Jean qui grogne et Jean qui rit/17

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XVII

SECONDE VISITE À KÉRANTRÉ


Depuis plus de deux ans qu’Hélène Dutec s’était séparée de son enfant, elle avait reçu bien régulièrement des nouvelles, tantôt de Jean, tantôt de Simon. Elle se réjouissait de les voir heureux, et elle recevait très souvent des sommes d’argent qui dépassaient ses espérances. C’était tantôt Jean, tantôt Simon qui lui envoyaient vingt francs, quelquefois même quarante francs. L’aisance, le bien-être régnaient dans son petit ménage. Le bon Kersac y était toujours pour quelque chose ; il se passait rarement une quinzaine sans qu’il vînt lui faire une visite ; chaque fois il apportait de quoi se contenter, disait-il.

« Car, ma bonne dame Hélène, tel que vous me voyez, je suis diablement égoïste ; ainsi, l’autre jour, je vous ai apporté une couple de chaises ; aujourd’hui ne voilà-t-il pas qu’il me faut un fauteuil ; j’en ai apporté un dans la carriole… Vous ne m’en voulez pas, n’est-ce pas, ajouta-t-il, de ce que je me soigne comme une petite-maîtresse. Je deviens douillet en prenant des années ; mais vous êtes bonne et vous n’en penserez pas plus mal de moi, n’est-ce pas ?

Hélène.

Mal ? que je pense mal de vous ? Comme si je ne voyais pas pourquoi vous apportez tout cela ? Cette table, c’est pour vous, n’est-ce pas ?

Kersac.

Certainement ! Je déteste manger sur le pouce.

Hélène.

Et l’armoire ? c’est pour vous encore ?

Kersac.

L’armoire, c’est pour serrer les petites provisions que je vous apporte et que je viens manger chez vous ; je n’aime pas les choses qui traînent : ça me taquine, ça me gêne.

Hélène.

Et le lit de la petite ?

Kersac.

Le lit est pour savoir ma protégée bien couchée. Je n’aime pas à voir un lit brisé, malpropre.

Hélène.

Et le linge ? et la vaisselle ? et le bois ? et tant d’autres choses ?

Kersac.

Le linge, c’est pour avoir de quoi m’essuyer quand j’arrive chez vous tout en transpiration. La vaisselle, c’est pour manger dedans ; le bois, c’est pour mettre une bûche au feu sans me gêner quand j’arrive transi de froid. Enfin, écoutez donc, je suis comme ça, moi. J’aime mes aises. Ce ne serait pas bien à vous de prendre mauvaise opinion de moi parce que je suis un peu…, un peu…, allons, il faut s’exécuter et lâcher le mot, un peu égoïste. »

Hélène sourit.

« Que le bon Dieu nous donne à tous des égoïstes de votre façon, monsieur Kersac.

Kersac.

Et quelles nouvelles des enfants ?

Hélène.

Très bonnes, merci bien. Jean me parle de vous dans toutes ses lettres ; il dit toujours, en me parlant de ce bon M. Abel qui le fit penser à vous, qu’il est bon comme vous, obligeant et gai comme vous, et que, comme vous, il ne peut souffrir le pauvre Jeannot.

Kersac.

Ha ! ha ! ha ! C’est bon, ça ! Eh bien, cela me donne bonne opinion de ce M. Abel. Ce Jeannot me déplaît plus que je ne puis le dire. Je parie qu’il finira par filouter et par se faire pincer.

Hélène.

Oh ! monsieur Kersac. Ne dites pas ça. Ce serait terrible ! Pensez donc ! l’enfant de ma sœur !

Kersac.

