L’Encyclopédie/1re édition/FLEURISTE (complément)

La bibliothèque libre.

FLEURISTE, s. m. (Art méchaniq.) fleuriste artificiel. L’art de fabriquer des fleurs artificielles consiste dans la façon de représenter avec des étoffes, de la soie, du fil, du coton, de la laine, du chanvre, des plumes, vélin, coques de vers à soie, & quantité d’autres choses, des fleurs, imitant si parfaitement la nature que l’on en peut former des arbres, charmilles & guirlandes, & même des desseins de parterre, de bois, de bosquets, &c. soit en petit, ou de grandeur convenable aux endroits où l’on juge à propos de les employer. C’est de ces sortes d’ouvrages que l’on décore les théatres, ainsi que les appartemens, sur-tout dans des jours de cérémonies, bals, festins, ou autres fêtes publiques ou particulieres. On en décore aussi les tables. Les femmes mêmes s’en servent dans leurs plus belles parures. Il en est de trois sortes : la premiere se fait avec du vélin, de la toile, & autre étoffe de soie ou de fil teint de différentes couleurs & empesé ensuite dans l’empoix ; on en découpe les fleurs & les feuilles avec des emporte-pieces, ciseaux & autres semblables outils ; on les gauffre avec des gauffroirs ; on les attache ensemble sur du fil de fer, de cuivre ou d’argent, couvert de vélin ou de soie, coloré avec un fil d’argent très mince ou de soie verte, observant toujours d’imiter la nature dans ses variétés.

La seconde se fait avec des plumes de différens animaux blancs que l’on teint de différentes couleurs après les avoir savonnées. Il y a des fleuristes qui nourrissent à cet effet des oiseaux en particulier, qu’ils ont grand soin d’entretenir proprement, & des plumes desquelles ils se servent au besoin. Ces plumes arrachées des oiseaux vivans conservent toujours non-seulement dans leur couleur naturelle, mais même dans celle qu’on leur substitue, leur premiere vivacité, & celle que l’on remarque dans les plus belles fleurs, ce que l’on ne peut voir dans les plumes qui ont été arrachées des oiseaux morts. On les découpe aussi avec des ciseaux, emporte-pieces, &c. On les ceintre avec des couteaux sans taillant, & on les attache comme les précédentes avec du fil d’argent ou de soie sur du fil de fer, de cuivre ou d’argent, couvert de vélin & de soie verte dont on forme les branches.

La troisieme se fait avec des coques de vers à soie, que l’on teint aussi de différentes couleurs. On les découpe avec des ciseaux & emporte-pieces, & on les attache aussi avec du fil d’argent ou de soie, sur du fil de fer, de cuivre ou d’argent, couvert de soie verte pour former les branches. Les ouvriers qui travaillent à ces trois sortes de fleurs, emploient également les mêmes outils, les mêmes ingrédiens, & tout ce qui peut servir en général à imiter les fleurs naturelles.

Les fleurs & les feuilles se font pour la plupart avec des emporte-pieces convenables, & semblables aux fleurs ou feuilles que l’on veut imiter. C’est une espece de poinçon creux, que l’on applique sur du vélin, taffetas ou autre étoffe pliée en huit, dix ou douze, selon l’épaisseur posée sur le billot ; on frappe un seul & fort coup de maillet sur l’emporte-piece, qui alors emporte la piece de part en part, ce qui lui en a fait donner le nom. On recommence ensuite sur l’étoffe, à côté de l’endroit où l’on a emporté la piece ; & de cette façon on multiplie à l’infini & promptement, les fleurs & les feuilles dont on a besoin.

La plupart des boutons se font de différentes manieres ; les uns se font avec du coton gommé, recouvert de vélin, taffetas ou autre étoffe ; les autres se font avec de la mie de pain aussi gommée, & recouverte de vélin ou taffetas ; d’autres enfin, ainsi que les grains, avec de la filasse, de la soie ou fil éffilé, ou non éffilé, & quantité d’autres semblables choses, que l’industrie de l’artiste est seule capable d’imaginer. V. nos Pl. & leur expl. Article de M. Lucotte.