L’Encyclopédie/1re édition/JET

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Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 521-528).
JETIJEUCU  ►

* JET, s. m. (Gramm.) il se dit, 1°. du mouvement d’un corps lancé avec le bras, ou avec un instrument ; le jet de la pierre avec la fronde est plus violent qu’avec le bras : 2°. de l’espace qu’il mesure à deux jets de pierre : 3°. de la poussée d’une branche : 4°. des essains d’abeilles : 5°. des eaux jaillissantes : 6°. du calcul par les jettons : 7°. en fauconnerie, en pêche, en fonderie, en peinture, en marine, en artifice, en plusieurs autres arts, voyez les articles suivans.

Jet des bombes, (Artillerie.) est le nom qu’on donne à la partie des Mathématiques qui traite du mouvement des bombes, de la ligne qu’elles décrivent dans l’air, de la maniere dont il faut disposer le mortier pour qu’elles aillent tomber à une distance donnée, &c. Voyez les articles Balistique & Projectile, où sont expliquées les lois du mouvement des bombes, ou plûtôt en général de tout corps pesant lancé avec une vîtesse & une direction donnée. Voyez aussi Jet, Art milit. (O)

Jet d’eau (Hydraulique.) est une lance ou lame d’eau qui s’éleve en l’air par un seul ajutage qui en détermine la grosseur. Les jets croisés en forme de berceaux, sont appellés jets dardans, & les droits perpendiculaires. Il y a encore des gerbes, des bouillons. Consultez ces articles à leur lettre. (K)

Mariotte démontre qu’un jet d’eau ne peut jamais monter aussi haut qu’est l’eau dans son réservoir. En effet, l’eau qui sort d’un ajutage devroit monter naturellement à la hauteur de son réservoir, si la résistance de l’air & les frottemens des tuyaux ne l’en empêchoient. Voyez l’article Fluide. Mais cette résistance & ces frottemens font que l’eau perd nécessairement une partie de son mouvement, & par conséquent ne remonte pas aussi haut. Ce même auteur a aussi fait voir que lorsqu’un grand jet se distribue en un grand nombre d’autres plus petits, le quarré du diametre du principal ajutage doit être proportionnel à la somme de toutes les dépenses de ses branches ; & que si le réservoir a cinquante-deux piés de haut, & l’ajutage six lignes de diametre, celui du conduit doit être de trois pouces. Les différentes regles pour les jets d’eau se trouvent renfermées dans un ouvrage exprès de M. Mariotte, imprimé dans le recueil de ses œuvres. Chambers. (O)

Jet se dit, dans l’Art militaire, des armes propres à lancer des corps avec force pour offenser l’ennemi de loin. Chez les anciens, la fronde, l’arc, la baliste, la catapulte, &c. étoient des armes de jet. Dans l’usage présent, les canons, les mortiers, les fusils, &c. sont les armes de jet qui ont été substituées aux anciennes.

Jet se dit particulierement de la bombe jettée ou lancée par le moyen du mortier. On appelle le jet des bombes, l’art ou la science de les tirer avec méthode pour les faire tomber sur des lieux déterminés. Cette science fait la principale partie de la balistique, qui traite du mouvement des corps pesans jettés ou lancés en l’air suivant une ligne de direction oblique ou parallele à l’horison. Voyez Balistique ou Projectile.

On a vû au mot Bombe quelle est à peu-près l’époque de l’invention de cette machine. Les premiers qui ont fait usage des bombes, les tiroient avec très-peu de méthode.

Ils avoient observé que le mortier, plus ou moins incliné à l’horison, portoit la bombe à des distances inégales ; qu’en éloignant la direction du mortier de la verticale, la bombe alloit tomber d’autant plus loin que l’angle formé par la verticale & la direction du mortier approchoit de 45 degrés ; & que lorsqu’il surpassoit cette valeur, les distances où la bombe étoit portée, alloient en diminuant ; ce qui leur avoit fait conclure que la plus grande portée de la bombe étoit sous l’angle de 45 degrés. Muni de cette connoissance que la théorie a depuis confirmée, lorsqu’il s’agissoit de jetter des bombes, on commençoit à s’assûrer, par quelques épreuves, de la portée sous l’angle de 45 degrés ; & lorsqu’on vouloit jetter les bombes à une distance moins grande, on faisoit faire au mortier un angle avec la verticale plus grand ou plus petit que 45 degrés. Cet angle se prenoit au hasard ; mais après avoir tiré quelques bombes, on parvenoit à trouver à peu-près la direction ou l’inclinaison qu’il falloit donner au mortier pour faire tomber les bombes sur les lieux proposés.

Telle étoit à peu-près la science des premiers bombardiers ; elle leur servoit presque autant que si elle avoit été plus exacte, parce que la variation de l’action de la poudre, la difficulté de faire tenir fixement & solidement le mortier dans la position qu’on veut lui donner, sont des causes qui dérangent presque toûjours les effets déterminés par la théorie.

Les premiers auteurs qui ont écrit sur l’Artillerie, comme Tartaglia de Bresce, Diego Ufano, &c... croyoient que la bombe, ainsi que le boulet, avoit trois mouvemens particuliers ; savoir, le violent ou le droit, le mixte ou le courbe, & le naturel ou perpendiculaire.

Le mouvement étoit droit, selon ces auteurs, tant que l’impulsion de la poudre l’emportoit considérablement sur la pesanteur de la bombe : aussi tôt que cette impulsion venoit à être balancée par la pesanteur, la ligne du mouvement du mobile devenoit courbe ; elle redevenoit naturelle ou perpendiculaire, lorsque la pesanteur l’emportoit sur la force de l’impulsion de la poudre.

C’est à Galilée, mathématicien du grand duc de Florence, qu’on doit les premieres idées exactes sur ce sujet. Il considéra la bombe comme se mouvant dans un milieu non résistant ; & en supposant que la pesanteur fait tendre les corps au centre de la terre, il trouva, comme nous allons bien-tôt le faire voir, que la courbe décrite par la bombe est une parabole. Voyez Parabole.

Si l’on suppose qu’un corps soit poussé par une force quelconque dans une direction oblique ou parallele à l’horisontale, elle sera celle de projection de ce corps, c’est-à-dire, la ligne dans laquelle il tend à se mouvoir ; son mouvement le long de cette ligne sera appellé mouvement de projection.

Par le mouvement de projection, le corps ou le mobile avance uniformément dans la même direction (en supposant qu’il soit sans pesanteur, & que le milieu dans lequel il se meut ne résiste point), il parcourt des espaces égaux dans des tems égaux ; mais si l’on considere que la pesanteur qui agit toujours sur lui, l’approche continuellement du centre de la terre lorsqu’il se meut librement, on verra bien-tôt que son mouvement sera composé de celui de projection, & de celui que lui imprime sa tendance au centre de la terre ; qu’ainsi il doit s’écarter de la direction qui lui a d’abord été donnée.