Oui, mais le père était un gueux, un gredin ! Excusez, ma bonne dame Hélène, je ne voulais pas vous peiner ; seulement, pour vous dire mon impression, ce garçon est jaloux de Jean ; il est envieux, ingrat, paresseux ; il n’aime personne. Pas comme notre petit Jean ! Celui-là est tout l’opposé. Mais, ajouta-t-il en se levant, j’oublie que j’ai quelques provisions dans ma carriole ; si nous dînions ! J’ai l’estomac creux, il me semble que j’avalerais un pain de six livres. »

Kersac et Hélène sortirent et allèrent sous le hangar, où étaient le cheval et la carriole. Kersac donna à boire au cheval, qui finissait son avoine, lui arrangea sa litière ; Hélène lui apporta une botte de foin ; après quoi Kersac se mit à décharger la carriole de ses provisions. Hélène reçut un bon gigot tout cuit, trois livres de beurre, un kilo de sucre, un kilo de café tout brûlé et moulu, un kilo de chandelle, un gros fromage, une bouteille d’huile à manger et une autre de vinaigre, un paquet d’épiceries de toutes sortes ; et enfin il retira un paquet qu’il semblait vouloir cacher.

« Ceci, dit-il, ce n’est pas pour vous, ma bonne dame Hélène, c’est pour moi.

Hélène.

Ah ! qu’est-ce que c’est, sans indiscrétion ?

Kersac.

Voilà ! C’est qu’il faut encore m’accuser d’un vilain défaut, et ce n’est pas agréable. Et pourtant il faut que je m’exécute, car tout de même quand vous verriez la chose, vous devineriez bien mon défaut. Tel que vous me voyez, Hélène, je suis un peu coquet ; j’aime à être bien tenu, bien peigné, bien attaché. Et chez vous il n’y a pas de glace. Cela m’ennuie, parce qu’en arrivant, voyez-vous, le vent, la sueur, la poussière, tout ça vous ébouriffe, vous dérange ; avec ma glace, je verrai de suite si je suis présentable. Vous n’êtes pas fâchée, n’est-ce pas ?

Hélène ne répondit qu’en lui serrant les mains dans les siennes ; sa bouche resta muette, mais ses yeux exprimèrent sa reconnaissance ; elle rentra et se mit à ranger les provisions dans l’armoire que lui avait value l’égoïsme de Kersac.

Kersac.

Un clou, s’il vous plaît, Hélène, pour attacher la glace. Où faut-il l’accrocher ?

Hélène.

Elle sera bien partout où vous la mettrez, monsieur Kersac. Voici un clou. »

En prenant le clou, Kersac s’aperçut qu’elle avait les yeux pleins de larmes.

Kersac.

Pourquoi pleurez-vous, Hélène ?… Pourquoi ?… Je veux que vous me le disiez.

Hélène, souriant.

Je pleure sur votre égoïsme ; je remercie le bon Dieu de vous avoir donné un si beau défaut, et je le prie de vous en récompenser dans ce monde et dans l’autre.

Kersac.

Oh ! dans ce monde, je n’y tiens guère ; dans l’autre, je ne dis pas ; et, à mon tour, je prie le bon Dieu de vous y retrouver avec mon petit Jean après ma mort.

Hélène.

Merci, monsieur Kersac ; c’est la meilleure prière que vous puissiez faire pour moi.

Kersac.

C’est qu’il y a longtemps que je vous connais.

Hélène.

Il y a plus de deux ans.

Kersac.

Et la petite, où est-elle donc ?

Hélène.

Elle n’est pas encore revenue de l’école ; elle va venir dîner avec nous tout à l’heure.

Kersac.

Elle est gentille, cette petite, je l’aime bien.

Hélène.

Elle vous aime bien aussi. Rien que d’entendre parler de vous, ses yeux brillent, sa bouche sourit.

Kersac.

Qui entend-elle parler de moi ? personne ne me connaît ici.

Hélène.

Et moi donc ? Est-ce que je puis oublier notre bienfaiteur et le protecteur de mon petit Jean ? Tout ce qui est ici vous rappelle à notre souvenir, tout vient de votre charité, de votre bonté.

Kersac.

Vous pouvez bien ajouter : et de mon amitié. Je me suis attaché à votre petit Jean, que j’en suis quelquefois étonné. De Jean cet attachement a passé à vous ; et ça me fait plaisir de venir vous voir et de vous aider un peu avec ce que j’ai de trop.

