Hokousaï (Goncourt)/Chapitre 18

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Charpentier (p. 65-68).
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XVIII

En 1804 paraît une publication importante d’Hokousaï, trois volumes aux images en couleur, portant le titre de Yama mata yama Montagnes et montagnes (paysages), qui sont une suite de vues prises autour de la baie de Yédo, et qu’annonce ainsi la préface : « Ceux qui ont rendu la beauté de ces paysages en peinture ou en poésie, sont le dessinateur Hokousaï et le poète Taïguéntei.  »

La première planche du premier volume représente la colline du temple Hatiman d’Itgaya, et l’on y voit deux femmes avec un enfant porteur d’un cerf-volant sur son dos, au moment de passer sous un tori-ï : une de ces portes à jour à l’entrée d’un temple sinthoïste.

La seconde planche est une vue du quartier Horino-outi, que traverse une femme, portée dans un kago, sur le toit duquel est une branche d’arbuste en fleurs ; puis c’est à Ohji, devant une maison de thé, des hommes en train de laver des plateaux à une fontaine ; puis à Asouka, c’est un porteur d’un barillet de saké, en compagnie d’un camarade, dont la titubation d’ivrognes fait sourire deux femmes ; puis à Hongo, c’est un balayeur grotesque balayant le chemin, que prennent deux promeneuses. Et c’est sur la colline de Takata, d’où l’on voit le Fouzi-yama, trois femmes de la société, reconnaissables au rouleau de soie qui entoure leur chevelure, faisant collation auprès d’un arbre, dans l’entre-deux des branches duquel, est posé un télescope dirigé vers la montagne ; et c’est dans la chute d’eau de Dondo, nommé ainsi à cause du bruit, des gens pêchant avec des charpagnes. Et c’est à Yédogawa, endroit célèbre par sa fraîcheur, et d’où vient dans un conduit l’eau excellente, baptisée eau pour le thé, des pêcheurs dans leurs barques.

Le second volume nous montre dans une planche, des hommes et des femmes que surprend une pluie d’orage à Ohkido, contre l’enceinte de la fortification du shôgoun, et leurs attitudes comiques ou gracieuses pour s’en défendre ; dans une autre planche, des jeunes femmes sur une terrasse d’Atago, en contemplation du vert paysage qu’elles ont sous leurs pieds ; dans une autre planche à Shinjikou, un homme, le jour de la fête des Étoiles, attachant des lanternes et des papiers de couleur à un bambou ; dans une autre planche à Foukagawa, une femme qui achète, à un marchand d’oiseaux et de poissons vivants, un oiseau qu’elle emporte dans une cage.

Nous trouvons dans le troisième volume, une vue de la statue en pierre de Niô, et l’entrée du temple à Zôshigaya ; une vue de la terrasse du temple à Akasaka, où sont des femmes et des enfants ; une vue d’un paysage où un homme souffle devant des promeneurs, des caramels pour les enfants, en forme d’oiseaux, de théières ; une vue en pleine neige de Koudan, où une Japonaise est si joliment encapuchonnée de noir ; une vue d’Asouka, où un Japonais est en train de tirer sur une feuille de papier, étendue sur l’inscription d’un monument commémoratif d’un artiste ou d’un lettré (sékihi), une épreuve de cette inscription, dont une autre épreuve est tenue, séchant devant elle, par une femme.

La femme qui peuple les promenades de ces trois livres, c’est la femme très reconnaissable, que dessine l’artiste vers ses quarante ans, la gracieuse petite femme longuette, au haut échafaudage de la chevelure traversée d’épingles, aux traits mignons rendus par trois points pour les yeux et la bouche, et trois petites lignes pour le nez et les sourcils, à l’ampleur des manches et de la ceinture, au placage contre le ventre et les cuisses de la jupe étroite, s’évasant et se répandant en vagues à ses pieds : un type de femme, élégant, fluet, gentillet, mais un peu mièvre.

La même année, Hokousaï illustre encore Misoka Tsouzoura, Le Panier à papier, un petit album de la plus grande rareté, contenant des pensées, des réflexions de Hokousouï.

Une jolie planche, dans ces colorations délavées des impressions de ce temps, est une planche, où se voient deux jeunes Japonaises jouant avec une souris blanche.