L’Encyclopédie/1re édition/CUNTUR, CONTOUR, ou CONDOR

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CUNTUR, CONTOUR, ou CONDOR, s. m. (Hist. nat. Ornithol.) très-grand oiseau ; il a quinze piés d’envergure ; ses ongles ressemblent plûtôt à ceux des poules qu’aux griffes des oiseaux de proie, cependant son bec est assez fort pour ouvrir le ventre à un bœuf. Il a sur la tête une crête qui n’est pas découpée comme celle du coq ; son plumage est noir & blanc, comme celui d’une pie. Les cunturs font un très-grand bruit en s’abattant sur terre ; aussi les Indiens du Pérou où il y a de ces oiseaux, & même les Espagnols, en ont-ils grand’peur. On en a tué un sur la côte de Chily, qui avoit seize piés d’envergure. La longueur de l’une de ses plumes étoit de deux piés quatre pouces ; le tuyau avoit cinq pouces trois quarts de longueur, & un pouce & demi de largeur à l’endroit le plus gros ; la plume entiere pesoit trois gros & dix-sept grains & demi ; sa couleur étoit d’un brun-obscur.

Les cunturs restent sur les montagnes, ils n’en descendent que dans les tems de pluie & de froid ; ils vivent alors de quelques gros poissons que la tempête jette assez souvent sur les côtes : on dit qu’ils ont quelquefois dévoré des enfans de dix à douze ans. On prétend, dit M. de la Condamine, que les Indiens présentent à ces oiseaux pour appas une figure d’enfant d’une argille très-visqueuse ; ils fondent dessus, & y engagent leurs serres de façon qu’ils ne peuvent plus s’en dépétrer. M. de la Condamine a vû des cunturs dans plusieurs endroits des montagnes de Quito, & on lui a rapporté qu’il s’en trouvoit aussi dans les pays-bas des bords du Marannon. Voyage de la riviere des Amazones, & hist. des Incas, &c.

On croit qu’il y a aussi de ces oiseaux dans la région de Sophala, des Caffres & de Monomotapa, jusqu’au royaume d’Angola, & on soupçonne qu’ils ne different pas de ceux que les Arabes ont appellés rouh. (I)