L’Avenir agricole de Madagascar

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L’AVENIR AGRICOLE
DE
MADAGASCAR

Aujourd’hui que Madagascar fait partie de notre domaine colonial, et que nous sommes en pleine possession de cette île qui nous a coûté de grands sacrifices, que la pacification peut être regardée comme complète, et que presque toutes les régions sont accessibles au colon européen, le moment est venu de nous rendre compte de la valeur de notre acquisition.

L’ile de Madagascar a une surface qui est sensiblement supérieure à celle de la France. Elle est située dans une région où les conditions de climat sont, en général, favorables au développement végétal, et l’idée de l’utiliser pour la culture se présente avec des apparences séduisantes.

Elle a été appréciée très différemment par les voyageurs qui l’ont parcourue, et même par ceux qui y ont fait de longs séjours, et représentée tantôt comme ne contenant en majeure partie que des terres impropres à la culture, tantôt comme offrant, au contraire, de grandes ressources. La tendance des colons est souvent d’adopter les opinions les plus favorables, et ils peuvent se préparer ainsi de grandes déceptions.

La valeur agricole d’un pays neuf doit être examinée sans idées préconçues, sans cet enthousiasme qui porte aux actions irréfléchies. Elle ne dépend qu’en partie des efforts que l’homme peut y développer, mais bien plus d’un ensemble de conditions qui doivent être déterminées par des recherches positives.

En envisageant dans son ensemble notre vaste empire colonial, qui présente une si grande diversité de situations et de conditions économiques, nous pouvons avoir la pensée d’en tirer de nombreux produits que nous demandons aujourd’hui à d’autres pays. Si nos propres possessions peuvent nous les donner, c’est un tribut de moins que nous payons à l’étranger, c’est le travail de nos nationaux et des populations qui nous sont soumises que nous encourageons, et nous augmentons ainsi la fortune publique de notre pays.

A l’heure qu’il est, les terres de nos colonies sont en général peu exploitées, et les immenses surfaces dont nous pouvons disposer dans les diverses parties du monde exigeraient, pour leur mise en valeur, plus de bras que nous ne pouvons en fournir, plus de capitaux que nous ne sommes disposés à en engager dans ces entreprises, plus d’efforts que nous n’en donnons actuellement.

Nous nous bornerons dans cette étude à envisager l’île de Madagascar, indépendamment de nos autres possessions coloniales. Elle est la dernière venue et, à ce titre, elle attire vivement l’attention de la Métropole.

Après les premières phases de la conquête, le général Gallieni a porté tous ses efforts vers la recherche des richesses naturelles qu’elle renferme, et vers les moyens de les utiliser. Il a été secondé dans cette œuvre par ses collaborateurs civils et militaires, dont les voyages et les séjours dans les diverses parties de l’île ont contribué à la connaissance des ressources qu’elle présente.

Aussi, malgré son étendue, l’île de Madagascar est-elle plus connue, plus fouillée que certaines de nos colonies plus anciennes, comme le montrent les nombreuses publications faites sur les diverses branches dans lesquelles s’exerce le travail de l’indigène et dans lesquelles peut s’exercer l’activité du colon européen.

L’impulsion qui doit mettre en œuvre l’activité de l’émigrant est donnée, et les renseignemens qui peuvent lui servir de guide sont déjà nombreux.

Mais, pour que le dévouement du personnel attaché à l’administration de l’île ne soit pas stérile, il faut que les conditions qui favorisent la mise en culture du sol et la possibilité de son exploitation se trouvent remplies.

C’est ce que nous nous proposons d’examiner.

Nous étudierons successivement les conditions qui sont les facteurs essentiels de la prospérité d’un pays, en mettant à contribution les observations personnelles de M. Alfred Grandidier, le Guide de l’Immigrant, publié sous la direction de ce savant éminent, à la demande du général Gallieni, la Revue de Madagascar, et surtout les renseignemens que nous ont fournis MM. Prud’homme, chef du service de l’Agriculture, et le commandant Dubois, de l’Etat-Major du Gouverneur général.

Nous passerons ainsi en revue le climat, et, en particulier, la température, l’abondance des pluies, l’intensité des perturbations atmosphériques ; la disposition topographique, qui influe sur la possibilité de la mise en culture et qui règle l’utilisation de l’eau ; les moyens de communication, d’où dépend la facilité de l’approvisionnement et de l’écoulement des produits ; la possibilité de se procurer la main-d’œuvre ; la nature du sol, c’est-à-dire sa teneur en principes fertilisans et son aptitude à se prêter aux façons aratoires.


I

L’ile de Madagascar est située dans l’hémisphère Sud de l’Océan Indien, à environ 12 000 kilomètres de la France. Sa plus grande longueur est de près de 1 600 kilomètres, sa largeur moyenne de 430 kilomètres. Elle a une superficie de 600 000 kilomètres carrés, un peu plus grande que celle de la France, de la Belgique et de la Hollande réunies. Sa population est d’environ 5 millions d’habitans, soit 8 habitans par kilomètre carré ; celle de la France étant de 71 habitans par kilomètre carré, Madagascar est donc neuf fois moins peuplée que la Métropole. Les côtes présentent un développement de 5 000 kilomètres, chiffre relativement faible, car elles sont peu découpées. C’est un pays de hauts plateaux qui se terminent à l’Est par des pentes très rapides et à l’Ouest par des plaines étendues.

Madagascar est situé dans la région tropicale, caractérisée par deux saisons bien tranchées, l’une sèche et relativement fraîche, l’autre chaude et humide. Mais l’île n’offre pas une homogénéité telle que l’on puisse appliquer à l’ensemble de son territoire la même appréciation. Le pays étant très montagneux, les altitudes très diverses modifient considérablement la température et le régime des eaux.

Son climat est relativement tempéré. Ainsi, par exemple, à Tananarive, situé à 1 400 mètres, la température moyenne est de 18°, avec un minimum de 6°, et un maximum de 29°. A Fianarantsoa, la température moyenne est de 19°, variant de 12° (minimum) à 27° (maximum).

Sur les côtes, c’est-à-dire au niveau de la mer, la température est beaucoup plus élevée ; à Diego-Suarez, elle est de 27°,4 en moyenne. Dans la région de Fort-Dauphin, la moyenne est de 23°, 8, avec un maximum de 27° et un minimum de 18°. A Tamatave, elle est de 24°, avec un maximum de 30 à 32° et un minimum de 15°.

La côte occidentale est plus chaude encore. Ainsi, la moyenne de Majunga est de 29°, avec un maximum de 35°, 7, et un minimum de 16°, 5.

Toutes les parties situées à un niveau peu élevé au-dessus de la mer se trouvent donc dans les conditions des climats tropicaux proprement dits. Mais, comme beaucoup de ceux-ci, ils sont sujets à des ouragans violens qui occasionnent de grands dégâts dans les cultures.

La distribution des pluies est elle-même très variable. C’est ainsi que, sur la côte Est, les vents chargés de vapeur d’eau de l’Océan Indien, se refroidissant contre les gradins successifs de la première chaîne côtière, déposent leur trop-plein d’eau. A Vohémar, il pleut pendant la moitié de l’année ; il en est de même à Tamatave, où il tombe jusqu’à 3 ou 4 mètres d’eau par an, c’est-à-dire cinq ou six fois plus qu’à Paris. Au Nord de l’ile, à Diego-Suarez, il tombe 70 centimètres d’eau répartis en 60 jours environ ; au Sud, à Fort-Dauphin, il pleut 90 jours environ, et il tombe 1 mètre d’eau.

Comme on le voit, c’est vers le milieu de la côte qu’il pleut le plus ; au Nord et au Sud, les pluies sont beaucoup moins abondantes. Au Sud-Ouest de l’île, il pleut très rarement et la sécheresse persiste pendant huit mois.

A l’Ouest et sur les hauts plateaux de l’intérieur, il y a deux saisons bien tranchées : celle des pluies et celle de la sécheresse. La première dure de novembre à mars ; les pluies y sont fréquentes et tombent quelquefois plusieurs jours sans discontinuer. A Tananarive et à Fianarantsoa, il tombe environ, pendant cette période, 1 m. 20 d’eau pour 60 à 90 jours de pluie ; à Majunga, il tombe jusqu’à 2 mètres d’eau par an : mais, pendant cinq à six mois, soit de mai à septembre, il ne tombe pas une goutte d’eau.

La salubrité est en rapport, d’un côté avec la température et l’humidité, de l’autre, avec la situation topographique. Elle influe considérablement sur la possibilité de la mise en valeur d’une région. En général, dans les parties les plus chaudes et les plus humides, surtout sur les côtes, de même que dans celles où se trouvent des eaux stagnantes et des terres marécageuses, les conditions sanitaires sont peu favorables. Dans la partie montagneuse, au contraire, telles que l’Imerina et le Betsileo, le climat est salubre ; il est plus tempéré, moins humide, et l’écoulement des eaux est plus facile. Cependant, là aussi, on trouve des bas-fonds qui sont plus ou moins fiévreux.

En dehors de la zone côtière, peu étendue, il existe un amoncellement de montagnes plus ou moins mamelonnées, séparées par des vallées étroites. On y trouve un grand nombre de cours d’eau, quelquefois réguliers, plus souvent intermittens et à régime torrentiel, qui, employés à l’arrosage, augmentent beaucoup la fertilité des terres.

Les vallées qui bordent ces cours d’eau sont généralement étroites, mais quelquefois elles s’élargissent au point de former de vastes plaines. La disposition topographique est telle que l’utilisation de l’eau devient souvent possible. Les indigènes y ont eu recours de tout temps et ont amené la pratique de l’arrosage à un certain degré de perfection. L’application des procédés usités en Europe peut certainement étendre beaucoup les superficies irrigables.

