L’Encyclopédie/1re édition/ORIFLAMME

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ORIFLAMME, s. f. (Hist. de France.) nos anciens historiens font ce mot masculin, & écrivent tantôt oriflamme, tantôt oriflambe, tantôt auriflamme, tantôt auriflambe ou oriflande : étendard de l’abbaye de Saint-Denis ; c’étoit une espece de gonfanon ou de banniere, comme en avoient toutes les autres églises ; cette banniere étoit faite d’un tissu de soie couleur de feu, qu’on nommoit cendal ou saint vermeil, qui avoit trois fanons, & étoit entourée de houppes de soie. L’oriflamme de Saint-Denis étoit attachée au bout d’une lance, d’un fust, d’un bâton, que Raoul de Presles nomme le glaive de l’oriflamme.

Louis le Gros, prince recommandable par la douceur de ses mœurs, & par les vertus qui font un bon prince, est le premier de nos rois qui ait été prendre l’oriflamme à Saint-Denis en 1124, lorsqu’il marcha contre l’empereur Henri V. Depuis lors, ses successeurs allerent prendre en grande cérémonie cette espece de banniere à Saint-Denis, lorsqu’ils marchoient dans quelque expédition de guerre ; ils la recevoient des mains de l’abbé, &, après la victoire, l’oriflamme étoit rapportée dans l’église de Saint-Denis, & remise sur son autel. C’étoit un chevalier qui étoit chargé de porter l’oriflamme à la guerre ; & cet honneur appartint pendant long-tems au comte de Vexin, en sa qualité de premier vassal de Saint Denis.

Il est assez vraissemblable qu’il y avoit deux oriflammes, dont l’une restoit toûjours en dépôt à Saint-Denis, & que, lorsqu’il se présentoit une occasion de guerre, on en faisoit une seconde toute semblable ; on consacroit cette derniere, & on la levoit de dessus l’autel avec de grandes cérémonies. Si on la conservoit exempte d’accidens pendant le cours de la guerre, on la rapportoit dans l’église ; quand on la perdoit, on en faisoit une autre sur l’original, pour l’employer dans l’occasion.

Guillaume Martel seigneur de Bacqueville, est le dernier chevalier qui fut chargé de la garde de l’oriflamme le 28 Mars 1414, dans la guerre contre les Anglois ; mais il fut tué l’année suivante à la bataille d’Azincourt, & c’est la derniere fois que l’oriflamme ait paru dans nos armées, suivant du Tillet, Sponde, dom Félibien, & le pere Simplicien. Cependant, suivant une chronique manuscrite, Louis XI. prit encore l’oriflamme en 1465, mais les historiens du tems n’en disent rien.

Les Bollandistes dérivent le mot oriflamme du celtique & tudesque flan, fan ou van, qui signifie une banniere, un étendard, & d’où l’on a fait flanon ou fanon, qui veut dire la même chose ; la premiere syllabe ori vient du latin aurum, c’est donc à dire étendard doré, parce qu’il étoit enrichi d’or.

Le lecteur peut consulter Galant, traité de l’oriflamme ; Borel, du Tillet, & les mémoires des Inscriptions. (D. J.)