L’Antiquaire (Scott, trad. Ménard)/Chapitre XLIV

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Traduction par Albert Montémont.
Ménard (Œuvres de Walter Scott, volume 7p. 434-442).


CHAPITRE XLIV.

LE SECRET DU TRÉSOR.


Après tout, si elle ne m’aime pas, il faut que j’en prenne mon parti. Me faudra-t-il pâlir parce qu’une belle rougit, ou soupirer parce qu’elle sourit, et sourit à un rival ? Non, par le ciel ! mon repos m’est trop cher pour que, semblable aux plumes qui se balancent sur sa tête, chaque mouvement dicté par son caprice ait le pouvoir de m’agiter.
Vieille comédie.


« Hector, dit Oldbuck à son neveu en s’en retournant au logis, il y a un point sur lequel je suis quelquefois tenté de croire que vous êtes fou.

— Si vous ne me croyez fou que sur un seul point, vous me faites plus de grâce en vérité que je n’en attendais, et que je n’en mérite.

— Je veux dire un point par excellence, continua l’Antiquaire ; j’ai quelquefois pensé que vous aviez jeté les yeux sur miss Wardour.

— Hé bien, monsieur ! répondit Hector d’un air fort calme.

— Le diable l’emporte avec son Hé bien, monsieur ! s’écria son oncle ; il me répond avec autant de tranquillité que si c’était la chose du monde la plus simple, que lui, simple capitaine dans l’armée, et rien de plus, pensât à épouser la fille d’un baronnet.

— J’ose croire, monsieur, dit le jeune Écossais, que sous le rapport de la famille, ce ne serait pas une mésalliance pour miss Wardour.

— Oh ! que le ciel nous préserve d’attaquer un tel sujet ! non, non : égalité parfaite des deux côtés ; tous deux portés sur le tableau de la noblesse du pays, et ayant également le droit de regarder avec mépris la classe entière des roturiers en Écosse.

— Et du côté de la fortune nous sommes sur un pied à peu près égal, puisque nous n’en avons ni l’un ni l’autre, continua Hector. Il peut donc y avoir erreur dans mon choix, mais non pas présomption.

— Oui ; mais voilà où gît l’erreur, puisque c’est ainsi que vous l’appelez : c’est qu’elle ne vous aime pas, Hector.

— Vous le croyez, monsieur ?

— J’en suis certain ; et pour vous en convaincre davantage, je vous apprendrai qu’elle en aime un autre. Elle s’est méprise sur le sens de quelques mots que je lui dis une fois, et depuis j’ai été à même de deviner l’interprétation qu’elle leur avait donnée. Alors j’étais incapable de m’expliquer sa rougeur et son embarras ; mais en me les rappelant maintenant, je les regarde, mon pauvre Hector, comme un signal de mort pour vos espérances et vos prétentions. Je vous conseille donc de battre en retraite, et de retirer vos forces le plus tôt que vous pourrez, car il y a une trop bonne garnison dans le fort pour que vous puissiez le prendre d’assaut.

— Je n’ai pas besoin de battre en retraite, mon oncle, » dit Hector en se tenant fort droit et marchant avec une espèce de gravité boudeuse et offensée. « Il n’y a pas lieu à se retirer quand on ne s’est pas avancé. Il y a en Écosse d’autres femmes que miss Wardour, et d’une aussi bonne famille.

— Et d’un meilleur goût. Sans aucun doute, il y en a, Hector ; et quoique je doive avouer que c’est une des femmes les plus sensées et les mieux élevées que je connaisse, cependant je doute fort que vous fussiez capable d’apprécier son mérite. Une femme à la tournure leste et pimpante, dont la tête serait surmontée d’un panache éclatant, qui porterait une amazone un peu de la couleur de votre uniforme, qui conduirait aujourd’hui le cabriolet, et demain passerait en revue le régiment sur le cheval gris qui aurait traîné la voiture la veille, hoc erat in votis[1], voilà celle qui vous subjuguerait, surtout si à ces qualités elle joignait le goût de l’histoire naturelle et était curieuse de voir un échantillon de phoque.

