L’Encyclopédie/1re édition/FIDUCIE

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FIDUCIE, s. f. (Jurispr.) fiducia seu pactum fiduciæ, étoit chez les Romains une vente simulée faite à l’acheteur, sous la condition de retrocéder la chose au vendeur au bout d’un certain tems.

Ce terme fiducia, qui est fort commun dans les anciens livres, ne se trouve point dans tout le corps de droit, du moins pour signifier un gage.

L’origine de ce pacte vint de ce qu’on fut long-tems à Rome, sans connoître l’usage des hypotheques ; de sorte que pour pouvoir engager les immeubles aussi bien que les meubles, on inventa cette maniere de vente simulée appellée fiducia, par laquelle celui qui avoit besoin d’argent, vendoit & livroit, par l’ancienne cérémonie de la mancipation, son héritage à celui qui lui prétoit de l’argent, à condition néanmoins que celui-ci seroit tenu de lui vendre & livrer l’héritage avec la même cérémonie, lorsqu’il lui rendroit ses deniers. Fiducia contrahitur, dit Boëce sur les topiques de Cicéron, cum res alicui mancipatur, ea lege ut eam mancipanti remancipes est quæ remancipatio fiduciaria, cum restituendi fides interponitur.

Le créancier ou acheteur fiduciaire, avoit coûtume de prendre pour lui les fruits de l’héritage.

Ces ventes fiduciaires étoient si communes anciennement chez les Romains, que parmi le petit nombre de formules qu’ils avoient pour les actions, il y en avoit une exprès pour ce pacte, appellée judicium fiduciæ, dont la formule étoit, inter bonos bene agies, & sine fraudatione, dit Cicéron, au troisieme de ses offices. Ce jugement étoit, dit-il, magnæ existimationis, imo étiam famosum. Voyez Orat. pro Ros. com. & pro cœcinnâ.

Mais depuis que les engagemens & même les simples hypotheques conventionnelles des immeubles furent autorisées, on n’eut plus besoin de ces ventes simulées, ni de ces formalités de mancipations & de rémancipations, dans lesquelles il y avoit toûjours du hasard à courir, au cas que l’acheteur fiduciaire fût de mauvaise foi.

Les peres qui vouloient mettre leurs enfans hors de leur puissance, les vendoient aussi autrefois, titulo fiduciæ, à quelqu’un de leurs amis, qui à l’instant leur donnoit la liberté ; ce qui s’appelloit émancipation. Mais Justinien, par une de ses constitutions qui étoit redigée en grec & qui est perdue, ordonna que toutes les émancipations seroient censées faites contractâ fiduciâ. Il en est fait mention dans la loi derniere, au code de emancipat. liber. Voyez Cujas, sur le §. 8. des instit. lib. III. tit. iij. & Loyseau, des offic. liv. II. ch. iij. n. 31. & suiv. (A)