L’Encyclopédie/1re édition/DIVAN

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DIVAN, s. m. (Hist. mod.) mot arabe qui veut dire estrade, ou sopha en langue turque ; ordinairement c’est la chambre du conseil ou tribunal où on rend la justice dans les pays orientaux, surtout chez les Turcs. Il y a des divans de deux sortes, l’un du grand-seigneur, & l’autre du grand-visir.

Le premier qu’on peut nommer le conseil d’état, se tient le dimanche & le mardi par le grand-seigneur dans l’intérieur du serrail, avec les principaux officiers de l’empire au nombre de sept ; savoir le grand-visir, le kaïmacan viceroi de l’empire, le capitan-bacha, le defterdar, le chancelier, les pachas du caire & de boude : & ceux-ci en tiennent de particuliers chez eux, pour les affaires qui sont de leur département ; & comme les deux derniers membres ne s’y trouvent pas, ils sont remplacés par d’autres pachas.

Le divan du grand-visir, c’est-à-dire le lieu où il rend la justice, est une grande salle garnie seulement d’un lambris de bois de la hauteur de deux ou trois piés, & de bancs matelassés & couverts de drap, avec un marche-pié : cette salle n’a point de porte qui ferme ; elle est comme le grand-conseil ou le premier parlement de l’empire ottoman. Le premier ministre est obligé de rendre la justice au peuple quatre fois par semaine, le lundi, le mercredi, le vendredi, & le samedi. Le cadilesker de Natolie est assis à sa gauche dans le divan, mais simplement comme auditeur ; & celui de Romelie en qualité de juge est à sa droite. Lorsque ce ministre est trop occupé, le cansch-bachi tient sa place : mais lorsqu’il y assiste, cet officier fait ranger les parties en deux files, & passer de main en main leurs arzhuals ou requêtes jusqu’au buijuk-teskeregi, premier secrétaire du grand-visir, auquel il lit la requête ; & sur le sujet qu’elle contient, les deux parties sont entendues contradictoirement sans avocats ni longueur de procédures ; on pese les raisons ; des assesseurs resument le tout & concluent. Si leur décision plaît au grand visir, son secrétaire l’écrit au haut de la requête, & le ministre la confirme par le mot sah, c’est-à-dire certain, qu’il souscrit au bas : sinon il fait recommencer le plaidoyer, & décide ensuite de sa pleine autorité, en faisant donner aux parties un hujet ou copie de la sentence. Les causes se succedent ainsi sans interruption jusqu’à la nuit, s’il y en a : on sert seulement dans la salle même de l’audience, un dîner qui est expédié en une demi-heure. Les officiers qui composent ce divan, outre le grand-visir, sont six autres visirs ou conseillers d’état, le chancelier, & les secrétaires d’état. Le chiaoux-bachi se tient à la porte avec une troupe de chiaoux, pour exécuter les ordres du premier ministre. Les causes importantes qui intéressent les officiers de sa hautesse, tant ceux qui sont attachés à sa personne, que ceux qui occupent les grandes charges de l’empire, les délibérations politiques, les affaires de terre & de mer, font la matiere du conseil-privé du grand-seigneur : on l’appelle galibé divan. Il se tient tous les dimanches & les mardis, comme nous l’avons dit. Les autres officiers militaires sont assis à la porte ; le muphti y assiste lorsqu’il y est mandé par un ordre exprès ; le teskeregi ouvre l’assemblée par la lecture des requêtes des particuliers ; le visir azem propose ensuite l’affaire importante qui doit faire la matiere de la délibération ; & après que les membres du galibé divan ont donné leur avis, ce ministre entre seul dans une chambre particuliere, où il fait son rapport au grand-seigneur qui décide.

Lorsque le sultan le juge à-propos, il convoque un conseil général, qui ne differe du galibé divan que par le plus grand nombre des membres qui le composent. Tous les grands de la porte y sont appellés, l’ulema, les officiers des milices & des différens ordres, même les vieux soldats & les plus expérimentés. Ce divan s’appelle oja divani, le divan des piés, peut-être parce que tout le monde s’y tient debout. Ce tribunal a quelque rapport à nos anciennes assemblées des états, comme le galibé divan au conseil privé du roi, & le divan au premier parlement de l’empire. Guer, mœurs & usages des Turcs, tome II.

Divan-beghi, nom d’un ministre d’état en Perse.

Le divan-beghi est le sur-intendant de la justice ; il n’a que le dernier rang parmi les six ministres du second ordre, qui sont tous au-dessous de l’athemadoulet, ou premier ministre.

On appelle au tribunal du divan-beghi, des jugemens rendus par les gouverneurs. Il a 50000 écus d’appointemens, afin de rendre la justice gratuitement. Il connoît des causes criminelles des khans, des gouverneurs, & autres grands seigneurs de Perse disgraciés pour quelque faute, & il reçoit les appels du baruga ou lieutenant criminel.

Le divan-beghi rend la justice dans le palais du prince, sans suivre d’autre loi ni d’autre regle que l’alcoran, qu’il interprete à son gré. Il ne connoît que des crimes. Tavernier, voyag. de Perse. Le chevalier de la Magdeleine, qui est resté fort long-tems chez les Turcs, en dit quelque chose dans les chap. xljx. & l. de son miroir ottoman. (G)