Si le mouvement de pesanteur étoit uniforme comme celui de projection, le corps se mouvroit dans une ligne droite qui seroit la diagonale d’un parallélograme dont les deux côtés seroient entr’eux comme le mouvement de projection est à celui de la pesanteur.

Mais comme la pesanteur fait parcourir au corps des espaces inégaux dans des tems égaux, la ligne qui résulte du concours de ces deux mouvemens doit être une ligne courbe.

Pour trouver cette ligne, il faut diviser celle de projection en plusieurs parties égales ; ces parties étant parcourues dans des tems égaux, peuvent exprimer le tems de la durée du mouvement du corps : & comme les espaces que la pesanteur fait parcourir au mobile sont comme les quarrés des tems, ces espaces sont donc entr’eux comme les quarrés des parties de la ligne de projection.

Ainsi A6 (Planc. VIII. fig. 2. de l’Art. milit.) étant la ligne de projection de la bombe qui tombe en B sur le plan horisontal AB, on divisera cette ligne en plusieurs parties égales, par exemple en 6, abaissant des perpendiculaires de tous les points de division de A6 sur AB, l’espace 6B parcouru par la pesanteur, sera à celui qu’elle fera parcourir au mobile dans le tems exprimé par A1, comme 36 est à 1. C’est pourquoi on prendra DI de la 36e partie de 6B ; par la même raison 2E sera les de 6B, 3F les , 4G les , & 5H les  ; faisant ensuite passer une courbe par les points D, E, F, G, H, B, elle sera celle que la bombe ou le mobile aura décrite pendant la durée de son mouvement.

Si par le point A on mene Ab égale & parallele à 6B, & que par les points D, E, F, G, H, B, on tire des paralleles à A6, les parties de la ligne Ab, Ad, Ae, &c. seront égales aux espaces que la pesanteur aura fait parcourir à la bombe ; elles seront les abscisses de la courbe ADEFGHB, & les ordonnées Dd, Ee, Ff, seront égales aux divisions correspondantes de A6. D’où il suit que les quarrés des ordonnées de cette courbe sont entr’eux comme les abscisses. Mais cette propriété appartient à la parabole : donc la courbe décrite par la bombe est une parabole.

Si le milieu dans lequel la bombe ou le mobile se meut est résistant, la courbe qu’il décrit n’est plus une parabole. Pour la déterminer, il faudroit savoir quelle est la loi suivant laquelle l’air résiste au mouvement. En supposant que cette résistance soit proportionnelle aux quarrés des vitesses, comme on le croit communément, M. Newton a démontré que la courbe décrite par le mobile est une espece d’hyperbole dont le sommet ne répond point au milieu de la ligne tirée du mortier au lieu où tombe la bombe ; la perpendiculaire abaissée de ce point sur cette ligne, la couperoit en deux parties inégales, dont la plus grande est celle du côté du mortier. Comme plusieurs expériences ont fait voir que la résistance de l’air n’opere pas assez sensiblement sur le mouvement des bombes, pour causer des erreurs sensibles dans les calculs où l’on en fait abstraction ; nous supposerons, comme on le fait ordinairement, qu’elles se meuvent dans un milieu non résistant.

Les lignes de projection des bombes jettées parallelement ou obliquement à l’horison, sont autant de tangentes à la courbe qu’elles décrivent ; car comme la pesanteur agit toûjours sur les corps qui se meuvent librement, elle doit les détacher d’abord de la ligne de projection ; par conséquent cette ligne ne doit toucher celle qu’ils décrivent que dans un point.

On sait que les bombes se tirent avec des especes de canons courts appellés mortiers. Voyez Mortier. La poudre dont le mortier est chargé est la force qu’on emploie pour chasser la bombe. Comme il y auroit beaucoup de difficultés à calculer les différentes impressions que les bombes peuvent recevoir des différentes quantités de poudre dont on peut charger le mortier, on a trouvé le moyen de les éluder, en supposant que la force dont la poudre est capable, est acquise par la chute de la bombe d’une hauteur verticale quelconque. Plus cette hauteur sera grande, & plus la force ou la vitesse acquise pendant la durée de la chute, le sera aussi. C’est pourquoi il n’y a point de charge de poudre dont la force ne puisse se considérer comme étant produite par une chûte verticale relative à la quantité de poudre de cette charge.

En supposant que les bombes décrivent des paraboles, on peut des différentes propriétés de ces courbes tirer les regles générales & particulieres du jet des bombes ; mais comme on peut aussi les déduire du mouvement des corps pesans, nous allons en donner un précis, en ne supposant que la connoissance de la théorie de ce mouvement.

Pour exprimer la vitesse avec laquelle la bombe est poussée suivant les différentes directions qu’on peut lui donner, nous supposerons qu’elle a acquis cette vitesse en tombant d’une hauteur déterminée BA (Fig. 1. Planc. VIII. de l’Art. milit. n°. 2.)

Il est démontré que si un corps pesant qui a acquis une vitesse en tombant d’une hauteur déterminée BA, est poussé de bas en haut avec cette vitesse, qu’il remontera à la même hauteur d’un mouvement retardé, dans le même tems que celui de la durée de sa chûte le long de cette hauteur. Voyez Mouvemens des corps pesans.

Si l’on suppose qu’il se meuve d’un mouvement uniforme pendant le même tems, avec la vitesse acquise en tombant de B en A, il parcourra un espace double de AB, c’est-à-dire AC : dans le tems qu’il employeroit à tomber d’un mouvement accéléré de B en A, & à remonter de A en B d’un mouvement retardé, il parcourra d’un mouvement uniforme AE quadruple de AB.

Si le corps pesant est poussé suivant une ligne de direction quelconque AF, (fig. 1, 2 & 3. Planc. VIII. n°. 2.) avec la vitesse acquise par sa pesanteur en tombant librement de B en A, pour avoir la distance où ce corps ira tomber, soit sur un plan horisontal AX, ou incliné au-dessus de l’horison AY, ou au-dessous AZ ; il faut sur AE, quadruple de AB, décrire un arc tangent au plan, qui coupera la ligne de projection en F ou f ; si l’on abaisse de ce point la verticale FfG, le point G où elle rencontrera les plans AX, AY & AZ, sera celui où le corps ira tomber.

