L’Encyclopédie/1re édition/CAPROTINE

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 639).
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* CAPROTINE, adj. f. (Hist. anc.) surnom que les anciens Romains avoient donné à Junon & aux nones de Juillet, tems auquel ils célébroient une fête dont Plutarque & Macrobe racontent ainsi l’origine. Les peuples voisins de Rome crurent qu’il leur seroit facile de prendre ou de détruire cette ville épuisée, après l’invasion des Gaulois. Ils s’assemblerent, & mirent à leur tête Lucius, dictateur des Fidenates. Lucius fit annoncer aux Romains par un héraut, que le seul moyen qu’ils eussent de conserver les restes de leur ville, c’étoit de lui livrer leurs femmes & leurs filles. Les sénateurs ne savoient quel parti prendre, lorsqu’une esclave appellée Philotis, persuada à ses compagnes de se couvrir des habits de leurs maîtresses, & de passer dans le camp ennemi. Ce qui fut exécuté. Le général les distribua aux capitaines & aux soldats. Ces filles les inviterent à prendre part à une fête solennelle qu’elles feignirent de célébrer entr’elles. Les hôtes séduits par cette innocente supercherie, s’abandonnerent à la débauche : mais lorsqu’ils furent assoupis par le vin & par le sommeil, elles appellerent les Romains par un signal qu’elles leur donnerent du haut d’un figuier sauvage. Ceux-ci accoururent, & firent main-basse par-tout. La liberté fut accordée à ces généreuses esclaves, avec une somme d’argent pour se marier ; le jour de cette délivrance extraordinaire, appellé Nones Caprotines ou du figuier ; & une fête instituée sous le même nom en l’honneur de Junon. Depuis ce tems, à pareil jour, les esclaves régaloient leurs maîtresses hors de la ville, sous des figuiers sauvages, luttoient entr’elles, & rappelloient par des exercices la mémoire d’une défaite qu’elles avoient occasionnée par leur dévouement & leur industrie.