Ces eaux des ruisseaux et des torrens agissent non seulement en mettant de l’eau à la disposition des plantes, mais elles apportent des élémens fertilisans en dissolution ou en suspension et déposent des limons.

Avant la conquête, les voies de communication étaient dans un état rudimentaire ; les routes n’existaient pas, il n’y avait que des sentiers, ou tout au plus des chemins muletiers ; quelques cours d’eau étaient parcourus par des pirogues.

Depuis l’occupation française, cet état de choses s’est modifié considérablement. Aujourd’hui, des routes, presque entièrement achevées, réunissent Majunga et Tamatave à Tananarive, et mettent en communication les localités les plus importantes. Un chemin de fer, qui doit relier la capitale à la côte Est, est en construction. Enfin les transports fluviaux ont été organisés depuis peu sur les principaux cours cVeau, comme l’Iaroka, le Betsiboka, le Tsiribihina, l’Onilaby, etc.

Les routes nouvellement construites sont carrossables sur presque toute leur étendue, et permettront de renoncer aux porteurs (bourjanes) pour les approvisionnemens du Centre et de diminuer le prix de revient actuel des transports

Les conditions de ravitaillement de l’Imerina et du Betsileo se sont donc très sensiblement améliorées depuis cinq ans ; elles étaient devenues très onéreuses, en raison de l’augmentation croissante des transports, due au développement de la colonie européenne, car il s’était établi une hausse considérable des salaires des porteurs. Ceux-ci, avant la campagne, étaient payés à raison de 15 francs par charge de 30 kilos et sont arrivés à exiger un salaire de 33 à 40 francs pour porter 25 kilos de marchandises de la côte à Tananarive. Aussi était-il impossible de transporter d’autres marchandises que celles qui sont strictement indispensables à la vie.


Madagascar n’est pas très peuplé ; la répartition des indigènes est, d’autre part, fort irrégulière ; c’est ainsi que les environs de Tananarive et de Fianarantsoa ont une population relativement dense, tandis que certaines régions du Sud sont à peu près désertes.

Il existe, à Madagascar, des races différant profondément les unes des autres, sous le rapport de l’intelligence et des aptitudes, mais tous les Malgaches sont, d’une manière générale, des travailleurs agricoles d’une valeur assez médiocre.

Les meilleurs d’entre eux, comme main-d’œuvre agricole, sont les Malgaches habitant le centre de l’île (exception faite de l’ancienne classe dirigeante, c’est-à-dire des Hovas, qui sont avant tout des commerçans). Habitués à vivre dans un pays peu fertile, ils se sont vus contraints d’améliorer, dans une certaine mesure, leurs méthodes de culture, et se sont accoutumés peu à peu à travailler la terre d’une façon plus intelligente. On peut donc dire que, toutes proportions gardées, les habitans du Centre et surtout les Betsileo sont des ouvriers assez bons et certainement susceptibles de se perfectionner, malgré leur paresse et leur indolence.

Les indigènes des côtes et ceux des régions moyennes offrent beaucoup moins de ressources. Le Betsimisaraka (environs de Tamatave), de même que le Sakalave, le Maliafaly, l’Antandry, ne consent pas à fournir un travail régulier. Vivant dans une région privilégiée, qui lui fournit abondamment ce qu’il lui faut pour vivre, il se décide difficilement à venir travailler chez les planteurs. On ne pourra tirer qu’un faible parti de ces populations, qui ne connaissent pas l’épargne et n’ont presque aucun besoin, à moins qu’on n’use de contrainte à leur égard.

Il existe, sur la côte orientale, entre Mananjary et Fort-Dauphin, une tribu douce, tranquille et adonnée aux travaux de culture ; c’est celle des Antaimoros, indigènes robustes qui, de temps à autre, viennent passer quelques mois, parfois même une année, sur les plantations du versant Est. Les colons agricoles de la côte comptent beaucoup sur eux pour entretenir et développer leurs cultures ; mais cette population n’est pas assez nombreuse pour fournir les travailleurs dont auraient besoin les planteurs et les diverses administrations de la colonie ; aussi se produit-il une hausse très sensible des salaires.

La faible population de Madagascar, la paresse des indigènes et l’importance des travaux entrepris ou simplement projetés par l’administration, rendent nécessaire l’introduction de main-d’œuvre étrangère dans la colonie. L’exemple des cinq années qui viennent de s’écouler démontre que la majeure partie des indigènes de la zone côtière et de la côte Est, en particulier, ne consentiront pas à travailler à un prix raisonnable, s’ils n’y sont pas forcés.

Les idées généralement acceptées en Europe ne permettant pas d’espérer qu’on se résoudra à faire du travail une obligation pour les indigènes, et les cours des principales denrées coloniales déterminant un maximum de salaires que les planteurs ne peuvent dépasser, on est amené à envisager l’introduction de main-d’œuvre étrangère comme une nécessité.

Sumatra, Ceylan et la presqu’île malaise ne doivent leur prospérité qu’aux Chinois et aux Hindous. L’avenir agricole de Madagascar ne sera assuré que lorsqu’un courant d’immigration de coolies africains ou asiatiques aura été créé.

L’administration n’a d’ailleurs jamais perdu de vue cette importante question, qui rentrait dans le programme de la mission envoyée récemment en Extrême-Orient par le général Gallieni. MM. Guyon et Lacaze, administrateurs des colonies, spécialement chargés de cette question, visitèrent Ceylan et Java, puis se rendirent en Chine et au Japon où, conformément aux instructions reçues, ils entamèrent des négociations avec d’importantes sociétés d’émigration. Il résulte des renseignemens recueillis par cette mission, qu’il serait possible d’introduire à Madagascar des Chinois, des Japonais et peut-être même des Javanais ou des Hindous, qui s’habitueraient certainement au climat de la colonie.

Les Chinois, qui donnent de si remarquables résultats dans les plantations de tabac de Deli (Sumatra), région très malsaine, et dans la presqu’île de Malacca, supporteraient sans difficulté le climat des parties les plus insalubres de la côte orientale de Madagascar.

Les Hindous, et principalement les Tamouls, qui fournissent, à Ceylan, toute la main-d’œuvre nécessaire aux planteurs de thé, pourraient être utilisés dans les mêmes régions.

Le Japonais, au contraire, originaire d’un pays tempéré, ne pourrait sans doute être employé à Madagascar qu’à plus de 800 ou 1 000 mètres d’altitude.

Sous le rapport de la quantité de travail produite, les Chinois, les Japonais et les Hindous sont les meilleurs ; les Javanais, d’un caractère mou et paresseux, ne donnent de bons résultats, dans les Indes néerlandaises, que grâce à l’extraordinaire densité de la population de Java, qui permet d’obtenir facilement un grand nombre de travailleurs pour un salaire extrêmement peu élevé (0 fr. 15 à 0 fr. 25 par jour, pour un homme).

La main-d’œuvre étrangère, quel que soit le pays d’où elle provient, doit, pour donner de bons résultats, être recrutée avec le plus grand soin. Les planteurs de Sumatra et ceux de Ceylan n’hésitent pas à envoyer des agens, les uns en Chine, les autres aux Indes, pour opérer le recrutement de leurs ouvriers dans de bonnes conditions. On risque, sans cette précaution, d’introduire, au lieu de bons ouvriers agricoles, des vagabonds dont on ne peut tirer parti ou des commerçans de détail, qui viennent faire concurrence au petit commerçant européen d’abord, et ensuite aux plus gros négocians (exemple : Singapore, Batavia, Poulo, Penangete). C’est surtout dans le recrutement de la main-d’œuvre indienne et chinoise que des précautions spéciales doivent être prises.

L’avenir agricole de Madagascar dépend beaucoup, comme on vient de le voir, d’une bonne utilisation du travail des indigènes et encore plus, peut-être, de l’introduction d’une bonne main-d’œuvre agricole étrangère.

Il va sans dire qu’elle dépend, en outre, de la continuité des efforts de l’administration et des colons. Le prospérité de Java ou de Ceylan n’est pas l’œuvre de quelques années, ni même d’une génération ; il a fallu bien des années d’efforts dirigés vers le même but et suivant une même méthode, pour arriver à un résultat appréciable et assurer la prospérité de ces deux îles.


II

Un des facteurs les plus importans de la prospérité agricole d’un pays, c’est la constitution du sol. Celui-ci ne doit pas seulement fournir les élémens nutritifs nécessaires à la production des récoltes, il doit encore réunir les conditions physiques indispensables aux travaux culturaux.

L’étude des terres peut servir de guide aux colons, pour les détourner des sols qui leur occasionneraient des mécomptes, et leur indiquer ceux qui, au contraire, seraient exploités avantageusement. Indiquons brièvement quels sont les principaux facteurs de la fertilité des terres.

La plante puise dans le sol une partie de ses élémens constitutifs, parmi lesquels l’azote, l’acide phosphorique, la potasse, la chaux, sont les plus importans. Ces substances n’existent pas toujours en quantités suffisantes, et la pénurie de l’une ou l’autre d’entre elles condamne la terre à la stérilité.