Hélène.

Je ne suis pas une ingrate, monsieur Kersac, croyez-le bien.

Kersac.

Je le sais bien ; je le vois bien ; et ça repose le cœur, voyez-vous, quand on n’a personne à aimer dans ce monde : je veux dire des créatures humaines, car on a toujours le bon Dieu à aimer. Je dis donc que ça repose le cœur quand on voit une bonne et honnête femme qui vous remercie du peu qu’on a fait pour elle, qui en est reconnaissante comme si c’était une belle et grande chose, et qui prie pour vous, qui pense à vous, qui vous aime. C’est une grande récompense, ma bonne Hélène, trop grande pour ce que je vaux. Et que vous écrit Jean dans sa dernière lettre ? ajouta-t-il après quelques instants.

Hélène.

Ils m’écrivent tous deux, monsieur Kersac. M. Abel a été bien bon pour eux ; en voilà encore un qui est un vrai cœur d’or, comme dit mon petit Jean. »

Et Hélène raconta à Kersac tout ce que M. Abel avait fait et promis, et comment il avait assuré à Simon un excellent mariage.

Kersac.

Peste ! il n’y va pas de main morte, ce bon Abel ! Plaise à Dieu qu’il n’ait pas son Caïn. Il va falloir que vous alliez à la noce d’ici à un an ou deux.

Hélène.

Moi, monsieur ! À une noce à Paris ! Qu’y ferai-je, mon Dieu ! et quelle figure y apporterais-je ?

Kersac.

Il faudra bien que vous y alliez. La mère doit être présente de par la loi.

Hélène.

La mère, mais pas la belle-mère, monsieur.

Kersac.

Comment, la belle-mère ?

Hélène.

Oui, monsieur ; je n’ai d’enfant que mon petit Jean. Quand j’ai épousé mon mari, Simon avait déjà près de neuf ans.

Kersac.

En voilà-t-il une belle découverte ! Quel âge avez-vous donc ?

Hélène.

J’ai trente-trois ans, monsieur. Jean a seize ans et demi : je me suis mariée à dix-sept ans.

Kersac.

C’est donc ça que je me disais toujours : Cette femme est diantrement bien conservée ! Qui croirait qu’elle a un grand garçon de vingt-quatre ans ! Ah ! mais ce que vous me dites là me fait plaisir ; voici pourquoi. Je suis garçon, vous savez. J’ai besoin d’une femme à la ferme, une femme qui fasse marcher le ménage, qui fasse la cuisine, qui fasse enfin ce que fait une fermière. J’ai eu du malheur jusqu’ici. Je ne peux pas tomber sur une femme honnête, active, intelligente, qui prenne mes intérêts, qui sache mener une ferme. J’avais bien pensé à vous, mais je me disais : « Elle a un grand garçon de vingt-quatre ans ; elle a pour le moins quarante et un à quarante-deux ans. C’est trop âgé pour commencer. » Et voilà que vous en avez trente-trois ! Mais c’est superbe ! Tiens ! c’est le bon Dieu qui exauce votre prière ; vous lui demandez de me donner du bonheur ! Suis-je donc heureux ! Je ne vais plus avoir à me méfier, à surveiller, à gronder. Tout ira comme sur des roulettes ; quand je serai malade vous me soignerez ; quand je serai absent, vous prendrez la direction de tout.

— Mais, monsieur, dit Hélène en riant, vous arrangez tout ça sans savoir si je puis faire l’affaire, si je connais le travail d’une ferme, si je sais traire une vache, élever des volailles. Une femme de ferme doit savoir tout cela à fond. »

Kersac s’arrêta consterné.

« C’est vrai, pourtant !… Et vous ne savez pas ?… Dites vite, ajouta-t-il avec vivacité, voyant qu’elle hésitait.

Hélène.

Si fait, monsieur, je sais ; je suis fille de fermier, j’ai travaillé à la ferme depuis que je me souviens de moi-même ; je n’ai quitté qu’à la mort de mon père et de mon mari.

Kersac.