Pour le démontrer, tirez la corde EF. On aura les deux triangles semblables EAF, FAG ; car les angles EAF, AFG sont égaux étant alternes : de plus, l’angle FEA qui a pour mesure la moitié de l’arc FfA, est égal à FAG qui étant formé de la tangente AG & de la corde FA, a pour mesure la moitié du même arc FfA : donc les deux triangles AEF & FAG sont semblables. C’est pourquoi l’on a . Mais dans la proportion continue le premier terme est au dernier comme le quarré du premier est au quarré du second. Donc Et . Les deux premiers termes de cette derniere proportion expriment les vitesses que le mobile acquiert en tombant librement de E en A, & de F en G ; car les vitesses peuvent être exprimées par les racines quarrées des espaces que la pesanteur fait parcourir au mobile. Il suit de-là que les espaces EA & AF étant entr’eux comme les vitesses précédentes, sont parcourus uniformément dans le même tems. Ainsi ils peuvent exprimer ces vitesses, mais les espaces parcourus par la pesanteur sont entr’eux comme les quarrés des vitesses. Donc, puisque EA & FG sont entr’eux comme les quarrés de EA & de AF, ces lignes sont celles que la pesanteur fait parcourir à la bombe ou au mobile dans le tems qu’il decriroit EA & AF uniformément, c’est-à-dire dans un tems double de celui qu’il employeroit à tomber de B en A, d’un mouvement accéléré, ou ce qui est la même chose, dans celui qu’il employeroit à monter de A en B, & à descendre de B en A.

Il est évident que cette démonstration s’applique également aux figures 1, 2 & 3 (Planc. VIII. n°. 2.) à la ligne de projection Af des mêmes figures, & à toutes les autres qu’on peut tirer de A aux différens points de l’arc AfFE ; que si le plan est horisontal comme AX (fig. 1.), l’arc AfFE est une demi-circonférence dont AE est le diametre : mais que si le plan est élevé sur l’horison comme AY (fig. 2.) l’arc précédent est plus petit que la demi-circonférence, & qu’il est plus grand quand le plan est abaissé sous l’horison, comme AZ (fig. 3.)

Pour décrire ces arcs dans ces deux derniers cas, il faut élever du point A sur AY & AZ, la perpendiculaire indéfinie AN (fig. 2 & 3.) ; puis du point C milieu de AE, élever sur cette ligne une autre perpendiculaire CL, qui étant prolongée jusqu’à la rencontre de AN, la coupera dans le point O qui sera le centre de l’arc. C’est pourquoi, si de ce point pris pour centre, & de l’intervalle OA ou OE on décrit l’arc AfFN terminé en N (fig. 3.) par sa rencontre avec AN (fig. 3.) & prolongée jusqu’en E (fig. 4) on aura l’arc demandé.

La distance AG à laquelle la bombe va tomber du mortier, se nomme la ligne de but, ou l’amplitude de la parabole ; AE quadruple de AB, la force du jet ; & FG ou fG, la ligne de chûte.

Comme il n’est point d’usage de tirer les bombes parallelement à l’horison, nous n’entrerons point dans le détail des circonstances particulieres de ce jet ; nous donnerons seulement la maniere de déterminer la hauteur le long de laquelle la bombe doit tomber pour acquérir la vitesse nécessaire pour décrire la ligne de projection qui dans ce cas est égale à celle de but, pendant que la pesanteur lui fait décrire la ligne de chûte.

Si l’on suppose que du point B (fig. 11), élevé sur l’horisontal AX de la quantité BA, on ait tiré une bombe avec une charge de poudre déterminée, & que la bombe ait été tomber en G sur AX, pour trouver la hauteur de laquelle elle auroit dû tomber pour acquérir la force ou la vitesse que lui imprime la charge de poudre du mortier pour décrire la ligne de projection BF d’un mouvement uniforme, pendant que la pesanteur lui fera décrire BA ou FG d’un mouvement accéléré, il faut mener BF parallele à AX, terminée en F par sa rencontre avec GF perpendiculaire à AX. On coupera BF en deux également en D, & l’on tirera AD, sur laquelle on élevera la perpendiculaire DE, qui sera terminée en E par sa rencontre avec le prolongement de AB ; l’on aura EB pour la hauteur demandée.

La bombe en tombant de B en A acquiert une vitesse capable de lui faire décrire cette même ligne d’un mouvement uniforme pendant la moitié du tems de la durée de sa chûte d’un mouvement accéléré ; elle doit donc décrire BD moitié de BF, dans le même tems ; comme AB & BD sont ainsi parcourus uniformément dans le même tems, ces deux lignes sont entr’elles comme les vitesses qui les leur font parcourir. Mais à cause du triangle rectangle ADE, l’on a  ; ce qui donne . Or la vitesse par la chûte le long de AB est égale à la racine quarrée de AB ; donc la racine quarrée de EB exprime la vitesse par BD : donc EB est la hauteur de laquelle la bombe doit tomber pour acquérir une vitesse capable de pousser la bombe par le mouvement de projection de B en D, dans le tems de la moitié de la durée de la chûte accélérée de la bombe le long de BA. Or dans un tems double cette même vitesse doit lui faire parcourir BF double de BD ; donc elle lui fera parcourir cet espace dans le tems que la pesanteur fera parcourir à la bombe la ligne BA ; donc, &c.

La force du jet, la ligne de projection, & la ligne de chûte sont en proportion continue, c’est-à-dire que (Planc. VIII. n°. 2. fig. 1, 2 & 3.)  ; ce qui est évident, puisque les triangles semblables EAF, FAG donnent cette même proportion.

Il suit de-là que lorsqu’on connoît l’amplitude de la parabole, & l’angle de l’inclinaison du mortier, on peut trouver la force du jet. Car dans le triangle FGA on connoît AG par la supposition, ainsi que l’angle FAG. De plus l’angle AGF qui est droit fig. 1, & qui est égal à GAP, plus GPA, fig. 2, & au droit APG moins PAG fig. 3. C’est pourquoi on viendra par la Trigonométrie à la connoissance de GF & de AF. Ces deux lignes étant connues, on trouvera AE, en cherchant une troisieme porportionnelle à GF & AF.

On voit par-là que si l’on tire une bombe avec une charge de poudre quelconque, qu’on observe l’angle d’inclinaison du mortier, & la distance où la bombe sera portée, on peut trouver la hauteur d’où elle auroit dû tomber pour acquérir une force qui agissant sur elle dans la direction du mortier, soit capable de produire le même effet que l’impulsion de la poudre dont il aura été chargé.

Si par les points fF (fig. 4.) on tire fd & FD perpendiculaire à AE, ces lignes seront égales à l’amplitude AG. Or comme tous les points de la demi-circonférence AFfE terminent les différentes lignes de projection selon lesquelles on peut tirer la bombe pour la faire tomber sur AX avec la charge de poudre exprimée par la force du jet AE, il s’ensuit que si de tous ces points on mene des perpendiculaires à AE, ou si l’on tire une infinité d’ordonnées à AE, elles exprimeront chacune la distance où la bombe ira tomber, tirée sous l’angle d’inclinaison formé par l’horisontale AX, & par les lignes de projection menées de A aux différens points ou aux ordonnées, rencontrant la demi-circonférence AfFE.