L’analyse chimique du sol est un moyen de déterminer sa valeur agricole bien plus sûrement que l’examen de l’intensité de la végétation. On admet, d’après les observations de P. de Gasparin et de M. E. Risler, qui ont analysé les terres du territoire français, et qui ont comparé les chiffres obtenus aux résultats culturaux, qu’on peut classer les terrains suivant leur richesse en azote, acide phosphorique et potasse. Cette classification est arbitraire ; elle concorde néanmoins avec la pratique culturale, dans le plus grand nombre des cas. Elle a été établie pour les terres de la France, situées sous un climat tempéré, où le régime des eaux est assez régulier. Mais on aurait peut-être tort de trop la généraliser, et de l’étendre à des régions où les conditions d’existence des organismes vivans sont profondément modifiées par un milieu ambiant très différent.

Nous avons en effet remarqué qu’à égalité de richesse en élémens nutritifs, les terres des régions méridionales, et principalement des régions tropicales, sont plus fertiles que les terres situées dans des régions tempérées. On ne peut donc pas appliquer le même coefficient de fertilité à des terres de même composition, prises dans des situations de climat différentes. Ainsi, à Ceylan, dans le Cambodge, à Java, à Sumatra, etc., et même dans le Midi de la France, on voit des terres pauvres porter d’abondantes récoltes. A Madagascar, ce fait se constate aussi. Cependant, il ne faut pas perdre de vue qu’une terre faiblement pourvue d’élémens nutritifs ne peut être que d’une fertilité de courte durée, à moins qu’il n’y ait une restitution suffisante des principes exportés. Les récoltes, en effet, épuisent le sol d’autant plus vite que les réserves qu’il contient sont plus faibles.

Nous devons donc faire entrer, en une juste mesure, dans l’évaluation de l’avenir agricole d’un pays, les réserves de fertilité que contient le sol. A côté de l’analyse chimique, doit se placer l’observation de la végétation, dont l’intensité est en rapport avec la richesse du sol ; mais cette observation induit quelquefois en erreur. Il peut se faire, en effet, qu’au début d’une mise en exploitation, une terre faiblement pourvue d’élémens fertilisans porte une belle récolte ; mais plusieurs récoltes successives l’épuiseront rapidement.

Il se peut aussi que des plantes sans valeur alimentaire y prennent un certain développement. Mais les espèces susceptibles de donner des grains pour la nourriture de l’homme et des herbes savoureuses pour celle des animaux sont absentes des terrains qui n’ont pas une bonne réserve de principes fertilisans. Enfin, on trouve une végétation luxuriante dans des endroits particulièrement privilégiés sous le rapport de l’humidité, sans qu’il faille en conclure à un fonds réel de fertilité dans la région avoisinante.

Pour apprécier ce que nous sommes convenus d’appeler la fertilité d’un terrain, on voit que l’examen superficiel de la végétation ne suffit pas et que l’analyse chimique s’impose. La composition et la nature des terres sont dans une relation étroite avec les roches dont elles proviennent : il est donc important, au point de vue agricole, de connaître l’origine géologique des sols.

La constitution géologique de l’île se résume d’une façon assez simple : la région montagneuse, qui occupe au moins les deux tiers de l’île, comprend principalement des gneiss et des micaschistes profondément décomposés et transformés en une argile rougeâtre, qui donne à l’ensemble du massif, et en général à toute l’île, cette couleur particulière aux terrains ocreux ; l’Ouest, beaucoup moins accidenté, est formé par des terrains sédimentaires. Les roches volcaniques apparaissent en certains points, et apportent avec elles une grande fertilité. Madagascar est d’ailleurs secoué par de fréquens tremblemens de terre.

Le cordon littoral est surtout constitué par un mélange des alluvions provenant du massif central, charriées par les cours d’eau, et par divers matériaux déposés par les eaux marines. Elles se prêtent à des cultures que favorise l’humidité du climat.

A l’influence de l’origine géologique, qui apporte une différenciation dans la constitution du sol, s’ajoute celle des dispositions topographiques. C’est ainsi que les mamelons du Centre, desséchés par la violence du vent et ravinés par les pluies, sont peu propres à porter de la végétation.

Les fonds des vallées, au contraire, où les élémens fins s’acumulent, où les eaux séjournent plus longtemps, et qui sont abrités contre les vents, sont choisis pour les cultures ; certains de ces fonds sont formés par d’anciens lacs, où se sont accumulées des alluvions et où les débris animaux et végétaux ont donné naissance à des sols d’une grande fertilité. Même dans les parties centrales de l’île, ces vallées sont nombreuses et forment quelquefois de vastes plaines.

Examinons, au point de vue de la nature des terres, les principales régions de l’île.

Le vaste massif de l’Imerina, situé dans la partie centrale, appartient aux formations gneissiques ; le climat est tempéré et sain, La partie montagneuse est presque entièrement dénudée ; la végétation n’est vigoureuse que dans les fonds de vallées.

Prise dans son ensemble, l’Imerina ne peut pas être transformée en une région d’exploitation agricole intensive ; son sol est très pauvre ; l’acide phosphorique, la potasse, la chaux, l’humus lui manquent. En outre, ses terres sont compactes et imperméables, se prennent en pâte par la pluie et se durcissent par la sécheresse, ce qui les rend difficiles à travailler ; elles se ravinent par les eaux pluviales, et se crevassent pendant la période sèche.

Il nous paraît hasardeux d’établir des cultures dans les terres placées dans de pareilles conditions, et les essais que l’on voudrait faire dans ce sens ne devraient être faits que sur une petite échelle.

Ce que nous venons de dire s’adresse plus particulièrement aux terres rouges de mamelons, c’est-à-dire aux immenses surfaces qui occupent la majeure partie du massif central de l’île et qui donnent à tout ce pays sa physionomie particulière. Mais les vallées et les bas-fonds se présentent dans de bien meilleures conditions ; on est en droit d’espérer, d’après la composition et la nature des terres qui les forment, qu’ils sont susceptibles d’être fructueusement exploités. Les eaux de pluie ont accumulé dans ces cuvettes les élémens fins enlevés aux flancs des coteaux. Aussi y rencontre-t-on souvent une grande fertilité due aux résidus des végétations antérieures, qui ont en quelque sorte centralisé les élémens utiles des terrains avoisinans et qui ont formé de l’humus, élément essentiel des terres meubles et perméables. Enfin, le sol y garde une certaine fraîcheur qui exalte encore la fertilité.

C’est sur les fonds de vallées que le colon doit exclusivement porter ses efforts. Mais beaucoup de vallées sont étroites et n’offrent pas des surfaces d’un seul tenant assez étendues pour que la grande colonisation s’y établisse ; elles conviennent plutôt à la petite culture.

Dans les lieux cultivés par les indigènes, et particulièrement dans ceux qui sont situés à proximité des villages, il n’est pas rare de rencontrer des terrains très riches, où se sont accumulées les fumures qui ont graduellement transformé le sol, particulièrement les cendres végétales qui apportent la potasse, l’acide phosphorique et la chaux, dont les terres de l’Imerina sont peu pourvues. Aussi trouve-t-on souvent des endroits où la culture maraîchère est pratiquée avec succès. Mais ce sont là des cas isolés, des conditions exceptionnelles ; ils n’infirment pas le jugement que nous portons sur l’ensemble des terres de l’Imerina.

L’exemple des terres enrichies en humus permet de croire qu’une longue suite d’améliorations peut amener les terrains pauvres à un certain degré de fertilité ; mais c’est l’œuvre des siècles, et la génération qui voudrait entreprendre ces modifications s’y userait sans profit immédiat.

La vaste région du Betsileo, située au Sud de la précédente, est placée dans les mêmes conditions ; les terres y sont de même nature et ne sont également utilisables que dans les vallées et les bas-fonds. Celle d’Anjozorobé, située au Nord-Est de Tananarive, très montagneuse et très arrosée, est analogue aux précédentes, mais avec des terres un peu plus riches.

Dans les cercles d’Ambatondrazaka et de Moramanga, intermédiaires entre la côte Est et le massif central, on trouve, à côté de terres analogues à celles de l’Imerina, des dépôts lacustres d’une grande richesse, où les cultures les plus exigeantes peuvent se développer plantureusement.

Le Betsiriry, situé à l’Ouest de l’Imerina, forme un pays généralement plat, constitué en majeure partie par des terres sédimentaires plus ou moins calcaires et dépourvues de cette couleur ocreuse qui caractérise le massif central. Leur richesse fondamentale n’est pas très grande, mais elles sont meubles et perméables, d’un travail facile, et susceptibles d’être mises en culture ; le climat en est très sec ; elles sont traversées par de nombreux cours d’eau qui permettent l’arrosage. Quant aux surfaces dénudées et pierreuses qui y forment de véritables causses, elles sont impropres à la culture.

La province de Diego-Suarez est la plus septentrionale de l’île ; elle comprend l’important massif volcanique de la motagne d’Ambre, d’où descendent de nombreux cours d’eau ; le climat est assez chaud, mais sain, et l’Européen peut y vivre. Les terres en sont riches et d’une grande fertilité ; la température y est élevée et les pluies y sont assez abondantes ; on y trouve donc les conditions les plus favorables à la culture.

Les terres de la province de Vohémar, située sur la côte au Nord de l’île, rappellent celles de l’Imerina et ne sont guère mieux pourvues que ces dernières en principes fertilisans, quelquefois même elles sont encore plus ingrates.

A quelques exceptions près, elles sont peu propres à être mises en culture et n’offrent pas de ressources suffisantes pour attirer la colonisation agricole intensive. Ce n’est que dans les parties voisines du littoral que celle-ci peut prendre un certain développement.

La province de Maroantsetra, située au Sud de la précédente, comprend des terres assez riches, meubles et perméables, ne durcissant que peu par la dessiccation ; elles paraissent, en général, susceptibles d’être mises en exploitation ; le climat, d’ailleurs, est particulièrement favorable à la végétation.