— Il est bien dur, dit Hector, de m’entendre toujours jeter au nez ce maudit veau marin ; mais au surplus cela m’est fort égal, et je n’ai pas envie non plus de mourir de chagrin pour les beaux yeux de miss Wardour. Elle est libre de choisir qui lui plaît ; je souhaite de tout mon cœur qu’elle soit heureuse.

— Ô générosité magnanime digne du soutien de Troie ! vous me rassurez, Hector ; j’avais peur d’une scène ; votre sœur m’avait dit que vous étiez passionnément amoureux de miss Wardour.

— Voudriez-vous donc, monsieur, dit le jeune homme, que je fusse passionnément amoureux d’une femme qui ne se soucie pas de moi ?

— Non pas, mon neveu, dit l’Antiquaire plus sérieusement ; il y a certainement beaucoup de bon sens dans ce que vous dites, et j’aurais donné beaucoup il y a vingt-cinq ans pour pouvoir penser comme vous.

— Tout le monde, je présume, peut penser comme il lui plaît sur de pareils points.

— Non pas suivant les usages de l’ancien régime, dit Oldbuck ; mais, comme je l’ai dit auparavant, la coutume du siècle me paraît plus sage, quoique faite pour inspirer moins d’intérêt. Mais, voyons, dites-moi quelles sont vos idées au sujet de cette invasion dont on parle tant ; le cri général est qu’ils arrivent. »

Hector, digérant sa mortification, qu’il désirait surtout cacher aux regards satiriques de son oncle, s’empressa d’entrer dans une conversation qui devait détourner ses pensées de miss Wardour et du veau marin. En arrivant à Monkbarns, comme ils s’empressèrent de raconter aux dames les événemens qui s’étaient passés au château, et qu’ils durent écouter à leur tour le récit de leurs incertitudes, et combien elles avaient hésité de se mettre à table avant le retour de l’Antiquaire, ces deux sujets si redoutés n’eurent pas lieu de se présenter.

Le lendemain matin l’Antiquaire se leva de bonne heure, et comme Caxon n’avait pas encore paru, il commença à regretter intérieurement le manque de nouvelles et le commérage de la ville, que l’ex-perruquier ne manquait pas de lui rapporter fidèlement tous les jours. L’habitude avait rendu son babil presque aussi nécessaire à notre Antiquaire que la prise de tabac qu’il prenait de temps en temps, quoiqu’il affectât de les regarder l’un et l’autre avec le même mépris. Cependant il fut distrait de l’espèce de vide qui résultait de cette privation, par la présence du vieil Ochiltree, qui se promenait en musant le long des haies bien taillées d’ifs et de houx, de l’air de quelqu’un qui est chez lui. En effet, il était devenu depuis peu tellement le commensal de la maison, que Junon elle-même n’aboyait plus en le voyant, mais se contentait de le surveiller d’un œil attentif et vigilant. Notre Antiquaire sortit en robe de chambre, et s’avança au devant de lui.

« Eh bien, les voilà qui arrivent tout de bon, Monkbarns, dit Ochiltree ; je suis venu tout exprès de Fairport pour vous annoncer cette nouvelle, et je m’en vais. Le Search vient d’entrer dans notre baie, et on dit qu’il a été chassé par une frégate française.

— Le Search ! dit Oldbuck en paraissant réfléchir, oh ! oh !

— Oui, oui, le brick canonnier du capitaine Taffril.

— Quoi ! cela aurait-il quelque rapport avec Search n° II, dit Oldbuck, saisissant comme un trait de lumière le rapprochement que ce nom pouvait offrir avec la cassette mystérieuse qui renfermait le trésor.

Le mendiant, comme un homme pris sur le fait dans un stratagème, mit son bonnet devant sa figure, et ne put s’empêcher de rire de tout son cœur. « Vous avez le diable au corps, Monkbarns, pour vous souvenir des choses, et les rapprocher. Qui aurait cru que vous auriez songé à cela ? Pour le coup, me voilà pris maintenant.