Il résulte de cette considération (Planc. VIII. n°. 2. fig. 1 & 4.), 1°. que le rayon CL étant la plus grande de ces ordonnées, exprime la plus grande distance AM où la bombe peut être chassée par la charge du mortier ; comme l’on a cette amplitude lorsque la ligne de projection est AL qui donne l’angle LAM de 45 degrés, puisque sa mesure est la moitié de l’arc AffL de 90 degrés, il s’ensuit que pour avoir la plus grande distance où la bombe peut aller, il faut que l’angle de projection soit de 45 degrés.

2°. Que comme les ordonnées également distantes du rayon CL perpendiculaire sur AE sont égales, les inclinaisons Af, AF également au-dessus & au-dessous de 45 degrés, donnent des amplitudes égales.

Ainsi l’angle de projection étant de 30 degrés ou de 60, la bombe ira à la même distance, parce qu’ils different également de 45 degrés.

3°. Comme les ordonnées df, df, sont les sinus des arcs Af, Af, & que les angles f A G, f A G ont pour mesure la moitié de ces arcs, les portées AG, AG égales aux ordonnées df, df sont entr’elles comme les sinus des arcs Af, Af, ou ce qui est la même chose, comme les sinus des angles doubles de l’inclinaison du mortier.

Ainsi, lorsque l’angle d’inclinaison du mortier est de 15 dégrés, l’arc Af est à 30 ; mais comme le sinus de cet arc est la moitié du rayon, la portée de la bombe tirée sous l’angle de 15 degrés, est la moitié de celle qu’on a sous l’angle de 45 degrés.

Si l’on veut connoître la plus grande hauteur à laquelle la bombe s’éleve sur l’horisontal AX (fig. 1. Planc. VIII. n°. 2.), il faut du point I milieu de AG, élever sur cette ligne la perpendiculaire IR, prolongée jusqu’à ce qu’elle rencontre la ligne de projection AF. On suppose qu’elle le fait en R. Si l’on coupe ensuite IR en deux également en K, ce point sera celui de la plus grande élévation de la bombe, & par conséquent IK sera la hauteur demandée.

Pour le démontrer, considérez que IR coupant AG en deux également, coupe de même AF en R, & que comme IR est la moitié de la ligne de chûte FG, IK moitié de IR est le quart de FG. Or le tems que la bombe emploie à parcourir AF par son mouvement de projection, est double de celui de AR ; mais les espaces que la pesanteur lui fait parcourir, sont entr’eux comme les quarrés des tems ; donc la ligne de chûte FG est quadruple de RK ou IK ; donc IK exprime la plus grande élévation de la bombe sur l’horisontale AX.

Les principes précédens suffisent pour la résolution des différens problèmes qui concernent le jet des bombes, lorsque le plan où elles doivent tomber est de niveau avec la batterie. On peut aussi les appliquer aux plans élevés au-dessus de l’horison, ou inclinés au-dessous, mais d’une maniere moins générale, parce que dans ces deux derniers cas les portées ne sont point entr’elles comme les sinus des angles doubles de l’inclinaison du mortier. Nous ferons voir la maniere de faire cette application dans les problèmes suivans ; mais auparavant nous allons donner le moyen de trouver l’angle de projection qui donne la plus grande portée de la bombe, soit que le plan sur lequel elle doit tomber soit élevé sur l’horison, ou incliné au-dessous.

Soient pour cet effet les figures 2 & 3. Planc. VIII. n°. 2. Nous supposerons dans la premiere que le plan AY sur lequel la bombe doit tomber, est élevé sur l’horisontale AX de 20 degrés, & dans la seconde, que AZ est au-dessous, de la même quantité.

Cela posé, l’arc dont AE est la corde, sera de 40 degrés plus petit que la demi-circonférence ; car l’angle NAE est égal à GAX formé par le plan incliné AY, & l’horisontale AX : or EAN a pour mesure la moitié de l’arc NE ; mais cette moitié étant de 20 degrés, par la supposition le double EN doit en avoir 40. Si l’on ôte ce nombre de 180 degrés, valeur de la demi-circonférence, il restera 140 degrés pour l’arc ALE, dont AE est la corde.

La perpendiculaire CL qui coupe la corde EA en deux également, coupe de la même maniere l’arc ALE ; c’est pourquoi dans cet exemple l’angle LAG de la plus grande portée a pour mesure le quart de 140 degrés, c’est-à-dire 35 degrés.

Il est évident que les angles également au-dessus & au-dessous de cet angle, donneront les mêmes portées, ainsi que ceux qui different également de 45 degrés, lorsque le plan sur lequel la bombe doit tomber, est horisontal ou de niveau avec la batterie.

Si le plan A Z, fig. 3, est au-dessous de l’horisontale AX de 20 degrés, l’arc ALNE en aura 180 plus 40, c’est à-dire 220 ; le quart de ce nombre qui est 55, donnera dans cet exemple l’angle de projection de la plus grande portée de la bombe sur AZ.

Il est aisé de tirer de-là une regle générale pour avoir l’angle de la plus grande portée de la bombe sur un plan élevé sur l’horison ou incliné au-dessous d’une quantité connue.

Dans le premier cas, il faut ôter de 180 degrés le double de l’angle de l’élévation du plan, & prendre le quart du reste : dans le second, il faut ajoûter à 180 degrés le double de l’inclinaison du plan, & prendre également le quart de la somme qui en résulte ; ou bien il faut dans le premier cas, ôter de 45 degrés la moitié de l’angle de l’élévation du plan, & ajoûter dans le second à 45 degrés la moitié de l’inclinaison du plan sous l’horison.

Problèmes. I. Ayant tiré une bombe sous un angle de projection pris à volonté, & connoissant la distance où elle aura été tomber sur un plan horisontal, trouver la force du jet.

Soit (fig. 4. Pl. VIII. n°. 2.) l’angle de projection FAY, & G le point où la bombe aura tombé sur le plan horisontal AY.

Comme on suppose que AG est connue, on trouvera par la Trigonométrie FG & AF, cherchant ensuite une troisieme proportionnelle à FG & AF, on aura la force du jet AF.

Si le plan est incliné au-dessus ou au-dessous de l’horison d’une quantité connue GAX, (fig. 5.) on connoîtra dans le triangle FAG, l’angle AGF, qui est égal à GAP, plus APG, l’angle de projection FAG, & le côté AG ; c’est pourquoi on viendra par la Trigonométrie à la connoissance des deux autres côtés AF & FG.

Si le plan est incliné au-dessous de l’horison, (fig. 6.) on connoîtra l’angle d’inclinaison XAZ, & par conséquent AGP, qui en est le complément ; l’angle PAF formé par l’horisontale AX, & la ligne de projection AF est aussi connue. Donc GAF qui est égal à GAP, plus PAF, le sera également ; or comme le côté AG est supposé connu, on connoît dans le triangle GAF un côté & les angles ; c’est pourquoi on peut par la Trigonométrie venir à la connoissance des deux autres côtés GF & AF.