Les terres de la province de Tamatave, placée à peu près au milieu de la côte Est, ont un certain degré d’ameublissement, et sont assez bien pourvues d’élémens fertilisans.

Les pluies y sont abondantes et la température y est élevée.

La province d’Andévorante paraît principalement formée de ces terres ocreuses que nous rencontrons si fréquemment dans l’île. Sauf en quelques points privilégiés, elle ne présente pas de grandes ressources.

Dans celle de Manahoro, les terres sont généralement riches en humus et en acide phosphorique, et se présentent dans des conditions satisfaisantes.

Dans la province de Mananjary, les fonds de vallées sont formés par des accumulations de matières fertilisantes ; mais les terres de coteaux sont assez pauvres.

Celle de Farafangana contient, à côté de terres ocreuses infertiles, des terres d’alluvions perméables et faciles à entamer par les instrumens de labour, véritables terres arables qui doivent attirer l’attention des colons.

Le cercle de Fort-Dauphin est situé au Sud de l’île ; il comprend un pays très mouvementé, sauf au voisinage immédiat de la mer, et bien arrosé ; sur un grand nombre de points, les terrains volcaniques affleurent ; les cultures sont très prospères dans les environs de Fort-Dauphin, principalement dans les vallées.

Les terres du cercle de Tuléar sont assez variables. On y trouve des terres ocreuses ingrates, à côté d’autres, franchement calcaires, assez riches et meubles, très différentes de celles qu’on rencontre le plus communément dans l’île. Là où l’arrosage est possible, on peut espérer en obtenir des récoltes satisfaisantes.

Celles du cercle de Maintirano sont les unes compactes, les autres sableuses et perméables, mais, en général, elles n’ont pas une grande richesse.

Celles de la province de Majunga, située sur la côte Nord-Ouest de l’île, n’ont ordinairement que des réserves assez faibles et ne peuvent pas être considérées comme offrant de grandes ressources de fertilité. Il s’y trouve cependant des sols qui, enrichis par la culture ou formés d’alluvions profondes, sont de bonne qualité.


III

La composition des sols étant ainsi déterminée, examinons la possibilité de les améliorer par l’apport des engrais et des amendemens, destinés à leur fournir les élémens qu’ils ne contiennent pas en quantités assez élevées pour produire de fortes récoltes.

Mais il ne faut pas perdre de vue que le fonds de l’alimentation des plantes est le sol, que les amendemens et les engrais ne doivent être regardés que comme des adjuvans, et que, d’ailleurs, leur emploi est réglé par des conditions économiques.

En général, les terres très pauvres ne peuvent pas pratiquement être rendues fertiles par un apport artificiel ; celui-ci, pour être efficace, devrait être si grand que peu de cultures sauraient en rémunérer la dépense.

Les terres stériles par elles-mêmes ne peuvent donc pas, dans la généralité des cas, être transformées avec profit, par les fumures, en terres de bonne production ; il convient de les abandonner.

Dans des terres qui renferment déjà de quoi fournir à une production à peu près normale, on peut arriver par des fumures relativement modérées à obtenir une récolte rémunératrice. Souvent même, l’apport de tel ou tel principe fertilisant dans une terre déjà riche par elle-même en exalte encore la fertilité, — C’est donc sur les sols de production moyenne et surtout sur ceux de grande production que l’agriculteur doit concentrer ses efforts.

Dans les pays où l’on trouve à proximité, ou avec des facilités de transport, les matériaux propres à augmenter la fertilité, il y a un grand intérêt à entrer dans la voie des améliorations. Les principaux progrès de l’agriculture dans les pays d’Europe sont dus à l’apport judicieux des principes utiles qui manquaient à la terre. Souvent, un seul des élémens fait défaut et son absence condamne le sol à la stérilité ; vient-on à le lui donner, on rend celui-ci apte à la culture.

C’est ainsi, par exemple, que l’apport de phosphates a fait rentrer dans les conditions des cultures normales les terrains granitiques, qui occupent de si grandes surfaces du territoire français ; ceux-ci contiennent en suffisance l’azote et la potasse, mais, manquant d’acide phosphorique, ils étaient de ce fait infertiles.

L’emploi d’amendemens calcaires dans les terres acides, où se sont accumulées les matières végétales, et où les plantes cultivées ne sauraient prospérer, transforme l’azote en produits assimilables et permet d’obtenir d’abondantes récoltes.

De même encore, les chaulages et les marnages pratiqués dans des terres fortes et imperméables, dont le travail est presque impossible, en amènent l’ameublissement.

Les exemples sont très nombreux des modifications heureuses apportées par un emploi judicieux de telles ou telles matières fertilisantes.

Telles sont les considérations qui s’appliquent aux pays à civilisation agricole avancée, comme ceux de l’Europe.

Mais, dans les pays neufs, qui sont éloignés des centres d’approvisionnement de matières fertilisantes, où les moyens de communication sont peu développés et les transports coûteux, on doit surtout compter sur la richesse naturelle du sol et abandonner les surfaces où celle-ci n’est pas suffisante par elle-même. Tout au plus, pour les améliorer, peut-on utiliser quelques ressources locales, quand elles sont à portée, telles que la chaux des roches calcaires, les marnes, etc., mais qu’on ne saurait employer à une certaine distance des lieux de production.

La terre doit encore être envisagée au point de vue de sa nature physique, et principalement de sa manière de se comporter au contact des eaux pluviales.

Ainsi, les terres fortes contenant beaucoup d’élémens fins se prennent en une pâte liante, quand elles sont mouillées ; elles adhèrent fortement aux instrumens de labour, s’égouttent lentement et gardent l’eau par suite de leur imperméabilité ; elles se ravinent par les pluies, surtout quand les pentes sont fortes ; d’autre part, la dessiccation les transforme en masses très dures, qui ne se laissent pas entamer par les instrumens. Même si de pareilles terres contiennent en notable proportion des principes fertilisans, elles sont peu propres à être cultivées.

Les terres légères, douées de perméabilité, se travaillent plus facilement, mais elles n’ont souvent qu’une faible réserve d’élémens nutritifs ; elles se dessèchent, d’ailleurs, rapidement et n’offrent plus alors à la plante l’eau de végétation dont elle a besoin.

Nous venons de considérer le sol dans lequel se développe la plante. Mais celui-ci n’est apte à produire des récoltes que par l’intervention de l’eau, qui doit particulièrement fixer notre attention.

Lorsque les pluies se répartissent d’une façon sensiblement régulière, le sol en retient assez pour que les plantes y trouvent la réserve nécessaire à leur accroissement. Mais il n’en est pas toujours ainsi. Dans les régions où il y a de grands intervalles entre les pluies et où les saisons se répartissent en périodes sèches et en périodes pluvieuses, l’eau peut, à certains momens, venir à manquer.

A la rigueur, une terre pauvre, alors surtout qu’il s’agit de cultures tropicales, généralement peu exigeantes, peut arriver à produire une certaine récolte, quand l’eau ne lui fait pas défaut ; mais une terre riche est vouée à la stérilité, quand elle n’a pas l’humidité suffisante. Cette observation s’applique à Madagascar, et plus encore aux Indes anglaises, où la famine se déclare dès que les pluies viennent à manquer.

Dans les pays abondamment arrosés, où l’on peut faire intervenir les eaux sous forme d’irrigation, celles-ci constituent un nouvel élément de fertilité, tant par l’humectation du sol que par les principes nutritifs que contient l’eau elle-même, en dissolution ou en suspension. Il convient de citer ce qui a été fait sous ce rapport à Java et sur la côte Est de l’Hindoustan, où des travaux d’irrigation ont permis de gagner de grandes surfaces à la culture. On ne saurait donc trop insister sur l’importance du régime des eaux ; celles-ci constituent, principalement pour les régions tropicales, le facteur essentiel de la production végétale.

Appliquons les diverses considérations qui précèdent aux terres de Madagascar. Nous voyons que l’acide phosphorique fait défaut dans le plus grand nombre de cas, surtout dans les régions où dominent les terres rouges.

Des engrais phosphatés y produiront certainement de l’effet.

Si l’on y a recours, il convient de s’adresser aux plus concentrés, afin d’éviter le transport coûteux des matières inertes. C’est ainsi que les superphosphates à haut titre, les phosphates précipités, ainsi que les scories de déphosphoration, seraient à recommander dans la généralité des cas.

Les phosphates naturels ne semblent devoir trouver leur place que dans des sols riches en matières organiques, comme on en rencontre fréquemment dans les endroits marécageux.

La potasse manque autant que l’acide phosphorique, et, dans beaucoup de terres, la proportion en est presque insignifiante.

Des engrais potassiques, chlorure de potassium et sulfate de potasse, joints aux engrais phosphatés, activeraient beaucoup la végétation. C’est ce qui explique pourquoi l’emploi de cendres végétales, qui renferment de la potasse, est si fréquent et si efficace à Madagascar.

On pourra employer, comme engrais azotés, le sulfate d’ammoniaque et les nitrates de soude et de potasse, le sang, la viande et la corne, ces derniers pouvant se trouver sur les lieux mêmes et ayant l’avantage d’ameublir le sol et d’être moins rapidement enlevés par les eaux.

Dans les sols où l’azote est accumulé sous forme de débris végétaux, il n’y a pas lieu de faire un apport d’engrais azotés ; il sera plus avantageux de chercher à mobiliser l’azote existant, en apportant des phosphates naturels, des scories, et en pratiquant des chaulages. Pour les terres qui manquent de chaux et qui, par suite, sont très compactes, des chaulages à haute dose feraient certainement de l’effet, en rendant le sol plus perméable et plus facile à travailler. Mais ils ne dispenseraient pas de l’apport des autres élémens.