— Je comprends tout cela, dit Oldbuck, aussi bien que la légende d’une médaille bien conservée. La boîte où le lingot a été trouvé appartenait au brick, et le trésor à mon phénix (Édie fit un signe affirmatif), et avait été enterrée là pour secourir sir Arthur dans ses embarras.

— Ce fut moi qui m’en chargeai avec deux hommes de l’équipage du brick, mais qui n’en connaissaient pas le contenu, et qui soupçonnaient que c’était quelque petite affaire de contrebande du capitaine. Je veillai nuit et jour jusqu’à ce qu’elle fût tombée entre les mains de celui à qui elle était destinée ; et quand ce démon d’Allemand cherchait le couvercle de la cassette, car il était affriandé, je crois que ce fut un démon écossais qui me mit dans la tête de lui jouer ce mauvais tour. Vous voyez bien que si j’en avais dit un peu plus ou un peu moins au bailli Little-John, toute l’histoire se serait découverte, et Dieu sait comme M. Lovel aurait été fâché de paraître là dedans ; aussi j’étais décidé à tout supporter pour éviter cela.

— Je suis forcé d’avouer, dit Oldbuck, qu’il n’a pas été trompé dans le choix de son confident, quoiqu’il puisse paraître un peu étrange.

— Je puis dire cela en ma faveur, Monkbarns, répondit le mendiant ; c’est que je suis peut être de tout le pays l’homme à qui il est le plus sur de confier de l’argent, par la raison que je n’en ai pas besoin, que je n’en désire pas, et que je ne saurais à quoi l’employer si j’en avais. Mais le pauvre garçon n’avait guère le choix dans cette affaire, car il croyait quitter le pays pour jamais (j’espère maintenant qu’il s’était trompé) ; et lorsque nous apprîmes, par un singulier hasard, la détresse de sir Arthur, la nuit était déjà avancée, et Lovel devait être à bord au point du jour. Cependant, cinq ou six nuits après, le brick vint passer une nuit en station dans la rade ; je fus averti de le joindre en chaloupe, et ce fut alors que nous enterrâmes le trésor où il fut trouvé.

— Il faut avouer que c’était là un exploit bien extravagant, bien romanesque, dit Oldbuck ; pourquoi ne pas se fier à moi ou à tout autre ami ?

— Il avait les mains teintes du sang du fils de votre sœur, dit Édie, et peut-être à répondre de sa vie ; était-ce là le moment d’aller vous demander conseil ? Et quel temps avait-il pour se consulter lui-même ou tout autre ?

— Vous avez raison ; mais si Dousterswivel eût pris les devans ?

— Il n’y avait pas grand’crainte qu’il vînt là sans être accompagné de sir Arthur. Il avait eu une fameuse frayeur une des nuits précédentes, et ne se souciait guère d’approcher de ce lieu, à moins qu’il n’y fût amené de force. Il savait bien que la première trouvaille avait été cachée par lui-même ; comment donc pouvait-il s’attendre à la seconde ? Il n’avait fait cela que pour tirer meilleur parti de sir Arthur.

— Alors, dit Oldbuck, comment espériez-vous que sir Arthur vînt là tout seul ?

— Oh ! dit Édie plaisamment, j’avais une certaine histoire sur Misticot qui l’aurait amené ainsi que vous, Monkbarns, de plus de quarante milles. D’ailleurs nous devions supposer qu’il serait attiré de nouveau au lieu où il avait trouvé le premier argent, puisqu’il ne savait pas le mot de l’énigme. Bref, l’argent ayant cette forme, sir Arthur se trouvant dans le plus pressant besoin, et Lovel étant résolu de ne jamais lui laisser soupçonner la main qui venait à son secours (car c’était la chose sur laquelle il insistait le plus), nous ne trouvâmes pas de meilleur expédient que celui-là, après nous être pourtant creusé long-temps la cervelle à ce sujet. Et si, par quelque étrange hasard, Dousterswivel avait mis ses griffes dessus, j’aurais été immédiatement chez vous ou chez le shérif, pour tout découvrir.

— Eh bien, malgré toutes vos sages précautions, je pense que votre expédient a mieux réussi qu’on ne devait s’y attendre. Mais comment diable Lovel possédait-il une telle masse de lingots d’argent ?