Les lignes de chûte & de projection, (fig. 5. & 6.) étant connues, on leur cherchera une troisieme proportionnelle, qui sera la force du jet EA.

II. La force du jet étant connue, trouver la plus grande distance où la bombe peut être portée sur un plan quelconque, fig. 1. 2. & 3. Pl. VIII. n°. 2.

Il est évident par tout ce que l’on a exposé précédemment, que la plus grande distance où la bombe peut être portée sur un plan quelconque avec une charge de poudre exprimée par la force du jet AE, est déterminée par la partie AM du plan, comprise entre le point A, où l’on suppose le mortier & la parallele LM, à la force du jet AE, menée de l’extrémité L de la ligne CL qui coupe l’arc ALE en deux également. C’est pourquoi il ne s’agit que de trouver la valeur de AM dans les fig. 1. 2. & 3. pour la résolution du problème proposé.

Lorsque le plan est horisontal (fig. 1.), on a déja vu que la plus grande distance où la bombe peut tomber est égale à la moitié de la force du jet AE, & qu’elle se trouve en tirant le mortier sous l’angle LAM de 45 degrés.

Si le plan AY (fig. 2.) est incliné au-dessus de l’horison AX, d’une quantité connue YAX, il faut d’abord trouver l’angle de projection de la plus grande portée LAM, comme on l’a enseigné ci-devant, & chercher ensuite la valeur de la ligne de projection AL.

Pour cet effet, considérez que l’angle NAY est droit ; qu’ôtant de cet angle les angles connus NAE & LAY, il restera l’angle EAL : or dans le triangle rectangle ACL, connoissant AC égal à la moitié de la force du jet AE, & un angle CAL, on viendra par la Trigonométrie à la connoissance de AL.

Présentement dans le triangle AML, on connoîtra le côté AL, l’angle LAM, & AML égal à MAX, plus l’angle droit ARM ; c’est pourquoi on viendra par la Trigonométrie à la connoissance de la plus grande distance AM, où la bombe peut être portée avec la charge du mortier exprimée par la force du jet A E.

Si le plan est incliné sous l’horison comme AZ (fig. 3.), & qu’on connoisse l’angle d’inclinaison XAZ formé par l’horisontale AX & le plan AZ, on cherchera d’abord, comme dans le cas précédent, l’angle de projection LAM, de la plus grande portée de la bombe ; on ôtera ensuite de l’angle droit NAZ, l’angle de projection LAZ. il restera l’angle NAL, auquel ajoutant NAC égal à celui de l’inclinaison du plan XAZ, on aura EAL, ou CAL. Alors dans le triangle ACL, connoissant, outre cet angle, le côté CA, égal à la moitié de la force du jet, on viendra à la connoissance de AL.

La ligne de projection AL étant ainsi connue, de même que les angles de la base du triangle LAM, savoir LAM & AML (ce dernier est égal à APG, moins PAG), il sera aisé de venir par la Trigonométrie à la connoissance de AM, ou de la plus grande portée de la bombe.

III. La plus grande distance où une bombe puisse aller sur un plan quelconque étant connue, & la force du jet, trouver la distance où elle ira, tirée sous tel angle de direction que l’on voudra, le mortier étant toûjours chargé de la même quantité de poudre, ou, ce qui est la même chose, la force du jet étant toûjours la même.

Lorsque le plan est horisontal, les différentes portées sont entr’elles comme les sinus des angles doubles de l’inclinaison de mortier ; c’est pourquoi l’on trouvera la distance demandée par cette analogie.

Comme le sinus total est au sinus de l’angle double de l’inclinaison du mortier ; ainsi la plus grande distance est à la distance demandée.

Si le plan donné AY (fig. 5.) est incliné sur l’horison AX, du centre O de l’arc ALN, on tirera le rayon OF : comme l’arc ALF est double de celui de l’inclinaison du mortier, l’angle AOE sera connu ; le rayon AO le sera aussi : car connoissant dans le triangle rectangle OCA, le côté AC égal à la moitié de la force du jet, & l’angle OAC, qui est égal à celui de l’inclinaison du plan YAX, on viendra aisément à la connoissance de OA. Ainsi dans le triangle AOF, on connoîtra les angles & les côtés OA & OF, qui feront venir à la connoissance de la ligne de projection AF. Dans le triangle AFG, on connoîtra le côté AF ; de plus l’angle d’inclinaison donné FAG, & l’angle AGF égal à APG, plus PAG ; par conséquent on trouvera par la Trigonométrie la distance demandée AG.

Si le plan AZ est incliné sous l’horison (fig. 6.) il est évident qu’on viendra de la même maniere à la connoissance de sa ligne de projection AF, & ensuite à celle de la distance demandée AG.

IV. La plus grande distance où une bombe puisse aller sur un plan quelconque étant connue, & la force du jet, trouve l’angle de projection ou d’inclinaison du mortier pour la faire tomber à une distance donnée.

Si le plan est horisontal, on fera cette analogie.

Comme la plus grande distance est à la distance donnée ; ainsi le sinus total est au sinus de l’angle double de celui de projection.

Ce sinus étant connu, on cherchera dans les tables de sinus l’angle auquel il appartiendra ; sa moitié sera la valeur de l’angle de projection demandé.

Si le plan est incliné au-dessus ou au-dessous de l’horison comme AY & AZ (fig. 5. & 6.), il y a plus de difficulté à trouver l’angle dont il s’agit ; voici néanmoins une méthode assez facile pour y parvenir.

Nous supposerons d’abord (fig. 5.) que le plan AY est élevé sur l’horison AX d’une quantité connue YAX ; que EA est la force du jet, & l’arc ALE décrit du point O, milieu du diametre AN, renferme toutes les différentes lignes de projection que la charge de poudre du mortier, ou la force du jet peut faire décrire à la bombe. Nous supposerons aussi que AG est la distance donnée. C’est pourquoi si l’on imagine que par G, on a mené GF parallele à AE, qui coupe l’arc ALE en s, & F ; tirant du point A, les lignes de projection Af, & AF, elles donneront l’angle demandé fAG, ou FAG.

Pour venir à la connoissance de cet angle par le calcul, il faut observer que dans le triangle AGF, on connoît le côté donné AG ; de plus l’angle AGF égal à GAP plus GPA ; qu’ainsi si l’on parvient à la connoissance de GF, ou de AF, on pourra connoître par la Trigonométrie, l’angle de projection FAG.

Pour cet effet, soit tiré du centre O de l’arc ALF sur AE, la perpendiculaire OC, qui étant prolongée jusqu’à la rencontre de cet arc en L, le coupera en deux également, ainsi que AE en C, & Ff en T.

On aura le triangle rectangle ACO, dans lequel le côté AC qui est égal à la moitié de la force du jet AE sera connu, ainsi que l’angle OAC, égal à celui de l’élévation du plan YAX, ou GAP ; c’est pourquoi on viendra par la Trigonométrie à la connoissance de OC & de OA, égale à OL.

