L’Encyclopédie/1re édition/MERCENAIRE

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MERCENAIRE, s. m. (Gramm.) s’il est pris comme une modification de l’ame, il signifie un caractere inspiré par un intérêt sordide, soit dans les mêmes sens qu’on dit des actions, des discours, des amitiés, des amours mercenaires.

Mercenaire se dit de tout homme dont on paye le travail. Il y a dans l’état des métiers qui sembleroient ne devoir jamais être mercenaires ; ce sont ceux que récompense la gloire ou même la considération.

Machiavel prétend que les peuples sont corrompus sans ressource quand ils sont obligés d’entretenir des soldats mercenaires. Il est possible que les grands états s’en passent. Avant François I. il n’y avoit point eu en France des corps armés & stipendiés en tout tems. Si le citoyen ne veut pas être opprimé, il faut qu’il soit toujours en état de défendre lui-même ses biens & sa liberté. Depuis un siecle les troupes mercenaires ont été augmentées à un excès dont l’histoire ne donne pas d’idée. Cet excès ruine les peuples & les princes, il entretient en Europe entre les puissances une défiance qui fait plus entreprendre de guerres que l’ambition, & ce ne sont pas là les plus grands inconveniens du grand nombre des troupes mercenaires.