Journal (Eugène Delacroix)/24 mars 1854

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Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 2p. 317-318).

24 mars. — Travaillé à ébaucher les Chasseurs de lions, pour Weill.

À deux heures et demie, séance à la commission de l’Industrie. Discussion sur le règlement concernant l’exposition des ouvrages faits depuis le commencement du siècle. J’ai combattu avec succès, aidé de Mérimée, cette proposition, qui a été écartée. Ingres[1] a été pitoyable ; c’est une cervelle toute de travers ; il ne voit qu’un point… C’est comme dans sa peinture ; pas la moindre logique et point d’imagination : Stratonice, Angélique, le Vœu de Louis XIII, son plafond récent avec sa France et son Monstre.

  1. Voir notre Étude sur les rapports d’Ingres avec Delacroix. À propos du plafond d’Ingres qui avait contribué à la décoration de l’Hôtel de ville, voici ce que Delacroix écrivait à un critique d’art : « Je ne sais si mon illustre confrère en plafond sera aussi satisfait de votre appréciation que je le suis pour ma part. Je suis entièrement de votre avis, à savoir que les camées ne sont pas faits pour être mis en peinture, et qu’il faut que chaque chose soit à sa place. » M. Burty ajoute en note : « L’illustre confrère en plafond, c’était Ingres, et les camées, c’était l’apothéose de Napoléon. » (Corresp., t. II, p. 110-111.)
    Burty aurait pu ajouter que si Delacroix prononce le mot camée, c’est que Ingres, pour l’Apothéose d’Homère, n’avait fait qu’agrandir une composition connue comme camée.