L’Encyclopédie/1re édition/FLOTTEMENT

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FLOTTEMENT, s. m. dans l’Art militaire, est un mouvement irrégulier ou d’ondulation, que font assez souvent les différentes parties du front d’une troupe en marchant, qui les dérange de la ligne droite qu’elles doivent former pour arriver ensemble & dans le même tems à l’ennemi.

Il est très-important de rectifier ce défaut dans la marche des troupes, parce que plus elles se prêtent à ce mouvement irrégulier, & plus il est aisé de les défaire ; car alors toutes leurs parties ne se soûtiennent pas également, & d’ailleurs elles peuvent se rompre elles-mêmes en marchant.

Pour y remédier, il faut accoûtumer dans les exercices, les troupes à marcher ensemble & d’un pas égal, de la même maniere que si tous les soldats qui composent le bataillon, faisoient un corps solide, sans desunion de parties.

Plus le front d’une troupe est grand, & plus elle est exposée au flottement ; c’est ce qui a fait dire à plusieurs habiles militaires, & entr’autres à M. le chevalier de Folard, qu’il faudroit diminuer le front de nos bataillons & augmenter leur épaisseur, c’est-à-dire les mettre à six ou huit de hauteur, comme ils l’étoient du tems du prince de Condé & de M. de Turenne. Voyez Evolution.

L’auteur auquel on attribue le mémoire concernant l’essai sur la légion (M. de Rostaing), prétend que cinquante files de front sont la plus grande étendue qu’on puisse donner aux divisions des troupes, pour les faire marcher régulierement.

Si le flottement dans une troupe qui marche en-avant pour en combattre une autre, est très-préjudiciable à sa force & à sa solidité, il n’est pas moins dangereux à l’égard des différens corps d’une armée qui marche pour en combattre une autre : car si les corps n’arrivent pas également & dans le même tems sur l’ennemi, les plus avancés perdront la protection de ceux qui couvroient leurs flancs, & par-là ils s’exposeront à être aisément battus & mis en desordre ; ce qui ne peut produire qu’un très-mauvais effet sur ceux qui les suivent, & sur le reste de l’armée. Aussi M. le maréchal de Puysegur dit-il que lorsque deux armées s’approchent pour combattre, il est aisé de juger, suivant l’ordre & l’exactitude avec laquelle l’une ou l’autre marche, quelle est celle qui battra l’autre ; ce sera celle dont le mouvement sera le plus régulier, & dont toutes les parties regleront le mieux leur marche les unes sur les autres pour arriver ensemble sur l’ennemi. (Q)