— C’est là ce que je ne puis vous dire ; mais cela avait été mis à bord avec les autres effets qu’il avait à Fairport, sans doute. Quoi qu’il en soit, nous les mîmes dans une des boîtes de munitions du brick, pour leur sûreté et la commodité du transport.

— Grand Dieu ! dit Oldbuck, dont la mémoire se reportait au commencement de sa connaissance avec Lovel, ce jeune homme auquel j’ai payé à dîner à Queens-Ferry, pour lequel je voulais faire faire une souscription à Fairport, risque tant d’argent sur un hasard de cette nature ! Allons, je ne paierai plus à dîner à personne, cela est certain. Et vous avez donc toujours entretenu une correspondance avec Lovel ?

— J’en ai reçu un petit bout de billet pour me dire qu’il y aurait hier un paquet à Tannonburgh, avec des lettres très importantes pour la famille de Knockwinnock, car il soupçonnait que l’on ouvrait les lettres au bureau de Fairport. Et il faut que cela soit vrai, car j’ai entendu dire que M. Mailsetter allait perdre sa place, pour s’être trop occupé des affaires des autres et pas assez des siennes.

— Et quelle récompense espérez-vous, Édie, pour avoir été le conseiller, le messager, le gardien, le confident de toutes ces affaires-là ?

— Que diable voulez-vous que j’espère, excepté que quelques uns des gentilshommes du pays viendront au convoi du vieux pauvre, et que vous porterez peut-être la tête vous-même, comme vous le fîtes pour le pauvre Steenie Mucklebackit. Quelle peine cela m’a-t-il donnée ? Il m’est égal d’aller d’un côté ou d’un autre, à moi qui suis toujours sur les chemins. Mais, par exemple, j’avoue que j’étais bien joyeux quand je suis sorti de prison, car je craignais que cette maudite lettre n’arrivât pendant que j’étais renfermé là comme une huître, et que tout allât de travers, faute de pouvoir l’aller chercher. Il y avait des fois où je pensais à me décharger sur vous de cela, mais c’eut été désobéir aux ordres positifs de M. Lovel ; et je savais qu’il avait besoin de voir quelqu’un à Édimbourg, avant de pouvoir faire ce qu’il voulait pour sir Arthur et sa famille.

— Et maintenant voyons un peu les affaires publiques, Édie. On dit toujours qu’ils viennent, n’est-ce pas ?

— Ma foi oui, monsieur, et il est arrivé des ordres sévères pour que les volontaires et les forces qui sont ici se tinssent prêts pour une alerte. On dit aussi qu’il va venir ici un jeune officier de mérite pour examiner nos moyens de défense. J’ai vu la servante du bailli qui nettoyait son ceinturon et sa culotte blanche, et je l’ai aidée un peu, car elle ne s’y entendait guère ; si bien que j’ai appris toutes les nouvelles pour ma peine.

— Et que pensez-vous de tout cela, vous, comme vieux soldat ?

— Ma foi, je ne sais pas… S’ils viennent en si grand nombre qu’on le dit, ils seront en force contre nous… Parmi nos volontaires aussi il ne manque pas de vieux enfans, quoiqu’il ne convienne guère de parler de l’incapacité des autres, à moi qui ne suis pas bon à grand’chose non plus maintenant… mais malgré tout cela, nous ferons de notre mieux.

— Comment ! est-ce que l’esprit guerrier se réveillerait aussi en vous, Édie ?

Ici le feu brille jusques aux cendres.

« Je n’aurais pas cru, Édie, que vous eussiez grand’chose à défendre.

— Moi, monsieur ! pas grand’chose à défendre !… Et le pays donc, et les coteaux, et les vallons, que j’aime tant à parcourir ! et les foyers des ménagères, où je trouve mon morceau de pain ! et les petits enfans, qui accourent pour jouer avec moi quand j’arrive à l’entrée d’une ville ! Diable, continua-t-il en saisissant son bâton avec beaucoup d’énergie, si j’avais autant de vigueur que de bonne volonté, avec une aussi bonne cause, j’en coucherais encore quelques uns par terre.

