Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes/Livre II/Chapitre 16

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XVI. Commerce des Hollandois à la côte de Coromandel.

À peine les Hollandois avoient paru aux Indes, qu’ils déſirèrent d’avoir des comptoirs ſur les côtes de Coromandel & d’Orixa. De l’aveu des ſouverains du pays, ils en formèrent, à des époques différentes, à la côte de la Pêcherie, à Negapatnam, à Sadrafpatnam, à Paliacate, à Bimilipatnam. Ils tirent annuellement de ces divers établiſſemens, pour les marchés d’Aſie ou d’Europe, quatre ou cinq mille balles de toile qui ſont portées à Negapatnam, chef-lieu de tant de loges. Cet entrepôt étoit entièrement ouvert, lorſqu’en 1690, il y fut conſtruit une citadelle aſſez régulière, mais peu étendue. Les maiſons qu’on permit de bâtir tout-au-tour, ayant rendu, avec le tems, les fortifications inutiles, on prit le parti en 1742 d’entourer la ville de murailles. Son territoire, d’abord très-borné, s’accrut ſucceſſivement de dix ou douze villages qui ſe remplirent de manufactures.

En échange des marchandiſes qu’ils recoivent, les Hollandois donnent du fer, du plomb, du cuivre, de l’étain, du ſucre, de l’araque, des bois de charpente, du poivre, des épiceries, de la toutenague, eſpèce de minéral qui participe du fer & de l’étain. Ils gagnent ſur ces objets réunis 1 100 000 liv. auxquelles on peut ajouter 88 000 liv. que produiſent les douanes. Les dépenſes actuelles montent à 808 000 liv. & l’on peut avancer, ſans crainte d’être accuſé d’exagération, que le fret des navires abſorbe le reſte des bénéfices. Le produit net du commerce n’eſt donc, pour la compagnie, que le profit qu’elle peut faire ſur la vente des toiles.