Journal de voyage d'un Troyen en Extrême-Orient et autour du monde/Préface

La bibliothèque libre.


PRÉFACE


À mon ami Fernand DORÉ,
à Troyes.


Tu m’as demandé, mon cher ami, de faire précéder ton récit de voyage de quelques lignes d’introduction. Je le fais d’autant plus volontiers que c’est en partie sur mes conseils que tu as fait ce tour du monde, et je suis heureux de cette occasion de te féliciter encore une fois de la détermination que tu as prise de te faire « globe trotter » et des premiers succès qui ont couronné cette entrée dans la carrière.

C’est un axiome devenu élémentaire en matière économique que l’on ne peut conquérir de nouveaux marchés qu’en allant sur les lieux se rendre compte des besoins du pays et tenter soi-même de nouer des relations. C’est ce que nos concurrents n’hésitent pas à faire, et tu as pu t’en rendre compte. Dans quelle proportion, hélas ! étaient les Français parmi les voyageurs que tu as rencontrés ? Nous comptons trop, nous autres, sur la réputation de nos produits ; nous attendons chez nous la venue d’un client qui n’arrive plus guère, car aujourd’hui c’est lui qui reçoit la visite du fabricant. Quand nous consentons à entrer en rapport avec l’étranger, c’est par le système suranné de représentants pris sur place et qui trop souvent n’offrent que de médiocres garanties. Il faut le répéter, c’est en se déplaçant que les Anglais hier, les Allemands aujourd’hui, ont su faire connaître et apprécier leurs articles dans toutes les parties du monde. Tu l’as compris et tu as voulu les imiter. Tu as donné là aux commerçants et aux industriels troyens un exemple qui ne sera sûrement pas inutile. Encore quelques voyages, parmi nos compatriotes champenois, comme celui que tu viens de faire, et le courant sera créé.

Tu as écrit ton récit d’un style simple et sans prétention, reproduisant les notes prises sur place au courant de la plume. Tu lui as conservé ainsi la fraîcheur d’impressions et la sincérité qui constituent, dans un pareil ouvrage, les qualités tout à fait essentielles. Ce n’est pas une œuvre littéraire que tu as entendu soumettre à la critique. Tu as voulu montrer que le « Tour du Monde » qui était encore considéré par la génération précédente comme une entreprise d’une hardiesse extraordinaire ne présente plus aujourd’hui aucune difficulté ; tu as vu et raconté que partout on trouvait le confortable et bien souvent plus qu’en France, car il s’en faut que nous ayons le monopole des bons hôtels et des moyens de transport faciles et à bon marché. C’est donc un service que tu as rendu en apportant ce témoignage, et tu as ainsi mérité, non seulement les félicitations, mais encore les remerciements de tous ceux qui s’intéressent réellement au développement de notre commerce extérieur.

Ce qu’il fallait démontrer.

H. JULLEMIER,
Consul de France.

Paris, 7 janvier 1900.