On peut affirmer que toutes les cultures profiteraient des améliorations qu’on ferait ainsi subir un sol. Mais il faut envisager aussi le côté économique de la question.

Des engrais concentrés, comme ceux dont nous venons de parler, peuvent être amenés par mer sans frais excessifs. Mais les transports sur terre sont coûteux.

Sur les côtes, à proximité des ports de débarquement, il sera donc possible de recourir à ces engrais importés d’Europe, comme on le fait en grand sur d’autres points de la mer des Indes ; il en sera de même sur le parcours des lignes ferrées, si les tarifs sont suffisamment réduits, et sur beaucoup de cours d’eau que les pirogues des indigènes remontent facilement. Mais, ailleurs, dans les localités éloignées, il ne semble pas possible, à l’heure actuelle, d’amener les engrais à un prix de revient qui puisse en rendre l’emploi rémunérateur.

Avant tout, il convient d’utiliser les ressources naturelles de l’île en principes fertilisans.

Les fumiers produits par les animaux, les résidus de l’alimentation humaine, ont été employés de tout temps.

Des gisemens de phosphate ont été signalés à Madagascar ; il est probable qu’on en trouvera d’autres. S’ils sont exploités, si la monture en est faite sur place, ils constitueront une ressource pour les terrains avoisinans, et, en général, pour les parties de l’île où ils peuvent être amenés sans être grevés de trop de frais. C’est surtout, comme nous l’avons dit, aux terres acides, riches en matières organiques, que le phosphate naturel convient. Mais, à défaut d’autres engrais phosphatés, on peut l’employer dans toutes les terres.

S’il était possible de le traiter sur place pour en faire du superphosphate, on augmenterait beaucoup l’importance de la découverte de ces gisemens. Une pareille industrie pourrait s’établir, si l’on trouvait, à proximité, des gisemens de pyrite permettant de fabriquer l’acide sulfurique nécessaire à cette transformation. D’après les renseignemens qu’a bien voulu nous fournir M. Le Myre de Vilers, il existe sur la côte Est des pyrites de fer abondantes et riches, qui pourraient être utilisées pour cette fabrication.

Le calcaire apparaît en beaucoup de points, et, si l’on trouve du combustible à proximité, on peut le transformer en chaux par la cuisson, en choisissant les calcaires les plus purs, donnant une chaux grasse, et en rejetant les calcaires magnésiens, qui ne fournissent qu’un produit se délitant mal.

L’emploi de la chaux sera subordonné aux moyens de transport. En raison des grandes quantités qu’il en faut pour obtenir de l’effet, ce n’est qu’à proximité des gisemens qu’il semble possible de l’utiliser.

Comme ressources locales, nous devons encore signaler les cendres végétales, qui apportent en même temps du phosphate, de la potasse et de la chaux, c’est-à-dire les élémens qui manquent le plus souvent. On doit utiliser celles dont on dispose, mais bien se garder d’en produire dans ce seul dessein, car on aboutirait à la destruction de la végétation forestière de l’île, qu’il y a, au contraire, intérêt à maintenir et à étendre.

De toutes manières, même dans les localités d’un abord facile, l’amélioration du sol par les élémens qui lui manquent entraine des dépenses importantes.

Quand il s’agit de cultures ordinaires, comme celles des céréales, des fourrages, etc., il convient d’agir avec beaucoup de précautions, car il est probable que, dans le plus grand nombre de cas, les frais ne seront pas couverts par l’augmentation de la récolte.

Il en est autrement pour les cultures spéciales, qui donnent un revenu brut relativement élevé et qui peuvent alors supporter de plus fortes dépenses. Lorsqu’il s’agit de la vanille, du café, du thé, du cacao, etc., produits qui se vendent à un prix élevé, le surcroît de récolte peut arriver facilement à payer la dépense supplémentaire. Pour ces cultures, l’emploi des engrais s’appliquera de préférence comme on le fait à Ceylan, à Java, à l’île Bourbon.

Dans une région où une partie seulement de la surface est mise en culture, on peut arriver à concentrer sur cette dernière les principes fertilisans soustraits aux terres avoisinantes. Là où il y a des pâturages, le fumier produit par les animaux améliore les terrains cultivés. Ce sera, principalement pour les localités éloignées des voies de communication, la principale ressource en matériaux nutritifs que les colons trouveront à leur disposition.

Un autre élément de fertilité doit appeler l’attention au plus haut degré, c’est l’eau, qui a une action si puissante sur la végétation et qui, en plus de son effet stimulant, doit être considérée comme un véritable engrais ; les principes minéraux qu’elle tient en dissolution sont assimilables au plus haut degré. En outre, elle charrie le plus souvent des limons, qui déterminent un colmatage se renouvelant périodiquement, et apportent à la terre un regain de fertilité.

Les ressources locales doivent jouer le premier rôle dans les améliorations du sol, car, ainsi que nous l’avons dit plus haut, l’emploi des engrais chimiques restera forcément limité à quelques localités d’un accès facile et à des cultures spéciales de grand rapport.


IV

Ayant ainsi examiné les circonstances dans lesquelles se trouve Madagascar au point de vue du climat, de la nature des terres et des conditions économiques, jetons un coup d’œil d’ensemble sur les ressources naturelles existant dans l’île, sur la manière dont les indigènes avaient compris l’exploitation agricole, sur les produits qu’ils en tiraient pour leurs besoins, et sur les industries qu’ils avaient créées. Nous verrons ensuite quelles modifications la conquête française a déjà introduites, dans quel esprit elles ont été dirigées, quelles espérances on peut fonder sur les tentatives déjà faites, et quelle situation Madagascar est appelée à occuper parmi les pays de production agricole. Nous avons vu plus haut que les coteaux et les mamelons sont peu susceptibles d’être exploités et que les vallées seules offrent des ressources. Les indigènes avaient bien remarqué ce fait, et c’est toujours dans les fonds de vallées qu’ils avaient installé leurs cultures ; ils trouvaient là non seulement un sol plus riche, mais aussi de l’eau, qu’ils savaient distribuer suivant les besoins de leur exploitation.

Le riz peut être regardé comme le plus important de leurs produits alimentaires ; c’est la seule céréale qu’ils cultivent ; il pousse bien dans presque toutes les parties de l’île, et on trouve de très belles rizières de marais aussi bien dans la partie centrale que sur les côtes. Le riz a besoin de l’intervention de l’eau, car les rizières sont maintenues submergées, presque sans interruption, jusqu’à l’époque de la récolte. Ce n’est qu’exceptionnellement qu’on pratique la culture du riz de montagne, auquel les pluies seules fournissent l’eau nécessaire à sa végétation.

Lorsque la disposition des cours d’eau le permet, on pratique les arrosages non seulement dans le fond des vallées, mais aussi sur les flancs des coteaux en cultures étagées ; l’eau, circulant ainsi de gradins en gradins, permet de donner un développement beaucoup plus grand à la partie utilisable de la vallée. Les Malgaches en général, et surtout les Betsileo, apportent beaucoup de soins aux cultures de riz. Il paraît probable que, dans un avenir peu éloigné, Madagascar sera en mesure d’exporter une quantité assez considérable de cette céréale. La colonie est encore loin de produire tout le riz qu’elle pourrait donner. Elle aura comme premier débouché, dès que sa production deviendra suffisante, les marchés de Bourbon et de l’île Maurice, qui, actuellement, font venir du riz des Indes anglaises.

Le manioc et la patate entrent également en forte proportion dans l’alimentation des indigènes, dans toutes les parties de l’île, ainsi que d’autres plantes alimentaires, indigènes ou importées, comme la pomme de terre, le maïs, les haricots, le pois du Cap, etc.

Les indigènes ne cultivent pas de plantes fourragères et se bornent à utiliser, pour la nourriture des bestiaux, les herbes qui poussent spontanément, principalement le véro, qui est très répandu dans la haute région.

Les plantes textiles ont une importance assez grande : non seulement elles servent aux indigènes pour leurs besoins, mais elles sont encore exportées.

Le cotonnier pousse naturellement dans beaucoup de régions et particulièrement sur la zone littorale ; mais sa culture, comme celle du chanvre, est abandonnée par suite de la concurrence des cotonnades américaines.

Le rafia vient spontanément dans les terres humides à de faibles altitudes ; on le trouve surtout en grande quantité près de Vatomandry et d’Andévorante, à un peu plus de 100 kilomètres au sud de Tamatave. La tige et les grosses côtes des feuilles sont employées pour la construction des cases des indigènes, et les fibres tirées des palmes forment une matière textile qui peut servir à confectionner des tissus, dont les plus fins sont utilisés pour le vêtement et les plus grossiers pour les sacs d’emballage. On l’exporte de Madagascar, après tissage (rabanes), ou simplement sous forme de fibre, telle qu’elle est obtenue après l’avoir détachée des feuilles.

D’autres plantes textiles croissent spontanément et servent pour la sparterie et la fabrication des cordages ; telles sont principalement le vacoa, le fano, l’aloès ou agave, le kiridjy et le jute.

Les pailles et les joncs sont tressés habilement par les Malgaches, pour former des nattes, des paniers, etc.

Après les plantes textiles, signalons la soie, qui est l’objet d’une exploitation particulièrement importante de la part des indigènes ; l’industrie séricicole est, il est vrai, très primitive ; cependant, ses produits ne manquent pas de qualité. Il y a lieu de croire que, lorsqu’elle aura été perfectionnée par les Européens, elle pourra devenir prospère. La soie est produite par plusieurs espèces de chenilles indigènes ou importées, qui se nourrissent sur diverses essences forestières. Le mûrier n’est guère répandu et le ver à soie proprement dit n’est encore élevé qu’exceptionnellement.

