L’Encyclopédie/1re édition/OEUVRE

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ŒUVRE, s. m. & f. (Gramm. Critiq. sacrée.) ce terme a plusieurs significations dont voici les principales. 1o. Il se prend pour ouvrage des mains : & adoraverunt opus manuum suarum. Ps. cxxxiv. 15. Il signifie 2o. les productions de la nature : mentietur opus olivæ, le fruit de l’olivier manquera. 3o. La délivrance du peuple juif : Domine, opus tuum vivifica ; Seigneur, accomplissez votre ouvrage. 4o. Les bienfaits : meditatus sum in omnibus operibus tuis, Ps. lxvj. 12. j’ai médité sur toutes les graces dont vous nous avez comblé. 5o. Les châtimens. 6o. La récompense & le prix du travail : non morabitur opus mercenarii apud te. Levit. xix. 13. 7°. Les actions morales bonnes ou mauvaises. (D. J.)

Œuvre, (Métallurgie.) lorsque l’on traite dans une fonderie des mines qui contiennent de l’argent, ou ces mines renferment déja par elles mêmes du plomb, ou l’on est obligé d’y joindre ce métal avant que de faire fondre la mine : après avoir fait ce mélange, on fond le tout, & de cette fonte il en résulte une matiere qu’on appelle l’œuvre, en allemand werk ; ce n’est autre chose que du plomb qui s’est chargé de l’argent qui étoit contenu dans la mine avec laquelle on l’a mêlé, aussi bien que des substances étrangeres, du soufre, de l’arsenic, du cuivre, &c. qui se trouvoient dans cette mine d’argent. Pour dégager ensuite l’argent du plomb & des autres substances avec lesquelles il est joint dans l’œuvre, on le fait passer par la grande coupelle, après avoir préalablement fait l’essai de l’œuvre pour savoir combien il contient d’argent.

L’on nomme aussi œuvre ou plomb d’œuvre celui qui découle du fourneau dans l’opération appellée liquation, & qui a servi à dégager l’argent qui étoit contenu dans le cuivre noir. Voyez Liquation. (—)

Œuvre, (Hydr.) on dit qu’un bassin a dans œuvre tant de toises, pour exprimer qu’il tient entre ses murs tant de superficie d’eau. On dit même hors d’œuvre, quand on parle du dehors d’un ouvrage. Ce terme s’emploie très-à propos pour les escaliers, perrons, balcons & cabinets qui excedent le bâtiment. (K)

Œuvre, s. m. (Archit. civile.) ce terme a plusieurs significations dans l’art de bâtir. Mettre en œuvre, c’est employer quelque matiere pour lui donner une forme & la poser en place : dans œuvre & hors d’œuvre, c’est prendre des mesures du dedans & du dehors d’un bâtiment : sous œuvre ; on dit reprendre un bâtiment sous œuvre, quand on le rebâtit par le pié : hors d’œuvre ; on dit qu’un cabinet, qu’un escalier, ou qu’une galerie est hors d’œuvre, quand elle n’est attachée que par un de ses côtés à un corps de logis. Daviler.

Œuvre d’église, s. f. (Arciht. civile.) c’est dans la nef d’une église, un banc où s’asseoient les marguilliers, & qui a au-devant un coffre ou table sur laquelle on expose les reliques : ce banc est ordinairement adossé contre une cloison à jour, avec aîles aux côtés, qui portent un dais ou chapiteau, & le tout est enrichi d’architecture & de sculpture. L’œuvre de saint Germain l’Auxerrois est une des plus belles œuvres de Paris. (D. J.)

Œuvres de marée, (Marine.) c’est le radoub & le carénage que l’on donne aux vaisseaux.

Œuvres vives, ce sont les parties du vaisseau qui entrent dans l’eau.

Œuvres mortes, comprennent toutes les parties du vaisseau qui sont hors de l’eau, ou bien tous les hauts d’un vaisseau, telle que la dunette, l’acastillage, les galeries, bouteilles, feugnes, couronnement, vergues & hunes.

Quelques-uns disent que les œuvres vives sont toutes les parties du corps du bâtiment comprises depuis la quille jusqu’au vibord ou au pont d’en-haut. (Z)

Œuvres du poids, (Comm.) on appelle à Paris marchandises d’œuvres du poids quelques-unes des marchandises qui sont sujettes au droit de poids-le-roi établi dans cette ville. Voyez Poids-le-roi.

Œuvre, s. m. ce mot est masculin pour signifier un des ouvrages de musique d’un auteur. Voyez Opéra. (S)

Œuvre, terme d’Artisans ; on dit du bois, du fer, du cuivre mis en œuvre. Un diamant mis en œuvre, est celui que le lapidaire a taillé, & à qui il a donné la figure qui lui convient pour en faire une table, un brillant, ou une rose : il se dit aussi par opposition au diamant brut, c’est-à-dire qui est encore tel qu’il est sorti de la carriere. (D. J.)

Œuvre, main d’, (Manufacture.) on appelle main d’œuvre, dans les manufactures, ce qu’on donne aux ouvriers pour le prix & salaires des ouvrages qu’ils ont fabriqués : ainsi on dit, ce drap coûte quarante sols par aune de main d’œuvre, pour dire qu’on en a donné quarante sols par aune au tisserand.

Œuvres blanches, (Taillanderie.) ce sont proprement les gros ouvrages de fer tranchans & coupans, qui se blanchissent, ou plutôt qui s’éguisent sous la meule, comme les coignées, besiguës, ébauchoirs, ciseaux, terriers, essettes, tarrots, planes, hâches, doloires, arrondissoirs, grandes scies, grands couteaux, serpes, bêches, ratissoires, couperets, faux, faucilles, houes, hoyaux, & autres tels outils & instrumens servant aux Charpentiers, Charrons, Menuissiers, Tourneurs, Tonneliers, Jardiniers, Bouchers, Pâtissiers, &c. On met aussi dans cette premiere classe les griffons, & outils de Tireurs d’or & d’argent, & les marteaux & enclumes pour Potiers d’étain, Orfevres & batteurs de paillettes. (D. J.)

Œuvres, maître des, (Antiq. rom.) les Romains n’avoient qu’un seul maître des œuvres, il n’étoit pas citoyen, & il ne lui étoit pas permis de demeurer ni de loger dans Rome ; son office consistoit à attacher le criminel au gibet. L’empereur Claude étant à Trivoli, eut la basse curiosité de voir exécuter des criminels, qu’on devoit punir d’un supplice ordinaire ; mais il fut obligé d’attendre jusqu’au soir, parce qu’il fallut aller chercher le maître des œuvres qui étoit alors occupé à Rome même. Cet office ne paroit pas avoir subsisté dans les premiers tems chez les Romains ; car dans l’affaire d’Horace, c’est à un licteur que le roi s’adresse pour l’attacher à l’arbre funeste, en cas qu’il fût condamné : dans la suite on vit les soldats romains faire la même fonction que les licteurs, fustiger & trancher la tête. (D. J.)