— Bravo, bravo, Édie ! un pays n’est jamais dans un bien grand danger, quand le mendiant est aussi prêt à combattre pour son écuelle que le seigneur pour ses biens. »

La conversation revint ensuite sur les particularités de la nuit que le mendiant et Lovel avaient passée dans les ruines de Saint-Ruth, et dont les détails amusèrent beaucoup l’Antiquaire.

« J’aurais donné une guinée, dit-il, pour voir ce fripon d’Allemand en proie aux angoisses de cette terreur que son charlatanisme lui fait inspirer aux autres, et craignant alternativement la fureur de son patron, et l’apparition de quelque lutin.

— Ma foi, dit le mendiant, il était temps que cela finît pour lui, car vous auriez dit que l’esprit de l’Enfer-Harnaché lui-même s’était emparé de sir Arthur. Mais que va devenir ce vagabond ?

— J’ai appris ce matin, par une lettre que j’ai reçue, qu’il vous décharge de l’accusation portée contre vous, et qu’il offre de faire des révélations qui rendront l’arrangement des affaires de sir Arthur plus facile que l’on n’espérait : c’est ce que m’écrit le shérif, et il ajoute qu’il a communiqué quelques renseignemens secrets importans au gouvernement, en considération desquels il doit, dit-on, le renvoyer dans son pays pour y jouer ses tours d’escroc.

— Et toutes les galeries, les roues, les grues, les machines qu’on avait faites pour Glenwithershins, qu’est-ce que tout cela deviendra ? dit Édie.

— J’espère que les ouvriers, avant de se disperser, feront un feu de joie de toutes leurs machines, comme une armée détruit son artillerie quand elle est forcée de lever un siège ; et quant aux galeries, je les abandonne : elles pourront peut-être encore servir de piège à ceux qui, avec autant de sagesse que nous, voudraient aussi lâcher la proie pour attraper l’ombre.

— Seigneur mon Dieu ! brûler toutes ces machines ! c’est une grande perte pourtant ; ne feriez-vous pas mieux de chercher à rattraper ce que vous pourriez de vos cent livres sterling sur la vente de ces objets ? » dit le mendiant d’un ton qui semblait affecter l’intérêt.

« Pas un liard, » dit l’Antiquaire avec humeur, en s’éloignant de lui de deux ou trois pas ; puis revenant et souriant à demi de son irritabilité, il lui dit : « Entre dans la maison, et souviens-toi du conseil que je te donne, de ne jamais parler de mine devant moi, ni devant mon neveu d’un phoque ou veau marin, comme vous l’appelez, vous autres.

— Il faut que je m’en retourne à Fairport, dit le vieillard errant, pour voir ce qu’on y dit de l’invasion ; mais je me souviendrai de ce que Votre Honneur vient de me dire, de ne jamais vous parler d’un veau marin, ni au capitaine Hector des 100 livres sterling que vous avez données à Dousterswivel.

— Que le diable t’emporte… Ne t’ai-je pas dit de ne pas me parler de cela ?

— Seigneur ! dit Édie en affectant un air de surprise, je croyais qu’il n’était pas défendu de plaisanter en causant avec Votre Honneur, si ce n’est au sujet du Prétorium et de l’obole que le porte-balle vous a vendue pour une vieille médaille…

— Bah, bah, » dit l’Antiquaire en s’éloignant rapidement, et rentrant dans la maison.

Le mendiant resta un moment à le suivre des yeux, puis partit d’un éclat de rire, de même qu’une pie ou un perroquet qui s’applaudit du succès de quelqu’un de ses tours malins ; puis il reprit encore une fois la route de Fairport. L’habitude d’errer sans cesse lui avait donné une espèce d’inquiétude et de besoin de changer de place, qui augmentait encore par le plaisir qu’il avait à recueillir les nouvelles. Il eut bientôt regagné la ville, qu’il n’avait quittée le matin pour aucun autre motif que pour faire une petite causerie avec Monkbarns.


  1. Tels étaient vos désirs. a. m.