Parmi les plantes oléagineuses, il convient de citer l’arachide, qui est cultivée dans beaucoup de régions de l’île, surtout dans l’intérieur ; elle n’est pas, à l’heure qu’il est, utilisée à la production de l’huile, mais sert directement à l’alimentation des indigènes.

Le cocotier est très abondant dans la zone littorale ; on en extrait une huile de bonne qualité. Quelques autres plantes pouvant fournir de l’huile, le ricin, le pignon d’Inde, poussent à l’état sauvage. Parmi les plantes tinctoriales, il faut citer l’indigotier et l’orseille, dont une certaine quantité est exportée.

Après les plantes cultivées, examinons la végétation forestière.

Les grandes forêts se trouvent surtout dans l’Est de l’île, et principalement dans le Nord-Est ; la baie d’Antongil est le centre d’un pays essentiellement boisé. Dans l’Ouest aussi, il en existe d’importantes. En revanche, le massif central, particulièrement l’Imerina, le Boueni, le Betsileo, est presque entièrement dénudé.

Dans toute la longueur de l’île, mais avec de nombreuses trouées, une série de forêts concentriques courent le long des divers chaînons montagneux qui constituent l’ossature générale de l’île. On évalue de 10 à 13 millions d’hectares la superficie de son domaine boisé, soit environ 20 pour 100 de la superficie totale.

Les forêts des régions moyennes et inférieures sont généralement plus riches que les forêts des régions élevées centrales. Dans les premières, on trouve surtout des bois d’ébénisterie, bois de rose, acajou, palissandre, ébène ; des bois de construction de premier choix ; des bois à sécrétions gommifères, comme les arbres à caoutchouc, les copaliers, et, sur le bord de la mer, des palétuviers.

On peut dire, d’une façon générale, que la forêt est moins développée dans les vallées abritées du vent de mer, qui sont moins humides. Au contraire, les pentes tournées vers la mer sont plus boisées.

La forêt est très différente suivant les points où on la considère. Celle de l’Est est la vraie forêt tropicale, en raison des pluies abondantes qui arrosent cette région. Celle de l’Ouest, sauf peut-être dans le Nord-Ouest, est très grêle : souvent, c’est plutôt une brousse inextricable.

Dans le Sud, enfin, pousse une végétation arborescente particulière, constituée par des arbres dépourvus de feuilles, par des plantes cactiformes, des arbres corail, des euphorbiacées qui donnent le caoutchouc.

La distribution des forêts s’explique par l’orographie et les variations du climat.

Bien que très entamées, les forêts de Madagascar possèdent encore de réelles richesses, dont il serait désastreux de tarir la source. Les indigènes ont beaucoup contribué à leur destruction en les incendiant, pour établir des cultures passagères, qui prospèrent en raison de l’humus accumulé et des cendres produites par la combustion du bois. Quand c’est la brousse qui est ainsi détruite, il n’y a pas à le regretter. Mais, quand c’est la vraie forêt, avec ses essences précieuses, c’est un mal irréparable et que l’administration aura grand intérêt à éviter.

Quand les voies de communication auront été établies, les bois pourront acquérir une plus-value considérable.

Il a été souvent question de la possibilité de tirer parti des terres du massif central et particulièrement des surfaces en coteaux, pour y développer une végétation forestière, c’est-à-dire de les boiser. Cette manière de voir repose sur l’idée que ces terrains étaient autrefois couverts de forêts, détruites probablement par les incendies que provoquaient les indigènes. Aussi parle-t-on, en réalité, non de boiser ces vastes surfaces, mais plutôt de les reboiser, c’est-à-dire de les reconstituer dans l’état qu’on suppose avoir existé autrefois. Certes, beaucoup de forêts ont été détruites, et il y a lieu de penser que, là où elles existaient, les conditions du développement d’une nouvelle végétation forestière se trouvent remplies. Qu’il soit fait là des tentatives de restauration des forêts, cela est désirable, tant pour utiliser des terres qu’on ne saurait employer autrement que pour modifier les conditions climatologiques de l’île. Mais, dans le plus grand nombre de cas, on se heurtera à des difficultés dont les principales résideront dans la nature des terres et dans l’absence d’une répartition régulière de l’eau. Aussi cette restauration, qui entraînera de grands frais, ne devra-t-elle être tentée que sur une petite échelle, car, à côté des terres dans lesquelles on peut avoir quelque espoir de la voir réussir, se trouvent d’immenses surfaces qui n’ont probablement jamais été boisées, parce que les conditions nécessaires au développement de la végétation arborescente ne se trouvent pas remplies. Il serait bien imprudent de tenter des entreprises de boisement dans des régions qui semblent vouées à une stérilité perpétuelle.

L’élevage du bétail est assez développé dans certaines régions de Madagascar. Les bœufs sont depuis très longtemps une des principales richesses de l’île ; on peut même dire que l’avenir de la colonie réside surtout dans l’élevage des bœufs, notamment des bœufs à bosse, qui existent en grand nombre dans toutes les parties de l’île, surtout dans le Nord, dans l’Ouest et dans le Sud-Ouest.

Les soins donnés actuellement aux bêtes par les indigènes se réduisent à peu de chose. En toute saison, chaque jour, les animaux sont conduits au pâturage ; le soir, ils sont ramenés au village, où un parc leur est réservé. Pendant les pluies (novembre à février), et jusqu’en août, ils se maintiennent dans un bon état d’embonpoint ; mais, dès octobre, les herbages sont desséchés, et les bœufs maigrissent sensiblement. Il y aurait grand intérêt à développer les cultures fourragères et à faire des approvisionnemens de foin, ou, ce qui pourra être plus utile, d’herbes ensilées, récoltées pendant la saison pluvieuse.

L’élevage du porc est très répandu, principalement en Imerina et en Betsileo. Les moutons et les chèvres sont peu nombreux ; l’âne existe en assez grande quantité ; le cheval est d’introduction récente.

On trouve à Madagascar toutes les volailles d’Europe ; les Malgaches en élèvent surtout dans le voisinage des villes, où l’écoulement en est possible ; mais ils en prennent peu de soin.


V

Depuis de longues années déjà, le contact des Européens a modifié le mode d’exploitation des richesses naturelles, tel que nous l’avons exposé, et a favorisé l’introduction de diverses espèces végétales. Mais ce n’est guère que depuis la conquête que ces efforts ont été dirigés d’une façon méthodique. Examinons d’abord les efforts faits par l’administration du gouvernement général.

Dès le début de l’organisation des services civils, au commencement de 1896, le service de l’agriculture fut installé à Madagascar.

Créé pour favoriser les entreprises de colonisation et pour activer le développement agricole de notre nouvelle colonie, il commença à recueillir tous les documens pouvant intéresser le colon agricole à un titre quelconque (valeur des terres, nature de la végétation, méthodes de culture, etc.).

Une première mission fut confiée à M. Prud’homme, chef de ce service, pour visiter les plantations des environs de Tamatave, où il put réunir d’intéressantes indications sur l’avenir des cultures de cacaoyers et de caféiers sur la côte orientale.

Madagascar présentant d’un point à un autre de son territoire des différences de climats très grandes, il fut décidé, en principe, d’organiser un certain nombre de stations d’essais agricoles, afin d’obtenir par des expériences pratiques des renseignemens sur les cultures à entreprendre.

Le premier de ces établissemens, dont la création remonte à cinq ans, peut déjà fournir d’utiles indications aux colons, et leur délivrer, à un prix extrêmement minime, et parfois même à titre gratuit, un très grand nombre de plantes utiles.

La station d’essais de Tananarive comprend, outre des pépinières importantes, une section d’acclimatation, un verger et un potager, et de grands champs d’expérience pour l’amélioration de la culture du riz, les essais de céréales des régions tempérées et de plantes fourragères.

Cet établissement a introduit un grand nombre de plantes utiles : le mûrier, des arbres fruitiers, des variétés de quinquina, d’eucalyptus, etc. ; il dresse des jardiniers et des ouvriers de ferme pour les colons agricoles.

La station d’essais de Tamatave, qui doit remplir sur la côte Est, c’est-à-dire dans une région franchement tropicale, le même rôle que celle de Tananarive dans le Centre, a été créée à la fin de 1897. On s’y occupe spécialement des cultures tropicales importantes, comme celles du cacao, de la vanille, du café, du thé, des plantes à caoutchouc et à gutta-percha, etc. On y a organisé, comme à Tananarive, d’importantes pépinières pour livrer au public des exemplaires des plantes dont la culture ou la vulgarisation méritent d’être encouragées.

L’organisation du service] de l’agriculture fut encore développée, en 1899, à la suite d’une longue tournée d’inspection du chef de service sur la côte orientale et dans le Sud de l’île, par la création de trois nouvelles stations, situées à Majunga, Mananjary et Fort-Dauphin. On s’occupe spécialement, dans la première, de la culture du coton et de celle du cocotier, et, dans les deux dernières, de la production du thé et des plantes à caoutchouc.

Il faut noter enfin que, pour développer, chez les Hovas, le goût des questions agricoles, le service de l’agriculture fait un cours hebdomadaire à l’Ecole professionnelle et à l’Ecole normale d’instituteurs de Tananarive, et c’est dans le même dessein qu’il a été chargé par le général Gallieni d’organiser des concours agricoles, qui attirent un grand nombre d’indigènes.

