L’Encyclopédie/1re édition/INCOMPRÉHENSIBLE

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Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 653-654).

* INCOMPRÉHENSIBLE, adj. (Gram. & Métaphysique.) qui ne peut être compris. Lorsqu’une proposition est incompréhensible, c’est ou la faute de l’objet, ou la faute des mots. Dans le premier cas, il n’y a point de ressource ; dans le second, il se faut faire expliquer les mots. Si les mots bien expliqués, il y a contradiction entre les idées, la proposition n’est point incompréhensible, elle est fausse ; s’il n’y a ni convenance ni disconvenance entre les idées, la proposition n’est point incompréhensible, elle est vuide de sens. Il est indécent d’en faire de semblable à des gens sensés. Il y a deux grands principes qu’il ne faut point perdre de vûe : c’est qu’il n’y a rien dans l’entendement qui n’y soit venu par la voie des sens, & qui par conséquent ne doive, en sortant de l’entendement, retrouver des objets sensibles pour se rattacher. Voilà en Philosophie le moyen de reconnoitre les mots vuides d’idées. Prenez un mot : prenez le plus abstrait ; décomposez le ; décomposez-le encore, & il se résoudra en dernier lieu en une représentation sensible. C’est qu’il n’y a en nous que des représentations sensibles, & des mots particuliers qui les désignent, ou des mots généraux qui les rassemblent sous une même classe, & qui indiquent que toutes ces représentations sensibles, quelque diverses qu’elles soient, ont cependant une qualité commune.