Présentement si l’on prolonge FG jusqu’à ce qu’elle rencontre l’horisontale AX dans le point P, il sera aisé, dans le triangle rectangle APG, semblable au triangle ACO, de venir à la connoissance de AP & de PG.

Comme CT est égale à AP, à cause des paralleles AE & FP, OT qui est égal à OC plus CT sera connue ; si l’on ôte OT de OL, il restera TL.

Cette ligne étant connue, on viendra par la propriété du cercle, à la connoissance de FT ou Tf, en multipliant OL plus OT par TL, & extrayant la racine quarrée du produit.

Pour déterminer FG ou fG, il faut considérer que CA moins PG est égale à TG ; ajoûtant TF à cette ligne, on a FG, & ôtant Tf de cette même ligne AC, il restera fG.

GF ou Gf étant connue, on connoît dans le triangle AFG ou AfG deux côtés, & l’angle AGF compris par ces côtés ; c’est pourquoi on viendra par la Trigonométrie à la connoissance des angles FAG, AFG.

Lorsque le plan sur lequel la bombe doit tomber, est incliné sous l’horison AX, comme AZ fig. 6. il est clair qu’on déterminera de la même maniere la valeur de l’angle de projection FAG, pour faire tomber la bombe à la distance donnée AG.

Remarques. 1°. Il est évident que, si la distance AP, prise du point A, où l’on suppose la batterie, fig. 5 & 6. jusqu’à la rencontre de la ligne de chûte FG avec l’horisontale AX, est plus grande que CL, le problème est impossible ; car, dans ce cas la ligne de chûte ne toucheroit ni ne rencontreroit l’arc ALE dans aucun point. Et 2°. que si AP se trouve égale à CL, l’angle cherché sera celui de la plus grande portée de la bombe.

2°. On peut, par la résolution des problèmes précédens, calculer des tables pour trouver avec toutes les charges de poudre qu’on peut employer, les distances où les bombes iront tomber, soit que le plan sur lequel on les tire soit horisontal, ou incliné à l’horison, sous tel angle d’inclinaison que l’on voudra, & réciproquement pour trouver les angles d’inclinaison, lorsque les distances où les bombes doivent tomber sont données. M. Bélidor a rempli cet objet dans le Bombardier françois pour les plans horisontaux ; les deux derniers problemes qu’on vient de résoudre, donnent les moyens de continuer ces tables pour les autres plans.

2°. Il faut observer que, comme il y a deux angles de projection pour chaque amplitude de la bombe, au-dessus de la plus grande portée, & que le plus grand lui donne plus d’élévation que le petit, on doit se servir du premier lorsque l’objet des bombes est de ruiner des édifices, le second & le plus petit angle doit être employé pour tirer des bombes dans les ouvrages attaqués, & sur des corps de troupes, parce que les bombes ayant alors moins d’élévation, elles s’enfoncent moins dans la terre, ce qui en rend les éclats plus dangereux.

Description & usage de l’instrument universel pour jetter les bombes. Quoique les différens calculs nécessaires pour tirer les bombes avec regle & principes soient fort simples, cependant, comme il peut arriver que tous ceux qui peuvent être chargés de la pratique du jet des bombes, n’en soient pas également capables, on a imaginé différens instrumens pour leur épargner ces calculs ou pour les abréger. On peut voir ces différens instrumens, & la maniere de s’en servir dans l’Art de jetter les bombes par M. Blondel. Nous donnerons seulement ici la construction & l’usage de celui qui peut servir le plus généralement à ce sujet, & qu’on appelle par cette raison l’instrument universel.

C’est un cercle X, fig. 7. assez grand pour être divisé en degrés ; il est d’une matiere solide, comme de cuivre ou de bois. Il a une regle AF tangente à sa circonférence, attachée fixement à l’extrémité de son diametre AB, & de pareille longueur ; elle est divisée dans un grand nombre de parties égales, comme par exemple 200.

On attache à la tangente ou à la regle AF, un filet RP, de maniere qu’on puisse le faire couler le long de AF ; ce filet est tendu par un plomb P, qui tient à son extrémité.

Pour trouver, par le moyen de cet instrument, l’inclinaison qu’il faut donner au mortier pour jetter une bombe à une distance donnée sur un plan horisontal, ou de niveau avec la batterie.

On cherchera d’abord la force du jet, en tirant le mortier avec la charge de poudre dont on veut se servir, sous un angle d’inclinaison pris à volonté.

La force du jet AE, fig. 8. étant trouvée, par exemple de 923, pour connoître l’angle d’inclinaison ou de projection FAG, on fera une regle de trois, dont les deux premiers termes seront la force du jet AE, & le diametre AB de l’instrument universel X, égal à la regle AF, divisée en 200 parties égales ; le troisieme terme de cette regle sera la distance donnée AG, que nous supposerons ici de 250 toises.

Ainsi nommant x le quatrieme terme de cette regle, l’on aura 923. 200 ∷ 250. x ; faisant l’opération, on trouvera 54 pour la valeur de x, ou du quatrieme terme.

On fera couler le filet RP de l’instrument universel X, fig. 7 & 8. depuis A jusqu’à la 54e division R de la regle AF ; on mettra ensuite cet instrument dans une situation verticale, & de maniere que la regle AF soit parallele à l’horison. Alors le filet RP coupera l’instrument dans deux points d & D, qui donneront les arcs Ad, AD, dont la moitié sera la valeur de l’angle cherché.

Pour le démontrer, il faut imaginer l’instrument universel X, placé immédiatement sous l’horisontale AG, fig. 8, de maniere que le diametre AB soit dans le prolongement de la force du jet AE. On verra alors que les parties Ad, AdD du demi-cercle de X sont proportionnelles à Af & AfF de la demi circonférence AfFE, ou que les triangles ARD, AGF sont semblables, ainsi que ARd, AGf ; d’où il suit que les arcs Ad & AdD sont de même nombre de degrés que Af & AfF ; mais fAG & FAG sont les angles de projection pour faire tomber la bombe au point G. Donc, &c.

Remarque. Si le filet RP, au lieu de couper le demi-cercle de l’instrument ne faisoit que le toucher, l’angle de projection cherché seroit de 45 degrés, & la portée donnée seroit la plus grande. Mais s’il tomboit en dehors le problème seroit impossible, c’est-à-dire, que la charge de poudre déterminée, ne seroit pas suffisante pour chasser la bombe à la distance donnée.

Si l’angle d’inclinaison du mortier, ou de la ligne de projection est donné, & qu’on veuille savoir à quelle distance la charge du mortier portera la bombe sur un plan horisontal, supposant cette charge, ou la force du jet, la même que dans le problème précédent.