En outre, une mission, dont la partie agronomique était confiée à M. Prud’homme, a parcouru et étudié Java, une partie de Sumatra, Ceylan et la côte Est des Indes anglaises. Elle en a rapporté, outre un stock très important de plantes précieuses, d’utiles indications sur l’organisation agricole des possessions anglaises et néerlandaises, et des renseignemens précis sur les cultures du thé, du quinquina, du café, du tabac, etc., ainsi que sur les essais de culture de plantes à caoutchouc et à gutta-percha.

La création d’un laboratoire industriel et agricole est décidée et rendra les plus grands services à la colonie.

Comme on le voit, l’impulsion donnée par le général Gallieni à l’organisation des services de l’agriculture est considérable, et il y a lieu d’en attendre d’heureux résultats. Les études entreprises dans les stations d’essais de l’île ont permis d’établir dans quel sens les efforts de la colonisation devront être dirigés.

Les cultures qui paraissent présenter le plus d’élémens de succès sont, pour le massif central, le théier, le cotonnier, le tabac, le mûrier et le riz.

Nous avons vu que le riz est déjà cultivé sur une grande échelle ; l’aménagement des eaux peut en étendre beaucoup la production.

Des essais d’acclimatation de céréales européennes ont été tentés, sans grand succès, semble-t-il, jusqu’à présent.

Le théier permettra de tirer un parti avantageux des terres suffisamment humides, voisines des rizières ; l’altitude n’est pas un obstacle à sa culture, qui peut réussir sur tous les points de Madagascar, soumis à un régime de pluies convenable ; si, en Imerina, les rendemens sont moins abondans que sur la côte orientale, à cause de l’altitude et de la sécheresse, en revanche, les feuilles seront de qualité supérieure.

Les terres du Centre de Madagascar présentent beaucoup d’analogie avec celles de Ceylan, où l’on cultive le thé sur une très grande échelle. Les essais déjà faits à Madagascar font espérer des résultats satisfaisans.

Le théier ne donne pas de produits aussitôt après sa plantation. On ne peut commencer à récolter que vers la fin de la troisième année, et il n’entre en plein rapport qu’à l’âge de sept ou huit ans.

A côté de la plantation de thé, doit se trouver l’établissement destiné à la préparation des feuilles, qui est longue et délicate. Cette préparation varie suivant qu’on veut obtenir du thé vert ou du thé noir. Pour le premier, c’est à une torréfaction faite immédiatement après la récolte qu’on a recours ; pour le second, on procède à un fanage des feuilles au soleil, à l’enroulement, à une fermentation subséquente, et ensuite à la dessiccation et au triage. Ces opérations demandent de très grands soins, qui influent sur la valeur marchande des produits.

Le thé ainsi produit pourrait être écoulé en France, où la consommation, qui atteint à l’heure actuelle plus d’un million de livres, tend à augmenter.

Il n’est pas impossible que les thés de Madagascar trouvent aussi un débouché sur les marchés étrangers, au même titre que les thés de Java, par exemple.

Le cotonnier a déjà été cultivé par les Malgaches ; il existe dans presque toute l’île à l’état sauvage.

Le coton est un des rares produits qui trouveraient un débouché important auprès des indigènes, si les Européens installaient des ateliers de tissage pour produire sur place les cotonnades, qui sont actuellement fournies par l’industrie américaine, et dont les indigènes font une grande consommation. Il est probable qu’une sélection attentive des semences, l’introduction de bonnes variétés amélioreraient la qualité du coton indigène, qui laisse beaucoup à désirer. C’est dans certaines parties de la région centrale qu’il paraît devoir le mieux réussir.

Le tabac donnera vraisemblablement aussi de bons résultats dans presque toute File, principalement en Imerina et en Betsileo. Suivant les climats, on produira diverses qualités, qu’il sera possible d’améliorer par une manipulation soignée et par l’emploi judicieux des engrais. L’Europe, et en particulier la France, demandent à l’étranger, surtout à l’Amérique, une grande partie du tabac qu’elles consomment, pour modifier par des mélanges appropriés le tabac européen. Les planteurs de Madagascar pourront donc trouver un débouché pour leurs tabacs.

Le mûrier, introduit depuis une trentaine d’années, n’est pas encore très répandu ; mais déjà, malgré le peu de soins qu’on lui donne, on a obtenu des résultats encourageans.

Le développement et l’amélioration de l’industrie séricicole deviendraient une source de richesses pour certaines régions de l’île. Des efforts ont été faits dans ce sens ; c’est ainsi que, récemment, un ménage de sériciculteurs français, venant du Gard, est arrivé à Tananarive pour diriger une magnanerie modèle, et qu’un système de primes encourage les indigènes à planter des mûriers et à élever des vers à soie. Le climat de l’Imerina est très favorable à cette industrie, qui a beaucoup d’avenir dans la colonie.

L’élevage du bœuf a toujours été considéré comme une des principales richesses de Madagascar ; mais on s’est gravement trompé, quand on a cru qu’il serait possible de le développer dans toutes les parties de l’île.

Le Centre se prête mal aux entreprises de ce genre. Le climat trop sec pendant une grande partie de l’année et l’aridité natuturelle de tous les mamelons de l’Imerina et du Betsileo rendent particulièrement difficile la culture des plantes fourragères, et, par suite, la production du bétail, dans le massif central.

Les Malgaches arrivent à nourrir, sans trop de difficultés, quelques têtes de bovidés ; mais il ne faut pas espérer, dans les conditions actuelles, voir l’élevage prendre une grande extension sur les hauts plateaux. Les régions intermédiaires de l’Est, et surtout les parties Nord, Nord-Ouest, Ouest et Sud-Ouest, se prêtent beaucoup mieux à la production des bovidés.

Pour utiliser les terres qui ne peuvent convenir que pour les pâturages, il y aura intérêt à développer l’élevage du bétail. Il convient d’ajouter que, la plus grande partie des terres malgaches nécessitant l’intervention d’une grande quantité de fumier, l’élevage est le complément indispensable de toute entreprise agricole bien dirigée.

Ce sont les bêtes bovines, et particulièrement le bœuf à bosse, qui réussissent le mieux, et c’est sur leur exploitation que doivent porter surtout les efforts. Elles remplissent un rôle important en fournissant aux cultures le travail et le fumier et en servant ensuite à l’alimentation ; elles font déjà l’objet d’une exportation assez importante, qu’il deviendra possible d’augmenter, grâce à la proximité du Sud-Africain, qui offre un large débouché à tous les produits de l’île.

Pendant la saison des pluies, ces animaux s’entretiennent assez facilement en consommant les herbes des pâturages ; mais, pendant la saison sèche, cette ressource leur manque ; il est donc nécessaire de leur fournir des plantes fourragères, telles que le maïs, le manioc et le cactus inerme, récemment introduit. La culture des plantes fourragères présente, à ce point de vue, une importance exceptionnelle et mérite d’être étudiée avec la plus grande attention.

De même, les essais devront porter sur la conservation des fourrages par le fanage et surtout par l’ensilage, pour pouvoir nourrir les animaux pendant la saison sèche.

Les peaux vertes ou sèches et le cuir donnent lieu, à Madagascar, à des transactions commerciales assez importantes, dans lesquelles l’Européen n’intervient le plus souvent que comme intermédiaire entre les indigènes et les fabricans. Leur production augmentera avec le développement de l’élevage.

Si l’avenir de l’élevage réside surtout dans l’exploitation des bovidés, il ne faut cependant pas perdre de vue que le mouton peut arriver aussi à jouer un rôle important, principalement pour la production de la laine.

Il ne semble pas qu’il y ait lieu de se livrer à l’élevage du cheval, les essais faits dans ce sens n’ayant pas donné de résultats encourageans.

Les côtes conviennent aux cultures tropicales, dont quelques-unes, d’ailleurs, existent déjà sur des étendues restreintes ; il y aurait le plus grand intérêt à les développer ; ce sont, par exemple, la canne à sucre, le caféier, le cacaoyer, le giroflier, le théier, la vanille, les plantes à caoutchouc.

Rappelons que, si le théier donne, dans les parties chaudes et humides, des produits de moins bonne qualité, il y fournit des récoltes extrêmement abondantes.

Le vanillier est une ressource précieuse pour le petit colon et mérite également d’attirer l’attention des grands propriétaires. Il ne réussit que dans un climat chaud et suffisamment humide, d’une température moyenne peu inférieure à 23 ou 25 degrés ; les grands vents ou une sécheresse un peu persistante le font dépérir rapidement ; le sol doit être léger et friable, sans humidité stagnante, mais retenant cependant une certaine quantité d’eau, comme les sols riches en humus. Les conditions de sa réussite se trouvent réalisées, surtout en ce qui concerne le climat, sur les points de la côte orientale qui sont suffisamment abrités.

La préparation de la vanille constitue une opération qui doit être exécutée par des personnes habiles et expérimentées. Beaucoup de planteurs sont effrayés par les difficultés pratiques de ces nombreuses et délicates manipulations et renoncent, pour cette raison, à la culture d’une plante qui peut donner pourtant des produits très rémunérateurs. Cependant, il existe déjà d’importantes cultures de vanille à Nossi-Bé et sur la côte orientale, notamment aux environs de Mahanoro et de Vatomandry.

Cette situation serait améliorée par l’association des planteurs et par l’installation d’un établissement où se ferait, par des personnes compétentes, la préparation de la gousse. Les conditions nécessaires pour obtenir un beau produit marchand se trouveraient ainsi bien plus facilement réalisées.

