairée par de nombreux vitraux qu’il est intéressant de décrire en détail. Ceux du chœur sont au nombre de sept, et représentent les sacrements avec leurs symboles placés au-dessous, savoir ; 1o le baptême de Notre-Seigneur, 2o la descente du Saint-Esprit, 3o la Pâque des Juifs, 4o Notre-Seigneur donne à saint Pierre le pouvoir des clés, 5o Moïse consacre Aaron, 6o le bon Samaritain, 7o le mariage de saint, Joseph avec la Vierge Marie. Le long de la grande nef, derrière et au-dessus des tribunes se trouvent des verrières avec dessins géométriques et rosaces ; enfin, dans les basses nefs, on a placé de nombreux vitraux dont voici l’énumération : 1o, 2o et 3o les pèlerinages en l’honneur de la Sainte-Vierge : Fourvière, Lourdes et la Salette, 4o l’apparition du Sacré-Cœur à Marguerite-Marie ; des scènes de la vie de la Sainte-Vierge et de Notre-Seigneur, savoir : 5o Marie chez ses parents Joachim et Anne, 6o la Présentation de Marie au temple, 7o l’Annonciation, 8o la Visitation, 9o la Naissance du Sauveur, 10o Jésus présenté au temple, 11o l’ange annonçant à Joseph la nécessité de fuir, 12o la fuite en Égypte, 13o la sainte Famille se reposant sous un palmier, 14o Jésus travaillant dans l’atelier, 15" la sainte Famille de Nazareth, 16o l’agonie de Notre-Seigneur, 17o Jésus devant le sanhédrin, 18o la Flagellation, 19o le Couronnement d’épines, 20o Jésus portant sa croix, 21o sa mort, 22o la Résurrection, 23o l’Ascension, 24o la Descente du Saint-Esprit, 25o la bonne mort, 26o Notre-Dame du Rosaire, 27o enfin, dans la chapelle Saint-Antoine, ce saint opérant une guérison.