L’Encyclopédie/1re édition/FORTIFIER

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FORTIFIER EN-DEDANS, (Fortific.) c’est prendre le côté du polygone pour le côté extérieur. Voy. côté extérieur & Fortifier en-dehors. (Q)

Fortifier en-dehors, (Fortificat.) c’est dans la Fortification faire servir le côté du polygone qu’on se propose de fortifier, de côté intérieur : on dit alors qu’on fortifie en dehors, parce que les bastions sont véritablement hors du polygone ; on dit au contraire qu’on fortifie en-dedans, lorsque le côté du polygone sert de côté extérieur, les bastions étant alors en-dedans le polygone.

On peut également fortifier les places en-dehors & en-dedans. Cette derniere méthode paroît mériter quelque préférence sut la premiere, parce qu’en la suivant on fixe les pointes des bastions où l’on veut, & qu’elle est plus propre à proportionner toutes les parties de la fortification aux côtés & aux angles des polygones qu’on fortifie.

Lorsqu’on fortifie en-dehors, on a l’avantage de fixer les lieux où doivent être les courtines ; ce qui peut servir lorsque la place a une vieille enceinte déterminée par un rempart, ou par des maisons qu’on veut conserver. Mais on peut indifféremment dans la fortification réguliere, se servir de l’une ou de l’autre de ces méthodes, suivant que le terrein & la situation de la place peuvent le demander. Car lorsque tous les côtés intérieurs se trouveront déterminés sur un plan bien exact, on peut en leur menant des paralleles, à la distance qui doit être entre le côté extérieur & l’intérieur, construire la fortification en-dedans sur ces paralleles ; & après avoir calculé & trouvé la grandeur de toutes ses parties & de ses angles, il est aisé ensuite de construire la fortification sur le côté intérieur. Voyez chacune de ces constructions à la suite du mot Fortification, dans les systèmes du chevalier de Ville, de Pagan, de Vauban, de Mallet, &c.

Si la place qu’on veut fortifier est irréguliere, & que les côtés intérieurs soient donnés de grandeur & de position, ou si elle a une vieille enceinte sur laquelle on doit prendre les courtines, il est fort difficile alors de parvenir par la fortification du polygone extérieur, à avoir pour côtés intérieurs les côtés de l’enceinte : car dans les polygones irréguliers, la distance du côté intérieur à l’extérieur n’est pas la même pour tous les côtés, comme dans les réguliers ; l’inégalité des angles du polygone rend cette distance plus ou moins grande, suivant les variations de ces angles : c’est pourquoi si l’on mene des paralleles aux côtés intérieurs & à la distance qui leur convient à chacun, la grandeur de ces paralleles ne répondra point à celle des côtés intérieurs correspondans ; ses paralleles qui seront les moins éloignés des côtés intérieurs, s’étendront sur celles qui le seront davantage, & elles en diminueront la grandeur. Mais comme les plus proches des côtés intérieurs se trouveront opposés aux plus petits de ces côtés, les côtés extérieurs qu’elles produiront se proportionneront en quelque maniere les uns & les autres, parce que les plus grands seront diminués par la rencontre des petits. C’est par cette espece de compensation de côtés, que quelques auteurs croyent qu’il est plus avantageux de fortifier par le polygone extérieur, que par l’intérieur. Mais ces auteurs n’ont pas fait attention que par cette méthode les courtines du polygone extérieur ne tombent pas toûjours sur les côtés de l’intérieur ; ce qui est un grand inconvénient, lorsque la ville a une enceinte sur laquelle on veut prendre les courtines.

Dans la pratique des fortifications, on peut lorsque les places n’ont point d’enceinte déterminée, se servir du polygone extérieur pour la trace de la ligne magistrale ; mais on doit préférer la méthode de tracer cette ligne par le polygone intérieur, s’il faut prendre nécessairement les courtines sur les côtés de l’enceinte. Voyez, dans la troisieme édition des élémens de fortification, l’examen du traité de la fortification par le polygone extérieur & par l’intérieur. (Q)