Alors pourquoi diable m’effrayez-vous ? Je ne vous demande pas si vous voulez, puisque vous pouvez. Du moment qu’il s’agit de me rendre service, vous n’hésiterez pas, j’en suis sûr. Quand faut-il vous envoyer une charrette pour déménager ?

Hélène.

Quand vous voudrez, monsieur. Rien ne me retient ici. Vous avez pensé juste, en étant si sûr de mon consentement ; tout ce que je pourrai faire pour vous, je le ferai avec bonheur, en remerciant le bon Dieu de m’offrir les moyens de vous témoigner ma reconnaissance.

Kersac.

La semaine prochaine alors ; nous sommes à jeudi aujourd’hui ; lundi prochain vous déménagez.

Hélène.

Je serai prête, monsieur.

Kersac.

Bien ! tout est convenu ; je suis content. Je ne vous parle pas de gages ; il vous passera assez d’argent dans les mains, plus que vous n’en pourriez dépenser ; vous prendrez ce qu’il vous faudra, ce que vous voudrez. Je n’ai pas besoin de vous fixer la somme et je ne crains pas que vous en preniez trop.

Hélène.

Et la petite Marie, monsieur, qu’en ferons-nous ?

Kersac.

Marie viendra avec vous.

Hélène.

Ce sera peut-être un embarras pour vous, monsieur ?

Kersac.

Embarras ? pas le moindre. Quand elle aura vingt et un ans, je l’adopterai et je la marierai à mon petit Jean. J’ai déjà fait mon plan, allez. Vous savez, je suis égoïste. J’arrange ma vie pour moi-même.

Hélène.

Et sans oublier les autres, monsieur. Mon Dieu, que c’est donc beau et bon d’être égoïste au point où vous l’êtes !

Kersac.

Mais oui ; vous voyez ! on se fait une bonne petite vie ; on se fait des amis.

Hélène.

Bien dévoués et bien reconnaissants, monsieur.

Kersac, souriant.

Toujours ! Les amis sont toujours dévoués et reconnaissants ; sans cela ce ne sont plus des amis… Et le dîner que nous oublions ! Marie va rentrer, et si je n’ai pas quelque chose à mettre dans mon pauvre estomac, je la mange à la croque au sel. »

Hélène remit du bois dans le feu, tira de l’armoire aux provisions de quoi faire une omelette et de quoi assaisonner une salade. Quand les œufs furent battus et prêts à mettre sur le feu, Kersac lui offrit de tenir la poêle pendant qu’elle mettrait le couvert. Ce fut bientôt fait, et, au moment où Hélène versait l’omelette dans une assiette, la petite Marie arriva rouge et joyeuse.

Elle courut à Kersac, qui l’embrassa sur les deux joues ; elle lui rendit ses baisers en disant :

« J’ai été bien des jours sans vous voir, mon bon ami ; pourquoi êtes-vous resté si longtemps sans venir ?

Kersac.

Parce que c’est le temps de la moisson, ma petite Marie, et que, dans ces moments-là, hommes et chevaux ont bien à faire.

Marie.

Mais vous, bon ami, vous ne travaillez pas ?

Kersac.

Tout comme les autres et plus que les autres ; pendant qu’ils se reposent, je vais voir de tous côtés si chacun est à son affaire, si l’ouvrage se fait comme il faut ; je suis le premier levé et le dernier couché.

Marie.

Mais c’est très fatigant, cela !

Kersac.

Sans doute, c’est fatigant ; mais, tant qu’on vit dans ce monde, il faut se fatiguer pour faire son devoir.

Marie.

Et si l’on ne veut pas se fatiguer ?

Kersac.

Si on ne veut pas se fatiguer, on est un lâche et un méchant, parce qu’on offense le bon Dieu ; on mécontente les hommes et on est puni dans ce monde et dans l’autre monde.

Marie.

Comment est-on puni ?

Kersac.