On fera couler le filet RP le long de la regle AF, fig. 7 & 8. qu’on tiendra dans une situation parallele à l’horison, jusqu’à ce qu’il coupe le demi-cercle de l’instrument dans un point d, qui donne l’arc Ad double de l’inclinaison donnée : après cela on comptera exactement le nombre des parties de AF, depuis A jusqu’en R, que nous supposons être le point auquel le filet RP étant parvenu, donne l’arc Ad double de l’inclinaison du mortier. Supposant que le nombre des parties de cette regle, depuis A jusqu’en R, soit 54, on fera une regle de trois, dont les deux premiers termes seront toutes les parties de la regle AE, & celle de la force du jet AE. Le troisieme sera AR, supposé de 54 parties ; ainsi l’on aura 200. 923 ∷ 54. x : faisant cette regle, on trouvera 250 toises pour la distance AG où la bombe ira tomber.

Si le plan sur lequel la bombe doit tomber, est plus élevé ou plus bas que la batterie, on trouvera de même avec l’instrument universel, l’angle d’inclinaison convenable pour la faire tomber à une distance donnée.

Soit le plan AY, fig. 9. élevé sur : l’horison A, & d’une quantité connue YAM ; le point de ce plan, où l’on veut faire tomber la bombe, soit aussi AG ; la distance donnée, & la force AF décrite de 923 toises, comme dans les problèmes précédens, il s’agit de trouver l’angle d’inclinaison du mortier.

On déterminera d’abord, par la Trigonométrie, l’horisontale AM, on trouvera ensuite le nombre des parties de la regle AF de l’instrument universel, correspondant aux toises de AE, par cette regle de trois.

La force du jet AE 923 toises
est à la somme des parties de la regle AF 200.
comme NM.
est à AR.

La partie AR de la regle AF étant connue, on placera le filet RP en R, & l’on fera ensorte qu’il y soit attaché fixement. Cela fait, on mettra l’instrument universel verticalement en A, fig. 10. on le disposera de maniere que le prolongement de la regle AF, donne sur le lieu donne G, où la bombe doit tomber. Alors le filet RP qui pend librement, coupera le demi cercle de l’instrument dans deux points d & D, qui détermineront les arcs Ad, AD, dont la moitié sera la valeur des deux inclinaisons du mortier pour jetter la bombe en G.

On opérera de la même maniere pour trouver ces mêmes angles, si le lieu où la bombe doit tomber, est au dessus de l’horison.

Remarque. Il est évident que si le filet RP ne faisoit que toucher le demi-cercle AdDB, la distance AG seroit la plus grande où la bombe pourroit aller avec la force du jet donné, ou la charge du mortier ; & que s’il tomboit en dehors, le problème seroit impossible.

Pour démontrer cette opération, il faut, comme on l’a fait dans la précédente, supposer le demi-cercle AFfEN, fig. 9. qui termine toutes les différentes lignes de projection que la bombe peut décrire avec la force du jet AE, & imaginer que le diametre AB de l’instrument universel, est placé dans le prolongement du diametre NA de ce demi-cercle ; alors la regle AF sera dans le prolongement de AG, & l’on verra que le filet RP coupe le demi-cercle de l’instrument, de la même maniere que la ligne de chûte FG coupe AfFEN ; ainsi les angles FAG, RAD sont égaux, de même que fAG, RAD, &c.

Il est aisé d’observer que, comme le point A du diametre AB de l’instrument universel est élevé sur l’horison, la direction AC n’est pas exactement la même, que si ce point étoit immédiatement sur la ligne BM ; mais comme cette élévation est très-petite, par rapport à la distance AG, la différence qui en résulte, ne peut être d’aucune considération dans la pratique du jet des bombes, & c’est par cette raison qu’on n’y a nul égard.

Pour ce qui concerne la maniere de pointer le mortier. Voyez Mortier. Article de M. Le Blond.

Jet de Voiles, Jeu de Voiles (Marine.) c’est l’appareil complet de toutes les voiles d’un vaisseau. Un vaisseau bien équipé doit avoir au moins deux jets de voiles, & de la toile pour en faire en cas de besoin.

Jet de Feu, (Artificier.) on appelle ainsi certaines fusées fixes, dont les étincelles sont d’un feu clair comme les gouttes d’eau jaillissantes, éclairées le jour par le soleil, ou la nuit par une grande lumiere.

La composition des jets n’est autre chose qu’un mêlange de poulverin, & de limaille de fer. Lorsqu’elle est fine, pour les petits jets, on en met le quart du poids de la poudre, & lorsqu’elle est grosse, comme pour les gros jets, dont les étincelles doivent être plus apparentes, on y en met le tiers & même davantage. On peut diminuer cette dose de force, lorsqu’on se propose d’imiter des cascades d’eau, parce qu’alors au lieu de monter, les étincelles doivent tomber, pour imiter la chûte de l’eau.

On fait des jets de toute grandeur, depuis 12 jusqu’à 20 pouces de long, & depuis six lignes jusqu’à 15 de diametre.

Jet (Brasserie.) c’est une espece de timballe à deux douilles, une au-dedans hachée au-devant, & une autre sur le derriere, à-travers lesquelles on passe un bâton de six à sept piés de long, dont le bout est emmanché dans la douille de devant, & à l’autre bout est un contrepoids de plomb. Cet instrument sert à jetter l’eau, ou les métiers dans les bacs. Voyez l’article Brasserie & ses Planches. Voyez aussi l’article Jetter.

Jets (Fonderie.) Les Fondeurs appellent ainsi des tuyaux de cire que l’on pose sur une figure, après que la cire a été réparée, & qui étant par la suite enfermés dans le moule de terre, & fondus ainsi que les cires de la figure, par le moyen du feu qu’on fait pour les retirer, laissent dans le moule reposé des canaux qui servent à trois différens usages ; les uns sont les égoûts par lesquels s’écoulent toutes les cires ; les autres sont les jets qui conduisent le métal du fourneau à toutes les parties de l’ouvrage, & les évents qui laissent une issue libre à l’air renfermé dans l’espace qu’occupoient les cires, lequel, sans cette précaution, seroit comprimé par le métal à mesure qu’il descendroit, & pourroit faire fendre le moule, pour se faire une sortie, ou occuper une place où le métal ne pouroit entrer. On fait ces tuyaux creux comme un chalumeau, pour qu’ils soient plus légers, & de grosseur proportionnée à la grandeur de l’ouvrage, & aux parties où ils doivent être posés, & diminuent de grosseur depuis le haut jusqu’au bas. Voyez à l’article Bronze, la Fonderie des statues équestres ; & dans nos Planches de Fonderie, les figures.

Jet, (Fondeurs de caracteres d’Imprimerie.) ce sont deux pieces du moule à fondre les caracteres d’Imprimerie, qui forment ensemble une ouverture quarrée, qui va en diminuant depuis son entrée jusqu’à l’autre bout opposé. Ce jet est la premiere chose qui se présente en fondant, & sert pour ainsi dire d’entonnoir pour faire couler la matiere dans le reste du moule, jusqu’à la matrice. Voyez Moule, Voyez aussi nos Planches.