Le poivrier permettra d’utiliser un grand nombre de points de la côte Est, où il rencontrera la chaleur et l’humidité qui lui conviennent.

Le développement des plantes à latex pouvant fournir le caoutchouc est également du plus haut intérêt.

Le caoutchouc de Madagascar, connu depuis longtemps sur le marché d’Europe, est généralement très apprécié du commerce.

Les principales plantes à caoutchouc se rencontrent sur les versans Est et Ouest, ainsi que dans le Sud de l’île. Le centre de Madagascar (Imerina et Betsileo), presque entièrement dénudé, n’en produit pas. On est encore loin de connaître complètement toutes les plantes à caoutchouc de la Grande Ile ; on peut espérer qu’on découvrira dans les forêts de nouvelles espèces intéressantes, comme cela s’est produit récemment dans la région d’Antondroy et Mahafaly (environs de Fort-Dauphin). Mais, à Madagascar, la récolte s’opère avec si peu de ménagemens, qu’elle aboutit à la destruction de ces plantes précieuses, dont la reconstitution nécessitera de longues années et de grands sacrifices.

Il y aurait lieu de régulariser dès maintenant leur exploitation et de développer les plantations des espèces qui fournissent les meilleurs résultats, en se souvenant qu’il faut attendre bien des années, avant de pouvoir faire des récoltes fructueuses.

Des études plus complètes des plantes à caoutchouc, au point de vue de la spécification des espèces botaniques, du mode de multiplication de chacune d’elles et de la manière d’opérer la récolte, seraient de la plus haute importance pratique, et les champs d’essais situés dans les régions où ces plantes peuvent prospérer devraient avoir pour principal but de nous fixer sur les conditions d’existence et de développement de ces végétaux utiles.

Le caféier vient en beaucoup de points de l’île, depuis le bord de la mer jusque sur les hautes terres de la partie centrale ; c’est surtout sur la côte, et jusqu’à une altitude d’environ 700 mètres, qu’il pousse vigoureusement. On peut fonder sur lui de grandes espérances, en raison de la zone relativement étendue où il peut s’établir et de la facilité avec laquelle on peut écouler la récolte. Mais cette culture exige des soins assez grands, une terre profonde, et, quand celle-ci n’est pas assez riche, l’emploi de fumures et de terreau.

Le caféier n’entre en plein rapport que cinq ou six ans après la plantation ; il faut donc pouvoir faire des avances de capitaux notables pour entreprendre une exploitation d’une certaine importance. Mais celle-ci peut être établie comme annexe d’une autre exploitation et développée à mesure que les ressources augmentent. Une fois en plein rapport, la plantation des caféiers donne des résultats très rémunérateurs.

Le café Libéria pousse vigoureusement dans le voisinage des côtes. Le café à petits grains ou coffea arabica préfère, au contraire, le climat relativement tempéré des régions centrales et des zones d’altitude moyenne.

La petite quantité de café produite dans l’Imerina et dans le Betsileo est d’excellente qualité ; mais les terres du massif central sont trop médiocres pour qu’on puisse y planter le caféier sur de grandes étendues. On doit plutôt le considérer, dans le Centre de Madagascar, comme un arbuste de jardin qu’il faut entourer de soins minutieux, que comme une plante de grande culture.

Le cacaoyer est une plante des régions tropicales, qui ne se développe que dans des conditions spéciales de sol, de température et d’humidité. Son aire géographique est donc très limitée, mais, là où il réussit, il donne des résultats très avantageux. Des essais faits à Madagascar depuis un certain nombre d’années sont assez encourageans. C’est seulement sur les côtes, dans les endroits bien abrités des vents de mer, que les plantations semblent devoir prospérer. Là, en effet, il y a une humidité constante et une température élevée.

La plantation ne commence à donner de produits importans qu’au bout de sept ou huit ans, et ce n’est qu’à dix ans que l’arbre est en plein rapport. Elle nécessite des soins particuliers. Pendant les premières années, les plantes doivent être abritées des rayons du soleil. On utilise à cet effet des végétaux donnant un fort ombrage, tels que le bananier, qu’on intercale dans la plantation, et qui ont aussi pour but de protéger le cacao contre les vents. Afin que les jeunes plants ne soient pas étouffés, on doit faire des nettoyages et des binages fréquens. C’est une exploitation qui demande une avance notable de capitaux, et qui ne donne des résultats qu’au bout d’un assez grand nombre d’années. A l’heure actuelle, la production de cacao est encore peu importante, mais on peut prévoir qu’elle atteindra prochainement un chiffre assez élevé.

Le cacao de Madagascar est de bonne qualité. Le marché français l’apprécie et l’achète souvent à un prix plus élevé que celui de la Martinique et de la Guadeloupe.

La canne à sucre demande également un climat chaud et humide, mais avec une période relativement sèche ; beaucoup de points de Madagascar remplissent ces conditions ; mais c’est au voisinage de la côte que la réussite semble devoir être la plus complète, là surtout où le sol est riche en humus.

La récolte peut s’effectuer environ quinze mois après la plantation ; mais cette exploitation ne peut se faire que si l’on est à portée de l’établissement industriel qui retire de la canne, soit le sucre en nature, soit l’alcool. Quelques fabriques de sucre sont établies aux environs de Tamatave et de Vatomandry ; mais la concurrence de l’Europe et des colonies est grande, et il ne semble pas qu’il y ait actuellement à encourager cette culture, les conditions économiques ne lui étant pas favorables. En outre, elle demande une main-d’œuvre dont on ne dispose pas actuellement. Il est bon cependant de prendre note de la possibilité de donner un certain développement à la culture de la canne à sucre, les circonstances pouvant lui devenir un jour plus avantageuses. Le cocotier, qui peut être planté aussi bien sur la côte Ouest que sur la côte orientale, fournit le coprah, dont on exporte, tous les ans, de Ceylan, une quantité considérable en Europe, en vue de l’extraction du beurre de coco.

La graine de ricin, qu’on récolte dans la plus grande partie de l’île, et qui trouve un débouché sur le marché de Londres, peut aussi devenir l’objet d’une culture d’une certaine importance.

L’exploitation des quinquinas, dont la culture sera possible dans la zone forestière du versant oriental, jusqu’à une altitude de 1 200 mètres, présente aussi de l’avenir, si l’on s’adresse aux cinchona à haut rendement, comme on le fait à Java. C’est l’emploi des plants de quinquina riches en alcaloïdes, obtenus par sélection, qui a ruiné les cultures de quinquina ordinaire de Ceylan, et qui a rendu les Hollandais maîtres du marché de la quinine.

L’avenir agricole de Madagascar semble donc devoir résider principalement dans la culture des plantes tropicales, pour lesquelles il faut le plus souvent engager des capitaux assez importans, mais qui sont susceptibles de donner des résultats très rémunérateurs. Dans les parties chaudes et humides, et principalement sur les côtes, la plupart des plantes tropicales pourront prospérer. Le café, le cacao, la vanille, forment des denrées dont l’écoulement est facile, et qui laissent des bénéfices. C’est de l’extension de leur culture que dépendra surtout la prospérité de l’île.


De ces observations, on peut conclure que l’île, prise dans son ensemble, n’est pas destinée à devenir un pays de colonisation agricole intensive, mais que, cependant, beaucoup de points offrent des ressources pour l’établissement de cultures fructueuses.

En effet, les immenses surfaces occupant les mamelons de la région centrale ne sont pas propres à être exploités, et il convient de ne pas y porter ses efforts. Elles doivent être laissées dans la période pastorale et forestière, où l’homme tire exclusivement parti de la végétation spontanée. Les pâturages qui y existent pourront nourrir quelques troupeaux et les forêts devront être soigneusement conservées par une exploitation judicieuse. Dans cette vaste région, qui occupe la majeure partie de l’île, les vallées seules sont susceptibles de se prêter à l’exploitation agricole, qu’on peut encore développer par l’aménagement des eaux, qui y sont abondantes. Les cultures qu’on y établira seront surtout destinées à la consommation indigène et c’est sur les ressources locales qu’il faudra exclusivement compter pour l’amélioration des terres.

Bien des points où le colon européen ne pourra pas réussir peuvent cependant être exploités par l’indigène, qui se contente de bénéfices moindres, en raison de la modicité de ses besoins.

Dans la région côtière, au contraire, les cultures spéciales de grand rapport et pouvant aboutir à une rémunération suffisante des capitaux, seront développées avantageusement ; mais elles nécessitent des avances importantes, parce qu’elles n’entrent en rapport qu’au bout de quelques années et sont parfois détruites par des ouragans qui sévissent dans ces parages. Aussi, le petit colon sera-t-il rarement en mesure de s’adonner à ces cultures, pour lesquelles d’ailleurs il faut des connaissances professionnelles. Là, il pourra y avoir intérêt à apporter des matières fertilisantes, destinées à augmenter les rendemens.

Des richesses naturelles existent en assez grand nombre, qu’il faut exploiter avec modération pour ne pas en tarir la source, et dont on peut tirer un parti immédiat.

Les tentatives d’acclimatation et d’amélioration des espèces indigènes, les perfectionnemens dans la préparation des produits récoltés, modifieront avantageusement la situation agricole.

L’impulsion puissante donnée par le général Gallieni au développement des diverses branches de l’agriculture a déjà amené des résultats positifs. Elle a, en outre, développé, chez les collaborateurs civils et militaires du gouvernement général, une émulation pour la mise en valeur des ressources de la Grande Ile, et, partout, on peut constater une grande activité, mise au service d’une direction intelligente.


ACH. MÜNTZ ET EUG. ROUSSEAUX,