Dans ce monde, personne ne vous aime, ne vous estime et ne veut de vous ; on ne gagne plus rien et on devient misérable ; et, dans l’autre monde, le bon Dieu vous renvoie au diable, qui est très méchant et qui vous rend malheureux, mais malheureux comme tu ne peux pas te figurer.

Marie.

Comme vous faites bien alors de vous fatiguer, bon ami. Mais tâchez de vous fatiguer beaucoup, assez pour que le bon Dieu soit content et qu’il ne vous envoie pas à ce méchant diable.

Kersac.

Oh ! je me fatigue assez, sois tranquille.

Hélène.

Monsieur Kersac, Marie va croire qu’il suffit de se fatiguer pour contenter le bon Dieu. Il faut d’autres choses encore.

Kersac.

Comment donc ! certainement ! Écoute, Marie, il faut aussi beaucoup aimer le bon Dieu.

Marie.

Je l’aime bien aussi, mais je ne le vois pas ; alors je ne peux pas l’aimer comme ceux que je connais.

Kersac.

Si fait, tu le connais ; tu sais que c’est le bon Dieu qui t’a créée, qui te donne tout ce que tu as.

Marie.

Je le sais bien, mais je ne vois pas les choses qu’il me donne. Pas comme vous, qui me soignez et qui me donnez beaucoup de choses que je vois. Aussi je vous aime de tout mon cœur.

Kersac.

Dites donc, Hélène, entendez-vous ce qu’elle dit ? Je crains qu’elle ne soit plus forte que moi. Je suis à bout de raisonnements. Faites-lui comprendre que je ne vaux pas le bon Dieu.

Hélène.

Marie, c’est le bon Dieu qui m’a fait venir à ton secours quand ta bonne t’a abandonnée ; c’est le bon Dieu qui te fait vivre, qui a permis que le bon M. Kersac te connaisse et t’aime ; c’est le bon Dieu qui te garde et te protège jour et nuit ; il t’aime, il veut que tu sois heureuse toujours ; tu vois bien que tu dois l’aimer plus que tout le monde.

Marie.

C’est vrai, mère, c’est vrai ; je l’aime et je l’aimerai plus encore, je vous le promets.

Kersac, riant.

Et moi, Marie, comment m’aimeras-tu assez pour m’empêcher d’être jaloux ?

Marie.

Vous ? Oh ! vous savez que je vous aime bien, que je vous aimerai toujours. (Elle l’embrasse et lui dit à l’oreille : « plus que tout le monde… vous comprenez ? ») Et puis c’est vilain d’être jaloux ; et vous ne ferez jamais rien de vilain. »

Le dîner était prêt ; ils se mirent à table. Kersac rit longtemps de la promesse de sa fille adoptive et mangea comme un homme qui vient de faire sept lieues et qui est encore à jeun à une heure de l’après-midi. Marie dévorait ; le gigot était cuit à point, l’omelette était excellente, la salade était bien assaisonnée, le beurre était frais, le pain était tendre, les convives étaient heureux ; Kersac était particulièrement enchanté de s’être assuré une femme sûre et intelligente à sa ferme, et de trouver en elle et en la petite Marie une société et une distraction agréables.

Quand Marie sut qu’elle allait demeurer à la ferme de Kersac, elle ne se posséda plus de joie.

« Partons tout de suite, mon bon ami, emmenez-nous tout de suite, répétait-elle avec instance.

Hélène.

C’est impossible, Marie ; il me faut le temps de payer les petites choses que je dois, de faire mes adieux à M. le curé, à ma sœur Marine, de ranger mes effets ; car, dit-elle en souriant et se tournant vers Kersac, j’ai des effets maintenant et je ne veux rien laisser de ce que vous m’avez donné, monsieur Kersac.

Kersac.

Vous emporterez tout ce que vous voudrez, Hélène ; je vous enverrai ma plus grande charrette.

Hélène.

Merci, monsieur, je laisserai la maison à ma sœur, qui n’aura plus de loyer à payer de cette façon. »

Kersac avait fini de dîner ; il se leva pour aller atteler son cheval ; Hélène l’accompagna et il partit en répétant :

« À lundi ! »