Jet, Jetter, (Jardinage.) ; on dit qu’un arbre fait de beaux jets, qu’il jette bien, quand on voit sortir des branches fortes & vigoureuses de sa tige.

On dit encore des melons, qu’ils ont jetté de grands bras.

Jet du bois, (Jardinage.) c’est la pousse même de l’année qui forme un jet.

Jet d’eau, (Menuiserie.) c’est une traverse des bas des dormans aux chassis à verre, qui rejette l’eau lorsqu’il pleut. Voyez les figures de nos Planches.

Jet de Moule. (à la Monnoye.) c’est l’action de verser le métal dans les moules, où l’on a imprimé les planches gravées.

L’or se jette dans les moules avec le creuset, en le prenant avec des hapes creuses construites à cet effet. Quant à l’argent & le cuivre on se sert de cuillieres, en puisant dans le creuset le métal en bain que l’on veut mouler.

Jet, Picot, ou Ret traversant, (Pêche) ces mots sont en usage dans le ressort de l’amirauté d’Abbeville, & la sorte de rets qu’ils désignent se tend en-travers de la riviere. Ses mailles ont vingt-une lignes en quarré ; sa chûte, deux brasses & demie à trois brasses, & sa longueur, 30 à 35 brasses. Son pié est garni de plaques de plomb qui le font caler, & sa tête est soutenue de flottes de liége.

Les pêcheurs sur la Somme se servent du jet autrement que ceux qui l’emploient au-de-là de S. Vallery, plus avant vers la mer. Les premiers frappent sur une petite ancre le bout de leur filet, qu’ils jettent de leur bateau, au milieu de la riviere. De-là ils le filent jusqu’au bord ; à l’extrémité opposée, au bout de la piece où est frappée l’ancre, ils mettent une grosse pierre ou cabliere à une brasse au plus du rivage ; & comme il ne reste alors pas assez d’eau dans le lit pour faire flotter le filet de toute sa hauteur, il se replie & forme une espece de ventre, ou de follée, ou de poche.

Ils frappent encore & sur la tête du ret amarrée à l’ancre, & sur la cabliere une bouée ou un petit barril ; ils reconnoissent ainsi l’étendue du filet qui bat la riviere, la follée ou poche exposée au courant.

Lorsque le jet est ainsi établi, les pêcheurs au nombre de trois ou quatre dans un bateau, hommes & femmes, voguent avec leurs avirons, à quelques cent brasses au-dessus du filet, vont & viennent, refoulant la marée vers le filet, chantant, faisant le plus de bruit qu’ils peuvent, criant, siflant, & frappant sur le bord du bateau. D’autres cependant se mettent à l’eau, la battent, l’agitent avec leurs avirons ou de petites perches. Le poisson s’éleve du fond où il est enfoui, suit le courant, & va se jetter dans la follée du filet qu’on releve de tems en tems du côté de la cabliere, par la ligne de la tête & du pié du jet, dont on n’emploie à cette pêche qu’une seule piece. Le poisson pris, on replace le filet, & l’on continue la pêche jusqu’à ce que la marée montante la fasse cesser.

Les pêcheurs conviennent que leur pêche n’en seroit pas moins bonne, sans le fracas qu’ils font ; il est d’habitude : mais la précaution d’agiter l’eau est nécessaire pour faire sortir le poisson.

Il y a encore un filet du nom de jet, qui differe peu du coleret, sur-tout lorsqu’on le traîne. Sédentaire, il est fixé à des pieux, traversant toute une riviere, une gorge, un bras. Les pêcheurs battent l’eau, & le poisson renfermé dans l’enceinte du fer à cheval que le filet forme, va s’arrêter dans ses mailles qui sont de deux pouces. Il est, comme les autres, plombé par le bas, & garni de flottes de liége par le haut.

Jet, chez le Plombier, c’est un petit entonnoir de cuivre, qui est à un des bouts du moule à fondre les tuyaux sans soudure, & par lequel on verse le métal fondu dans le moule. Voyez Plombier. Voyez nos Planches de Plomberie.

Jet, (Jurisprudence.) sur mer se dit lorsque pour soulager le navire, on est obligé de jetter une partie de sa charge.

On entend aussi quelquefois par ce terme de jet, la contribution que chacun des intéressés au navire doit supporter pour le jet qui a été fait en mer.

Suivant l’ordonnance de la Marine, l. III. tit. 8. si par tempête, ou par chasse d’ennemis ou de pyrates, le maître du navire se croit obligé de jetter en mer une partie de son chargement, il doit prendre l’avis des marchands & principaux de son équipage ; & si les avis sont partagés, celui du maître & de l’équipage doit être suivi.

Les ustensiles du vaisseau, & autres choses les moins nécessaires, les plus pesantes & de moindre prix, doivent être jettées les premieres, & ensuite les marchandises du premier pont ; le tout cependant au choix du capitaine, & par l’avis de l’équipage.

L’écrivain doit tenir registre des choses jettées à la mer. Au premier port où le navire abordera, le maître doit déclarer devant le juge de l’amirauté, s’il y en a, sinon devant le juge ordinaire, la cause pour laquelle il aura fait le jet. Si c’est en pays étranger qu’il aborde, il doit faire sa déclaration devant le consul de la nation françoise. Après l’estimation des marchandises sauvées, & de celles qui ont été jettées, la répartition de la perte se fait sur les unes & sur les autres, & sur la moitié du navire & du fret au marc la livre.

Les munitions de guerre & de bouche, ni les loyers & hardes des matelots ne contribuent point au jet, & néanmoins ce qui en a été jetté est payé par contribution sur tous les autres effets.

On ne peut pas demander de contribution pour le payement des effets qui étoient sur le tillac, s’ils sont jettés ou endommagés par le jet, sauf au propriétaire son recours contre le maître, & néanmoins ils contribuent s’ils sont sauvés.

On ne fait pas non plus de contribution, pour raison du dommage arrivé au bâtiment, s’il n’a été fait exprès pour faciliter le jet.

Si le jet ne sauve pas le navire, il n’y a lieu à aucune contribution, & les marchandises qui peuvent être sauvées du naufrage, ne sont point tenues du payement ni du dédommagement de celles qui ont été jettées ou endommagées.

Mais si le navire ayant été sauvé par le jet, & continuant sa route vient à se perdre, les effets sauvés du naufrage, contribuent au jet sur le pié de leur valeur, en l’état qu’ils se trouvent, déduction faite des frais du sauvement.

L’ordonnance de la Marine contient encore plusieurs autres regles pour la contribution qui se fait à cause du jet. (A)

Jet, terme de Fauconnerie, petite entrave que les fauconniers mettent au pié de l’oiseau ; on le nomme autrement l’attache d’envoi ou de réserve.